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29/06/2023 | FRANCE | N°19/01309

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 29 juin 2023, 19/01309


N° RG 19/01309 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGU2









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 14 janvier 2019



RG : 2016j01151





SAS CORIANCE



C/



SARL DANFOSS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 29 Juin 2023





APPELANTE :



SAS CORIANCE au capital de 5 407 500 euros, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 412 56

1 706, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représentée et plaidant par Me Yann VIEUILLE de la SARL VJA AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1132





INTIMEE :

...

N° RG 19/01309 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGU2

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 14 janvier 2019

RG : 2016j01151

SAS CORIANCE

C/

SARL DANFOSS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 29 Juin 2023

APPELANTE :

SAS CORIANCE au capital de 5 407 500 euros, immatriculée au RCS de Bobigny sous le numéro 412 561 706, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée et plaidant par Me Yann VIEUILLE de la SARL VJA AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1132

INTIMEE :

SARL DANFOSS au capital de 1.856.140 €, immatriculée au RCS de VERSAILLES sous le n°542 030 812, venant aux droits de la société SONDEX France par déclaration de dissolution de la société par décision de l'associé unique DANFOSS SARL en date du 29/05/2018

[Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 1]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Luc-Marie AUGAGNEUR du cabinet CORNET-VINCENT-SEGUREL, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 20 Février 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Janvier 2023

Date de mise à disposition : 29 Juin 2023

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Marianne LA-MESTA, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Dans le cadre de la modernisation des sous-stations des réseaux de chaleur d'un quartier de [Localité 3] (21), la Sas Coriance, liée à la commune par un contrat de délégation de service public et maître de l'ouvrage, a réalisé une consultation des entreprises pour la réalisation de 4 lots métiers définis comme suit :

- lot n° 3 : fourniture des skids,

- lot n° 4 : raccordements hydrauliques/mise en place des skids

- lot n° 5 : électricité / régulation

- lot n° 6 : calorifuge.

Le 7 mai 2014, en réponse à cette consultation, la Sarl Sondex, spécialisée dans la commercialisation d'échangeurs thermiques, a établi pour la société Coriance un devis n° SONDEVJ140025rev3 portant sur un 'ensemble de skids préfabriqués' au prix de 340.000 euros HT avec un échéancier de livraison précisant 'sur base d'une commande du lot 3 en S20 : livraison de la S28 à la S34 les lundis de chaque semaine'.

Le même jour soit le 7 mai 2014, en semaine 19, la société Coriance a adressé à la société Sondex une commande n° TX140135 portant sur '48 skids' au prix et selon l'échéancier de livraison du devis, étant précisé que l'acompte de 20% devait être réglé 'à la commande après signature des pièces contractuelles par les parties et réception d'une facture'.

Un différend est né entre les parties en raison notamment de retards de livraison.

Par courriel du 31 juillet 2014, la société Sondex a proposé à la société Coriance d'établir un accord transactionnel aux termes duquel le montant de la commande serait ramené à 245.519,63 euros (43.339,82 + 153.593,99 + 48.585,82 = 245.519,63) au lieu des 340.000 euros initialement convenus (donc une diminution du prix, ou moins-value selon les termes de la société Sondeix, de 94.480 euros), étant précisé que sur le nouveau prix de 245.519,63 la société Sondex appliquait une remise de 5% soit un montant final de 233.244 euros (donc une diminution du prix de 106.756 euros) .

Par courriel du même jour, la société Coriance a répondu qu'elle ne donnait pas son accord à cette proposition, indiquant que les points en litige seraient discutés lors de leur réunion la semaine suivante.

Par courrier du 23 octobre 2014, la société Sondex France a mis en demeure la société Coriance de lui régler la somme de 189.213,19 euros au titre de factures restées impayées.

La société Coriance a refusé de régler cette somme aux motifs d'importants retards de livraison et d'inexécutions contractuelles.

Par acte d'huissier du 8 juillet 2016, la société Sondex a assigné la société Coriance devant le tribunal de commerce de Lyon en règlement de ses factures et en réparation de son préjudice.

Par transmission universelle du patrimoine de la société Sondex à la Sarl Danfoss (son associé unique) du 6 juillet 2018, celle-ci est venue aux droits de la demanderesse.

Par jugement contradictoire du 14 janvier 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- condamné la société Coriance à payer à la société Sondex la somme de 141.920 euros HT outre intérêt légal à compter du 23 octobre 2014,

- débouté la société Sondex de ses demandes de dommages-intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat et préjudice commercial subi,

- rejeté la demande de la société Coriance concernant la facturation des travaux réalisés par les entreprises sous-traitantes,

- rejeté la demande en dommages-intérêts de la société Coriance pour abus du droit à agir de la société Sondex,

- rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision nonobstant appel et sans caution,

- dit qu'il n'y a pas lieu à condamnation en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens seront partagés par moitié entre les parties.

La société Coriance a interjeté appel par acte du 20 février 2019.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 13 janvier 2020 fondées sur les articles 1134, 1142, 1147, 1152, 1154, 1156, 1184 et 1382 anciens du code civil, l'article L.441-6 du code de commerce et les articles 699 et 700 du code de procédure civile, la société Coriance demande à la cour de :

- recevoir son recours, le dire bien fondé et réformer en toutes ses dispositions le jugement critiqué,

Statuant à nouveau,

- juger que la société Danfoss ne rapporte pas la preuve de l'exécution de ses propres obligations et n'est pas fondée à réclamer le paiement des sommes dont elle se prétend créancière,

- juger que la société Danfoss a fait l'aveu des retards dans la livraison des marchandises vendues et de l'inexécution d'une partie des prestations contractuellement mises à sa charge,

- confirmer le jugement déféré en ce que la société Danfoss est redevable des pénalités contractuelles applicables pour les matériels livrés avec retard,

- réformer le jugement déféré en ce qu'il autorise la réduction du prix du contrat par le débiteur défaillant en ses obligations, ce en violation de l'article 1184 ancien du code civil,

- juger que la société Danfoss doit supporter sous forme de dommages-intérêts la réparation de la totalité des préjudices découlant de l'inexécution de ses obligations contractuelles,

Subsidiairement, condamner en application de l'article 1142 ancien du code civil la société Danfoss à la réparation en argent de l'inexécution des prestations contractuellement dues,

Par conséquent,

- condamner la société Danfoss au paiement des sommes suivantes avec pour l'ensemble des sommes application des intérêts de retard au taux légal applicable entre professionnels à compter de l'engagement des dépenses par elle et de l'anatocisme :

21.937 euros par application de la clause pénale destinée à l'indemnisation des retards de livraison,

184.864,52 euros HT en remboursement des sommes qu'elle a avancées auprès d'entreprises tierces pour suppléer la défaillance de la société Sondex dans l'exécution de ses obligations contractuelles,

75.000 euros de dommages-intérêts en réparation des préjudices causés par l'engagement abusif de la procédure à son encontre,

25.000 euros HT de dommages-intérêts pour l'indemnisation des moyens qu'elle a mis en 'uvre directement pour suppléer les manquements de la société Danfoss,

- condamner la société Danfoss au paiement de la somme de 35.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouter la société Danfoss de toute demande contraire,

- condamner la société Danfoss aux entiers dépens dont recouvrement direct au profit de la Selarl VJA Avocats par application de l'article 699 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 11 mai 2020 fondées sur les articles 66 et 329 du code de procédure civile, les articles 1134, 1589, 1315, 1147 anciens du code civil et l'article L.441-6 du code de commerce, la société Danfoss venant aux droits de la société Sondex demande à la cour de :

- constater qu'elle vient aux droits de la société Sondex, appelante à la procédure, par transmission universelle du patrimoine à son associé unique et reprend l'intégralité des moyens soulevés dans ses conclusions de première instance,

Sur les sommes qui lui sont dues au titre du matériel commandé et livré à la société Coriance et le préjudice subi,

- confirmer le jugement déféré et condamner la société Coriance à lui payer la somme de 198.292,80 euros TTC au titre du solde des factures impayées (sic),

- infirmer le jugement déféré et condamner la société Coriance à lui payer les intérêts sur la somme de 198.292,80 euros TTC au dernier taux de refinancement de la Banque centrale européenne majoré de dix points de pourcentage au titre de l'article L.441-6 du code de commerce à compter de la date d'échéance de chacune des factures,

- infirmer le jugement déféré et condamner la société Coriance à lui payer 128.107,20 euros à titre de dommages-intérêts pour l'exécution de mauvaise foi du contrat,

Sur les pénalités de retards sollicitées par la société Coriance,

à titre principal,

- infirmer le jugement déféré et rejeter la demande formulée par la société Coriance au titre des pénalités de retard,

A titre subsidiaire,

- juger que les pénalités exigées par la société Coriance ne sont pas justifiées dans leur montant,

- réduire en conséquence le montant exigible au titre des pénalités de retard à la somme de 13.997,89 euros,

Sur les autres sommes sollicitées à tort par la société Coriance,

- confirmer le jugement déféré et débouter la société Coriance de ses demandes formulées à titre de dommages-intérêts,

- confirmer le jugement déféré et débouter la société Coriance de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

en tout état de cause,

- condamner la société Coriance au paiement de la somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Coriance aux entiers dépens, au profit du cabinet Lexavoué, avocat sur son offre de droit.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 18 décembre 2020, les débats étant fixés au 26 janvier 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, la cour rappelle que les 'demandes' tendant à voir 'constater' ou tendant à ' voir dire et juger' lorsque celles-ci développent en réalité des moyens ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour.

Il est précisé ensuite que le litige n'est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est antérieur au 1er octobre 2016.

La société Coriance expose :

- que la société Sondex a fixé elle-même le montant du préjudice subi par sa cocontractante et qu'elle lui a imposé une réduction de prix en lieu et place d'une exécution forcée ou de dommages et intérêts à hauteur des préjudices réellement subis, que c'est donc à tort que le tribunal a retenu que la proposition de réduction de prix faite par la société Sondex devenait de fait le nouveau prix de vente de la commande.

- que la société Sondex a été défaillante dans l'exécution de la commande (retards de livraison et livraisons non conformes : pièces détachées au lieu de pièces assemblées) et a reconnu ses manquements puisqu'elle a appliqué une réduction de prix et évoqué dans ses correspondances les difficultés rencontrées,

- que le matériel n'a jamais été complètement livré ni assemblé par la société Sondex, que cela ressort des nombreux courriels échangés entre les parties et de l'absence de signature de sa part sur les bons de livraison, que contrairement à ce qu'affirme la société Sondex, il lui appartenait de fournir des skids complets (échangeurs et vannes) assemblés et non de simples échangeurs,

- qu'elle a du recourir aux services d'autres prestataires pour pallier la carence de la société Sondex, soit par recours aux sociétés Snef et Emig, pour terminer le travail non réalisé par la société Sondex et qu'elle justifie leur avoir réglé la somme de 184.864,52 euros HT,

- que contrairement à ce qu'affirme la société Sondex elle n'a pas revendu les matériels,

- qu'il y a lieu d'appliquer la clause de pénalités de retard compte tenu des retards de livraison reconnus par la société Sondex,

- qu'elle a passé de nombreuses heures à gérer le chantier et déployé des moyens pour assurer la continuité du service et que son préjudice à ce titre doit être évalué à la somme de 25.000 euros, qu'il y a également lieu de condamner la société Sondex à la somme de 75.000 euros pour procédure abusive.

En réponse, la société Sondex expose :

- qu'elle a exécuté régulièrement sa prestation comme en attestent ses factures et les bons de livraison correspondants et que la société Coriance n'a émis aucune réserve à la livraison des matériels,

- qu'il y a lieu de confirmer la condamnation prononcée par le tribunal, assortie des intérêts de retard non pas au taux légal mais, en application de ses conditions générales de vente, conformément à l'article L 441-6 du code de commerce à compter de la date d'échéance des factures,

- que la société Coriance a réglé tardivement l'acompte ce qui a engendré un décalage de l'échéancier des livraisons, que compte tenu du planning à respecter, la société Coriance lui a imposé de livrer des skids 'en kit' plutôt que des skids complets et que cette modification de la commande par la société Coriance l'a contrainte à diminuer son prix de 106.756 euros HT soit 128.107,20 euros TTC (ce qui représente pour elle une 'moins-value' d'autant), qu'il y a lieu de condamner la société Coriance à lui régler cette somme en réparation de son préjudice,

- que contrairement à ce qu'a retenu le tribunal il n'y a pas lieu d'appliquer la clause de pénalités de retard, qu'en effet la date à retenir pour le démarrage de l'échéancier de livraison est le 16 juillet 2014, date de règlement de l'acompte par la société Coriance,

- que les livraisons suivantes devaient donc s'échelonner entre le 8 septembre et le 20 octobre 2014, qu'il résulte des pièces versées aux débats qu'elle a effectué les livraisons entre le 21 juillet et le 25 août 2014 donc non pas en retard mais en avance,

- qu'elle a adressé le 2 juin 2014 une facture à la société Coriance pour le paiement de l'acompte et que la société Coriance a attendu le 16 juillet pour la régler, ce qui a différé d'autant la conclusion du contrat et sa date d'effet,

- que la société Coriance ne s'est vu adresser aucun reproche de la part de la commune de [Localité 3] qui lui a confié ce marché de travaux,

- que de manière déloyale la société Coriance a sollicité dès le 25 juillet 2014 des entreprises concurrentes en lui imposant une éviction partielle du marché,

- qu'en tout état de cause ses conditions générales prévoient que les délais de livraison ne sont donnés qu'à titre indicatif,

- que le tribunal pour retenir l'application de pénalités de retard ne s'est fondé que sur des échanges de courriels, sans que soit rapportée la preuve d'une responsabilité prouvée et définitivement établie, à titre subsidiaire, que le calcul des pénalités est erroné (la société Coriance réclame 21.937 euros à ce titre) et doit être ramené à la somme maximale de 13.997,89 euros,

- que la société Coriance aurait du lui adresser une mise en demeure de respecter ses obligations avant de s'adresser à des entreprises concurrentes et que les devis des sociétés Snef et Emig ont été reçus le 25 juillet 2014, que la société Coriance ne leur a passé commande que bien plus tard dans le mois d'août ce qui démontre l'absence d'urgence, que l'intervention de ces sociétés est sans lien avec une éventuelle carence de sa part puisqu'elle porte notamment sur le lot n° 4 qui n'est pas l'objet du contrat la liant à la société Coriance,

- que l'intervention des sociétés Snef et Emig représente un coût bien supérieur (184.864,52 euros HT) à celui de la prestation qui lui a été retirée (94.480,37 euros) ce qui démontre que cette intervention ne concerne pas exclusivement son remplacement, que la demande de la société Coriance à ce titre doit donc être rejetée,

- qu'elle n'a commis aucune faute et n'est donc pas responsable des difficultés que la société Coriance a pu rencontrer sur le chantier, que la société Coriance ne justifie pas du montant de 25.000 euros auquel elle prétend et qu'elle a fait preuve d'une particulière mauvaise foi dans l'exécution du contrat et qu'elle doit en conséquence être déboutée de sa demande de 75.000 euros pour procédure abusive.

Sur ce,

Il résulte des productions :

- que la société Coriance et la Commune étaient liées par un contrat de délégation de service public, la société Coriance agissant alors comme maître de l'ouvrage,

- qu'un CCCP a été établi par la société Coriance et précisait les prestations à fournir par les entreprises dont les équipements hydrauliques, que l'ensemble de ces prestations participaient à la réalisation de plusieurs lots et faisait état du lot ' fourniture de skid' et 'ensemble de skid préfabriqués',

- que selon les termes de la proposition de la société Sondex, 'sur la base d'une commande du lot 3" en S20 (débutant le 12 mai 2014), les livraisons devaient intervenir de la S28 (débutant le 7 juillet) à la S34 (débutant le 18 août) les lundis de chaque semaine et qu'il était prévu une pénalité de retard de 1/1000 du prix du matériel par jour ouvré de retard plafonné à 10% de la valeur du matériel objet du retard ; qu'un acompte de 20% devait être versé à la commande par virement et le solde à 45 jours,

- que faute de fournir les preuves d'un appel d'offre spécifique, la société Sondex n'a pu remettre son offre que sur la base du CCTP dressé par la société Coriance et qu'elle s'engageait ainsi à fournir les skids avec les prestations mentionnées dans l'article 1.6.1 du CCTP, ce qui incluait le raccordement hydraulique des équipements, que son offre n'est en effet pas restrictive sur le lot 3 et que certaines de ses pièces visent d'ailleurs la totalité de ce lot (p1.2 page 4),

- que la commande de la société Coriance est datée du 7 mai 2014 et reprenait les conditions du devis en précisant toutefois qu'un acompte de 20% devait être versé à la commande après signature des pièces contractuelles et réception d'une facture, que la société Sondex n'a pas répondu sur les modalités de cette commande qu'elle a ensuite commencé à exécuter de sorte qu'elle est réputée l'avoir acceptée sur ces modalités,

- que si l'établissement d'une première facture par Sondex conditionnait le paiement de l'acompte, force est de constater que le contrat ne subordonnait pas les délais de livraison à ce premier paiement, que si la facture a été envoyée dans un délai de trois semaines et n'a pas été réglée avant début juillet, aucune modification n'intervenait sur les dates de livraison des skid qui étaient inchangées.

Ensuite, la société Sondex n'a pas contesté l'existence de retards de livraison, ce qui résulte clairement de ses courrriels et notamment celui du 11 juillet 2014 indiquant 'suite aux retards de livraison, des actions viennent d'être prises' ; un courriel de Sondex du 23 juillet 2014 confirmait que l'usine ne pouvait fabriquer et donc livrer les skids selon le planning prévu et proposait de 'fournir les composants principaux' pour que des tuyauteurs réalisent les skids sur site ; la société Sondex indiquait par la suite et qu'un changement était intervenu à la tête de l'usine de skids, celui du 31 juillet 2014, indiquant notamment 'conscient du préjudice que nous vous avez subi nous avons consenti....' et ramenant la commande à la somme de 233.244 euros HT.

Les procès-verbaux de réunion de chantier confirment les retards de livraison par ailleurs. S'agissant des dates de livraison, il résulte des productions, comme justement relevé par le tribunal de commerce, que les bons de livraison ne comportent aucune signature ni tampon humide de la société Coriance de sorte que la date exacte de livraison ne peut découler de ces pièces.

Les retards par rapport au planning contractuel ne sont donc pas contestables ainsi que la livraison d'éléments incomplets par rapport à la commande. C'est donc à tort que la société intimée prétend que la moins-value a pour origine un changement de commande de son adversaire alors que la responsabilité lui en est entièrement imputable.

Les inexécutions contractuelles imputables à la société Sondex sont en conséquence clairement établies.

Il résulte ensuite des courriels échangés par les parties (p7 Danfoss) que :

- le 29 juillet 2014 la société Sondex a fait connaître le planning de livraison mis a jour le 29 avril 2014 en indiquant avoir gagné une semaine par rapport au planning précédant, qu'en réponse, la société Coriance a dit être en attente d'une confirmation sur la moins-value générée par la fourniture de skids non complets et sollicité une proposition sérieuse eu égard au retard pris et aux incidences financières sur les raccordements à venir, que la société Sondex a en retour indiqué avoir envoyé la proposition la veille, que la société Coriance a estimé cette proposition 'vague et plutôt légère en rapport avec les difficultés rencontrées', sollicitant une proposition ferme, sérieuse et détaillée, que la société Sondex a indiqué préparer ce chiffrage, que le 30 juillet, la société Coriance a demandé si la société Sondex avançait sur le sujet, indiquant que le laps de temps nécessaire ne saurait retarder en tous les cas la délivrance du matériel,

- que par courriel du 31 juillet 2014, la société Sondex a proposé un accord transactionnel, la société Coriance devant émettre une modification de commande pour 9 skids complets, 39 échangeurs avec caisson et 39 jeux de composants hydrauliques pour sous-stations, le montant de la facture totale étant ramené à la somme de 233.244 euros (dont une remise de 5% supplémentaire), la société Sondex se disant 'consciente du préjudice que vous avez subi',

- que la société Coriance a noté la proposition tout en indiquant que l'accord ne pouvait être unilatéral ni fondé sur les estimations adverses, soulignant être mise devant le fait accompli alors que le matériel compris dans la commande de base étant toujours retenu ; qu'elle a ajouté avoir proposé l'idée de ne recevoir que la livraison directe des échangeurs et du matériel pour débloquer la situation ; qu'elle précisait être dans l'obligation de mobiliser 'au pied levé' différents prestataires pour pouvoir raccorder les échangeurs et autres équipements en sous-station ; que la société Sondex était mise en demeure de livrer l'ensemble des pièces nécessaires à la réalisation des sous-stations sur le site et le justificatif des envois vers le site de [Localité 3],

- que le 18 août 2014, la société Coriance faisait état d'une livraison des 48 échangeurs et 48 vannes deux voies se plaignait à nouveau de la non livraison de diverses pièces dont l'ensemble des compteurs.

Il résulte de ces pièces que la société Coriance avait effectivement sollicité une proposition de moins-value, que cependant, faute d'accord sur cette proposition, elle ne peut être engagée par le courrier de la société Sondex sur un accord transactionnel à hauteur du montant allégué, ledit courrier ne valant pas renonciation pour elle à demander l'indemnisation de préjudices découlant d'inexécutions contractuelles.

Il s'agit en premier lieu de déterminer le montant des prestations exécutées par la société Sondex par rapport au devis initial et qui doivent recevoir paiement.

La société Coriance aurait dû, si la prestation avait été exécutée correctement, débourser une somme de 340.000 euros HT. Elle a versé à la société Sondex la somme de 68.000 euros HT soit un reste à payer de 272.000 euros HT sur la commande initiale.

Au regard d'une prestation initialement fixée initialement à 340.000 euros HT, la société Sondex a réduit le prix de la commande à la somme de 233.244 euros HT d'où un reste à payer de 165.244 euros HT après déduction de l'acompte (tableau pièce 8).

Les prestations exécutées pour Coriance ne peuvent correspondre à l'acompte qu'elle a versé et calculé en pourcentage du prix total. La société Coriance conteste les prestations énumérées par l'intimée mais ne justifie par aucun élément avoir dû suppléer la carence de la société Sondex s'agissant de ces prestations facturées.

Il en découle que la société Danfoss justifie du solde restant dû sur sa créance ainsi que justement retenu par le tribunal de commerce.

S'agissant des frais dont la société Coriance soutient qu'ils découlent de l'inexécution fautive de son adversaire, les factures de sociétés tiers qui sont produites portent sur un total de 184.864,52 euros.

La société Coriance a nécessairement dû suppléer aux inexécutions de la société Sondex en faisant appel à des entreprises tiers.

La société Coriance se prévaut de prestations de deux sociétés pour un total exécuté de 184.864,52 euros et produit à cet effet en pièces 6 et 7 les commandes et factures.

Il ne peut être reproché à la société Coriance, au vu des retards rapidement enregistrés, d'avoir anticipé sur la demande de devis permettant de terminer les travaux. Ces devis ainsi que les factures correspondantes portent bien sur les skid litigieux, peu important la mention erronée au lot 4, lot des deux sociétés en cause, de sorte qu'il n'est pas contestable qu'il s'agit de travaux nécessaires pour pallier aux carences de la société Sondex.

Mais la société Coriance ne justifie cependant d'un préjudice sur le montant des travaux qu'à hauteur du surcoût généré par l'inexécution fautive de son adversaire, outre des pénalités de retard contractuellement prévues.

En conséquence de ce qui précède, il est établi que la société Coriance a acquitté pour faire face aux défaillances de la société Sondex la somme de 184.864,52 euros HT. Compte tenu du solde dû à la société Sondex à hauteur de 233.244 euros HT, elle doit débourser un montant total de 418.108,52 euros pour l'exécution des travaux.

Son préjudice est donc équivalent au surcoût généré et justifié par les carences de la société Sondex par rapport au prix du marché initial, soit la somme de 78.108,52 euros.

Compte tenu du versement de l'acompte et déduction faite du surcoût supporté par Coriance, il est dû par la société Coriance un solde de 87.135,48 euros sur le marché. Le jugement est réformé en ce sens.

Sur les pénalités de retard, elles sont dues eu égard aux retards de livraison indéniables et le guide des bonne pratiques opposées par Danfoss est inopposable à la cause. Chaque partie produit un décompte difficilement lisible sur le décompte de ces pénalités de retard. Toutefois, les erreurs de calcul relevées par la société Danfoss sont avérées et la société Coriance n'y apporte aucune réponse. En conséquence, le montant des pénalités de retard est arrêté à la somme de 13.997,89 euros. Le jugement est réformé en ce sens.

S'agissant enfin des intérêts de retard, l'intimée ne justifie ni de conditions générales de vente opposables à l'appelante, ni de mentions portées sur les factures de sorte que le jugement est confirmé en ce qu'il dit que la somme due portait intérêts légaux à compter de la mise en demeure.

Sur les demandes de dommages et intérêts

La preuve d'un préjudice découlant de l'action abusive de l'intimée, dont la créance est pour une grande partie reconnue, n'est nullement rapportée de sorte que la demande de dommages intérêts à ce titre n'est pas fondée.

Par ailleurs, la société Coriance ne justifie pas plus d'un préjudice concret né des moyens mis en oeuvre pour suppléer la carence de la société Sondex.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté ces demandes de dommages intérêts.

Par ailleurs, la société Danfoss ne justifie pas plus d'un préjudice né de l'exécution de mauvaise foi du contrat par son adversaire et le jugement est également confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Chacune des parties conservera la charge de ses dépens d'appel dans la mesure où aucune d'elles n'obtient intégralement satisfaction sur ses prétentions.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Les dispositions de première instance à ce titre sont par ailleurs confirmées.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Constate que la société Danfoss vient aux droits de la société Sondex France par transmission universelle du patrimoine de la société Sondex France à son associé unique.

Infirme le jugement querellé en ce qu'il a condamné la société Coriance à payer à la société Sondex la somme de 141.920 euros HT outre intérêts à compter du 23 octobre 2014 et rejeté la demande de la société Coriance concernant les travaux réalisés par les sous-traitants.

Confirme le jugement querellé pour le surplus.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société Coriance justifie d'un préjudice de 78.108,52 euros HT suite à la défaillance de la société Sondex.

Condamne la société Coriance à payer à la société Danfoss la somme de 87.135,48 euros HT à titre de solde dû sur le marché de travaux outre intérêts légaux à compter du 23 octobre 2014.

Condamne la société Danfoss à payer à la société Coriance la somme de 13.997,89 euros à titre de pénalités de retard.

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens d'appel.

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/01309
Date de la décision : 29/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-29;19.01309 ?
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