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25/05/2023 | FRANCE | N°19/05132

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 25 mai 2023, 19/05132


N° RG 19/05132 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MP3P









Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond

du 05 juin 2019



RG : 2017j442





SAS GROUPE EPI



C/



[W]

[B]

S.C. A DEVELOPPEMENT

S.C. L DEVELOPPEMENT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 25 mai 2023







APPELANTE :



SAS GROUPE EPI repré

sentée par ses représentants légaux en

exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée et plaidant par Me Virginie MARRO de la SELARL VM AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1439



INTIMES :



M. [T] [P] [W]

né...

N° RG 19/05132 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MP3P

Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond

du 05 juin 2019

RG : 2017j442

SAS GROUPE EPI

C/

[W]

[B]

S.C. A DEVELOPPEMENT

S.C. L DEVELOPPEMENT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 25 mai 2023

APPELANTE :

SAS GROUPE EPI représentée par ses représentants légaux en

exercice domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée et plaidant par Me Virginie MARRO de la SELARL VM AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1439

INTIMES :

M. [T] [P] [W]

né le 15 Juillet 1972 à [Localité 5]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Mme [I] [B] épouse [W]

née le 24 Août 1974 à [Localité 6]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Société Civile A DEVELOPPEMENT

[Adresse 4]

[Localité 2]

Société Civile L DEVELOPPEMENT

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentés par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et plaidant par Me Xavier VAHRAMIAN, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 19 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 12 Janvier 2023

Date de mise à disposition : 25 mai 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

M. et Mme [W] ont créé entre 2002 et 2006 trois sociétés spécialisées dans le nettoyage industriel et général, soit les sociétés ALB Services (nettoyage industriel), l'Eurl PHS qui exploite une activité de nettoyage industriel et la société Killian Services qui exploite une activité de nettoyage général.

Par acte sous seing privé du 28 décembre 2011, M. [W] et Mme [B] épouse [W] (ci-après 'les époux [W]') ont cédé aux époux [C], sous conditions suspensives à réaliser au plus tard le 31 mars 2012, l'intégralité des parts sociales de la Sarl ALB Services (ci-après 'la société ALB'), de l'Eurl Partenaires Hygiène Services (ci-après 'la société PHS') et de la Sarl Killian Services (ci-après 'la société Killian') pour un prix global de 1.100.000 euros révisable à la baisse en fonction des situations comptables des sociétés au 31 mars 2012.

Aux fins de cette opération, les époux [W] ont constitué deux holdings, les sociétés civiles A Développement et L Développement et les époux [C] ont constitué la Sas Groupe EPI.

Par acte authentique du 30 mars 2012, la cession de l'intégralité des parts des trois sociétés ALB, Killian et PHS a été formalisée entre, d'une part, les sociétés A Développement et L Développement et les époux [W], cédants, et d'autre part, la société Groupe EPI, cessionnaire, au prix de 1.100.000 euros révisable dans les conditions prévues à la convention du 28 décembre 2011.

Après avoir pris possession des archives et de la documentation administrative et commerciale des sociétés, la société Groupe EPI a estimé que plusieurs contrats censés constituer le fonds de commerce des sociétés ALB, Killian et PHS avaient été résiliés avant la cession et a contesté le prix d'acquisition pour le rapporter à 976.160,51 euros.

Les cédants ont contesté cette baisse du prix.

Par ordonnance de référé du 15 novembre 2012, le tribunal de commerce de Lyon a désigné un expert afin qu'il arrête les comptes des sociétés cédées et fixe le prix définitif de cession.

Le 3 février 2014, l'expert a déposé son rapport aux termes duquel il a proposé de fixer le prix de cession à la somme de 1.001.554 euros.

La société Groupe EPI a fait valoir un défaut d'information sur la période dite intermédiaire des contrats résiliés entre la date de signature de la convention sous conditions suspensives du 28 novembre 2011 et sa réitération du 30 mars 2012.

Par acte d'huissier du 27 février 2017, la société Groupe EPI a assigné les cédants devant le tribunal de commerce de Lyon en se prévalant de manquements à une obligation de sincérité et à un engagement de bonne gestion, de manquement à une obligation d'information aux fins d'obtenir paiement de sommes au titre de la marge perdue la première année, d'une perte de chance de percevoir une marge commerciale la seconde année d'exploitation et en paiement de dommages intérêts pour mauvaise foi contractuelle.

Par jugement contradictoire du 5 juin 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté la société Groupe EPI de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Groupe EPI à payer à M. [W], Mme [W], la société A Développement et la société L Développement la somme de 3.000 euros chacun au titre des dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamné la société Groupe EPI à payer à M. [W], Mme [W], la société A Développement et la société L Développement la somme de 2.500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- et imputé les entiers dépens à la société Groupe EPI.

La société Groupe EPI a interjeté appel par acte du 18 juillet 2019.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 20 novembre 2020 fondées sur les articles 1134 et 1147 anciens du code civil, la société Groupe EPI demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau,

- juger que les consorts [W] et les sociétés L Développement et A Développement ont souscrit à son égard une obligation de sincérité et un engagement de bonne gestion jusqu'à la date de réalisation de la vente au 30 mars 2012,

- juger que les consorts [W] et les sociétés L Développement et A Développement ont par ailleurs souscrit une obligation d'information à son égard pour tous évènements qui pourraient avoir un effet significativement défavorable sur la situation des sociétés cédées,

- juger qu'en ayant volontairement omis de lui communiquer l'existence de résiliations de contrats clients et ainsi la baisse significative de chiffre d'affaires, les consorts [W] et les sociétés L Développement et A Développement ont délibérément manqué à leurs obligations contractuelles de sincérité et d'information,

- condamner en conséquence solidairement les consorts [W] et les sociétés L Développement et A Développement à lui verser la somme de 92.327 euros HT au titre de la marge perdue la première année,

- condamner en outre solidairement les consorts [W] et les sociétés L Développement et A Développement à lui verser la somme de 92.327 euros HT au titre de la perte de chance de percevoir une marge commerciale une seconde année d'exploitation,

- condamner les mêmes solidairement à lui verser la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts supplémentaires pour mauvaise foi contractuelle,

- condamner les mêmes solidairement à lui verser la somme de 15.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile

- et au paiement des entiers dépens,

- rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires des intimés.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 23 novembre 2020 fondées sur les 1134, 1147 et 1382 anciens du code civil, les époux [W] et les sociétés A Développement et L Développement demandent à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la société Groupe EPI de l'ensemble de ses demandes et a fait droit à leur demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- rejeter l'ensemble des demandes de la société Groupe EPI,

à titre d'appel incident,

- réformer le jugement déféré sur le quantum des dommages-intérêts alloués,

- condamner la société Groupe EPI à leur régler chacun une somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

- condamner la société Groupe EPI à leur régler chacun une somme de 7.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Groupe EPI aux entiers dépens dont distraction au profit de la SCP Aguiraud Nouvellet.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 février 2021, les débats étant fixés au 12 janvier 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige n'est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est antérieur au 1er octobre 2016.

Sur l'obligation d'information incombant aux cédants

La société Groupe EPI expose :

- que les déclarations du cédant engagent sa responsabilité si elles se révèlent inexactes et que que la Cour de cassation a consacré le principe d'une obligation de sincérité dans les déclarations du cédant (Cass. com. 7 avril 2009),

- qu'aux termes de la convention du 28 décembre 2011, les cédants ont déclaré avoir géré 'en bon père de famille' les sociétés et se sont engagés à informer le cessionnaire des évènements qui pourraient avoir un effet défavorable sur les sociétés cédées,

- que les cédants ne l'ont pas informée de la résiliation de nombreux contrats clients (22 selon rapport Cogeparc) au cours de la période couverte par cette obligation d'information,

- qu'il ressort du rapport établi par son expert comptable (le cabinet Cogeparc) qu'en raison de ces résiliations de contrats, les sociétés cédées ont perdu un chiffre d'affaires de :

111.754 euros HT pour la société ALB

288.845 euros HT pour la société Killian

34.860 euros HT pour la société PHS

- que l'argument des cédants selon lequel ils ont communiqué une situation financière et comptable au 31 octobre 2011 n'est pas pertinent puisque l'obligation d'information devait courir jusqu'au 30 mars 2012 et qu'une telle synthèse de comptabilité intermédiaire ne détaille pas les contrats,

- que l'expertise réalisée par M. [A] n'a pas pris en considération les résiliations de contrats et que c'est donc à tort que les cédants affirment que l'affaire aurait 'déjà été jugée',

- que la réalisation d'audits pré-acquisition n'a pas permis d'identifier l'existence de ces résiliations de contrats et que les échanges d'informations entre les parties avant la cession n'ont jamais concerné la résiliation des contrats,

- que les grands livres des sociétés ALB et PHS ne lui ont pas été transmis par les cédants avant la cession du 30 mars 2012,

- que les cédants ont manqué à leur obligation d'information telle que stipulée en page 20 du contrat de cession du 28 décembre 2011 (informer le cessionnaire des évènements qui pourraient avoir un effet défavorable sur la situation des sociétés), quand bien même de nouveaux contrats auraient permis de limiter la baisse du chiffre d'affaires.

En réponse, les époux [W] et les sociétés A et L Développement exposent :

- que la convention du 28 décembre 2011 prévoyait expressément, à la clause 'prix', les conditions de révision du prix de cession à la baisse (page 14 de la convention) et la désignation d'un expert en cas de désaccord des parties (page 18 de la convention),

- que le désaccord survenu entre eux et la société Groupe EPI sur le prix de cession a donné lieu à un rapport d'expertise du 3 février 2014 fixant le prix de cession à la somme de 1.001.554 euros, qu'ils ont intégralement réglé à l'appelante la somme correspondant à cette baisse du prix,

- que l'affaire a donc déjà été jugée,

- que contrairement à ce qu'affirme la société Groupe EPI, l'expert a tenu compte des résiliations de contrats,

- que l'arrêt de la Cour de cassation du 7 avril 2009 invoqué par la société Groupe EPI n'est pas applicable à l'espèce (notamment en ce qu'il concerne la perte d'un client important),

- qu'en l'espèce les clients perdus n'étaient pas significatifs et ont en outre été 'compensés' par les nombreux clients gagnés parallèlement,

- que l'appelante ne prétend pas qu'elle n'aurait pas acquis les titres cédés si elle avait su que ces sociétés avaient perdu quelques clients,

- que l'appelante a été indemnisée par le mécanisme contractuel de révision du prix qui a fait l'objet de l'expertise judiciaire, qu'en tout état de cause une cession de parts ne garantit pas un chiffre d'affaires futur,

- que les acquéreurs sont seuls responsables du chiffre d'affaires réalisé postérieurement à la cession par les sociétés cédées,

- qu'en l'occurrence le chiffre d'affaires cumulé des sociétés cédées est en 2013 de 2.282.733 euros ce qui est conforme au chiffre arrêté au jour de la cession soit 2.333.150 euros

- que le chiffre d'affaires est donc resté constant et qu'il est indifférent que certains clients aient été perdus et d'autres gagnés, les cédants n'ayant pas garanti une liste de clients,

- qu'un audit complet a été réalisé au mois de décembre 2011 avant la signature de la convention sous conditions suspensives,

- qu'il ressort des pièces versées aux débats que M. [W] avait annoncé en septembre 2011 un chiffre d'affaires consolidé de 2,4 millions d'euros, ce qui est quasiment identique à l'évaluation de l'expert (2,33 millions d'euros),

- qu'il n'y a donc aucun mensonge de leur part en ce qui concerne le chiffre d'affaires,

- que par ailleurs ils ont bien communiqué aux acquéreurs les documents comptables (et ce pour toute la période intermédiaire courant jusqu'au 31 mars 2012) et ont donc respecté leur obligation d'information,

- que les acquéreurs ont également été informés au 31 octobre 2011 (date de l'arrêté des comptes) que certains contrats avaient été résiliés,

- qu'il n'y a donc aucun manquement de leur part à l'obligation d'information,

- que le rapport du cabinet d'expertise-comptable Cogeparc comporte des erreurs et ne prend pas en compte les contrats nouveaux gagnés par la société durant la période intermédiaire,

- qu'aucune des résiliations de contrats n'a eu d'effet 'significativement défavorable' sur la situation des sociétés, qu'en outre des 'gains de clients' sont venus compenser les pertes de clients et que l'expert a d'ailleurs constaté qu'il n'y avait pas d''hémorragie de la clientèle',

- que l'appelante a attendu près de 5 ans après la cession pour engager son action quelques jours avant la prescription.

Sur ce,

Il résulte de l'article 1134 ancien du code civil que 'Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi'.

Selon l'article 1147 ancien du code civil, 'Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.'

La cour relève de manière liminaire que la convention prévoyait expressément au paragraphe 'prix' les conditions dans lesquelles le prix pouvait faire l'objet d'une diminution selon différentes formules de révision expressément déterminées (quatre conditions), que suite à la fixation d'un prix définitif de cession par l'expert, tenant compte de la diminution du chiffre d'affaires, la diminution de prix retenue a été intégralement réglée par les époux [W], ce qui n'est pas contesté.

La convention liant les parties stipulait également dans les 'obligations du cédant' que les gérants ont déclaré avoir géré les sociétés en bon père de famille depuis le 1er septembre 2011 pour PHS, depuis le 31 mars 2011 pour ALB et depuis le 31 décembre 2010 pour Killian et ils s'engageaient à une gestion normale jusqu'à la date de réalisation, soit le 31 mars 2012 (p19). Il s'engageaient également à informer le cessionnaire des évènements qui surviendraient ou dont l'annonce de la survenance serait faite et qui pourraient avoir un effet significativement défavorable sur la situation des sociétés, dans la mesure où ils auraient eu connaissance. Ils déclaraient qu'aucun événement de cette nature n'était intervenu depuis la date de clôture du dernier exercice ni l'annonce d'un tel événement.

Aucune liste de clients n'était annexée à l'acte de sorte qu'aucun client particulier ne représentait une valeur contractuelle spécifique aux termes de la convention.

Il est cependant nécessaire, au vu des clauses sus évoquées de déterminer si des informations portant sur des résiliations de clients et pouvant avoir un effet significativement défavorable ont été omises par les cédants et ont causé un préjudice indemnisable au cessionnaire, étant relevé qu'une telle action fondée sur la responsabilité contractuelle apparaît recevable en dehors de l'application de la clause contractuelle se rapportant aux modalités de révision du prix. L'affaire ne peut donc être considérée comme jugée comme l'affirment à tort les intimés.

La société appelante appuie ses prétentions sur un rapport amiable d'une société Cogeparc expliquant dans un 'compte rendu de mission' dressé le 26 juillet 2016 qu'elle avait reçu mission de la société Groupe EPI de déterminer le montant du préjudice concernant la perte des contrats avant la réitération de la cession au 30 mars 2012, la base du préjudice correspondant aux contrats existant à la clôture des derniers comptes transmis avant le 30 mars 2012 et résiliés avant le 1er avril 2012 et le préjudice correspondant à la perte du chiffre d'affaires sur ces clients et égale au montant qui aurait été facturé jusqu'à la date d'une éventuelle résiliation du contrat par le client faite après le 1er avril 2012. Elle a relevé les contrats perdus. Elle a conclu à des pertes de chiffres d'affaires et donc à des pertes de marge pour un montant cumulé de 92.327 euros pour les trois sociétés.

Ce rapport ne fait cependant mention que de la perte de clients en se référant aux dernières factures et aux mentions portées dans le grand livre comptable (22 clients mentionnés) et il ne met pas en parallèle le gain de clients. Ce rapport et est donc manifestation incomplet sur les conséquences défavorables de cette perte.

L'appelante prétend également que l'expert [A] n'a pour sa part pas tenu compte des résiliations de contrat. Ce dernier, en page 61 du rapport et en réponse aux dires, a indiqué qu'il n'avait pas été constaté d'hémorragie de clientèle et qu'il n'avait pas été apporté la preuve d'une fraude généralisée et caractérisée, l'expert soulignant avoir demandé vainement des éléments permettant d'apporter la preuve d'une éventuelle perte de chiffre d'affaires sur les mois suivants le 31 mars 2012. Il a également précisé, en réponse à un dire lui reprochant de ne pas avoir tenu compte d'éléments postérieurs à la date de clôture, indiqué avoir retenu pour établir les comptes de référence, choisi de tenir compte des événements postérieurs à la clôture et pouvant avoir une influence au 31 mars 2012 jusqu'au 30 septembre 2012.

L'appelante se prévaut enfin d'une décision rendue par la Cour de cassation le 7 avril 2009 mais cette référence n'est pas nécessairement applicable au présent litige, s'agissant d'un client très important qui avait été perdu et alors qu'aucun mécanisme de correction du prix n'avait été stipulé par ailleurs.

Ainsi que justement relevé par les intimés, des résiliations de contrats ont été nécessairement prises en compte lors de l'établissement du chiffre d'affaires. Le chiffre d'affaires cible devait s'élever à 2.550.000 euros mais ne s'est élevé qu'à la somme de 2.333.150 euros au 31 mars 2012, ce qui a entraîné une diminution du prix de cession. Le chiffre d'affaires s'est maintenu par la suite.

Il ne résulte pas des productions que les intimés aient spécifiquement avisé l'appelante de pertes de divers clients, les messages échangés ne le révélant pas, même si dans le cadre de l'audit et de communication de pièces, l'appelante était à même d'identifier un certain nombre de départs.

Les éléments du dossier révèlent cependant que la clientèle se révèle fluctuante en la matière, avec une alternance de perte de marchés et gains d'autres marchés ayant d'ailleurs des conséquences sur des personnels transférés compte tenu des règles de droit social applicables en la matière.

L'appelante ne conteste pas de manière argumentée à ce sujet les éléments rapportés par les appelants sur le gain de divers clients énumérés en pièces 29 à 32 sur la même période.

Il s'opère ainsi régulièrement des compensations entre clients perdus et gagnés d'où un maintien de la clientèle et sans que le chiffre d'affaires n'en soit notablement affecté.

Il ne découle donc pas de ces éléments que les intimés auraient manqué à leur devoir d'information en ne révélant pas des renseignements ayant un effet spécifiquement défavorable sur la situation des sociétés dont les parts ont été cédées.

Le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté les prétentions de la société groupe Epi.

Sur la demande de dommages intérêts des intimés pour procédure abusive

Les époux [W] et les sociétés A et L Développement exposent :

- que c'est à juste titre que le tribunal a condamné la société Groupe EPI à des dommages intérêts pour procédure abusive,

- que la société Groupe EPI a intenté la présente procédure 8 ans après la cession et sans prendre en compte les nouveaux clients générés pendant la période intermédiaire,

- que son préjudice pour abus du droit d'agir doit être actualisé à la somme de 15.000 euros chacun.

En réponse, la société Groupe EPI soutient :

- que les procédures qu'elle a diligentées précédemment lui ont toutes donné raison en raison des manquements des cédants à leurs obligations,

- que c'est donc à tort que le tribunal a retenu qu'elle avait agi de manière abusive contre les cédants.

En, droit, l'exercice d'une action en justice peut dégénérer en un abus du droit d'agir, lequel suppose la démonstration d'une faute.

En l'espèce, les intimés ne démontrent pas en quoi l'exercice par la société appelante de son action en responsabilité contractuelle présente un caractère fautif ouvrant droit à des dommages intérêts pour préjudice distinct

Le jugement est infirmé de ce chef et les intimés déboutés de leur demande en paiement de dommages intérêts pour procédure abusive.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société appelante qui succombe sur ses prétentions principales supportera les dépens d'appel.

Il est en outre équitable de la condamner à payer à chacun des quatre intimés la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement querellé sauf en ce qu'il a condamné la société Groupe EPI à payer à M. [W], Mme [W], la société A Développement et la société L Développement la somme de 3.000 euros chacun au titre des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Déboute M. [T] [W], Mme [I] [B] et les sociétés L Développement et A Développement de leurs demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la société groupe EPI aux dépens d'appel, ces derniers avec droit de recouvrement.

Condamne la société Groupe EPI à payer aux époux [T] [W] et [I] [B] et aux sociétés L Développement et A Développement chacun la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/05132
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;19.05132 ?
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