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01/06/2023 | FRANCE | N°20/01072

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 01 juin 2023, 20/01072


N° RG 20/01072 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M3LQ









Décision du Tribunal de Commerce de Lyon du 30 janvier 2020



RG : 2018j1058







A.S.L. ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE VENDOME



C/



S.A.S. CITYA BOURGUIGNON PALLUAT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 01 Juin 2023







APPELANTE :



A.S.L. ASSOCIATION SYNDICALE LIBR

E VENDOME représenté par son syndic en exercice la société REGIE DES SITES TERTIAIRES ' BILLION RST, représentée par ses dirigeants légaux en exercice domiciliés ès qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Olivier DOLM...

N° RG 20/01072 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M3LQ

Décision du Tribunal de Commerce de Lyon du 30 janvier 2020

RG : 2018j1058

A.S.L. ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE VENDOME

C/

S.A.S. CITYA BOURGUIGNON PALLUAT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 01 Juin 2023

APPELANTE :

A.S.L. ASSOCIATION SYNDICALE LIBRE VENDOME représenté par son syndic en exercice la société REGIE DES SITES TERTIAIRES ' BILLION RST, représentée par ses dirigeants légaux en exercice domiciliés ès qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Olivier DOLMAZON de la SELAS LEGA-CITE, avocat au barreau de LYON, toque : 1030

INTIMEE :

S.A.S. CITYA BOURGUIGNON PALLUAT représentée par ses dirigeants légaux en exercice domiciliés ès qualité audit siège, venant aux droits de la société [L] [W] S.A.S ADMINISTRATEUR D'IMMEUBLE

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Daphné O'NEIL de la SELARL BOËGE AVOCATS, avocat au barreau de LYON, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Clément CARON de la SELARL BOËGE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE FORCEE :

S.A. MMA IARD prise en la personne de son représentant légal, en qualité d'assureur responsabilité civile professionnelle de la société [L] [W] SAS ADMINISTRATEUR D'IMMEUBLES

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Christophe SAVONNET de la SELARL HELIOS AVOCATS, avocat ay barreau de LYON, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Clément CARON de la SELARL BOËGE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 10 Mars 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 22 Mars 2023

Date de mise à disposition : 01 Juin 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La Sas [L] [W] Administrateur d'Immeuble (ci-après « la société [L] [W] ») était le syndic de l'Association syndicale Libre [Localité 6] (ci-après « l'ASL [Localité 6] »), laquelle gérait l'ensemble immobilier « Le [Localité 6] » et était composée de plusieurs syndicats de copropriétaires. Elle était présidée par la Sas Citya Bourguignon Palluat.

Entre le 20 janvier 2017 et le 5 juillet 2017, la société Citya Bourguignon Palluat a passé différents bons de commande auprès de la Sarl Sécuritas France pour des opérations de surveillance de l'ensemble immobilier.

Par courrier recommandé du 17 octobre 2017, la société Sécuritas France a mis en demeure la société Citya Bourguignon Palluat de lui régler diverses créances.

Lors de l'assemblée générale du 31 octobre 2017, l'ASL [Localité 6] a fait le choix d'un nouveau syndic.

Par ordonnance d'injonction de payer du 8 novembre 2017 n°2017IP04036, le président du tribunal de commerce de Lyon a condamné la société Citya Bourguignon Palluat à payer à la société Sécuritas les sommes de :

- 45.344,98 euros en principal au titre des différentes prestations de gardiennage, outre intérêts annuels au taux contractuel de 3 fois le taux légal à compter du 18 octobre 2017,

- 4.534,49 euros au titre de la clause pénale,

- 160 euros au titre de l'indemnisation forfaitaire de recouvrement,

- 150 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance d'injonction de payer du même jour n°2017IP04037, le président du tribunal de commerce de Lyon a condamné la société Citya Bourguignon Palluat à payer à la société Sécuritas les sommes de :

- 41.363,72 euros en principal au titre des différentes prestations de gardiennage, outre intérêts annuels au taux contractuel de 3 fois le taux légal à compter du 18 octobre 2017,

- 4.136,37 euros au titre de la clause pénale,

- 160 euros au titre de l'indemnisation forfaitaire de recouvrement,

- 150 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courriers recommandés du 16 novembre 2017, la société Citya Bourguignon Palluat a formé opposition à ces ordonnances, faisant valoir qu'elle avait passé commande pour le compte de l'ASL [Localité 6] et que seule cette dernière était tenue au règlement des sommes litigieuses. Ces affaires ont été enregistrées sous les numéros RG 2017J1946 et 2017J1947.

Par acte d'huissier du 10 avril 2018, la société Sécuritas France a assigné en intervention forcée l'ASL [Localité 6]. L'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 2018J00625. Par jugement du 25 avril 2018, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la jonction de ces trois affaires sous le numéro 2017J1946.

Par acte d'huissier du 26 juin 2018, l'ASL [Localité 6] a assigné en intervention forcée la société [L] [W] et son assureur, la société Allianz, faisant valoir que la société [L] [W] avait commis une faute dans le cadre de son mandat. L'affaire a été enregistrée sous le numéro RG 2018J1058. Par jugement du 11 juillet 2018, le tribunal de commerce a ordonné la jonction des affaires.

Par jugement contradictoire du 30 janvier 2020, le tribunal de commerce de Lyon a :

- ordonné la jonction des affaires enrôlées sous les n°2017J1946, 2017J1947, 2018J625 et 2018J1058,

- rejeté les exceptions de compétence soulevées par l'ASL [Localité 6], la société Citya Bourguignon Palluat, la société [L] [W] et la société Allianz,

- s'est déclaré compétent pour connaître du litige,

- jugé que la société [L] [W] n'a pas commis de faute dans la gestion du mandat qui lui a été confié par l'ASL [Localité 6] et l'a mise hors de cause,

- mis hors de cause la société Citya Bourguignon Palluat prise en sa qualité de dirigeante de la société [L] [W],

- mis hors de cause la société Allianz,

- condamné l'ASL [Localité 6] à payer à la société Sécuritas France la somme de 86.708,70 euros TTC, outre intérêt au taux de 3 fois le taux légal à compter du lendemain de la date d'échéance de chacune des factures, la somme de 8.670 euros au titre de la clause pénale et la somme de 320 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,

- rejeté comme infondées les autres prétentions, fins et conclusions des parties,

- condamné l'ASL [Localité 6] à payer à la société Sécuritas France une somme de 10.000 euros, à la société Citya Bourguignon Palluat une somme de 2.000 euros, à la société [L] [W] une somme de 5.000 euros et à la société Allianz une somme de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ,

- condamné l'ASL [Localité 6] au paiement des entiers dépens, comprenant ceux de la présente instance et ceux des deux procédures d'injonction de payer,

- ordonné l'exécution provisoire de la présente décision, nonobstant appel et sans caution.

L'ASL [Localité 6] a interjeté appel par acte du 10 février 2020 à l'encontre de la société Citya Bourguignon Palluat

Par acte du 20 février 2020, l'ASL [Localité 6] a assigné en intervention forcée devant la cour d'appel de Lyon la Sa MMA Iard en sa qualité d'assureur de la société [L] [W].

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 26 octobre 2020 fondées sur l'article 1192 du code civil et l'article 700 du code de procédure civile, l'ASL [Localité 6] demande à la cour de :

- juger que la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W], a été défaillante et a commis une faute dans l'exécution du mandat,

- juger qu'elle a failli à son devoir de conseil,

- juger que sa responsabilité contractuelle est engagée,

- condamner solidairement la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W] et son assureur la société MMA Iard à la relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre par le jugement déféré,

- au besoin, condamner solidairement la société Citya Bourguignon Palluat venant aux droits de la société [L] [W] et son assureur la société MMA Iard à lui payer les sommes versées au titre de l'exécution provisoire de première instance :

86.708,70 euros TTC, outre intérêt au taux de 3 fois le taux légal à compter du lendemain de l'échéance de chacune des factures, la somme de 8.670 euros au titre de la clause pénale et la somme de 320 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de recouvrement,

10.000 euros au titre de l'article 700 versé à la société Sécuritas,

2.000 euros au titre de l'article 700 versé à la société Citya Bourguignon Palluat,

5.000 euros au titre de l'article 700 versé à la société [L] [W],

1.500 euros au titre de l'article 700 versé à la société Allianz,

- ordonner la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1154 du code civil,

- débouter la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W] et son assureur la société MMA Iard de l'intégralité de leurs demandes,

- condamner solidairement la société Citya Bourguignon Palluat venant aux droits de la société [L] [W] et son assureur la société MMA Iard à lui payer la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner solidairement les mêmes aux entiers frais et dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 11 janvier 2021 fondées sur les articles 1192 et suivants du code civil et l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965, la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W], et la société MMA Iard demandent à la cour de :

- juger que la société [L] [W] n'a commis aucun manquement dans l'exécution de son mandat de syndic,

- juger que la société [L] [W] n'a pas failli à son devoir de conseil et d'information,

en conséquence,

- rejeter intégralement les demandes formées par l'ASL [Localité 6] à leur égard,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

- condamner l'ASL [Localité 6] au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner l'ASL [Localité 6] aux entiers dépens de l'instance.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 mars 2021, les débats étant fixés au 22 mars 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les fautes du mandataire

L'association syndicale libre [Localité 6] soutient que :

- le tribunal a exclu à tort la faute de gestion en retenant que le syndic avait pris en urgence des mesures conservatoires en raison de la vétusté du système incendie et de la survenance d'un premier sinistre alors que les prestations de la société Sécuritas n'étaient pas des travaux d'urgence mais une prestation de service gardiennage liée à une problématique du système incendie et qu'il appartenait au syndic de faire procéder à des travaux de reprise et non de l'engager dans un gouffre financier en commandant un gardiennage beaucoup plus coûteux que la réfection du système incendie,

- même si les prestations pouvaient être qualifiées de 'travaux d'urgence', le syndic devait l'en informer et convoquer une assemblée générale immédiatement, ce qui n'a pas été fait ; si la concluante a été avisée de la mise en place de deux agents Ssiap 24h/24, elle n'a pas été avisée du coût et n'a pas reçu le devis,

- le syndic devait se préoccuper du coût horaire journalier ou hebdomadaire de la prestation, ce qui n'a pas été fait alors qu'elle avait écrit que le devis était excessivement lourd,

- les prestations n'ont jamais été mises à l'ordre du jour d'une assemblée générale, il n'y a jamais eu de vote refusant les travaux, une assemblée générale a été annulée au dernier moment, seul un audit a été mis à l'ordre du jour avec un seul devis refusé faute de convocation de certains volumes (procès-verbal de carence), ce qui n'est pas fautif, le syndic confondant audit et véritable procédure d'appel d'offre et de suivi de travaux,

- le syndic a été averti par le conseil syndical du refus de paiement et a commis un excès de pouvoir en poursuivant la signature de bons de commande, alors qu'il n'avait pas agi depuis trois ans, ayant été défaillant dans l'entretien de l'immeuble,

- la société Citya Bourguignon Palluat a reconnu son erreur et annoncé une déclaration de sinistre, sans en justifier,

- multipliant les erreurs, le syndic avait imputé des charges sur le volume 3 ; c'est la raison pour laquelle, il n'y a eu aucune poursuite du syndicat des copropriétaires du volume 3,

- la situation n'aurait pas évolué depuis un an et les travaux n'auraient pas été réalisés, un audit sur les travaux commandés d'office a conclu que les prestations commandées n'étaient pas exigées réglementairement et comportait des prestations non conformes, les travaux n'ont pas été votés.

Par ailleurs, elle fait valoir que :

- le syndic est tenu de porter à la connaissance des copropriétaires ou de l'ASL toute nouvelle obligation mise à sa charge et il doit proposer des solutions susceptibles de permettre au mieux la réalisation et la mise en 'uvre des actions du syndicat et permettant le bon fonctionnement de la propriété, pour optimiser la gestion et d'éviter les risques pesant sur la copropriété ; il doit ainsi signaler aux copropriétaires des dégradations de tous types,

- le syndic n'a ni conseillé, ni informé les copropriétaires sur le coût dispendieux des services de gardiennages et il aurait dû alerter l'ASL sur la nécessité de réorganiser le service de gardiennage,

- les échanges entre le syndic et la société IPSI prouvent qu'il y a eu du retard dans l'intervention de la société IPSI laquelle avait d'ailleurs proposé une «remise en état fonctionnel du réseau d'alarme incendie» pour un montant de 5 191,27€ alors que ledit système n'était pas aux normes et qu'une solution intermédiaire telle que proposée par IPSI n'apparaissait pas envisageable.

La société Citya Bourguignon Palluat et son assureur rétorquent que :

- depuis le début de l'année 2016, le syndic a proposé aux membres de l'ASL le remplacement du système de sécurité incendie de l'ensemble immobilier et pour ce faire, a consulté plusieurs bureaux d'étude en vue de leur confier une mission de maîtrise d''uvre complète pour le changement de la centrale incendie ; les devis ont été soumis à l'Assemblée Générale de l'ASL, dès le 26 mai 2016 ; le syndic a même transmis un devis de travaux de remplacement de l'installation, établi sans étude préalable ou cahier des charges d'un bureau d'études, afin de permettre aux membres de l'ASL d'avoir une première estimation du coût de l'opération,

- l'ASL [Localité 6] a refusé de voter les travaux proposés par la société [L] [W] ; elle est seule responsable de cette prétendue situation de blocage qui perdurait, un devis n'a pas été validé en raison d'un désaccord sur le paiement des charges, notamment le syndicat des copropriétaires du volume 3 n'aurait pas réglé les appels de charges ; les travaux ont été systématiquement reportés pour un coût moindre, seul un budget de 7.000 euros a été voté pour un audit,

- le syndic a respecté les décisions d'assemblée générale en sollicitant un bureau d'études, pour une mission d'assistance à maître de l'ouvrage, mais l'ASL a soudainement remis en cause ses compétences et exigé un autre intervenant ; tout ceci a retardé les travaux,

- les devis ont été soumis à l' assemblée générale mais un problème sur la répartition des charges est intervenu, il a fallu convoquer d'autres volumes,

- le syndic avait le pouvoir d'engager les dépenses, nécessaires en raison de la défaillance du système incendie et faisant courir un risque imminent aux occupants, même si les travaux étaient commandés et si elle s'efforçait de réduire les délais d'intervention ; un départ de feu a eu lieu dans l'immeuble en janvier 2017 sans déclenchement des systèmes de sécurité, le syndic aurait engagé sa responsabilité à défaut,

- des factures Sécuritas ont été réglées mais la défaillance du syndicat de copropriété du volume 3 a contraint le syndic à suspendre les paiements ; un changement de syndic est ensuite intervenu,

- il était impossible de fournir un devis pour ces prestations sans savoir combien de temps le gardiennage serait nécessaire, sans connaître la date de fin des travaux de rénovation du système incendie, toutefois, l'information a été donnée à l'ASL sur l'intervention de Sécuritas et l'ASL n'a pas sollicité l'information, refusant d'emblée le paiement,

- il n'existe aucun excès de pouvoir, le syndic avait le devoir d'agir, il n'a reconnu aucune erreur,

- la conformité des travaux de rénovation a fait l'objet d'une autre instance.

Elles ajoutent que le caractère onéreux des factures n'est pas démontré, que le syndic avait bien commandé les travaux de rénovation du système incendie à la société IPSI afin de limiter les coûts occasionnés par le gardiennage, qu'il a justement pris l'initiative de louer une centrale incendie afin de bénéficier d'un système de sécurité incendie moins onéreux que le recours à des agents de gardiennage en permanence.

Sur ce,

Selon l'article 1992 du code civil, 'Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu'il commet dans sa gestion (...)'.

Cette responsabilité de nature contractuelle s'applique au syndic d'immeuble.

En l'espèce, il résulte des statuts de l'ASL que 'l'assemblée générale est réunie chaque année , à titre ordinaire. Elle peut être convoquée extraordinairement lorsque le syndic ...le juge nécessaire'. (article 9).

L'article 18 qui se rapporte aux pouvoirs du syndic précise que ce dernier :

- il administre, conserve et entretient tous les biens et éléments d'équipement dont lé propriété est transférée à l'association ou dont elle doit assumer l'entretien ou qu'elle créée...

- il engage le personnel nécessaire à la conservation, à l'entretien et à la police des biens et équipements ci-dessus visés, fixe les conditions de son emploi et le rémunère,

- il convoque les assemblées générales ordinaires et extraordinaires.....

- il fait effectuer tous travaux d'entretien courant ou nécessaires,

- il commande l'exécution de tous les travaux urgents, sauf à en référer aussitôt que possible à l'assemblée générale'.

Le tribunal de commerce a estimé que le syndic avait respecté l'article 18 des statuts en prenant des mesures conservatoires compte-tenu de la vétusté du système incendie et de la survenance d'un premier sinistre.

Le litige ne porte pas sur des travaux commandés par le syndic mais sur l'engagement de dépenses de surveillance palliant, selon lui, des travaux qui n'auraient pu être votés du fait de l' ASL.

Les factures objet du litige révèlent que le coût du gardiennage était particulièrement dispendieux, soit un total de 86.700 euros sur une durée inférieure à 6 mois entre le 20 janvier 2017 et le 5 juillet 2017 et il s'agissait d'une dépense manifestement engagée à perte, ne dispensant pas d'effectuer des travaux de réfection du système d'incendie. Le syndic a d'ailleurs reconnu ce coût dans des courriels et l'a qualifié d'excessivement lourd (pièce 12 intimées).

A supposer que les prestations de gardiennage puissent être qualifiées de 'travaux urgents' le syndic ne prouve pas avoir avisé l'ASL du coût et de la durée de la prestation (pas de communication d'un devis et donc de précisions sur le coût horaire de ces prestations) ni avoir convoqué une assemblée générale sur ce point d'autant qu'il avait connaissance du refus du conseil syndical (courrier du 12 janvier 2017 de la société Billon) ; l'engagement de cette dépense n'a jamais été mis à l'ordre du jour d'une assemblée générale. L'intimée ne peut par ailleurs soutenir sérieusement qu'un devis était impossible à dresser faute de connaissance de la durée de la prestation. Enfin, le Syndic ne peut échapper à son obligation d'information en reprochant à l'ASL de ne pas avoir sollicité elle-même l'information.

Or, par courrier, du 12 janvier 2017, la société Billon RST prenait acte de l'intervention des deux agents et déclarait refuser de régler les factures faute de traitement par le syndic du dossier depuis trois ans, ce qui était à l'origine de la situation. Elle invitait la société Citya [W] à une déclaration de sinistre.

Il ressort des productions que le syndic (p4 appelante) aurait seulement fait connaître par courriel de janvier 2017 (pas de date précise ni d'identité des destinataires) dans le cadre d'un compte rendu d'une réunion du 12 janvier 2017 avoir mis en place deux agents Ssiap 24h/24 'durant la période de dérangement du ssi' sur le site de [Localité 6], précisant que le 'volume 3" représenté par son syndic RST refusait la prise en charge de ces frais et les estimait à la charge du syndic dans la mesure où le problème était connu depuis 2014 et indiquant les référence avoir procédé à une déclaration de sinistre. Citya [W] précisait procéder à une déclaration de sinistre.

Il est certes incontestable que des travaux de rénovation du système incendie devaient être entrepris, ce qu'aucune des parties ne réfute.

Pour justifier qu'elle avait fait diligence pour l'exécution des travaux dans le cadre d'un programme de rénovation engagé début 2016 mais qu'elle s'est heurtée au refus de l'ASL de voter les travaux et de les régler (du volume 3), de sorte qu'elle n'était pas responsable de la situation de blocage qui perdurait, la société Citya Bourguignon Palluat se réfère aux procès-verbaux d'assemblée générale.

Ces derniers révèlent cependant :

- qu'aucune assemblée générale antérieure à 2016 n'évoque le problème puisque les procès-verbaux ne sont pas produits,

- qu'une assemblée générale devait se tenir le 26 mai 2016 mais qu'elle a été annulée le 23 mai 2016 par le syndic (pas de motifs),

- que pour l' assemblée générale de juillet 2016, il avait seulement été mis à l'ordre du jour un audit portant sur la centrale d'incendie et qu'il a été soumis à l'assemblée générale un devis d'une société Russier de 32.040 euros TTC un autre étant annoncé en attente) , qu'il a été alloué un budget maximum de 7.000 euros pour la réalisation de l'audit, que le devis Russier correspond en fait à une mission d'appel d'offre et de suivi des travaux, de sorte qu'aucune comparaison utile de devis ne pouvait intervenir faute d'identité des prestations, que la société BLT a émis ensuite un devis de 5.700 euros,

- qu'une assemblée générale extraordinaire a été fixée le 27 mars 2017 mais qu'un procès-verbal de carence a finalement été dressé ; que ce procès-verbal révèle que 'aucune des résolutions portées à l'ordre du jour ne sont soumises au vote...le cabinet Altros ingénierie présent lors de cette assemblée générale, ainsi que les syndics représentant les volumes convoqués (volume 2 et volume 3) estiment que le volume habitation et le volume parkings auraient dû être convoqués contrairement à ce qui a été annoncé en premier lieu. En effet, après analyse de la situation, Altros ingénierie ainsi que les syndics représentant les volumes convoqués...estiment que compte tenu de la complexité de l'ensemble immobilier,.....tous les volumes doivent participer au vote et donc au choix du prestataire qui réalisera l'assistance à maîtrise d'ouvrage et la réalisation d'études de conception en vue du remplacement du SSI de l'immeuble' ; qu'il avait par ailleurs été demandé au syndic de soumettre un autre devis au vote.

Il n'est par ailleurs justifié d'aucune alerte du syndic à l'adresse des membres de l'association concernant le problème de sécurité incendie avant 2016 ni d'aucune diligence particulière et les procès-verbaux ne révèlent pas l'urgence des travaux à réaliser. Or, si la société intimée est défaillante à donner des éléments techniques sur l'état du service de sécurité incendie lors de la mise en place des agents, il n'est pas contesté que le problème n'était pas récent (au moins depuis 2014). Force est donc de constater que la société Citya Bourguignon a réagi très tardivement pour remédier au problème de la sécurité incendie et ce, de manière inadaptée (pas de mesures conservatoires ou de travaux urgents, assemblée générale annulée, devis ne correspondant pas à une mission d'audit et ne permettant aucune comparaison utile, assemblée générale convoquée avec les mauvais volumes et ne permettant pas un vote d'où un procès-verbal de carence, engagement à perte dans des dépenses très onéreuses). Elle ne justifie par ailleurs d'aucun refus de principe de vote des travaux de réfection du système incendie par les copropriétaires.

Il résulte de tout de qui précède que l'association Citya Bourguignon Palluat a commis plusieurs manquements à l'égard de l'ASL, qu'elle a ainsi engagé cette dernière, manquant également à son devoir de conseil, dans des dépenses onéreuses palliant ses carences avérées dans la gestion de la réfection du système incendie et qu'elle n'a pas respecté son obligation d'en référer à l'assemblée générale comme prévu dans les statuts.

Il en découle que les factures litigieuses mises à la charge de l'ASL n'ont pour origine que les fautes du syndic de sorte que ce dernier doit en supporter intégralement la charge.

Le jugement est en conséquence infirmé et les intimées condamnée in solidum à garantie l'ASL des condamnations mises à sa charge par le jugement de première instance. Il est fait droit à la demande de capitalisation des intérêts qui est de droit.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les intimées qui succombent au principal sur leurs prétentions supporteront les dépens de première instance et d'appel et verseront à l'association syndicale libre [Localité 6] la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Infirme le jugement querellé,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit que la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W] a commis des fautes dans l'exécution du mandat et engagé sa responsabilité contractuelle.

Condamne in solidum la société Citya Bourguignon Palluat, venant aux droits de la société [L] [W], et son assureur la société MMA Iard à garantir l'association syndicale libre [Localité 6] de toutes les condamnations prononcées à l'encontre de cette dernière par le jugement déféré.

Ordonne la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

Condamne in solidum la société Citya Bourguignon Palluat venant aux droits de la société [L] [W] et son assureur la société MMA Iard à payer à l'association syndicale libre [Localité 6] la somme de 8.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/01072
Date de la décision : 01/06/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-06-01;20.01072 ?
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