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08/06/2023 | FRANCE | N°22/02426

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 08 juin 2023, 22/02426


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 22/02426 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OG2C





S.A.S. EUROPROP'SERVICES



C/



[H]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Mars 2022

RG : R 21/00410



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 08 JUIN 2023







APPELANTE :



S.A.S. EUROPROP'SERVICES

[Adresse 2]

[Localité 4]
r>

représentée par Me Silvère IDOURAH, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



[K] [H]

née le 25 Mai 1985 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]



représentée par Me Jean-michel PENIN, avocat au barreau de LYON









DÉBATS EN AUDIENCE PUBLI...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 22/02426 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OG2C

S.A.S. EUROPROP'SERVICES

C/

[H]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 23 Mars 2022

RG : R 21/00410

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

APPELANTE :

S.A.S. EUROPROP'SERVICES

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Silvère IDOURAH, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

[K] [H]

née le 25 Mai 1985 à [Localité 5]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Jean-michel PENIN, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 07 Avril 2023

Présidée par Etienne RIGAL, Président magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Etienne RIGAL, président

- Vincent CASTELLI, conseiller

- Françoise CARRIER, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 Juin 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Etienne RIGAL, Président et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société EUROPROP'SERVICES ( ci-après, la société) exploite une activité de nettoyage des bâtiments.

Elle applique à ce titre les dispositions de la Convention collective nationale des entreprises de propreté.

Elle emploie environ 270 salariés.

En date du 27 août 2018, la société a embauché Madame [K] [H] suivant contrat de travail à durée déterminée en qualité d'agent administratif.

A l'issue de ce contrat, soit à compter du 1 er décembre 2018, Mme [H] a été embauchée, sous contrat de travail à durée indéterminée en qualité d'agent administratif.

Le 4 novembre 2019, la société EUROPROP'SERVICES a affiché une note de service relative à l'organisation d'élections professionnelles en vue de la mise en place d'un CSE.

Le 27 novembre 2019, M. [I] [S], secrétaire général adjoint de l'Union

syndicale CGT des travailleurs de la manutention et du nettoyage, a remis à la société une liste de candidat sur laquelle figurait en deuxième position Mme [H].

la société EUROPROP'SERVICES l'a convoquée le 27 novembre à un entretien préalable à une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement avec mise à pied conservatoire .

Cet entretien était fixé au 10 décembre 2019.

Le 12 décembre 2019, la société EUROPROP'SERVICES a notifié à Mme [H] un blâme.

Cette sanction disciplinaire était motivée par six griefs à savoir (pièce n° 15) :

- l'insubordination (refus de se rendre au bureau de poste pour l'envoi du courrier) ;

- le dénigrement de l'entreprise et l'incitation des salariés à démissionner ;

- le refus de communiquer sur les difficultés des salariés ;

- le refus de transmettre les informations importantes aux inspecteurs de la société ;

- le harcèlement de la direction pour l'obtention d'une augmentation de salaire

injustifiée ;

- la déformation de l'information transmise à l'inspection du travail.

Le 2 juillet 2020 et par lettre à son employeur, cette salariée l'informait de ce qu'elle exerçait dès ce jour son droit de retrait motivé comme il suit : « estimant me trouver dans une situation de travail dont j'ai un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent » .

Elle précisait que ce jour là, à 14h30 ,elle avait été victime d'une agression notamment physique de la part de Madame [X] [N], responsable d'exploitation.

Elle ajoutait que ces faits faisaient suite à un autre événement 'd'une particulière gravité', à savoir la lacération des pneus de sa sa voiture qui avait provoqué un accident le 16 février 2020 , ayant failli lui coûter sa vie six ainsi que celle de son fils.

Enfin elle ajoutait : 'je rappelle que le 31 janvier 2020 Madame [N] avait prie la décision de dégrader les pneus de ma voiture ce qui a de toute évidence été faite dans les jours qui ont suivi ».

Le 18 juillet 2020, la société EUROPROP'SERVICE adressait à l'Inspecteur du travail une demande d'autorisation d'un licenciement de Mme [H], au motif disciplinaire de « s'en être violemment prise à une collègue de travail Madame [N] [X] en tentant de l'agresser le 2 juillet 2020.

Le 5 août 2020, l'Inspecteur du travail a refusé de faire droit à cette demande d'autorisation de licenciement.

Sur le recours hiérarchique exercé par la société EUROPROP'SERVICE, la Ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, tout en modifiant la motivation retenue par l'Inspecteur du travail, a également refusé le 13 janvier 2021 de faire droit à la demande d'autorisation de licenciement de Mme [H] .

La société EUROPROP'SERVICE a alors saisi le tTribunal administratif de LYON d'un recours juridictionnel exercé contre ce refus d'autorisation de licenciement.

Par jugement du 7 juin 2022, le tribunal administratif de LYON a rejeté le recours juridictionnel exercé par la société EUROPROP'SERVICE contre le refus du Ministre du travail d'autoriser le licenciement de Mme [H].

Ensuite du refus d'autorisation de licenciement, la société convoquait la salariée un entretien le 4 septembre 2020, au cours de celui-ci cette dernière faisait valoir qu'elle il ne pouvait reprendre son poste de travail en raison de la présence dans l'entreprise de Madame [N].

Le 6 octobre 2020 la société lui indiquait refuser d'écarter Madame [N] et prendrae acte du maintien de l'exercice de son droit de retrait.

Le 3 avril 2021, la société mettait en demeure sa salariée de reprendre son travail.

Elle cessait le paiement des salaires à compter du 22 avril 2021 au motif d'une absence injustifiée.

Par requête reçue au greffe le 18 novembre 2021 Madame faisait convoquer la société à comparaître devant la formation de référé du conseil de prud'hommes de Lyon, notamment aux fins de voir établir le paiement des salaires.

Par ordonnance de référé en date du 21 octobre 2021, le dit conseil, en sa formation présidée par le juge départiteur a rendu une ordonnance dont le dispositif était rédigé pour l'essentiel comme il suit

« CONDAMNE la société EUROPROP' SERVICES à payer à Mme [K] [H] une

provision sur les salaires retenus correspondant aux salaires des mois d'avril 2021 et mai 2021, soit la somme de 4 408,18 €,

- DIT que la société EUROPROP' SERVICES devra remettre à Mme [K] [H] des bulletins de salaires conformes à la présente décision, sans astreinte.'.

L'employeur ne reprenait pas le paiement des salaires , après paiement des sommes dues au titre de l'ordonnance de référé, soit après celui du mois de mai 2021.

Par une nouvelle requête reçue au greffe le 18 novembre 2021 la salariée faisait convoquer la société devant la formation de référé du conseil de prud'hommes de Lyon afin d'obtenir paiement des salaires échus à compter du mois de juin 2021.

Au terme des débats devant cette juridiction, elle demandait condamnation provisionnelle de la société à lui payer les sommes suivantes :

- Salaire du mois de juin 2021 à janvier 2022 (2.204,09 x 8) : 17.632,72 €

- Indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile :1.200,00 €

La société quant à elle invoquait l'existence d'une contestation sérieuse sur le droit de retrait exercé par celle-ci par conséquent concluait à l'irrecevabilité de ses demandes formées devant le juge des référés.

À titre subsidiaire elle sollicitait que soit constatée l'absence de danger grave et imminent justifiant l'exercice du droit de retrait et par conséquent, elle sollicitait rejet des demandes en paiement de salaire.

À titre reconventionnel elle demandait condamnation de son adversaire à lui payer la somme de 1500 €, en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 23 mars 2022, le conseil de prud'hommes, en sa formation de référé rendait une ordonnance dont le dispositif était rédigé comme il suit :

« Condamne la société à payer à titre provisionnel à Madame [H] les somme de

' 17'632,72 € au titre des salaires de juin 2021 à janvier 2022 ;

' 700 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la société EUROPROP'SERVICES aux entiers dépens. »

Le 30 mars 2022 la société formait appel de cette ordonnance.

Au terme de ses dernières écritures notifiées le 8 mai 2022, cette dernière demande à la cour de :

A titre principal :

- Constater la nullité de l'ordonnance de référé du 23 mars 2022,

A titre subsidiaire :

- Constater l'absence de motif llégitime et justifiant le droit de retrait de Madame [H],

- Dire justifiée la retenue de salaires opérée,

- Infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance de référé rendue en date du 23 mars

2022,

Et, y ajoutant, en tout état de cause:

- Condamner Madame [H] au paiement de la sornme de l500€ en application de l'article 700 du Code de procedure civile.

- Condamner la même aux entiers dépens de premiere instance et d'appel.

Au terme de ses dernières écritures notifiées le 13 mars 2023, l'intimée demande à la cour de :

Confirmant l'ordonnance de référé du Conseil de prud'hommes de LYON du 23 mars 2022,

Condamner la société EUROPROP'SERVICES à lui payer à titre provisionnel les sommes suivantes :

- Salaire du mois de juin 2021 à janvier 2022 : 17.632,72 €

- Indemnité au titre de l'article 700 du CPC : 700,00 €

Condamner la société EUROPROP'SERVICES aux dépens ;

Y ajoutant,

Condamner également la société EUROPROP'SERVICES à lui payer à Mme [H] les sommes

suivantes :

- Indemnité au titre de l'article 700 du CPC (appel) 2.400,00 € .

Une ordonnance de clôture a été rendue le 14 mars 2023.

Avec l'accord des parties, cette ordonnance a été rabattue et la clôture des débats a été prononcée avant l'ouvertuire de l'audience de plaidoiries le 7 avril 2023.

Sur la demande en annulation de l'ordonnance de référé

De ce chef, la partie appelante valoir que :

L'article 455 du Code de procedure civile dispose que :

'Le jugement doit exposer succinctement les prétentions respectives des parties et leurs moyens. Cet exposé peat revêtir la forme d'un visa des conclusions des parties avec l'indicatz'on de leur date...'

Si le égislateur a autorisé le juge à exposer les prétentions des parties et leurs moyens sous la forme d'un visa des conclusions des parties, l'article 455 exige explicitement l'indication de la date des conclusions.

Or, la Cour observera que le juge de référé du Conseil de prud'hommes de Lyon a fait réference aux conclusions des parties régulièrement déposéess sans en indiquer les dates, alors même que les parties ont echangé plusieurs éecritures avant la date d'audience.

Sur ce

L'ordonnance reprend bien les demandes qui avait été formées par l'appelante devant la formation de référé du conseil de prud'hommes.

Elle expose donc les prétentions qui avaient été celles des parties au cours des débats.

En revanche, il est manifeste que cette ordonnance n'expose pas les moyens qui ont été développés par l'appelante au cours des débats préalables à sa décision.

Il apparaît bien également que cette ordonnance n'indique pas la date des conclusions rédigées par les parties.

Cependant, il n'est pas démontré que cette irrégularité de pure forme ait pu être à l'origine d'un préjudice quelconque étant observée que les demandes et prétentions sont bien celles résultant des dernières écritures déposées et qu'il est répondu au fond sur tous les arguments qui avaient été développés.

Il ne sera pas fait droit à la demande d'annulation.

Sur la demande en paiement provisionnel de salaire et l'exercice du droit de retrait

Arguments des parties

La société expose que :

La mise en oeuvre du droit de retrait nécessite la démonstration d'une situation de danger susceptible de se produire et le maintien de ce droit de retrait ne peut être etre justifié que par l'absence d'execution par l'employeur d'une obligation de sécurité précise.

La motivation de l'ordonnance du 21 octobre 2021 permettait de cornprendre clairement que selon le conseil, l'exercice du droit de retrait par Madame [H] pouvait étre regardée oomme legitime tant que l'enquete pénale sur les differentes plaintes était en cours.

Cette position résultait d'une présomption de croyance en l'existence d'une infraction autant de temps que l'enquête de police était en cours.

Or les plaintes ont été classées sans suite.

L'enquêe de police au cours de laquelle tous les protagonistes ont ete entendus a permis au Procureur de la République de considérer que les accusations de Madame [H] n'etaient pas fondées.

Tous les salaries de l'entreprise contestent la version des faits faite par Madame [H] et dégnent cette demière comme celle qui agresse tout le monde dont Madame [N].

Dans ces conditions, la Cour dira que c'est à tort que le juge de référé a fait droit à la demande de la salariee en lui allouant une provision sur les salaires dus.

Mme [H] répond que :

Le 2 juillet 2020, elle été victime d'une agression notamment physique de la part de Mme [X] [N], responsable d'exploitation.

Elle s'est aussitôt rendue au commissariat pour déposer plainte au titre de ces faits (pièce n° 35).

Le jour-même, elle a exercé son droit de retrait au sens des articles L.4131-1 et suivants du Code du travail, estimant se trouver dans une situation de travail dont elle avait un motif raisonnable de penser qu'elle présentait un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé.

Elle évoquait ainsi :

- son agression par Madame [N] survenue le jour-même ;

- un autre évènement d'une particulière gravité, à savoir la lacération des pneus de sa voiture qui avait provoqué un accident le 16 février 2020 qui avait failli lui coûter la vie, ainsi que celle de mon fils de quatre ans ;

- des menaces et insultes de la part de M. [R] [U], Directeur, le 14 janvier 2020.

Madame [N] était toujours présente dans l'entreprise durant la période litigieuse de juin 2021 à janvier 2022.

Dès lors, la situation de péril perdurait.

Sur ce

Au terme de l'article R.1455-75 du code du travail :

'Dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.'

Il revient donc à la présente juridiction de rechercher si le bien-fondé de l'exercice par Madame [H] de son droit de retrait pour la période courant du mois de juin 2021 au mois de janvier 2022 ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

Pour répondre à cette question la cour ne saurait se reposer et se fonder sur l'ordonnance de référé rendue par le conseil de prud'hommes, en sa formation de départage, le 29 octobre 2021, laquelle décision, d'une part, n'a pas l'autorité de la force jugée et, d'autre part, concerne une période antérieure.

L'article L.4131-1 du code du travail dispose que :

'Le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection.

Il peut se retirer d'une telle situation(...)'.

Cette disposition légale n'apporte pas d'exigences que le caractère de gravité du danger et son éminence soit réel et effectif. Le salarié conserve une marge d''appréciation et a un certain droit à l'erreur cependant dans la limite du raisonnable.

Il doit donc être recherché dans l'étude du bien fondé d'un tel retrait si le salarié avait un motif raisonnable de se penser dans une situation de danger susceptible de mettre en cause sa vie sa sant', c'est à dire d'entraîner une incapacité totale de travail.

Le salarié qui a exercé à bon escient son droit de retrait et dont le salaire n'a pas été versé peut demander au juge des référés d'ordonner à son employeur de lui verser une provision sur le salaire retenu.

Il incombe ainsi au salarié, dans ce cadre, de justifier de l'existence d'un motif raisonnable de penser qu'il était un danger et s'agissant d'une action en référé il doit justifier de ce que ce motif ne se heurte à aucune contestation sérieuse.

En l'espèce Madame [H] a exercé un tel droit de retrait en se fondant depuis le 2 juillet 2020 sur les faits suivants :

une agression physique qu'elle aurait subie le 2 juillet 2020 de Madame [X] [N], responsable d'exploitation,

La lacération des pneus de sa voiture, ayant provoqué un accident le 16 février 2020 qui aurait été commandité par la même Madame [N].

Il est implicitement acquis que Madame [H] et Madame [X] [N] ont eu une altercation violente le 2 juillet 2020.

En effet, l'employeur a argué de violences subies par cette dernière au soutien de sa demande d'autorisation de licenciement.

Madame [H], quant à elle, a porté plainte au pénal contre Madame [N].

En l'état, aucune suite n'a été donnée à cette plainte, le ministère public ayant considéré que l'enquête de police n'avait pas permis de déterminer avec précision les circonstances et l'imputabilité à l'une ou l'autre de cet épisode de violences.

Quelles qu'aient pu être les circonstances orignelles de cette altercation, il n'en reste pas moins certain qu'un conflit sérieux dégénérant en violences a existé entre ces deux membres du personnel de l'entreprise et qu'ainsi, Madame [H] pouvait craindre la survenue d'une nouvelle altercation.

Il sera précisé que Madame [N] est toujours présente dans l'entreprise et donc susceptible d'entrer en contact avec l'intimée dans l'hypothèse où elle reprendrait son service.

Cependant s'il existe, en l'état, et alors qu'il n'est pas justifié par l'employeur de mesures de prévention, un risque d'un nouvel incident, celui-ci ne saurait fonder un retrait de la salariée que dans l'hypothèse d'une menace grave pour la vie ou la santé de cette dernière et cela d'autant plus que l'intimée s'est retirée depuis une très longue période.

Or, il n'est pas justifié de ce que l'altercation du 2 juillet 2000 aurait été ou pu être à l'origine de blessures quelconques.

Les faits que Madame [H] et Madame [N] se reprochent réciproquement, n'apparaissent pas d'une gravité telle qu'ils auraient pu être à l'origine à l'origine de blessures sérieuses ou d'une incapacité totale de travail..

Par ailleurs, aucune pièce ne vient étayer l'affirmation par l'intimée que Madame [N] aurait été à l'origine de la lacération de ses pneus de voiture et aurait donc ainsi entendu attenter à sa sécurité .

Le SMS produit par celle-ci ne permet pas d'identifier son auteur si ce n'est que par un prénom, ce qui est insuffisant, et, au surplus, il apparaît avoir été adessé longtemps avant cette lacération et à l'occasion d'opétations de votes achevées.

Enfin, aucune pièce vient soutenir la réalité d'insultes ou menaces émanant de Monsieur [U] et il sera observé qu'en toute hypothèse, il n'est pas allégué que celles-ci auraient été réitérées avant la mise en 'uvre du droit de retrait 5 mois plus tard.

Dans ces conditions, il n'apparaît pas que durant la période concernée par la retenue de salaire contestée, Madame [H] aurait eu, sans contestation sérieuse possible, des raisons raisonnables de se croire dans une situation de danger grave et imminent, mettant en péril sa vie ou sa santé.

Elle ne démontre pas, sans contestation possible, l'existence d'un risque de violences graves.

Il importe peu dans le cadre de ce litige que l'employeur puisse avoir des craintes quant à un retour dans l'entreprise de Madame [H], seule la question des craintes de celle-ci étant posée.

Au regard de ces motifs, il sera retenu que la démonstration du bien fondé de l'absence au travail de l'intimée depuis le mois de juin 2021, fondée sur l'exercice d'un droit de retrait, se heurte à une contestation sérieuse.

Sa demande en paiement provisionnel des salaires retenus pour la période de juin 2021 à janvier 2022, sera déclarée irrecevable devant la juridiction des référés

Dans ces conditions, l'ordonnance appelée sera infirmée en ce qu'elle lui a alloué de telles sommes.

Elle sera également infirmé en ce qu'elle lui a alloué une somme en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

En équité, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande reconventionnelle de l'employeur fondé sur cette disposition légale.

Madame [H], succombant, supportera les dépens de première instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en référé, prononcé par sa mise à disposition au greffe,

Dit n'y avoir lieu à annulation de l'ordonnance de référé du conseil de prud'hommes de Lyon, en date du 23 mars 2022,

Iinfirme la dite ordonnance en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

Déclare Madame [K] [H] irrecevable en ses demandes en paiement provisionnel des salaires retenus pour la période de juin 2021 à janvier 2022,

Déboute la société EUROPROP'SERVICES de sa demande reconventionnelle fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne Madame [K] [H] aux dépens de première instance et d'appel.

Le greffier Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 22/02426
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;22.02426 ?
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