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08/06/2023 | FRANCE | N°21/02532

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale c, 08 juin 2023, 21/02532


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 21/02532 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NQIN





[R]

C/

Société ACCEL







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 12 Janvier 2021

RG : 18/00244











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE C



ARRÊT DU 08 JUIN 2023







APPELANTE :



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représentée par Me Nathalie ROSE, avocat postulant inscrit au barreau de LYON

et représentée par Me Coraly SADURNI-RAFFAT, avocat plaidant inscrit au barreau de SAINT-ETIENNE,



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numér...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 21/02532 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NQIN

[R]

C/

Société ACCEL

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT-ETIENNE

du 12 Janvier 2021

RG : 18/00244

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 08 JUIN 2023

APPELANTE :

[X] [R]

née le 11 Juin 1978 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représentée par Me Nathalie ROSE, avocat postulant inscrit au barreau de LYON

et représentée par Me Coraly SADURNI-RAFFAT, avocat plaidant inscrit au barreau de SAINT-ETIENNE,

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 69123/2/2021004743 du 01/04/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMÉE :

Société ACCEL

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Pascal GARCIA de la SELARL CAPSTAN RHONE-ALPES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 02 Mars 2023

Présidée par Vincent CASTELLI, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Nathalie PALLE, président

- Thierry GAUTHIER, conseiller

- Vincent CASTELLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 08 Juin 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Président et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [X] [R] (la salariée) a été embauchée à compter du 10 octobre 2007 par la société ACCEL (l'employeur, la société), dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel, en qualité d'agent d'entretien.

Le 27 août 2018, le médecin du travail a émis un avis d'inaptitude définitive de la salariée en ces termes : « Inapte au poste : personnel d'entretien. Inapte au poste, inapte à tout poste dans l'entreprise ou le groupe. Après échange avec l'employeur, inaptitude confirmée au poste de personnel d'entretien. Aucun aménagement, adaptation, transformation ou mutation du poste n'est possible. L'état de santé actuel fait obstacle à envisager ou suivre une formation, quelle qu'elle soit, en vue du maintien dans l'emploi au sein de l'entreprise ou du groupe. ['] L'état de santé de la salariée fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ['] ».

Par courrier du 21 septembre 2018, après convocation de la salariée à un entretien préalable à éventuel licenciement auquel elle ne s'est pas présentée, l'employeur a notifié à celle-ci son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Après entretien préalable du 27 février 2018, la salariée s'est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Le 15 mai 2018, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Saint-Etienne aux fins, notamment, de voir prononcer la nullité de son licenciement et voir condamner l'employeur à lui verser des sommes à titre de rappels de salaires et des sommes indemnitaires pour harcèlement moral et licenciement abusif.

Par jugement du 12 Janvier 2021, le conseil de prud'hommes de Saint-Etienne a :

Dit que la salariée succombe dans l'administration de la preuve du harcèlement moral ;

Débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

Dit que le licenciement de la salariée pour inaptitude et impossibilité de reclassement est fondé et repose sur une cause réelle et sérieuse ;

Débouté la salariée de sa demande de complément de salaire pour la période de septembre 2017 à janvier 2018, de sa demande de rappel de salaire pour la période du 23 au 25 août 2017 et pour la période du 22 au 28 septembre 2017 ;

Dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

Pris acte du désistement de la salariée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouté la société de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Débouté les parties de leurs demandes plus amples et contraires ;

Laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

La salariée a relevé appel du jugement le 8 avril 2021.

La salariée, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 8 juillet 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, demande à la cour d'infirmer le jugement en ses dispositions rejetant ses demandes et, statuant à nouveau de ces chefs, de :

Prononcer la nullité du licenciement sur le fondement de l'article L. 1152-1 du code du travail ;

Condamner la société à lui verser les sommes suivantes :

salaires : période du 22/09/17 au 28/09/17 et du 23/08/2017 au 25/09/2017 : 65 euros,

complément de salaire de 09/2017 à 01/2018 : 293,20 euros,

dommages-intérêts pour harcèlement moral : 5 000 euros,

dommages-intérêts pour licenciement abusif sans cause réelle et sérieuse sur le fondement des article L.1152-1, L.1152-3, L.1235-3-1 du code du travail : 780 euros,

Débouter la société de toutes ses demandes, fins et conclusions,

Condamner la société aux dépens au profit de Maître Nathalie ROSE, avocat sur son affirmation de droit et recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

La salariée fait valoir :

s'agissant des salaires demandés, que l'employeur a modifié les dates de fermeture de l'entreprise sans le lui indiquer ; que sur son bulletin de salaire de septembre 2017 il est déduit des périodes de congé sans solde qu'elle n'a pas sollicitées ;

s'agissant du complément de salaire demandé, que celui-ci lui est dû en vertu de l'article 53 de la convention collective de commerce de gros du 23 juin 1970, lequel ne mentionne aucune exclusion ;

s'agissant du harcèlement moral, qu'elle a adressé plusieurs courriers à l'employeur pour dénoncer le harcèlement moral qu'elle subissait ; que l'employeur ne lui a pas communiqué la date du déménagement de l'entreprise, ni l'adresse des nouveaux locaux ; qu'il a ignoré ses courriers et ne lui a fourni aucune consigne, la mettant ainsi à l'écart comme si elle ne faisait plus partie de l'entreprise ; qu'elle a fait l'objet de plusieurs arrêts de travail mentionnant comme motif : « crises d'angoisse » ; que la surveillance vidéo par l'employeur est avérée ; que le fait de ne pas acheter de produits ménagers démontre l'indifférence qui lui est portée, de même que le non-respect de la visite médicale après son accident de trajet.

L'employeur, aux termes de ses dernières conclusions notifiées le 29 septembre 2021, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris,

En conséquence, débouter la salariée de l'intégralité de ses demandes,

Débouter la salariée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la salariée à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamner la salariée aux dépens.

L'employeur fait valoir :

que la salariée ne rapporte pas la preuve des graves accusations qu'elle porte à l'encontre de la société ; qu'aucun des faits qu'elle invoque au soutien du harcèlement moral allégué n'est établi ;

que le licenciement pour inaptitude de la salariée et impossibilité de reclassement est fondé ; que celle-ci ne justifie nullement sa demande de dommages-intérêts pour licenciement abusif sans cause réelle et sérieuse ;

que les dates de congés de l'été 2017 ont été fixées dans le respect des dispositions légales ; qu'un rappel de salaire de 65 euros lui a déjà été versé sur la paie du mois de mai 2018 ;

que les dispositions de la convention collective ne sont pas applicables aux accidents de trajet ; qu'elle ne se trouvait pas sous la subordination de la société à la date de cet accident ; que subsidiairement, elle ne justifie pas du montant réclamé.

Par application des dispositions de l'article 455 alinéa 1er du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions susvisées des parties pour un plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 14 février 2023.

MOTIFS DE LA DECISION 

Sur le harcèlement moral, la cause du licenciement et les demandes indemnitaires

Aux termes de l'article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

En application de l'article L. 1154-1 du même code, dans sa rédaction issue de la loi n° 2018-1088 du 8 août 2016, lorsque le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement moral, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs, étrangers à tout harcèlement.

Il résulte de ces dispositions que, pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral au sens de l'article L. 1152-1 du code du travail. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, la salariée, reprenant dans ses écritures les termes de son courrier adressé à l'employeur le 10 avril 2018, invoque les éléments suivants :

mauvaises conditions de travail (pas de produits ménager fournis pour le nettoyage des locaux) : la salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

absence de communication (par exemple pour les dates de congés) sauf par le tableau : la salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

mise à l'écart : la salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

mépris affiché : la salariée produit le courrier de l'employeur du 6 septembre 2017, relatif à une difficulté concernant les dates de congés, et contenant la phrase : « Nous tenons à vous donner la définition du mot inclus : être contenu, compris dans quelque chose ». Ce fait est matériellement établi.

absence de réponse à ses questions et courriers : la salariée produit 7 courriers, datés du 29 septembre 2017 au 18 juin 2018, par lesquels elle interpelle et interroge la société sur plusieurs points la concernant, courriers adressés à la société postérieurement au courrier précité de cette dernière en date du 6 septembre 2017. La société ne produit pas d'autre courrier de réponse. Ce fait est matériellement établi.

déconsidération auprès de ses collèges de travail : la salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

absence de salutations reçues depuis plusieurs années : la salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

surveillance permanente par système de vidéo-surveillance reliée au téléphone portable de l'employeur : la salariée verse une note écrite d'information de la société, indiquant : « A compter du 20 février 2017, notre société ACCEL s'est dotée d'une surveillance vidéo. Merci de signer ce document pour prise de connaissance », ainsi que des SMS adressés à la salariée par le dirigeant, M. [M], horodatés du 29 avril 2017, qui indiquent : « Bonjour, j'ai vu que tu es arrivée au bureau. Bon travail » et « J'ai relier la caméra à l'ordinateur et à mon Iphone. Voilà pourquoi ». La société ne conteste pas ces éléments mais soutient avoir commis des erreurs de formulation et des maladresses et produit plusieurs attestations de salariés déclarant n'avoir jamais vu de système de vidéo-surveillance au sein de la société, ainsi que la facture, postérieure au licenciement de la salariée, de l'acquisition d'un système de surveillance vidéo, ce qui rend vraisemblable qu'elle en était précédemment dépourvue. La cour considère au vu de ces éléments que la réalité d'un système de vidéo-surveillance au cours de la relation de travail avec la salariée n'est pas établie.

menace de réduction de ses horaires de travail à une heure hebdomadaire en cas de refus de démissionner : La salariée n'offre pas de prouver ce fait, lequel n'est en conséquence pas établi.

Dans ses écritures, la salariée invoque également :

l'absence de communication, par l'employeur, de son identité à la médecine du travail : la salariée n'offre pas de prouver ce fait autrement que par un courrier qu'elle a elle-même rédigé, insuffisant à emporter la conviction. Ce fait n'est en conséquence pas établi.

l'absence de visite médicale de reprise après son accident de trajet : la salariée offre seulement de prouver ce fait par un courrier qu'elle a elle-même rédigé, insuffisant à emporter la conviction. Ce fait n'est en conséquence pas établi.

Enfin, la salariée produit des éléments médicaux, notamment sept arrêts de travail (discontinus) établis par le Dr [B] [E], médecin généraliste, à partir du 6 avril 2018, sur lesquels figurent les termes « crise d'angoisse », ainsi que des certificats du même praticien en date des 26 mars, 30 mars, 13 avril et 13 juillet 2018, lesquels mentionnent des crises d'angoisse et des troubles récurrents « semble-t-il liés à un problème professionnel avec l'un de ses employeurs » et : « La reprise du travail semble impossible en raison d'une nuisance grave de son état de santé (reprise dans la société Accel) ».

Il incombe à la cour d'examiner à ce stade si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, en prenant en compte les documents médicaux produits, permettent de présumer ou laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

La cour relève à cet égard que l'attitude de mépris reprochée par la salariée à l'employeur ne consiste qu'en une seule phrase, à l'occasion d'un unique courrier, dont la formulation ressortit davantage à de l'ironie ponctuelle, quoique déplacée, plutôt qu'à un comportement de harcèlement. Par ailleurs le fait, pour l'employeur, de s'abstenir de répondre à de nombreux courriers de la salariée, lesquels n'appelaient pas nécessairement de réponses nouvelles, ne peut en soi être assimilé à un agissement répréhensible de ce dernier.

Si le mal-être de la salariée, attesté par les éléments médicaux produits, n'est pas contestable, il n'est cependant pas démontré que celui-ci soit en lien objectif avec les faits ci-avant rappelés.

Dans ces conditions, la cour considère que même pris dans leur ensemble, les faits matériellement établis ne permettent pas de présumer ni ne laissent supposer l'existence d'un harcèlement moral.

La salariée ne présente pas d'autre moyen au soutien de ses demandes d'annulation du licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement abusif.

En conséquence, ces demandes, de même que la demande indemnitaire pour harcèlement moral, doivent être rejetées.

Le jugement est confirmé sur ces points.

Sur les demandes en paiement de salaires

Pour la période du 23 août au 25 août 2017

Selon l'article L. 3141-15 du code du travail, dans sa rédaction issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, applicable à la période considérée, un accord d'entreprise ou d'établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche fixe :

1° La période de prise des congés ;

2° L'ordre des départs pendant cette période ;

3° Les délais que doit respecter l'employeur s'il entend modifier l'ordre et les dates de départs.

L'article L.3141-16 du même code précise qu'à défaut de stipulation conventionnelle, l'employeur ne peut, sauf en cas de circonstances exceptionnelles, modifier l'ordre et les dates de départ moins d'un mois avant la date de départ prévue.

En l'espèce, la salariée justifie de ce que, par un courrier du 30 mai 2017, l'employeur l'a informée de ses dates de congés, du 31 juillet 2017 au 18 août 2017, ce que ne conteste pas ce dernier.

Toutefois l'employeur produit six attestations de salariés qui indiquent que de nouvelles dates de congés (à savoir du 7 août au 25 août 2017 inclus) ont été affichées dans l'entreprise « fin mai ou début juin 2017 ». La salariée n'offre pas de prouver, autrement que par conjectures ou par ses propres courriers, impropres à emporter la conviction, que l'affiche litigieuse aurait été apposée postérieurement au mois de juin 2017.

La salariée, qui a par ailleurs indiqué dans son courrier du 10 avril 2018 consulter le tableau d'affichage de l'entreprise, a ainsi été informée dans le délai légal de la modification des dates de congés de l'été 2017 au même titre que tous les salariés, de sorte que sa demande de rappel de salaire pour la période du 23 août au 25 août 2017 doit être rejetée.

Le jugement est confirmé sur ce point.

Pour la période du 22 septembre au 28 septembre 2017

En vertu des dispositions de l'article 1353 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver et, réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La société ne conteste pas que pendant la période du 22 septembre au 28 septembre 2017, la salariée était placée en arrêt maladie et que la retenue sur salaire réalisée pour cette même période, notée « congé sans solde » sur le bulletin de paie du mois de septembre 2017, doit être restituée à celle-ci.

La société soutient cependant avoir déjà procédé à cette restitution (tant pour la période du 23 août au 25 août 2017, précédemment examinée, que pour la période du 22 septembre au 28 septembre 2017) sur le bulletin de paie du mois de mai 2018, où apparaît la somme de 65 euros à titre de « rappel salaire horaire ».

Toutefois, comme le relève la salariée, rien n'établit que cette somme de 65 euros, versée huit mois plus tard par l'employeur, corresponde pour partie à la période du 22 septembre au 28 septembre 2017.

Dès lors, la société, qui échoue à justifier du paiement de la somme de 32,50 euros telle que réclamée par la salariée, sans contester autrement cette somme même à titre subsidiaire, sera condamnée à la verser à la salariée.

Le jugement est réformé sur ce point.

Sur la demande de complément de salaire pour la période de septembre 2017 à janvier 2018

Selon l'article 53 de la convention collective nationale de commerces de gros du 23 juin 1970, applicable en l'espèce :

« Le salarié ayant au moins 1 an d'ancienneté dans l'entreprise et dont le contrat se trouve suspendu par suite de maladie ou d'accident dûment justifié par un certificat médical, et contre-visite s'il y a lieu, touchera une indemnité déterminée dans les conditions suivantes:

1. Lors de chaque arrêt de travail, les délais d'indemnisation commenceront à courir :

- à compter du 1er jour d'absence, si celle-ci est consécutive à un accident de travail ou à une maladie professionnelle (à l'exclusion des accidents de trajet) ;

- à compter du 1er jour d'hospitalisation réelle ou à domicile ;

- à compter du 8e jour d'absence dans tous les autres cas.

Pour le calcul des indemnités dues au titre d'une période de paie, il sera tenu compte des indemnités déjà perçues par l'intéressé durant les 12 mois antérieurs, de telle sorte que, si plusieurs absences pour maladie ou accident ont été indemnisées au cours de ces douze mois, la durée totale d'indemnisation ne dépasse pas celle applicable en vertu des alinéas suivants.

2. Le montant de l'indemnité est calculé comme suit :

A partir de 1 an d'ancienneté :

- pendant 30 jours, 90 % de la rémunération brute que le salarié aurait gagnée s'il avait continué à travailler ;

- pendant les 30 jours suivants, les 2/3 de cette même rémunération.

Ces temps d'indemnisation seront augmentés de 10 jours par période entière de 5 ans d'ancienneté en sus du minimum de 1 année sans que chacun d'eux puisse dépasser 90 jours.

En outre, ils seront augmentés de 10 jours en cas d'absence consécutive à un accident du travail ou à une maladie professionnelle (à l'exclusion des accidents de trajet) dans la même limite de 90 jours.

3. Toutes les garanties mentionnées au présent article s'entendent déduction faite des allocations que l'intéressé perçoit de la sécurité sociale et des régimes complémentaires de prévoyance, mais en ne retenant, dans ce dernier cas, que la part des prestations résultant des versements de l'employeur. Lorsque les indemnités de la sécurité sociale sont réduites du fait, par exemple, de l'hospitalisation ou d'une sanction de la caisse pour non-respect de son règlement intérieur, elles sont réputées être servies intégralement. En tout état de cause, un salarié ne pourra percevoir, après application des garanties mentionnées ci-dessus, une indemnisation plus importante que le salaire qu'il aurait perçu s'il avait continué à travailler pendant la période de suspension de son contrat.

4. La rémunération à prendre en considération est celle correspondant à l'horaire pratiqué, pendant l'absence de l'intéressé, dans l'établissement ou partie d'établissement. Toutefois, si par suite de l'absence de l'intéressé, l'horaire du personnel restant au travail devait être augmenté, cette augmentation ne serait pas prise en considération pour la fixation de la rémunération.

L'ancienneté prise en compte pour la détermination du droit à l'indemnisation s'apprécie au premier jour de l'absence. »

La cour relève que ce texte ne conditionne pas la mise en 'uvre des garanties prévues à la survenance d'un accident du travail ou à une maladie professionnelle, de sorte que contrairement à ce qu'on retenu les premiers juges, il importe peu que la salariée se soit trouvée ou non sous la subordination d'un autre employeur au jour de l'accident de trajet, le 20 septembre 2017.

De même, contrairement à ce que soutient l'employeur, ce texte, qui se borne à reporter le point de départ de l'indemnisation en cas notamment d'accident de trajet, n'exclut pas pour autant ce type d'événement du champ des garanties.

En revanche, la cour constate que la salariée ne précise pas les indemnités qu'elle a perçues de la sécurité sociale ou des régimes complémentaires de prévoyance, ni a fortiori n'en justifie, alors que ces indemnités doivent être déduites des garanties en vertu des prévisions conventionnelles.

C'est donc à juste titre que l'employeur soutient que la salariée ne justifie pas de la somme qu'elle sollicite.

En conséquence, cette demande doit être rejetée.

Le jugement est confirmé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Compte tenu de l'issue du litige, le jugement est confirmé quant aux dépens et aux frais irrépétibles.

La société, succombant partiellement, est condamnée aux dépens d'appel, qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle et sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile est rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, rendu en dernier ressort,

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté la demande de Mme [X] [R] de sa demande de rappel de salaire pour la période du 22 au 28 septembre 2017 ;

Statuant à nouveau du chef infirmé,

CONDAMNE la société ACCEL à verser à Mme [X] [R] la somme de 32,50 euros à titre de rappel de salaire pour la période du 22 au 28 septembre 2017 ;

REJETTE la demande de la société ACCEL au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société ACCEL aux dépens d'appel qui seront recouvrés comme en matière d'aide juridictionnelle.

LE GREFFIER, LA PRESIDENTE,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale c
Numéro d'arrêt : 21/02532
Date de la décision : 08/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-08;21.02532 ?
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