AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : N° RG 21/00672 - N° Portalis DBVX-V-B7F-NL3N
[S]
C/
CPAM DE [Localité 3]
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Pole social du TJ de LYON
du 15 Décembre 2020
RG : 18/05604
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE D - PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 09 MAI 2023
APPELANT :
[B] [S]
né le 19 Août 1957 à [Localité 2]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
représenté par Me Hervé GERBI de la SELARL GERBI, subsitué par Me BURON Isabelle, avocats au barreau de GRENOBLE
INTIMEE :
CPAM DE [Localité 3]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représenté par M. [H] [C] muni d'un pouvoir
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 10 Février 2023
Présidée par Nathalie PALLE, Présidente, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
- Nathalie PALLE, président
- Thierry GAUTHIER, conseiller
- Vincent CASTELLI, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 09 Mai 2023 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par décision du 7 novembre 2017, la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] (la caisse) a attribué à M. [S] (l'assuré), victime d'un accident du travail le 8 octobre 2014, un taux d'incapacité permanente partielle à la date de consolidation du 1er septembre 2017 de 51%, dont 3% pour le taux socio-professionnel, pour les « séquelles d'un polytraumatisme à type de limitation modérée des mouvements de l'épaule gauche, côté non dominant par paralysie du nerf circonflexe, anisocorie avec photophobie et atteinte cognitive modérée portant sur la sphère exécutive et attentionnelle, et gêne modérée à la marche ».
Le 8 janvier 2018, l'assuré a saisi le tribunal du contentieux de l'incapacité de Rhône-Alpes en contestation de la décision. Le tribunal ayant été supprimé le 31 décembre 2018, le dossier a été transféré le 1er janvier 2019 au tribunal de grande instance, devenu le pôle social du tribunal judiciaire de Lyon à compter du 1er janvier 2020.
A l'audience du 10 novembre 2020, le tribunal a ordonné une consultation médicale sur pièces confiée au professeur [E].
Par jugement du 15 décembre 2020, le tribunal a :
- déclaré recevable le recours,
- maintenu la décision du 7 novembre 2017 et a fixé le taux à 51% (48% pour le taux médical et 3% pour le taux socio-professionnel) à compter de la date de consolidation,
- rappelé que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l'audience sont à la charge de la Caisse nationale d'assurance maladie,
- dit n'y avoir lieu à dépens.
Le 8 janvier 2021, l'assuré a relevé appel de ce jugement.
Par ses conclusions déposées au greffe le 1er septembre 2021, oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, la victime demande à la cour de :
- infirmer le jugement en ce qu'il a maintenu la décision du 7 novembre 2017 et a fixé le taux à 51% (48% pour le taux médical et 3% pour le taux socio-professionnel) à compter de la date de consolidation pour la victime.
Statuant à nouveau dans cette limite,
- infirmer la décision de la caisse du 7 novembre 2017, rectifiée par notification du 25 novembre 2019, fixant l'IPP de l'assuré au taux de 51% dont 3% du taux socio-professionnel,
- fixer au taux de 81% l'IPP fonctionnelle,
- condamner la caisse aux dépens, outre en la somme de 2500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
L'assuré conteste :
- d'une part, le taux de 10% retenu pour la limitation des mouvements des deux hanches alors que la bilatéralité des séquelles, associée à une limitation importante des mouvements et à une nette boiterie subséquente, objectivées lors de l'examen clinique, justifie un taux fonctionnel d'au moins 30% (15% par hanche),
- d'autre part, l'absence d'IPP retenue pour les séquelles du rachis lombaire, alors que l'examen clinique du médecin conseil de la caisse fait état des doléances de douleurs basses, et constate une raideur moyenne du rachis lombaire à la mobilisation et une distance main sol de 30 cm, ce qui justifie un taux de 10%, ainsi que le conclut le docteur [G], médecin qu'il a mandaté.
Il fait valoir que l'analyse du professeur [E], médecin consultant désigné par le tribunal, ne peut qu'être écartée, celui-ci n'ayant procédé à aucun examen clinique et n'ayant chiffré aucun déficit fonctionnel.
Par des conclusions oralement soutenues à l'audience et auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé de ses moyens, la caisse conclut à la confirmation du jugement, à la confirmation du taux d'incapacité permanente de 51% notifié à l'assuré et au rejet de l'intégralité des demandes de l'assuré.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Selon l'article L. 434-2 du code de la sécurité sociale, le taux de l'incapacité permanente est déterminé d'après la nature de l'infirmité, l'état général, l'âge, les facultés physiques et mentales de la victime ainsi que d'après ses aptitudes et sa qualification professionnelle, compte tenu d'un barème indicatif d'invalidité.
Pour les infirmités multiples résultant d'un même accident, le barème indicatif d'invalidité, annexé à l'article R. 434-32, préconise, lorsque les lésions qui portent sur des membres différents intéressent une même fonction, que les taux estimés doivent s'ajouter, sauf cas expressément précisés au barème.
Et le chapitre 3.2 du barème annexé à l'article R. 434-32 du code de la sécurité sociale, relatif aux atteintes au rachis dorso-lombaire préconise un taux d'incapacité permanente partielle de 5 à 15% lorsqu'il existe des douleurs persistantes et une gêne fonctionnelle discrètes.
L'incapacité permanente est appréciée en fonction de l'état séquellaire au jour de la consolidation de l'état de la victime, sans que puissent être pris en considération des éléments postérieurs.
Après avoir procédé à l'examen clinique de l'assuré et consulté l'ensemble des certificats et documents médicaux qui lui ont été remis, le médecin conseil du service du contrôle médical a fixé, à la consolidation du 31 août 2017, le taux médical d'IPP à 48% pour les « séquelles d'un polytraumatisme à type de limitation modérée des mouvements de l'épaule gauche, côté non dominant par paralysie du nerf circonflexe, anisocorie avec photophobie et atteinte cognitive modérée portant sur la sphère exécutive et attentionnelle, et gêne modérée à la marche ».
Seuls sont contestés par l'assuré, l'évaluation limitée à 10% de l'état séquellaire des deux hanches ainsi que l'absence de séquelles du rachis lombaire.
Aux termes du rapport d'évaluation des séquelles, tels qu'ils sont rapportés par le médecin conseil de l'assuré dans son avis médico-légal du 28 avril 2021, le médecin conseil du service du contrôle médical de la caisse, a constaté, s'agissant des hanches, une nette boiterie à la marche jambe droite surtout au démarrage, un accroupissement incomplet, des amplitudes : Droite 100/0 ; 40/30 ; 30/30 sans douleur - Gauche, bonnes amplitude mais une limitation de l'abduction avec 100/0 ; 30/30 ; 30/30 et, s'agissant du rachis lombaire, une raideur moyenne à la mobilisation et notamment une raideur lombaire basse (distance doigts de la main- sol de 30 centimètres) et une rotation à 30°, pour en conclure, s'agissant des hanches, à une gêne modérée à la marche avec limitation importante des mouvements des deux hanches indemnisables au taux de 10 % et, s'agissant du rachis lombaire, à des lombalgies séquellaires sans raideur, sans séquelles indemnisables.
Les constatations cliniques du médecin conseil du service du contrôle médical de la caisse, relatives aux hanches, sont identiques à celles que faisaient le professeur [R], orthopédiste, à l'examen du 10 octobre 2016, par lesquelles il concluait que les hanches sont souples avec, à droite, de très bonnes amplitudes, sans douleur, et à gauche, également de bonnes amplitudes mais une limitation de l'abduction.
L'assuré ne peut se référer aux constatations effectuées lors de l'examen clinique réalisé le 15 octobre 2019 à l'occasion de l'expertise médicale judiciairement ordonnée dans le cadre de la procédure en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur (pièce n°5 de l'appelant), dont rien n'indique qu'elles se rapportent à l'état existant à la date de la consolidation du 31 août 2017, pour en conclure, avec le médecin qu'il a mandaté, que les deux hanches présentent des limitations fonctionnelles en flexion, extension, rotation interne et rotation externe justifiant, selon lui, une évaluation d'incapacité pour chacune d'elles, non plus qu'il ne saurait reprocher au médecin consultant désigné par le tribunal de n'avoir pas procédé à son examen clinique le jour de l'audience, alors même que celui-ci a pu, à juste titre, considérer qu'un tel examen n'avait pas de pertinence plus de trois ans après la date de consolidation.
Enfin, au regard des données de l'examen clinique par le médecin conseil de la caisse qu'il a relayées et nonobstant la mention erronée d'une limitation qualifiée d'importante des mouvements des deux hanches qui est littéralement mentionnée dans le rapport d'évaluation des séquelles, le médecin consultant désigné par le tribunal a estimé comme étant conforme au barème le taux de 10% attribué pour la hanche gauche,les bonnes amplitudes de la hanche droite ne justifiant pas l'attribution d'un taux d'incapacité et la cour considère qu'il n'existe pas de motif pertinent en faveur d'une majoration du taux qui a été attribué à ce titre.
En revanche, s'agissant du rachis lombaire, la persistance d'une gène fonctionnelle du rachis lombaire, objectivée par le constat clinique d'une raideur moyenne à la mobilisation et notamment une raideur lombaire basse (distance doigts de la main- sol de 30 centimètres) et d'une rotation à 30°, associée à des doléances d'une douleur lombaire basse surtout en rotation, justifient l'attribution d'un taux d'incapacité permanente partielle de 5%, de sorte qu'il convient de réformer le jugement en ce sens.
La caisse qui succombe en son appel est tenue aux dépens et il est équitable de fixer à 1 500 euros l'indemnité qu'elle doit payer à l'assuré au titre des frais non compris dans les dépens qu'il a pu exposer pour faire valoir ses droits dans la présente procédure.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement en ce qu'il a rappelé que les frais de consultation médicale ordonnée au cours de l'audience sont à la charge de la Caisse nationale d'assurance maladie de [Localité 3],
L'INFIRME en ses autres dispositions,
Et statuant à nouveau du chef infirmé,
FIXE à 56%, dont 3% à titre de taux socio-professionnel, le taux d'incapacité permanente partielle de M. [B] [S] à la date consolidation du 31 août 2017, consécutivement à l'accident du travail dont il a été victime le 8 octobre 2014,
Y ajoutant,
CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] à payer à M. [B] [S] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de [Localité 3] aux dépens d'appel.
Le greffier, La présidente,