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11/05/2023 | FRANCE | N°22/03802

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 11 mai 2023, 22/03802


N° RG 22/03802 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OKGW









Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE CEDEX 1 du 18 mai 2022



RG : 2020f00696







Société SELARL MJ ALPES



C/



[Adresse 6]

[I] née [L]

S.A.R.L. LA RESERVE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 11 Mai 2023







APPELANTE :



Société S

ELARL MJ ALPES représentée par Maître Caroline JAL, co-gérante, mandataire judiciaire, agissant es-qualité de mandataire judiciaire et de liquidateur judiciaire au redressement judiciaire et à la liquidation judiciaire de la SARL LA RESERVE désignée à ses fonctio...

N° RG 22/03802 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OKGW

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE CEDEX 1 du 18 mai 2022

RG : 2020f00696

Société SELARL MJ ALPES

C/

[Adresse 6]

[I] née [L]

S.A.R.L. LA RESERVE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 11 Mai 2023

APPELANTE :

Société SELARL MJ ALPES représentée par Maître Caroline JAL, co-gérante, mandataire judiciaire, agissant es-qualité de mandataire judiciaire et de liquidateur judiciaire au redressement judiciaire et à la liquidation judiciaire de la SARL LA RESERVE désignée à ses fonctions par jugements du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE en date des 03 juillet 2019 et 29 janvier 2020

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Anthony SCARFOGLIERO, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

INTIMEES :

Mme [B] [I] ès qualités de gérante de la SARL LA RESERVE

[Adresse 2]

[Localité 4]

Mme [B] [I] née [L]

[Adresse 1]

[Localité 4]

S.A.R.L. LA RESERVE prise en la personne de son représentant légal en exercice, domicilié es qualités audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentées par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102

En la présence du Ministère Public prise en la personne de Romain DUCROCQ, substitut général

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Mars 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Mars 2023

Date de mise à disposition : 11 Mai 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 29 août 2018, la SARL La Réserve a cédé son fonds de commerce à la SAS APJ.

Par jugement du 3 juillet 2019, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société La Réserve, désigné la Selarl MJ Alpes, prise en la personne de Me Caroline Jal, ès-qualité de mandataire judiciaire et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 3 juillet 2019.

Par jugement du 29 janvier 2020, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a converti la procédure de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire et désigné la Selarl MJ Alpes, prise en la personne de Me Jal, ès-qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte du 3 juillet 2020, le Selarl MJ Alpes, ès-qualités a assigné la société La Réserve et Mme [L] épouse [I], en qualité de gérante et de dirigeante de la société La Réserve devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne afin de voir reporter la date de cessation des paiements de la société La Réserve au 3 janvier 2018.

Par jugement contradictoire du 18 mai 2022, ce tribunal a :

- dit la demande de la Selarl MJ Alpes, prise en la personne de Me Jal, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve recevable mais mal fondée,

- rejeté la demande de la Selarl MJ Alpes, prise en la personne de Me Jal, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve, de fixer au 3 janvier 2018 la date de déclaration de cessation des paiements de la société La Réserve,

- condamné la Selarl MJ Alpes, prise en la personne de Me Jal, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve à verser à Mme [L] épouse [I] la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que conformément aux dispositions de l'article R. 641-9 susvisé, la présente décision fera l'objet d'une notification au débiteur par les soins de M. le greffier,

- dit que les publicités de la présente décision seront faites d'office par le greffier,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

La Selarl MJ Alpes, représentée par Me Jal, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve, a interjeté appel par acte du 25 mai 2022.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 13 juillet 2022 fondées sur les articles L.631-1, L.631-8, R.631-13 et suivants et L.641-4 du code de commerce, la Selarl MJ Alpes, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

' dit sa demande recevable mais mal fondée,

' rejeté sa demande de fixer au 3 janvier 2018 la date de déclaration de cessation des paiements de la société La Réserve,

' l'a condamné à verser à M. [L] épouse [I] la somme de 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

et statuant à nouveau,

- juger qu'elle est recevable et bien fondée en ses demandes,

- juger qu'à la date du 3 janvier 2018, la société La Réserve était dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible,

- juger en conséquence qu'elle était, à cette date, en état de cessation des paiements,

en conséquence,

- reporter la date de cessation des paiements de la société La Réserve au 3 janvier 2018,

- ordonner l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 9 août 2022 fondées sur les articles L.631-1 et L.631-8 du code de commerce, la société La Réserve, Mme [L] épouse [I] en qualité de gérante de la société La Réserve et Mme [L] épouse [I] en son nom propre demandent à la cour de :

- dire l'appel recevable mais non fondé,

- confirmer le jugement dans toutes ses dispositions,

- débouter la Selarl MJ Alpes, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve,

- condamner la Selarl MJ Alpes, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve à payer à Mme [L] épouse [I] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Selarl MJ Alpes, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve aux entiers dépens.

Le ministère public, par avis du 4 janvier 2023 communiqué contradictoirement aux parties le 5 janvier 2023, a requis l'infirmation du jugement entrepris.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 mars 2023, les débats étant fixés au 16 mars 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur l'irrecevabilité de Mme [L] épouse [I]

En application de l'article 963 du code de procédure civile, lorsque l'appel entre dans le champ d'application de l'article 1635 bis P du code général des impôts, les parties justifient, à peine d'irrecevabilité de l'appel ou des défenses selon le cas, de l'acquittement du droit prévu à cet article.

En l'espèce, Mme [L] épouse [I] qui n'a pas acquitté le droit prévu à l'article 1635 bis P du code général des impôts doit être déclarée irrecevable en sa défense dans le cadre de la présente instance.

Sur le report de la date de cessation des paiements au 3 janvier 2018

Le liquidateur judiciaire soutient que la société était en cessation des paiements depuis 2017, de sorte qu'il convient de reporter au maximum du délai légal la date de cette cessation des paiements de la société La Réserve. A ce titre, l'appelante fait valoir que :

-selon les bilans de la société, l'actif circulant était de 47.367 euros en 2017 et de 57.147 euros en 2018 et les dettes de 320.478 euros en 2017 et de 306.568 euros en 2018, de sorte qu'il est démontré qu'elle était en état de cessation des paiements au cours des exercices 2017 et 2018, étant relevé que l'actif circulant n'a pas à être assimilé en totalité à de l'actif disponible, seule la trésorerie disponible et les créances dont il est établi qu'elles sont immédiatement mobilisables constituant de l'actif disponible,

- au 30 juin 2017, la passif fournisseur et social est de 99 460 euros pour un actif global de 47 367 euros et au 30 juin 2018 le passif fournisseur et social est de 77 685 euros pour un actif global de 57 147 euros,

- depuis 2017, la société La Réserve n'a quasiment aucune disponibilité immédiate (5.680 euros au 30 juin 2017 et 931 euros au 30 juin 2018)

- le compte clients correspondant à la somme de 15.819 euros au 30 juin 2017 et 22.989 euros au 30 juin 2018 n'est considéré comme de l'actif disponible que s'il est immédiatement réalisable,

- même en considérant les créances clients comme de l'actif disponible, ces sommes ajoutées au faible montant de la trésorerie soit 5.680 euros au 30 juin 2017 et 931 euros au 30 juin 2018 sont totalement insuffisantes pour faire face au seul passif social et fiscal à même date.

- certaines des déclarations de créances reçues par le mandataire judiciaire confirment l'ancienneté des difficultés financières de la société La Réserve et l'état de cassation des paiements de cette dernière depuis 2017,

- la société La Réserve a été condamnée le 01 février 2017, par le tribunal de commerce de Saint-Étienne à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Haute-Loire les sommes de 109.467,09 euros, 13.280,65 euros et 45.567,78 euros en remboursement de trois prêts, que les délais de paiements accordés n'ont pas été respectés et que nonobstant l'appel interjeté contre ce jugement les intimés ne contestent absolument pas le principe de l'impayé des échéances des prêts mais uniquement les TEGS et la disproportion des engagements de caution pris en garantie des emprunts,

- l'examen des créances déclarées pour un montant de 608.519,67 euros fait apparaître que la société La Réserve était débitrice depuis de nombreuses années de créances échues et impayées pour un montant significatif et qu'elle n'avait toujours pas apuré ce passif ancien à l'ouverture de la procédure collective,

- si certaines dettes exigibles et figurant aux bilans arrêtés au 30 juin 2017 ou 30 juin 2018 ont bien évidemment été pour partie réglées lors de l'ouverture de la procédure collective, l'examen des créances déclarées permet de démontrer qu'une partie d'entre elles est toujours impayée à cette date.

Sur ce :

Conformément aux articles L.631-1 et L.631-8 du code de commerce, la date de cessation des paiements ne pouvant être reportée qu'au jour où le débiteur était déjà dans l'impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, il y a lieu pour le juge saisi d'une demande de report, de se placer, pour apprécier cette situation, non pas au jour où il statue, mais à celui auquel est envisagé le report de la date de cessation des paiements.

L'état de cessation des paiements est caractérisé par l'impossibilité pour le débiteur de faire face au passif exigible avec son actif disponible.

L'actif disponible s'entend des éléments d'actifs figurant au bilan, d'une liquidité telle qu'ils permettent de faire face aux dettes exigibles, c'est à dire immédiatement réalisables et notamment la trésorerie disponible en caisse, les soldes bancaires créditeurs, les effets de commerce échus ou escomptables, ainsi que les valeurs cotées en bourse et les ouvertures de crédits non utilisées.

Le passif exigible s'entend de l'ensemble des dettes échues au jour où l'appréciation est portée et non assorties d'un moratoire. Les dettes doivent être certaines, liquides et exigibles, ce qui exclut les dettes litigieuses. De même la seule comparaison des bilans, fût-elle déficitaire est insuffisante.

En l'espèce, il ressort de l'examen des bilans et comptes de résultats versés aux débats qu'au 30 juin 2017, le passif fournisseur et social de la société La Réserve était de 99.460 euros pour un actif disponible de 44.619 euros et qu'au 30 juin 2018 le passif fournisseur et social était de 77.685 euros pour un actif disponible de 51.077 euros. La cour relève également que la société La Réserve était confrontée depuis plusieurs années à l'impossibilité de faire face à son passif exigible, comme en atteste le passif ancien et impayé tenant notamment à une créance de l'URSSAF exigible depuis le mois de septembre 2016 pour 4.761,32 euros, une créance de 1.381,51 euros de la société Ducreux exigible depuis le 21 mars 2017, une créance de la société Exaurev de 3.645,97 euros exigible depuis le 15 novembre 2017 ainsi qu'une créance de la société Lixxbail de 641,93 euros exigible depuis le 30 juin 2014.

Dès lors, s'il n'est pas contestable, comme le relèvent les premiers juges, que les comptes arrêtés au 30 juin 2017 ne suffisent pas à déterminer l'état de cessation des paiements au 1er mars 2018, en revanche, la permanence de cet état de cessation des paiements, qui perdure au 30 juin 2018, conjugué à l'existence de nombreuses dettes anciennes et en tout cas antérieures au 3 janvier 2018 demeurées impayées, permettent d'établir qu'à cette date, la société La Réserve n'était plus en mesure de faire face à son passif exigible avec son actif disponible. Il convient donc d'infirmer le jugement déféré et de reporter la date de cessation des paiements au 3 janvier 2018.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Il convient d'ordonner l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de liquidation judiciaire et d'infirmer le jugement déféré sur ce point. Le jugement doit également être infirmé en ce qu'il a condamné la Selarl MJ Alpes, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société La Réserve à payer à Mme [L] épouse [I] la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare Mme [L] épouse [I] irrecevable en sa défense dans le cadre de la présente instance,

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Fixe la date de cessation des paiements de la société La Réserve au 3 janvier 2018,

Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et à hauteur d'appel,

Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/03802
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;22.03802 ?
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