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29/06/2023 | FRANCE | N°19/08247

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 29 juin 2023, 19/08247


N° RG 19/08247 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MXFQ















Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 novembre 2019



RG : 2018j01458











SARL CANOIS



C/



SAS PASSMAN

SAS LOCAM





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 29 Juin 2023







APPELANTE :



SARL CANOIS au capital de

100 000 euros, immatriculée au RCS de CANNES sous le numéro 408 393 627, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]



Représentée par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau...

N° RG 19/08247 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MXFQ

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 novembre 2019

RG : 2018j01458

SARL CANOIS

C/

SAS PASSMAN

SAS LOCAM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 29 Juin 2023

APPELANTE :

SARL CANOIS au capital de 100 000 euros, immatriculée au RCS de CANNES sous le numéro 408 393 627, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON, toque : 215, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Michel MONTAGARD, Membre de l'AARPI MONTAGARD & Associés, avocat au barreau de NICE,

INTIMEES :

SAS PASSMAN au capital de 479 210,00 €, immatriculée au RCS de LYON sous le n° B 402 091 722, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentée par Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON, toque : T.1740

SAS LOCAM au capital de 11.520.000 €, immatriculée au RCS de Saint-Etienne sous le numéro 310.880.315, prise en la personne de son dirigeant légal en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Franck PEYRON de la SELARL MORELL ALART & ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 766

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 02 Décembre 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 10 Mai 2023

Date de mise à disposition : 29 Juin 2023

Audience présidée par Raphaële FAIVRE, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 26 février 2015, la SARL Canois, qui exploite l'enseigne hôtel de France, a conclu avec la SAS Location Automobiles Matériels (la société Locam) un contrat de location longue durée portant sur une solution Wifi (couverture Wifi complète de l'hôtel, prestation complète matériel et logiciel et sécurisation intégrale) fournie par la SAS Passman, spécialisée dans l'installation et la mise à disposition de solutions d'accès internet et de services associés à destination d'établissements d'accueil, d'hôtels de campings et d'établissements de santé moyennant le règlement de 60 loyers mensuels de 148,50 euros HT, soit 178,20 euros TTC. La société Canois a également régularisé avec la société Passman un contrat de prestation de maintenance portant sur le matériel.

Le 25 mars 2015, un avis de livraison a été signé par la société Passman. Un procès verbal d'installation sans réserve a été signé par la société Passman et la société Canois comportant la date du 4 mars, du 5 mars et du 6 mars 2015.

Par courrier recommandé du 28 octobre 2016, la société Canois a demandé à la société Passman la résiliation amiable du contrat. Par courrier du 26 décembre 2016, la société Passman lui a indiqué que la résiliation anticipée entraînerait le paiement d'une indemnité de résiliation ou le paiement des loyers jusqu'au terme du contrat.

Par courrier recommandé du 22 février 2018, la société Canois a mis en demeure la société Passman de lui adresser les justificatifs des interventions de maintenance effectuées, indiquant qu'à défaut, elle se prévaudra de l'exception d'inexécution en suspendant le paiement des loyers.

La société Canois a cessé de régler ses loyers à compter du mois d'avril 2018 aux motifs de dysfonctionnements dans l'exécution du contrat.

Par courrier recommandé du 26 juillet 2018, la société Locam a mis en demeure la société Canois de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l'exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat. Cette mise en demeure est demeurée sans effet.

Par acte d'huissier du 18 septembre 2018, la société Canois a assigné les société Passman et Locam devant le tribunal de commerce de Lyon afin, notamment, de se voir rembourser la somme de 5.346 euros correspondant aux loyers réglés.

Par jugement contradictoire du 6 novembre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- condamné la société Canois à payer à la société Locam la somme de 4.276,80 euros correspondant aux loyers échus et à échoir, outre intérêts et pénalités de retard,

- condamné la société Canois à payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice causé du fait de la violation de la clause d'exclusivité,

- ordonné à la société Canois de restituer le matériel objet du contrat de location,

- condamné la société Canois à verser la somme de 1.000 euros à chacune des sociétés Passman et Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Canois aux dépens de l'instance,

- rejeté la demande d'exécution provisoire du présent jugement.

La société Canois a interjeté appel par acte du 2 décembre 2019.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 19 novembre 2020 la société Canois demande à la cour au visa des articles 1217 et suivants, 1224 et suivants et 1231-1 du code civil et de l'article 700 du code de procédure civile de :

- la juger recevable en son appel,

- le déclarer bien fondée,

en conséquence,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a débouté de toutes ses demandes et a rejeté la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- constater que les sociétés Passman et Locam n'ont pas exécuté leurs obligations conformément aux contrats qui les lie avec elle,

- prononcer la résolution du contrat de location qu'elle a passé le 26 février 2015 avec la société Passman et la société Locam à compter de la date du 26 mars 2018,

- condamner la société Locam et Passman à rembourser dans leur totalité les loyers perçus, soit la somme de 5.346 euros,

- condamner solidairement la société Passman et la société Locam à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de dommages-intérêts,

- débouter la société Passman de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- condamner la société Passman et la société Locam à lui payer solidairement la somme de 2.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés devant le tribunal de commerce de Lyon,

- condamner la société Passman et la société Locam à lui payer solidairement la somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a également dû exposer dans le cadre de la procédure d'appel,

- condamner la société Passman et la société Locam aux entiers dépens.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 29 mai 2020 la société Passman demande à la cour au visa des articles 1103, 1103, 1147 et 1184 anciens du code civil, de :

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société Canois à payer la somme de 500 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice causé du fait de la violation de la clause d'exclusivité,

par conséquent, statuant à nouveau et y ajoutant,

- débouter la société Canois de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

- prononcer la résiliation du contrat du 26 février 2015 aux torts exclusifs de la société Canois et en tirer toutes les conséquences de droit en ordonnant à la société Canois de restituer le matériel objet du contrat de location,

- condamner la société Canois à lui payer les sommes suivantes :

' 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour le préjudice causé du fait de la non-restitution du matériel financé et de la violation de clause d'exclusivité,

' 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner la société Canois aux entiers dépens de l'appel.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 6 janvier 2021 la société Locam demande à la cour au visa des articles 1134 et 1165 ancien du code civil et de l'article 9 du code de procédure civile, de :

- confirmer le jugement entrepris,

- constater qu'elle a parfaitement rempli ses obligations contractuelles au titre de la convention du 26 février 2015,

- constater qu'aucune faute ne peut lui être imputée au titre de la prestation de fourniture d'une solution Internet, cette dernière étant simplement en charge du financement de l'opération,

- débouter la société Canois de l'intégralité de ses demandes, prétentions et fins,

- constater que la société Canois a réceptionné le matériel et confirmé la bonne exécution de la prestation commandée auprès de la société Passman suivant l'avis de livraison en date du 25 mars 2015,

- constater que la société Canois a cessé de payer les mensualités à compter du mois d'avril 2018,

- juger que le contrat la liant avec la société Canois est résilié après la mise en demeure restée infructueuse du 26 juillet 2018,

- condamner, en conséquence, la société Canois à lui payer la somme de 4.276,80 euros correspondant aux loyers échus et à échoir, outre intérêts et pénalités de retard,

A titre subsidiaire, si la cour entendait prononcer la résolution du contrat conclu avec la société Passman emportant alors la caducité subséquente du contrat conclu avec elle :

- condamner la société Passman à lui rembourser la somme de 7.959,38 euros correspondant au montant de la somme qu'elle a versé après confirmation de la bonne exécution de la prestation et de la livraison du matériel commandée,

en tout état de cause,

- condamner la société Canois à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Canois aux entiers dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 mars 2021, les débats étant fixés au 10 mai 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Les contrats ayant été régularisés entre les parties avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, complété par la loi du 20 avril 2018 ratifiant cette ordonnance, ils demeurent soumis à la loi ancienne, y compris pour ses effets légaux et pour les dispositions d'ordre public, conformément à l'article 9 de cette ordonnance.

Sur la demande de résolution du contrat de fourniture et du contrat de location financière

Au soutien de sa demande, la société Canois expose que :

-elle a constaté rapidement après la signature du contrat de fourniture du matériel « solution Wifi n°81 » et du contrat de maintenance un grave dysfonctionnement du matériel, le Wifi ne fonctionnant pas ou de manière très aléatoire,

-elle a également constaté un dysfonctionnement du service de maintenance assuré par la société Passman qui ignore ses demandes d'interventions et qui n'a jamais répondu aux appels téléphoniques des employés de l'hôtel sollicitant un déplacement pour la remise en fonctionnement du matériel,

-elle a été contrainte de conclure un nouveau contrat avec la société Orange le 9 octobre 2017, ce qui est également un indice de ce que le service wifi ne fonctionnait pas de manière satisfaisante,

-en conséquence de ces manquements, elle a demandé sans succès la résolution amiable du contrat par courrier du 28 octobre 2016 et a renvoyé le matériel, puis, après réception d'un courriel de la société Passman lui indiquant qu'elle devait payer les loyers jusqu'au terme du contrat, elle a mis cette dernière en demeure de lui fournir les justificatifs des interventions de maintenance, lui indiquant qu'à défaut elle entendait se prévaloir de l'exception d'inexécution,

-le silence gardé par la société Passman à la suite du courrier la mettant en demeure de fournir la preuve de ses interventions constitue l'aveu de son manquement contractuel,

Elle fait grief au jugement déféré de ne pas avoir recherché si le manquement de la société Passman avait entraîné des conséquences suffisamment grave pour justifier la rupture des liens contractuels alors que l'inexécution des obligations a conduit au dysfonctionnement du service Wifi, au mécontentement des clients et à la mauvaise réputation de l'hôtel.

Elle soutient que l'envoi par le nouveau responsable de l'hôtel d'une demande de résiliation amiable du contrat ne signifie pas que celui-ci n'a pas constaté des manquements ultérieurs à sa prise de fonction comme il l'a relaté dans un courriel adressé à son conseil le 21 novembre 2017 et qui n'a pu être rédigé par pure opportunité alors qu'aucune procédure contentieuse n'était engagée. Elle ajoute qu'après avoir pris connaissance des conditions exorbitantes de résiliation, elle a décidé de poursuivre le contrat.

La société Passman fait valoir que :

-l'appelante se contredit en faisant tout à la fois valoir que le matériel a dysfonctionné rapidement et n'a jamais fonctionné,

-la société Canois procède par allégation sans apporter une quelconque preuve de ses dires,

-la société Canois ne lui a jamais fait part du moindre dysfonctionnement de l'installation et ne produit par le moindre courrier, mail ou justificatif en ce sens, alors que les statistiques de connexion Wifi font état d'un usage régulier et sans anomalie jusqu'au mois de novembre 2017, date de démontage du matériel,

-la société Canois ne démontre pas davantage un quelconque dysfonctionnement du service de maintenance et elle est dans l'incapacité de produire un justificatif de demande d'intervention formulée auprès d'elle au titre de cette maintenance,

-en réalité, elle a seulement souhaité changer d'opérateur suite au changement de propriétaire de l'hôtel comme elle le précise dans son courrier de résiliation du 28 octobre 2016 dans lequel elle ne formule aucun grief s'agissant d'un dysfonctionnement de l'installation,

-le courrier adressé par la société Canois à son conseil et faisant état de dysfonctionnement est une preuve à sois-même,

-les griefs formulés pour la première fois par courrier recommandé du 22 février 2018 ont été soulevés en pure opportunité alors qu'à cette date la société Canois avait déjà contracté avec un autre opérateur,

-la société Canois ne peut lui reprocher de ne pas produire les justificatifs des interventions au titre de la maintenance, alors que si elle n'a pas fait intervenir ses techniciens c'est qu'aucun dysfonctionnement ne lui a été signalé,

-aucune preuve d'un préjudice d'atteinte à la réputation de l'hôtel n'est davantage démontré.

La société Locam expose quant à elle que :

-la société Canois ne rapporte pas la preuve des dysfonctionnements du matériel ni des manquements dans l'exécution de la prestation de maintenances tels qu'allégués,

-en tant que société de location financière, elle ne peut, en tout état de cause, être tenue pour responsable d'éventuels dysfonctionnements du matériel fourni ou de la mauvaise exécution de la prestation incombant à la société Passman, étant précisé que les conditions générales de vente l'exonèrent de toute responsabilité,

-la société Canois a manqué à ses obligations contractuelles en cessant de verser mensuellement les loyers à compter du mois d'avril 2018,

-la résiliation doit donc être constatée à la date du 26 juillet 2018, date à laquelle elle a mis en demeure la société Canois de payer les sommes dues en application de la convention soit la somme de totale de 4.276,80 euros,

Sur ce :

Conformément à l'article 1134 ancien du code civil, dans sa rédaction applicable en la cause, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

Lorsque des contrats incluant une location financière sont interdépendants, l'anéantissement du contrat de prestation ou de fourniture, qui ne peut être prononcé qu'en présence du prestataire ou du fournisseur, est un préalable nécessaire à la constatation, par voie de conséquence, de la caducité du contrat de location.

En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que :

-le 28 octobre 2016, la société Canois, exploitant l'enseigne hôtel de France, a adressé un courrier à la société Passman ainsi libellé : « suite à la cessation d'activité des anciens propriétaires de l'établissement, nous souhaitons résilier notre contrat. Je vous remercie de prendre les mesures adéquates pour mettre fin au contrat d'abonnement. Je vous remercie par avance de prendre les dispositions nécessaires à cette résiliation »,

-selon courrier du 26 décembre 2016, la société Passman a accusé réception du courrier de la société Canois du 28 octobre 2016, lui a confirmé avoir pris en compte cette résiliation, lui a indiqué que le terme du contrat était le 19 avril 2020 et que en cas de résiliation anticipation, l'indemnité de résiliation s'élevait à la somme de 6.207,30 euros, après le 20 janvier 2017,

-par courriel du 21 novembre 2017, la société Canois informait la société Passman de l'expédition du matériel, objet du contrat,

-par courriel en réponse du même jour, la société Passman informait la société Canois de ce que les indemnités de résiliation s'élevaient à la somme de 4.573,80 euros, après le 20 novembre, et que la résiliation était subordonnée au paiement de cette indemnité ou de tous les loyers échus et à venir, outre la restitution du matériel, indiquant être contrainte de refuser le colis,

-par courriel du même jour, la société Canois interrogeait Me [B], son conseil, en ces termes : « je vous transmet le mail que nous avons reçu de la société Passamn ce jour. Je voudrais s'il vous plaît, vérifier si le montant de la pénalité est justifié en sachant que leur matériel a été envoyé ce jour. J'ai essayé d'appeler plusieurs fois le commercial, envoyé plusieurs recommandés et essayé de les joindre au téléphone en vain et aujourd'hui nous avons envoyé un mail les informant de l'envoi de leur matériel et nous obtenons la réponse qu'ils retournerons le colis. Nous avons fait part à plusieurs reprises de notre mécontentement suite aux plaintes des clients qui n'arrivaient pas à utiliser le Wifi correctement mais rien n'a été fait »,

-par courrier du 22 février 2018, le conseil de la société Canois informait la société Passman que sa cliente suspendait le règlement de la facture de maintenance au titre de l'année 2017 pour défaut d'exécution de la prestation,

-par courrier du 22 mai 2018, la société Locam informait la société Canois de la possibilité d'une résiliation anticipée moyennant le versement d'une indemnité de résiliation de 4.740,84 euros,

-par courrier du même jour, le conseil de la société Canois indiquait à la société Locam que la société Passman n'avait pas satisfait à l'exécution du contrat de maintenance de la solution Wifi et que sa cliente était bien fondée à solliciter la résiliation du contrat et lui demandant de lui confirmer par retour son acceptation de la résiliation anticipée sans frais du contrat,

-par courrier du 11 juin 2018, la société Locam indiquait au conseil de la société Canois qu'après régularisation du procès verbal de réception et de bon fonctionnement, sa cliente avait renoncé à tout recours contre elle et que les griefs formulés à l'encontre de la société Passman, ne justifiaient pas l'interruption unilatérale du paiement des loyers.

Il résulte ainsi des propres déclarations de la société Canois dans son courrier du 28 octobre 2016, qu'elle a souhaité résilier le contrat de fourniture et de maintenance régularisé avec la société Passman pour convenances personnelles, tenant au changement de propriétaire de l'hôtel. Il se déduit également des constatations précédemment opérées que l'appelante n'a jamais fait état du moindre manquement de la société Passman à la prestation de maintenance, ni d'aucun dysfonctionnement du matériel, avant que cette dernière, puis à sa suite, la société Locam, ne l'informent des conséquences financières d'une telle résiliation unilatérale du contrat de fourniture et de maintenance en cours d'exécution. Les manquements allégués ne sont d'ailleurs aucunement démontrés. En effet, le courriel du dirigeant de la société Canois à son conseil, faisant état de prétendues réclamations adressées à la société Passman, qui ne sont toutefois pas versées aux débats, tout comme les affirmations de Me [B] quant à la mauvaise exécution du contrat de maintenance, constituent des preuves à sois-même qui sont dépourvues de valeur probante.

En conséquence, il convient de débouter la société Canois de sa demande de résolution judiciaire du contrat de fourniture et de maintenance aux torts de la société Passman.

Il y a également lieu de débouter la société Canois de sa demande d'anéantissement subséquent du contrat de location financière régularisé avec la société Locam, étant rappelé qu'en cas d'interdépendance entre le contrat de fourniture et de maintenance et le contrat de location financière, laquelle n'est pas contestée, la résolution d'un contrat de prestation entraîne la caducité du contrat de location financière, de sorte que la sanction revendiquée tenant à la résolution du contrat régularisé avec la société Locam est en tout état de cause erronée.

Il convient ainsi de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu que la société Canois n'était pas fondée à mettre fin unilatéralement aux contrats régularisés avec la société Locam et la société Passman. Il convient en outre de la débouter de sa demande en remboursement des loyers versés et de sa demande de dommages et intérêts résultant des dysfonctionnements allégués.

Sur la demande en paiement de la société Locam

En l'espèce, il n'est pas contesté que la société Canois a cessé de régler les loyers afférant au contrat de fourniture et de maintenance à compter du mois d'avril 2018.

Or, l'article 10 des conditions financières du contrat de location longue durée, stipule « qu'en cas de défaut du respect du contrat de location, ce dernier pourra être résilié de plein droit par le bailleur, excluant toute application de l'article 1184 du code civil, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée sans effet en cas de non paiement d'un loyer à son échéancier, l'arrivée du terme constituant à elle seule la mise en demeure. En cas de résiliation, le client devra, outre la restitution du matériel, verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d'une clause pénale de 10%, ainsi qu'une somme égale à la totalité des échéances restant à courir jusqu'à la fin du contrat telle que prévue à l'origine, majorée d'une clause pénale de 10% sans préjudice de tous dommages et intérêts que le client pourrait devoir au cessionnaire du fait de la résiliation ».

En l'absence de résiliation du contrat valablement opérée par la société Canois et compte tenu de la mise en demeure du 24 juillet 2018 demeurée infructueuse, la société Locam est bien fondée à soutenir que le contrat de location a été résilié de plein droit à compter du 3 août 2018, soit 8 jours après cette mise en demeure demeurée infructueuse.

La société Locam, qui a perçu 36 loyers pour un total de 5.346 euros TTC revendique une créance de 4.276,80 euros correspondant à un arriéré de loyers de 712,80 euros au titre de 4 loyers échus et une indemnité de résiliation de 3.564 euros au titre de 28 loyers à échoir. Il convient de faire droit à cette demande dont le principe et le montant ne font l'objet d'aucune discussion par les parties. En revanche, il convient de la débouter de sa demande au titre des pénalités et intérêts contractuels de retard, laquelle en l'absence de demande chiffrée dans le dispositif de ses écritures, constitue une demande indéterminée.

Sur la demande de restitution du matériel

L'article 10 des conditions financières du contrat de location longue durée, stipule également qu'en cas de résiliation de plein droit du contrat de location, le locataire sera tenu de restituer immédiatement le matériel au bailleur. Or, la cour relève en l'espèce que la société Locam, ne sollicite pas la restitution du matériel, cette demande étant formulée par la société Passman, laquelle n'a pas la qualité de bailleresse, de sorte qu'elle n'est pas fondée à formuler une telle demande. Il convient donc d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a ordonné à la société Canois la restitution du matériel.

Sur la demande de dommages et intérêts pour violation de la clause d'exclusivité et non restitution du matériel

Au soutien de sa demande, la société Passman fait valoir que :

-la clause d'exclusivité trouvait encore application dès lors que le contrat n'a pas été résilié, faute de paiement de l'indemnité de résiliation,

-la société Canois a violé la clause d'exclusivité prévue au contrat et a sans doute fait bénéficier le nouvel opérateur du matériel installé dans le cadre du contrat litigieux, dès lors que l'offre du nouvel opérateur ne comporte ni câble, ni cordon ni raccordement connectique ni ondulateur,

-le fait qu'elle ait refusé la restitution du matériel adressée le 21 novembre 2017 n'est pas à l'origine de son préjudice alors qu'elle était fondée à refuser le matériel dès lors que le contrat n'a pas été résilié dans les formes requises,

-par son attitude totalement déloyale la société Canois lui a causé un dommage notamment dans ses relations avec la société Locam avec laquelle elle est, de ce fait, mise en porte à faux.

Pour contester toute violation de la clause d'exclusivité stipulée au contrat, la société Canois indique que l'utilisation du service Wifi est indispensable au bon fonctionnement d'un hôtel, de sorte qu'elle s'est résolue à recourir à un autre prestataire par contrat d'octobre 2017 tout en continuant à payer les loyers à la société Passman jusqu'en avril 2018.

Elle estime en outre que la clause d'exclusivité ne s'applique pas dès lors qu'elle invoque l'exception d'inexécution et la résiliation du contrat dans ses courriers du 22 février 2018 et du 24 mai 2018.

Sur ce :

L'article 8 des conditions générales du contrat de prestation de maintenance comporte une clause d'exclusivité ainsi libellée : « le client s'engage à travailler exclusivement avec Passman pour la proposition de connexion internet pour les clients (borne internet, business, centrer, Wifi, téléphonie). Cette clause est valable pour l'ensemble des lieux ouverts au public de l'établissement, et ce, pendant toute la durée du contrat de location. Passman se réserve cependant le droit d'autoriser la présence de solutions d'accès à internet pour les clienst provenant d'autres prestataires mais ce uniquement sous réserve d'acceptation express des conditions par les deux parties ».

Quand bien même la société Canois, qui se prévaut d'un nouveau contrat de fourniture d'accès à internet régularisé avec la société Orange le 9 octobre 2017, aurait méconnu la clause d'exclusivité précitée, ce qui n'est pas démontré, en l'absence de précision quant au périmètre de ce nouveau contrat, en tout état de cause, la cour relève que  la société Passman, qui fait valoir que « cette attitude totalement déloyale lui cause un dommage, notamment dans ses relations à l'égard de la société Locam avec laquelle elle est, de ce fait mise en porte à faux », sans toutefois assortir ces allégations de la moindre offre de preuve, tenant notamment à l'existence de difficultés dans le partenariat contractuel entretenu avec la société Locam, doit être déboutée de sa demande indemnitaire, en l'absence de démonstration de l'existence d'un préjudice. Il convient donc d'infirmer le jugement déféré sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Succombant dans ses prétentions, la société Canois est condamnée aux dépens d'appel et conserve la charge de ses frais irrépétibles ; elle est condamnée en appel à verser à la société Locam et à la société Passman chacune une indemnité de procédure d'un montant de 1.500 euros, ce qui conduit à la confirmation du jugement déféré sur ces points. Enfin, la société Canois doit être déboutée de sa demande d'indemnité de procédure en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la société Canois à payer à la société Passman la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts pour le préjudice résultant de la violation de la clause d'exclusivité et en ce qu'il a condamné la société Canois à restituer le matériel,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à restitution du matériel,

Déboute la société Passman de sa demande de dommages et intérêts pour violation de la clause d'exclusivité,

Condamne la société Canois à verser à la société Locam et à la société Passman chacune la somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour l'instance d'appel,

Déboute la société Canois de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Canois aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/08247
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;19.08247 ?
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