La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2023 | FRANCE | N°20/02913

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 11 mai 2023, 20/02913


N° RG 20/02913 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7LI















Décision du Tribunal de Commerce de Saint Etienne du 15 mai 2020



2018/J422











S.A.S. SECRET EDEN



C/



S.A.S. LOCAM

S.A.S. CESAM

S.A.S. BFP ELECTRONIQUE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 11 Mai 2023







APPELANTE :>


S.A.S. LES SECRETS D'EDEN prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilée es qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 2]



Représentée par Me Simon ULRICH, avocat au barreau de LYON, toque : 2693





INTIMEES :



S.A.S. LOCAM agissant poursuites et...

N° RG 20/02913 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7LI

Décision du Tribunal de Commerce de Saint Etienne du 15 mai 2020

2018/J422

S.A.S. SECRET EDEN

C/

S.A.S. LOCAM

S.A.S. CESAM

S.A.S. BFP ELECTRONIQUE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 11 Mai 2023

APPELANTE :

S.A.S. LES SECRETS D'EDEN prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilée es qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 2]

Représentée par Me Simon ULRICH, avocat au barreau de LYON, toque : 2693

INTIMEES :

S.A.S. LOCAM agissant poursuites et diligences par son dirigeant domicilié ès qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

S.A.S. CESAM agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés audit siège

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Philippe NOUVELLET de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et ayant pour avocat plaidant Me Valérie BOTHY-LANFRANCHI, avocat au barreau de NICE

S.A.S. BFP ELECTRONIQUE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représentée par Me Guillaume ROSSI de la SELAS AGIS, avocat au barreau de LYON, toque : 538

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Juin 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 15 Mars 2023

Date de mise à disposition : 11 Mai 2023

Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 7 février 2017, la SAS Les Secrets d'Eden (ci-après société Secrets d'Eden) a conclu avec la société Location Automobiles Matériels (ci-après société Locam) un contrat de location portant sur deux machines (Cryo E et Twin Slim) fournies par la SAS Cesam (ci-après société Cesam), moyennant le règlement de 60 loyers mensuels de 658,40 euros HT (790,08 euros TTC).

Le 16 février 2016, un procès-verbal de livraison et de conformité a été signé par la société Secrets d'Eden.

Cette dernière a cessé de payer ses échéances au motif des dysfonctionnements des machines livrées.

Par courrier recommandé du 5 janvier 2018 dont il a été accusé réception le 16 janvier 2018, la société Locam a mis en demeure la société Secrets d'Eden de régler les échéances impayées sous peine de déchéance et de l'exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.

Par acte du 23 mars 2018, la société Locam a assigné la société Secrets d'Eden devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne afin d'obtenir notamment la somme de 46.061,66 euros correspondant aux 5 échéances échues impayées, auxquelles s'ajoutent les 48 échéances à échoir, ainsi que la clause pénale de 10%, outre intérêts au taux légal et autres accessoires de droit.

Par acte du 4 juillet 2018, la société Les Secrets d'Eden a appelé dans la cause la société Cesam. Par jugement du 27 juillet 2018, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a prononcé la jonction des instances.

Par acte du 3 octobre 2018, la société Cesam a appelé en la cause la SAS BFP Electronique (ci-après société BFP) en sa qualité de fabricant du matériel objet du contrat. Par jugement du 16 novembre 2018 du tribunal de commerce de Saint-Etienne, l'affaire a été jointe à la précédente.

Par jugement contradictoire du 15 mai 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- débouté la société BFP Electronique de sa demande tendant à prononcer la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 3 octobre 2018,

- débouté la société Cesam de sa demande tendant à voir constater le défaut de qualité à agir de la société Les Secrets d'Eden,

- débouté la société Les Secrets d'Eden de sa demande tendant à voir prononcer la résolution du contrat de fourniture et maintenance la liant à la société Cesam,

- constaté l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats liant d'une part la société Les Secrets d'Eden et la société Cesam et d'autre part la société Les Secrets d'Eden et la société Locam,

- débouté la société Les Secrets d'Eden de sa demande tendant à voir prononcer la caducité du contrat de location,

- débouté la société Les Secrets d'Eden de sa demande de restitution des loyers versés,

débouté la société Les Secrets d'Eden de sa demande d'indemnisation,

- condamné la société Les Secrets d'Eden à verser à la société Locam la somme de 46.061,66 euros y incluse la clause pénale de 10%, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 janvier 2018,

- ordonné la restitution par la société Les Secrets d'Eden à la société Locam des deux appareils, objets du contrat de location,

- rejeté la demande d'astreinte,

- condamné la société Les Secrets d'Eden à payer la somme de 250 euros à la société Locam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Les Secrets d'Eden à payer la somme de 2.000 euros à la société Cesam au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes réciproques des sociétés Cesam et BFP Electronique, fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens sont à la charge de la société Les Secrets d'Eden,

- rejeté la demande d'exécution provisoire du jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La société Les Secrets d'Eden a interjeté appel par acte du 9 juin 2020.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 7 janvier 2021, la société Les Secrets d'Eden a demandé à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- débouté la société BFP Electronique de sa demande tendant à prononcer la nullité de l'assignation qui lui a été délivrée le 3 octobre 2018,

- débouté la société Cesam de sa demande tendant à voir constater son défaut de qualité à agir,

- constaté l'interdépendance et l'indivisibilité des contrats la liant d'une part avec la société Cesam et d'autre part avec la société Locam,

- ordonné qu'elle restitue à la société Locam des deux appareils, objets du contrat de location,

- rejeté la demande d'astreinte,

- dit qu'il n'y a pas lieu de faire aux demandes réciproques des sociétés Cesam et BFP Electronique, fondées sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que les dépens, dont frais de greffe taxés et liquidés dès à présent à 66,70 euros, sont à sa charge,

- rejeté la demande d'exécution provisoire du jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a rejeté ses demandes tendant à voir prononcer :

- la résolution du contrat de fourniture et maintenance la liant à la société Cesam,

- la caducité du contrat de location,

- la restitution des loyers versés

- l'octroi de dommages et intérêts à son profit

en ce qu'il l'a condamnée à

- verser à la société Locam la somme de 46.061,66 euros y incluse la clause pénale de 10%, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 janvier 2018, outre la somme de 250 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- payer à la société Cesam la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

en conséquence,

à titre principal,

- constater l'existence de vices cachés affectant les différents appareils qui lui ont été loués par la société Cesam et fabriqués par la société BFP Electronique,

à titre subsidiaire,

- constater l'existence d'un défaut de conformité affectant les différents appareils qui lui ont été livrés par la société Cesam et fabriqués par la société BFP Electronique,

en tout état de cause,

- déclarer la clause de non recours réputée non écrite du fait de son caractère abusif,

- prononcer la résolution judiciaire du contrat qu'elle a conclu avec la société Cesam en raison d'une inexécution suffisamment grave,

- prononcer la caducité du contrat qu'elle a conclu avec la société Locam du fait de l'interdépendance,

- condamner la société Locam à lui rembourser la somme de 6.320,64 euros correspondant aux mensualités afférentes au contrat de location financière,

- ordonner n'y avoir lieu au paiement d'une quelconque somme de sa part,

- condamner solidairement les sociétés Locam, Cesam et BFP Electronique à lui payer la somme de 134.997,84 euros TTC au titre du préjudice économique subi,

- débouter les sociétés Cesam, Locam et BFP Electronique de l'ensemble de leurs demandes, fins et prétentions,

- condamner solidairement les sociétés Cesam, BFP Electronique et Locam à lui verser la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, première instance et appel compris.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 11 janvier 2021 fondées sur les articles 1103 et suivants et 1231-2 du code civil, la société Locam a demandé à la cour de :

- dire non fondé l'appel de la société Les Secrets d'Eden,

- la débouter de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement entrepris,

- condamner la société Les Secrets d'Eden à lui régler une nouvelle indemnité de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- la condamner en tous les dépens d'instance et d'appel.

Enfin, la société Locam a sollicité la condamnation de la société Secrets d'Eden à remettre les matériels litigieux sous astreinte, l'intimée étant la seule propriétaire de ces biens meubles dans le corps de ses écritures.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 31 décembre 2020 fondées sur l'article 1220 du code civil et l'article 700 du code de procédure civile, la société Cesam a demandé à la cour de :

à titre principal,

- l'a recevoir en son appel incident,

- le dire bien fondé,

- infirmer le jugement entrepris,

statuant à nouveau,

- constater le défaut de qualité à agir de la société Les Secrets d'Eden,

- débouter la société Les Secrets d'Eden de toutes ses demandes,

- condamner la société Les Secrets d'Eden au paiement de la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- outre les entiers dépens,

à titre subsidiaire,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris,

- condamner la société Les Secrets d'Eden au paiement de la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- outre les entiers dépens,

à titre infiniment subsidiaire,

- condamner la société BFP Electronique à la relever et garantir de toute condamnations éventuelle,

- condamner la société BFP Electronique à la somme de 2.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 25 novembre 2020 fondées sur les articles 56, 112, 114 et 855 du code de procédure civile et les articles 1231-1, 334 et 335 du code civil, la société BFP Electronique a demandé à la cour de :

- infirmer le jugement,

statuant à nouveau,

- constater la nullité de l'assignation pour défaut de diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige sans motif légitime,

- déclarer irrecevable et infondée l'assignation intervention forcée à son encontre,

- débouter la société Les Secrets d'Eden de toutes ses demandes, fins et moyens,

- condamner la société Les Secrets d'Eden à la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- outre les entiers dépens,

- confirmer pour le surplus le jugement déféré,

en tout état de cause,

- constater qu'elle a accompli l'ensemble des diligences qui lui incombent,

- constater que la société Les Secrets d'Eden ne rapporte pas la preuve de son préjudice financier,

- rejeter l'ensemble des moyens, fins et demandes de la société Les Secrets d'Eden,

condamner la société Cesam à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 mai 2021, les débats étant fixés au 15 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande d'astreinte formée par la société Locam dans le corps de ses conclusions d'appel

L'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile dispose que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

En l'espèce, la société Locam a demandé dans le corps de ses écritures que la société Secrets d'Eden soit condamnée sous « astreinte dont la cour fixera le montant » à lui remettre les appareils et objets du contrat de location.

Toutefois, cette demande n'a pas été présentée dans le dispositif des conclusions qui sollicite le rejet des prétentions de l'appelante, la confirmation de la décision déférée et des demandes au titre des dépens et de l'indemnisation au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

En première instance, le tribunal de commerce a rejeté la demande d'astreinte présentée par la société Locam et la lecture du dispositif des conclusions ne permet pas de retenir un appel incident au profit de l'intimée.

En application du texte susvisé, il convient de déclarer irrecevable la demande d'astreinte formée par la société Locam dans le corps de ses écritures.

Sur la validité de l'assignation délivrée par la société Cesam à la société BFP

À l'appui de sa demande, la société BFP a fait valoir :

- le non-respect des dispositions des articles 56, 112 et 114 du code de procédure civile en ce qu'elles n'ont pas prévu la possibilité pour le requérant d'avoir recours à une procédure de règlement amiable

- l'existence d'un grief en ce que la société BFP a été contrainte d'engager des frais pour assurer sa défense devant le tribunal.

La société Cesam a fait valoir sur ce point :

- l'absence de nullité de l'assignation en ce que la mise en 'uvre d'un mode amiable de résolution du litige n'était pas possible, la société Cesam étant elle-même assignée et l'impossibilité d'y parvenir puisque la société BFP prétend à l'existence d'une mauvaise utilisation et non d'un dysfonctionnement.

L'article 56 du code de procédure civile dispose : « L'assignation contient à peine de nullité, outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande avec un exposé des moyens en fait et en droit ;

3° L'indication des modalités de comparution devant la juridiction et la précision que, faute pour le défendeur de comparaître, il s'expose à ce qu'un jugement soit rendu contre lui sur les seuls éléments fournis par son adversaire ;

4° Le cas échéant, les mentions relatives à la désignation des immeubles exigées pour la publication au fichier immobilier.

Elle comprend en outre l'indication des pièces sur lesquelles la demande est fondée. Ces pièces sont énumérées sur un bordereau qui lui est annexé.

Sauf justification d'un motif légitime tenant à l'urgence ou à la matière considérée, en particulier lorsqu'elle intéresse l'ordre public, l'assignation précise également les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige.

Elle vaut conclusions. »

L'article 114 du code de procédure civile dispose que aucun acte de procédure ne peut être déclaré nul pour vice de forme si la nullité n'en est pas expressément prévue par la loi, sauf en cas d'inobservation d'une formalité substantielle ou d'ordre public et que la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public.

La société BFP fait grief à la société Cesam de l'avoir attraite en la cause sans auparavant avoir tenté de mettre en 'uvre un règlement amiable de la situation, et estime subir un grief de par cette assignation puisqu'elle a dû engager des frais de défense.

En l'état, il doit être relevé que la société Cesam a fait assigner en intervention forcée la société BFP du fait de sa propre assignation dans le litige opposant la société Secrets d'Eden à la société Locam.

Dès lors, et au vu de la nature du litige, la mise en 'uvre d'une procédure de règlement amiable des litiges n'était pas une obligation et n'avait pas de sens au vu de la judiciarisation avancée du litige. Au contraire, l'appel en garantie par assignation directe pouvait même relever d'une certaine urgence.

En outre, la notion de grief ne peut être tirée de la nécessité pour une partie d'avoir engagé des frais de défense mais de la privation d'un droit fondamental et notamment de la possibilité de présenter une défense dans une instance dans des conditions normales.

Au regard de ces éléments, les moyens de la société BFP seront rejetés et l'assignation sera déclarée valable.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur la qualité à agir de la société Secrets d'Eden à l'encontre de la société Cesam

Sur ce point, la société Cesam a fait valoir :

- le défaut de qualité à agir de la société Secrets d'Eden en ce qu'au jour de l'assignation, le lien contractuel entre l'appelante et la société Cesam était rompu, et que cette dernière ne bénéficiait plus d'aucun mandat issu du contrat pour assigner le fournisseur.

Pour sa part, la société Secrets d'Eden a fait valoir :

- l'interdépendance des contrats de fourniture et de location financière qui ont un objectif économique commun

- le caractère abusif de la clause de non-recours empêchant de rechercher la responsabilité de la société Cesam en cas de vice caché de l'appareil fourni, ce qui créé un déséquilibre grave entre les parties.

En l'espèce, il convient de rappeler que s'agissant de contrats interdépendants, la société Secrets d'Eden a la possibilité de demander, par voie d'exception, en défense à l'assignation de la société Locam s'agissant des paiements, la résolution judiciaire préalable du contrat de fourniture si et seulement si elle a appelé en la cause ledit fournisseur.

À défaut d'appel en la cause de la société Cesam, la société Secrets d'Eden ne pourrait obtenir la résolution judiciaire du contrat en raison de la stricte application de l'article 14 du code de procédure civile.

Dès lors, la société Secrets d'Eden dispose d'une qualité et d'un intérêt à agir à l'encontre de la société Cesam.

Il convient en conséquence de confirmer la décision déférée sur ce point.

Sur la demande de résolution du contrat de fourniture et maintenance, et de caducité du contrat de location financière formée par la société Secrets d'Eden

Sur ce point, la société Secrets d'Eden a fait valoir :

- l'existence de dysfonctionnements avérés du matériel livré à savoir l'appareil CRYO E constatés dès la livraison

- l'annulation de rendez-vous dès le mois de mars 2017 pour cette raison en attendant le remplacement de la pièce défectueuse

- le défaut de refroidissement à compter d'avril 2017 malgré le changement de la pièce défectueuse, la machine atteignant la température indiquée (0 degré) après 45 minutes et non 10 minutes comme prévu, soit la durée d'une séance

- le dysfonctionnement des cryodes en juin 2017 et le constat des dysfonctionnements divers par les clients

- l'absence de réponse à ses demandes de remplacements de la machine formées par lettre recommandée avec accusé de réception le 16 octobre 2017, en décembre 2017 et mars 2018

- la justification suffisante par ses soins du dysfonctionnement de la machine par le biais de la photographie fournie

- la reconnaissance par les premiers juges du caractère défectueux de la machine, sans que les conséquences nécessaires n'en aient été tirées

- l'absence de toute mauvaise utilisation de la machine par la société Secrets d'Eden

- l'absence de tout refus d'intervention étant rappelé qu'elle a repris contact avec la société Cesam par lettre recommandée avec accusé de réception à compter du mois d'octobre 2017 et sa volonté de poursuivre les relations commerciales après le remplacement de la machine défectueuse

- l'absence de sollicitation auprès d'elle de la part de la société BFP

- le caractère questionnant des dysfonctionnements de la machine qui l'a menée à prendre contact avec l'ANSM

- le caractère antérieur à la vente et caché du vice qui ne pouvait être décelé à la livraison, mais uniquement dans le cadre d'une utilisation postérieure à la vente

- à titre subsidiaire, le non-respect par la société Cesam de son obligation de délivrance en raison de l'existence d'un défaut de conformité, la machine fournie ne remplissant pas son objectif

- la possibilité de faire valoir une exception d'inexécution en raison des manquements quant à la délivrance du matériel, face à la demande en paiement

- la caducité du contrat de location financière ensuite de la résolution du contrat de fourniture de matériel.

Pour sa part, la société Cesam a fait valoir :

- la mise en cause de la société BFP

- les échanges réguliers avec cette société aux fins de résolution des difficultés rencontrées par la société Secrets d'Eden dès septembre 2017

- l'existence d'un SAV dans un délai d'un an à compter de la date de la livraison et son intérêt à régler le problème rapidement

- le refus de coopération de la société Secrets d'Eden qui a arrêté le paiement pour les deux appareils alors qu'un seul dysfonctionne

- l'absence de faute de sa part, et la difficulté liée à l'appareil qui avait déjà été changé en avril 2017, sans effet positif, outre le fait que la société BFP ne saurait se positionner puisque ses techniciens n'ont pas eu accès à l'appareil par la suite

- la mauvaise utilisation du dispositif par la société Secrets d'Eden, qui a orienté des patients non exigibles ou n'a pas fait un bon usage de l'appareil

- la nécessité en cas de dysfonctionnement de l'appareil, d'être relevée et garantie de toute condamnation puisqu'elle n'est que distributeur de l'appareil.

Pour sa part, la société BFP a mis en avant :

- la réalisation par ses soins, ensuite du signalement par la société Cesam du dysfonctionnement de l'appareil « Cryo E » de toutes les diligences nécessaires

- la limitation par l'article 9 des conditions de vente du contrat, de la garantie au remplacement des pièces reconnues défectueuses par les techniciens de Cesam

- la mise en 'uvre par ses soins, à titre commercial du changement du matériel litigieux et des accessoires à ses frais

- le refus par la gérante de la société Secrets d'Eden de répondre aux demandes de sa part concernant l'établissement du diagnostic pour cibler la défaillance invoquée, et l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception à la gérante de la société appelante le 26 janvier 2018, indiquant le refus d'accès à la machine à compter de septembre 2017, rendant l'établissement d'un diagnostic impossible

- lors de la livraison, le test du matériel par le technicien de la société BFP, indiquant le bon fonctionnement de la machine

- l'indication par la gérante de ce que les difficultés ne viennent pas du matériel mais de l'utilisation ou de son efficacité au regard des résultats espérés

- l'impossibilité pour la société Secrets d'Eden de reprocher à la société BFP une mauvaise utilisation du matériel litigieux

- la décision des premiers juges qui ont retenu l'absence de preuve du dysfonctionnement de l'appareil Cryo E, l'absence de fondement juridique à la demande de résolution du contrat et la bonne volonté de la société BFP pour résoudre les difficultés

- l'absence d'éléments probants concernant le dysfonctionnement de l'appareil, par la simple fourniture de photographies

- le rappel de ce que l'appareil ne doit pas être utilisé dans une pièce surchauffée, sans oublier que la formation pour l'usage de l'appareil est dispensé par la société Cesam

- la facture détaillée de ses relevés téléphoniques démontrant la prise de contact à plusieurs reprises avec la gérante de la société Secrets d'Eden, ainsi que l'historique des échanges avec la société Cesam, concernant la situation

- le fait que l'appareil Cryo E n'a qu'une visée esthétique et ne ressort pas d'un enregistrement auprès de l'ANSM, sauf à ce que l'appelante en fasse un usage médical ce qui la placerait en infraction

- l'existence d'un certificat ISO 13485 sur l'appareil.

Enfin, la société Locam a fait valoir :

- sa qualité de loueur auquel il n'appartient pas de vérifier le bon fonctionnement du matériel choisi par le locataire, ou d'assurer sa pérennité ou sa maintenance, le locataire étant mandaté à cet effet par le contrat

- le contenu du procès-verbal de livraison et de conformité, qui atteste de son bon fonctionnement

- le paiement pendant sept mois des loyers sans difficultés

- l'arrêt des paiements concernant les deux appareils financés alors qu'un seul, le Cryo E, fait l'objet de critiques

- l'article 7 du contrat qui indique que l'appelante a renoncé à tous recours du chef d'une défaillance à l'encontre du seul bailleur

- le caractère irrecevable de l'exception d'inexécution en l'absence de toute action à l'encontre du fournisseur, chose qui n'a été faite que lors de l'action en paiement

- les preuves apportés par la société BFP et la société Cesam, devant les premiers juges, concernant l'absence de dysfonctionnement et de vice caché de l'appareil, cette preuve incombant à la société Secrets d'Eden.

L'article 1134 du code civil dispose, dans sa version applicable au litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, et doivent être exécutées de bonne foi.

L'article 1641 du code civil dispose que le vendeur est tenu de la garantie à raison des défauts cachés de la chose vendue qui la rendent impropre à l'usage auquel on la destine, ou qui diminuent tellement cet usage que l'acheteur ne l'aurait pas acquise, ou n'en aurait donné qu'un moindre prix, s'il les avait connus.

S'agissant des vices cachés allégués par la société Secrets d'Eden, il convient de rappeler qu'il revient de rapporter la preuve de leur existence, antérieure à la livraison du bien financé étant également retenu que l'appelante concentre ses critiques sur l'appareil Cryo E et pas sur l'appareil Twin Slim qui n'est jamais critiqué, aucun grief ne pouvant être retenu contre ce dernier et aucune résolution ne pouvant être obtenue au titre de cet appareil.

À l'appui de ses prétentions, la société appelante a versé aux débats des photographies montrant la température de l'appareil Cryo E, la première datée du 23 mars 2018 indiquant de contacter le SAV et la seconde montrant uniquement un temps indiquant 9 minutes et des mesures de température à savoir 3 et 4 degrés.

Si la preuve est libre en matière commerciale, elle se doit cependant d'être complète mais surtout suffisamment objective, de simples photographies ne suffisant pas à emporter la conviction.

Dans leurs conclusions, les société BFP et société Cesam rappellent que l'utilisation de l'appareil Cryo E doit se faire dans des conditions spécifiques, notamment une pièce adaptée et non sujette à la chaleur pour permette que l'appareil puisse atteindre la température recommandée dans le temps indiqué sur la notice. Or, les photographies remises au débat ne permettent pas de déterminer si les conditions d'utilisation de l'appareil sont respectées mais également si la société Secrets d'Eden a respecté toutes les recommandations.

En outre, si la société Secrets d'Eden prétend que la température de zéro degré doit être atteinte en dix minutes, aucun élément n'est fourni permettant d'appuyer les dires de la société appelante.

S'agissant de la maintenance de l'appareil, il sera rappelé que celle-ci ne fait pas l'objet du contrat de location financière par la société Locam qui ne finance que l'acquisition du matériel critiqué en la présente instance.

Sur ce point, la société Secrets d'Eden a fait état de ce qu'aucune suite n'a jamais été donnée à ses demandes tant par le fournisseur, la société Cesam que par le mainteneur, la société BFP.

Or, les pièces versées aux débats par les intimées démontrent que les sociétés concernées ont rencontré des difficultés pour exécuter leurs obligations contractuelles.

Le courriel adressé par la société BFP à la société Cesam et la société Locam du 12 octobre 2017 indique que la gérante de la société Secrets d'Eden est injoignable par le service après vente pour procéder à un premier diagnostic à distance.

En outre, la lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 26 janvier 2018 par la société BFP à la société Secrets d'Eden fait part du refus de la gérante de cette dernière de la laisser accéder à la machine et de toute intervention de sa part.

S'il est reconnu par les parties que des changements sont intervenues sur la machine livrée au titre de la garantie, aucune explication n'est par contre fournie par la société Secrets d'Eden concernant les refus d'intervention du mainteneur au titre de l'exécution du contrat de fourniture.

De fait, l'inexécution qui pourrait être reprochée à la société Cesam et à la société BFP ne peut être retenue puisqu'elle a été causée par l'attitude de la société Secrets d'Eden, qui en date du 23 mars 2018 ne peut donc se plaindre d'un défaut d'intervention.

Au regard de ces éléments, il n'y a pas lieu de prononcer la résolution judiciaire des contrats de fourniture et de maintenance conclus entre les parties, de même qu'il n'y a pas lieu de prononcer la caducité du contrat de location financière liant la société Secrets d'Eden à la société Locam.

En conséquence, il y a lieu de rejeter les demandes financières formées par la société Secrets d'Eden à l'encontre de la société Locam s'agissant de la restitution des loyers.

De fait, la décision déférée sera confirmée.

Sur la demande de dommages et intérêts formée par la société Secrets d'Eden

La société Secrets d'Eden a fondé sa demande comme suit :

- l'existence d'un préjudice économique en raison des dysfonctionnements de la machine, avec la perte de 1,5 clients par jour attestée par un cabinet de gestion comptable

- le lien avec la mise à disposition de machines non conformes

- les tarifs pratiqués et la fréquence des soins soit la somme totale de 134.997,84 euros TTC.

La société Cesam a fait valoir :

- l'absence de tout justificatif concernant le montant des dommages et intérêts réclamés par la société Secrets d'Eden, qui prétend avoir remboursé des clients ou avoir fermé un établissement secondaire sans preuve.

La société BFP a fait valoir sur ce point :

- le caractère excessif de la somme réclamée, soit 141.318,48 euros, basée sur lettre recommandée avec accusé de réception écrite par la gérante de la société appelante

- l'impossibilité de se constituer une preuve à soi-même

- l'absence de caractère objectif du préjudice allégué.

Enfin, la société Locam a fait état des moyens suivants :

- l'absence de toute défaillance de sa part dans l'exécution de ses obligations qui portaient sur le financement

- l'application de la clause de non-recours à l'égard du bailleur en raison de la défaillance du matériel

- la jurisprudence de la cour de cassation qui indique que le bailleur financier ne saurait être condamné que ce soit sur un fondement contractuel ou délictuel à indemniser le préjudice subi par le locataire en raison de la défaillance du fournisseur dans l'exécution de ses propres obligations

- l'absence de preuve du préjudice allégué

- le rappel de ce que la société Secrets d'Eden a conservé la jouissance de l'appareil Twyn Slim sans pour autant réaliser les paiements, en l'absence de tout dysfonctionnement par ailleurs.

L'article 1240 du Code civil dispose que tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

En l'espèce, la société Secrets d'Eden ne justifie d'aucune faute de la part des sociétés intimées qui, au surplus, ont respecté l'intégralité de leurs obligations.

De plus, le préjudice allégué n'est fondé sur aucune pièce comptable, mais uniquement sur des allégations basées sur des rendez-vous annulés et un prix qui aurait été fixé pour chaque série de séance sans pour autant que la société appelante ne remette de documents pour fonder sa position.

Au regard de ces éléments, la demande de dommages et intérêts de la société Secrets d'Eden ne saurait prospérer et sera rejetée.

La décision déférée sera en conséquence confirmée à ce titre.

Sur les demandes accessoires

La société Secrets d'Eden échouant en ses prétentions, elle sera condamnée à supporter les entiers dépens de l'instance en appel.

L'équité commande d'accorder à la société Locam une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Secrets d'Eden sera condamnée à lui payer la somme de 800 euros à ce titre.

L'équité commander d'accorder à la société Cesam une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Secrets d'Eden sera condamnée à lui verser la somme de 2.000 euros à ce titre.

L'équité commander d'accorder à la société BFP une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Secrets d'Eden sera condamnée à lui verser la somme de 2.000 euros à ce titre.

Les autres demandes d'indemnisation fondées sur l'article 700 du code de procédure civile seront rejetées.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Déclare irrecevable la demande d'astreinte présentée par la SAS Locam,

Confirme le jugement déféré dans son intégralité,

Y ajoutant

Condamne la SAS Les Secrets d'Eden à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel,

Condamne la SAS Les Secrets d'Eden à payer à la SAS Locam la somme de 800 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Les Secrets d'Eden à payer à la société Cesam la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Les Secrets d'Eden à payer à la SAS BFP Electronique la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejette les autres demandes d'indemnisation présentées au fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/02913
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;20.02913 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award