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26/06/2023 | FRANCE | N°23/00096

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 26 juin 2023, 23/00096


N° R.G. Cour : N° RG 23/00096 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PAC5

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DE REFERE

DU 26 Juin 2023





























DEMANDEURS :



M. [Y] [I]

[Adresse 6]

[Localité 4]



Représenté par Me MAGNON Benjamin substituant Hugues DUCROT de la SCP DUCROT ASSOCIES - DPA, avocat au barreau de LYON (toque 709)





Mme [A] [U]

[Adresse 1]

[L

ocalité 4]



Représentée par Me MAGNON Benjamin substituant Me Hugues DUCROT de la SCP DUCROT ASSOCIES - DPA, avocat au barreau de LYON (toque 709)





M. [T] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représenté par Me MAGNON Benjamin substituan...

N° R.G. Cour : N° RG 23/00096 - N° Portalis DBVX-V-B7H-PAC5

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DE REFERE

DU 26 Juin 2023

DEMANDEURS :

M. [Y] [I]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représenté par Me MAGNON Benjamin substituant Hugues DUCROT de la SCP DUCROT ASSOCIES - DPA, avocat au barreau de LYON (toque 709)

Mme [A] [U]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me MAGNON Benjamin substituant Me Hugues DUCROT de la SCP DUCROT ASSOCIES - DPA, avocat au barreau de LYON (toque 709)

M. [T] [O]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me MAGNON Benjamin substituant Me Hugues DUCROT de la SCP DUCROT ASSOCIES - DPA, avocat au barreau de LYON (toque 709)

DEFENDEURS :

Mme [K] [R]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Ingrid POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON (toque 215)

M. [D] [R]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté par Me Ingrid POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON (toque 215)

Audience de plaidoiries du 12 Juin 2023

DEBATS : audience publique du 12 Juin 2023 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 juillet 2023, assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 26 Juin 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

Le terrain jouxtant celui de M. [D] [R] et Mme [K] [G] [V] [Z] épouse [R] a fait l'objet d'une division parcellaire acceptée par la mairie de [Localité 5] le 10 juin 2016 et avait fait l'objet d'un permis de construire pour la construction de deux maisons individuelles avant que les époux [R] ne soient propriétaires. M. [T] [O], Mme [A] [U] et M. [Y] [I], nouveaux propriétaires ont déposé une demande de permis modificatif qui a été accordé le 14 janvier 2021.

Par acte du 2 décembre 2022, les époux [R] ont fait assigner les époux [O] et M. [I] devant le président du tribunal judiciaire de Lyon, lequel par jugement contradictoire du 2 mars 2023 a notamment :

- enjoint aux époux [O] et à M. [I] d'arrêter les travaux de construction de leur maison d'habitation sur la parcelle [Adresse 8], un mois après la signification du jugement, sous astreinte passé ce délai de 1 000 € par infraction constatée,

- condamné les époux [O] et M. [I] à procéder à la remise en état de la parcelle [Adresse 8], par destruction de toutes les constructions et fondations qu'ils ont fait réaliser, dans les 90 jours de la signification du jugement, sous astreinte passé ce délai de 500 € par jour de retard,

- condamné les époux [O] et M. [I] à payer aux époux [R] la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens.

Les époux [O] et M. [I], dits ensuite les consorts [O]/[I], ont interjeté appel de la décision le 17 mars 2023.

Par assignation en référé délivrée le 25 mai 2023 aux époux [R], ils ont saisi le délégué du premier président afin d'obtenir l'arrêt de l'exécution provisoire et de condamner les époux [R] à la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

A l'audience du 12 juin 2023 devant le délégué du premier président, les parties, régulièrement représentées, s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans leur assignation, les consorts [O]/[I] invoquent les dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile et soutiennent qu'au moment de la procédure en première instance, compte tenu de l'avancement de la construction, la démolition aurait eu des conséquences irrémédiables et disproportionnées au regard des intérêts lésés.

Ils indiquent que cette construction devait être leur résidence principale et qu'elle n'entraîne aucun préjudice pour les époux [R].

Elle fait état du caractère disproportionné de la démolition en se fondant sur le constat dressé le 17 mars 2023 qui indique que la construction litigieuse est hors d'eau, hors d'air et raccordée aux compteurs électriques.

Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 7 juin 2023, les époux [R] s'opposent à la demande d'arrêt de l'exécution provisoire et sollicitent la condamnation des demandeurs à leur verser la somme de 3 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et à supporter les dépens.

Ils affirment l'absence de moyens sérieux de réformation et contestent l'existence de conséquences manifestement excessives.

Ils considèrent que le tribunal judiciaire a fait une application pertinente des règles de droit et de la jurisprudence, en retenant que le cahier des charges du lotissement avait valeur contractuelle et s'imposait aux consorts [O]/[I].

Ils soulignent que le cahier des charges n'a jamais fait l'objet d'une remise en cause et ajoutent que l'absence de mention dans l'acte de vente de l'article 2 du cahier des charges relève d'une responsabilité du vendeur et du notaire, ce qui a été reconnu par les demandeurs qui ont assigné leur vendeur et leur notaire le 4 mai 2023.

Ils affirment que la démolition ordonnée n'est pas disproportionnée, car les consorts [O]/[I] sont informés depuis longtemps des termes du cahier des charges et ont entendu profiter des délais de procédure pour continuer la construction de leur immeuble.

Ils relèvent enfin que le stade d'avancement de la construction, sans aucun aménagement intérieur ne caractérise nullement une impossibilité d'exécution de la démolition. Ils indiquent qu'en cas d'infirmation cette démolition sera compensée par une indemnisation à hauteur des sommes investies dans l'opération, notamment par les vendeur et notaire dernièrement assignés.

Dans leurs conclusions déposées au greffe par RPVA le 7 juin 2023, les consorts [O]/[I] maintiennent les demandes contenues dans leur assignation.

Ils soutiennent la caducité des clauses réglementaires du cahier des charges et qu'il n'existe aucune volonté non équivoque de contractualiser les règles du règlement de lotissement.

Ils renouvellent leurs arguments sur le caractère disproportionné de la sanction de remise en état prononcée par le tribunal judiciaire, et soulignent que la construction est hors d'eau, hors d'air ce qui correspond à un quasi-achèvement.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour plus de précisions sur les faits, prétentions et arguments des parties, à la décision déférée, aux conclusions régulièrement déposées et ci-dessus visées, comme pour l'exposé des moyens à l'énoncé qui en sera fait ci-dessous dans les motifs.

MOTIFS

Attendu que l'exécution provisoire de droit dont est assorti le jugement rendu le 2 mars 2023 par le tribunal judiciaire de Lyon ne peut être arrêtée, que conformément aux dispositions de l'article 514-3 du Code de procédure civile, et lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives ; que ces deux conditions sont cumulatives ;

Attendu que les consorts [O]/[I] ne tendent pas à distinguer les chefs du dispositif du jugement déféré en appel en sollicitant un arrêt global de l'exécution provisoire s'agissant tant de l'injonction d'arrêter les travaux de construction que de l'obligation de démolir l'ouvrage ;

Attendu que s'agissant de l'existence de conséquences manifestement excessives, il y a lieu de rappeler qu'il appartient seulement au premier président de prendre en compte les risques générés par la mise à exécution de la décision rendue et le caractère manifestement excessif de ces conséquences ne saurait exclusivement résulter de celles inhérentes à la mise à exécution d'une condamnation à exécuter une obligation de faire ou de ne pas faire, mais ces conséquences doivent concrètement présenter un caractère disproportionné ou irréversible ;

Attendu que s'agissant d'une part de l'injonction de cesser les travaux, il convient de constater d'abord qu'il n'est pas discuté que les consorts [O]/[I] n'ont cessé d'avancer la construction de leur immeuble à compter du point de départ de l'astreinte prononcée par le tribunal judiciaire de Lyon, alors qu'ils sont informés à tout le moins depuis l'assignation en référé délivrée par les époux [R] le 16 mars 2022 qu'une difficulté leur était opposée au titre des termes du cahier des charges du lotissement dans lequel cette construction avait démarré ;

Attendu que les consorts [O]/[I] n'invoquent pas un risque de conséquences manifestement excessives concernant cette obligation de cesser l'avancement des travaux et leur demande d'arrêt de l'exécution provisoire attachée à ce chef du dispositif du jugement du 2 mars 2023 ne peut qu'être rejetée sans avoir besoin d'apprécier le sérieux des moyens de réformation qu'ils articulent ;

Attendu que s'agissant ensuite de l'obligation pour les consorts [O]/[I] d'engager des travaux de démolition de l'immeuble, ils affirment d'une part l'impossibilité de revenir à la situation initiale en cas d'infirmation du jugement dont appel et d'autre part que cette démolition aurait au regard de leurs revenus l'effet de les priver d'une année et demie de ces derniers sans tenir compte des coûts de reconstruction en cas d'infirmation prononcée par la cour ;

Attendu qu'il est difficilement contestable qu'une démolition telle que celle ordonnée par le tribunal judiciaire de Lyon est susceptible d'avoir des conséquences irréversibles en ce qu'en l'état des éléments présents aux débats il n'est pas certain que les époux [R] disposeraient ou seraient susceptibles de disposer dans un délai bref des fonds suffisants pour financer la reconstruction de l'immeuble litigieux si d'aventure une infirmation était prononcée par la cour d'appel ; qu'une démolition conduirait dès lors à entraîner des conséquences irréversibles et disproportionnées ;

Attendu qu'il convient dès lors de constater que dans le cadre d'un arrêt des travaux tel qu'ordonné par le tribunal judiciaire de Lyon, la suspension des effets de la condamnation à démolir l'ouvrage est de nature à garantir les droits respectifs des parties quelle que soit la décision ensuite rendue par la cour ; qu'il doit être constaté que les consorts [O]/[I] ont indiqué n'avoir l'intention de reprendre les opérations de construction qu'en cas d'arrêt de l'exécution provisoire ;

Attendu qu'un moyen sérieux ne relève pas d'une simple affirmation ni de la seule reprise des arguments développés en première instance ; qu'en d'autres termes un moyen sérieux est un moyen suffisamment consistant pour mériter d'être allégué ou soutenu, pris en considération et avoir des chances d'être retenu après discussion et réflexion et qui doit en tout état de cause conduire à l'annulation ou à la réformation ;

Qu'il ne correspond pas plus à une critique de l'appréciation réalisée par le premier juge mais doit confiner à établir l'existence d'une erreur de droit qu'il a commise ou d'une erreur manifeste d'appréciation des éléments du litige, l'examen de ce moyen par le premier président nécessitant un niveau élevé d'évidence, car il lui est interdit de déterminer le bien fondé de l'appel ;

Attendu qu'il suffit de confronter l'ordonnance de référé rendue par le président du tribunal judiciaire de Lyon le 11 juillet 2022 et le jugement rendu par ce même tribunal le 2 mars 2023 pour constater qu'une discussion plus que sérieuse oppose les parties en particulier sur la persistance ou la caducité du cahier des charges du lotissement litigieux ; qu'il n'a pas été indiqué qu'un appel ait été interjeté contre cette ordonnance ;

Que le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon a considéré l'évidence ce que «le cahier des charges est fort ancien et dès lors caduc» alors que ce tribunal judiciaire dans le jugement dont appel a retenu une valeur contractuelle à plusieurs des stipulations de ce cahier des charges et dès lors son absence de caducité entre les colotis ;

Attendu que cette apparente contradiction entre deux décisions juridictionnelles suffit à caractériser le sérieux du moyen de réformation tenant à tout le moins au caractère caduc ou non du cahier des charges du lotissement ;

Attendu qu'il convient en conséquence de suspendre l'exécution provisoire du chef du jugement du 2 mars 2023 qui ordonne la démolition de l'immeuble, cet arrêt demeurant en revanche conditionné à l'arrêt effectif des travaux de construction tant que la cour n'a pas statué ; que cette échéance est d'ailleurs proche en ce que l'affaire est fixée le 6 novembre 2023 ;

Qu'il y a lieu de prévoir la possibilité pour les époux [R] de se prévaloir à nouveau de l'exécution provisoire de ce jugement en cas de reprise ou de poursuite des opérations de construction dûment constatée par un commissaire de justice ; qu'en effet, il serait disproportionné pour les époux [R] de devoir face le cas échéant à une appréciation du caractère proportionnel d'une décision de démolition, l'appréciation du juge étant nécessairement différente si l'immeuble est terminé ou s'il en cours d'édification ;

Attendu que compte tenu du résultat obtenu respectivement par les parties, elles doivent garder chacune la charge de leurs propres dépens, leurs demandes au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ne pouvant prospérer ;

PAR CES MOTIFS

Nous, Pierre Bardoux, délégué du premier président, statuant publiquement, en référé, par ordonnance contradictoire,

Vu la déclaration d'appel du 17 mars 2023,

Ordonnons la suspension de l'exécution provisoire du chef suivant du jugement rendu le 2 mars 2023 par le tribunal judiciaire de Lyon :

«Condamne M. [T] [O], Mme [A] [U] et M. [Y] [I] à procéder à la remise en état de la parcelle n° BB [Cadastre 7] du lotissement l'Aigas située [Adresse 2], par destruction de toutes les constructions et fondations qu'ils ont fait réaliser, dans les 90 jours de la signification du jugement, sous astreinte passé ce délai de 500 € par jour de retard»

Disons que l'exécution provisoire pourra reprendre ses effets si M. [D] [R] et Mme [K] [G] [V] [Z] épouse [R] établissent par un procès-verbal de commissaire de justice la poursuite ou la reprise des opérations de construction sur la parcelle susvisée,

Rejetons pour le surplus la demande d'arrêt de l'exécution provisoire présentée par M. [T] [O], Mme [A] [U] et M. [Y] [I],

Disons que chaque partie garde la charge de ses propres dépens et rejetons les demandes respectives au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 23/00096
Date de la décision : 26/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-26;23.00096 ?
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