N° RG 23/03926 - N° Portalis DBVX-V-B7H-O7BE
Nom du ressortissant :
[L] [H]
[H]
C/
PREFET DU RHONE
COUR D'APPEL DE LYON
JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT
ORDONNANCE DU 15 MAI 2023
statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers
Nous, Dorothée FREALLE, conseiller à la cour d'appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 02 janvier 2023 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d'entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d'asile,
Assistée de Charlotte COMBAL, greffier,
En l'absence du ministère public,
En audience publique du 15 Mai 2023 dans la procédure suivie entre :
APPELANT :
M. [L] [H]
né le 01 Février 1995 à [Localité 4]
de nationalité Guineénne
Actuellement retenu [Adresse 3]
Ayant pour conseil Maître Marie GUILLAUME, avocat au barreau de LYON, commis d'office
ET
INTIME :
M. LE PREFET DU RHONE
[Adresse 5]
[Localité 2]
non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON, pour la SELARL SERFATY VENUTTI CAMACHO & CORDIER, avocats au barreau de l'AIN,
Avons mis l'affaire en délibéré au 15 Mai 2023 à 17 heures 45 et à cette date et heure prononcé l'ordonnance dont la teneur suit :
FAITS ET PROCÉDURE
Par arrêt de la chambre des appels correctionnels de Grenoble en date du 15 novembre 2019 rectifié par ordonnance N°20/00195 du 03 février 2020, [L] [H] a été condamné à une interdiction du territoire national d'une durée de 5 ans.
Une obligation de quitter le territoire français avec délai de départ volontaire de 30 jours et assortie d'une interdiction de retour pour une durée de 24 mois a par ailleurs été prise à son encontre le 26 août 2022 et notifiée par voie postale le 02 septembre 2022.
[L] [H] a été interpellé le 11 mai 2023 pour des faits de maintien sur le territoire français malgré interdiction du territoire national.
Par décision en date du 11 mai 2023, l'autorité administrative a ordonné le placement de [L] [H] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire à compter du 11 mai 2023.
Suivant requête du 12 mai 2023, reçue le 12 mai 2023 à 15 heures 26, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-huit jours.
Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 13 mai 2023 à 17 heures 18 a :
' rejeté les moyens d'irrecevabilité,
' déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative,
' déclaré régulière la procédure diligentée à l'encontre de [L] [H],
' ordonné la prolongation de la rétention de [L] [H] dans les locaux du centre de rétention administrative de [Localité 2] pour une durée de vingt-huit jours.
[L] [H] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le 14 mai 2023 à 16 heures 29.
Dans ses conclusions le conseil d'[L] [H] a demandé l'infirmation de l'ordonnance déférée, de déclarer mal fondée la requête présentée par l'autorité préfectorale et d'ordonner sa remise en liberté.
Il fait valoir que :
- la décision de placement en rétention administrative est irrégulière, de même que la requête préfectorale aux fins de prolongation de la mesure de rétention est irrecevable faute pour la préfecture de produire le document de suivi de la Poste permettant de démontrer la régularité de la notification de la décision faisant à [L] [H] obligation de quitter le territoire français,
- la décision de placement en rétention n'est ni nécessaire, ni proportionnée,
- le contrôle d'identité de M.[H] est dépourvu de base légale en ce qu'il est fondé sur les dispositions de l'article 78-2 alinéa 9 du code de procédure pénale qui ne sont plus applicables au cas d'espèce dès lors que la France a décidé de rétablir les contrôles aux frontières intérieures ;
-la palpation de sécurité réalisée est illégale, celle-ci n'étant ni motivée, ni justifiée.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience du 15 mai 2023 à 10 heures 30.
[L] [H] a comparu, assisté de son avocat.
Le conseil de [L] [H] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d'appel.
Le préfet du Rhône, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l'ordonnance déférée.
[L] [H] a eu la parole en dernier.
MOTIVATION
Sur la recevabilité de l'appel
Attendu que l'appel de [L] [H] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) est déclaré recevable ;
Sur le moyen fondé sur l'irrégularité du contrôle d'identité de [L] [H]
Attendu qu'il résulte des pièces de la procédure que le contrôle d'identité à l'origine de la mesure de rétention de [L] [H] a été effectué en gare de Lyon-Perrache le 11 mai 2023 sur le fondement des dispositions de l'article 78-2 alinéa 9 du code de procédure pénale ;
Attendu que le conseil de [L] [H] soutient que ce texte n'était pas applicable au contrôle d'identité subi par ce dernier en raison du rétablissement des contrôles aux frontières intérieures françaises, ce que conteste le conseil de la Préfecture du Rhône ;
Attendu que pour écarter ce moyen, le premier juge a justement retenu que des dispositions de l'article 8 du réglement communautaire N°2016/399 sur le contrôle aux fontières extérieures de l'Union pas plus que celles de l'article 32 prévoyant la possibilité d'un rétablissement des contrôles aux frontières intérieures n'emportent la 'neutralisation' ou la suspension des effets de l'article 78-2 alinéa 9 du code de procédure pénale précité dont les dispositions légales demeurent effectives malgré la décision politique de rétablissement du contrôle aux frontières intérieures.
Que la lecture de la procédure n'objective pas qu'une quelconque irrégularité affecte le contrôle d'identité réalisé concernant [L] [H] au regard des dispositions de l'article 78-2 alinéa 9 du code de procédure pénale.
Qu'en conséquence, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté ce moyen.
Sur le moyen tiré de l'irrégularité de la mesure de palpation de sécurité
Attendu qu'il est constant qu'après avoir été contrôlé puis interpellé pour maintien irrégulier sur le territoire français malgré interdiction judiciaire du territoire, [L] [H] a fait l'objet d'une palpation de sécurité qui n'a amené la découverte d'aucun objet susceptible de s'avérer dangereux pour sa sécurité ou celle d'autrui ;
Que le conseil de M.[H] conteste le recours à la palpation de sécurité concernant M.[H], lequel ne serait ni motivé, ni justifié dès lors que celui-ci s'est montré particulièrement coopérant toute la durée de la procédure de contrôle.
Qu'il résulte cependant des dispositions de l'article R.434-16 du Code de la Sécurité Intérieure que la palpation de sécurité n'est pas une mesure de coertition mais exclusivement une mesure de sûreté dont les mentions du procès-verbal indiquent qu'elle a été pratiquée conformément à sa finalité ; qu'elle est laissée à l'appréciation du policier qui n'a pas à la motiver par écrit ; qu'en état de cause, l'appelant ne démontre aucune atteinte concrète à ses droits qui aurait résulté d'une éventuelle irrégularité de sa palpation de sécurité.
Qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a écarté ce moyen.
Sur le moyen tiré du défaut de preuve de la notification de l'OQTF du 26 août 2022
Attendu que le conseil de M.[H] reprend en cause d'appel ce moyen relatif à la validité de la notification de l'obligation de quitter le territoire national pour soutenir d'une part que la décision de placement en rétention administrative serait dépourvue de base légale et entachée d'une erreur de droit et d'autre part, que la requête préfectorale aux fins de prolongation de la rétention administrative de M.[H] serait irrecevable faute pour l'autorité administrative d'accompagner sa requête de toutes les pièces justificatives utiles ;
Qu'il fait valoir Mme la Préfète du Rhône ne produit pas le document de suivi de la Poste permettant de démontrer la régularité de la notification de la décision faisant à M.[L] [H] obligation de quitter le territoire français ; qu'il en résulte que la vérification de la durée légale de garde de quinze jours ne peut être opérée, puisque l'accusé de réception produit par la préfecture fait apparaître la date de présentation à l'adresse de M.[L] [H] mais ne fait pas mention de la date à laquelle le courrier a été retourné à la préfecture.
Attendu que le conseil de la Préfecture fait observer que le dossier contient l'accusé de réception de l'envoi de l'OQTF mentionnant la date de présentation du pli et de sa non-réclamation, soit le 2 septembre 2022 ;
Qu'il souligne que l'autorité administrative doit seulement justifier de ses propres diligences et que dans l'hypothèse d'un pli avisé et non réclamé, la date de notification d'une obligation de quitter le territoire français est celle de la première présentation du pli ;
Attendu en effet qu'il n'appartient pas à l'autorité administrative de prouver que les services postaux ont effectué les diligences normales d'un dépôt d'avis de passage et d'une conservation du courrier à disposition du destinataire ;
Qu'il y a lieu en conséquence d'écarter cet autre moyen.
Sur le moyen tiré de l'absence de nécessité et de proportionnalité de la décision deplacement en rétention et de l'erreur manifeste d'appréciation sur les garanties de représentation
Attendu que le conseil de M.[H] expose que ce dernier ignorait qu'il faisait l'objet d'une OQTF et qu'il aurait introduit un pourvoi en cassation contre l'arrêt de la chambre des appels correctionnels prononçant une interdiction judiciaire du territoire français ; qu'il soutient que M.[H] envisageait de rejoindre le territoire espagnol, qu'il aurait communiqué son adresse en Espagne et justifierait d'un titre de transport ;
Attendu cependant que l'autorité préfectorale a considéré que cette mesure était nécessaire faute pour M.[H] de justifier d'un hébergement stable et établi sur le territoire national, ni de la réalité de ses moyens d'existence effectifs, ce dernier disant être domicilié [Adresse 1] sans être en mesure de le démontrer notamment en produisant un justificatif de domicile et déclarant être sans profession ni ressources ;
Attendu qu'il apparaît dès lors qu'il ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à l'exécution de la décision d'éloignement et qu'aucune autre mesure n'apparaît suffisante à garantir efficacement l'exécution effective de cette décision ;
Qu'il prétend qu'il souhaitait se rendre en Espagne mais ne justifie ni de la réalité de son titre de transport ni de son adresse en Espagne ;
Que des mesures de surveillance sont donc nécessaires le temps d'organiser son retour, M.[H] étant démuni de document de voyage en cours de validité ;
Qu'il convient en conséquence de confirmer la prolongation de la mesure de rétention administrative dont il fait l'objet pour une durée de vingt-huit jours.
PAR CES MOTIFS
Déclarons recevable l'appel formé par [L] [H],
Rejetons les moyens d'irrégularité soulevés,
Confirmons l'ordonnance déférée.
Le greffier, Le conseiller délégué,
Charlotte COMBAL Dorothée FREALLE