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04/05/2023 | FRANCE | N°23/03524

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 04 mai 2023, 23/03524


COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 04 MAI 2023

statuant en matière de soins psychiatriques





N° RG 23/03524 - N° Portalis DBVX-V-B7H-O6FY



Appel contre une décision rendue le 12 avril 2023 par le Juge des libertés et de la détention de LYON.



APPELANTE :



Mme [V] [D]

née le 10 Novembre 1988 à [Localité 1]

de nationalité Française



Actuellement hospitalisée au centre hospitalier de [Localité 3]



comparante a

ssistée de Maître Hadrien DURIF, avocat au barreau de LYON, commis d'office





INTIME :



CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Non comparant, régulièr...

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 04 MAI 2023

statuant en matière de soins psychiatriques

N° RG 23/03524 - N° Portalis DBVX-V-B7H-O6FY

Appel contre une décision rendue le 12 avril 2023 par le Juge des libertés et de la détention de LYON.

APPELANTE :

Mme [V] [D]

née le 10 Novembre 1988 à [Localité 1]

de nationalité Française

Actuellement hospitalisée au centre hospitalier de [Localité 3]

comparante assistée de Maître Hadrien DURIF, avocat au barreau de LYON, commis d'office

INTIME :

CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 3]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant, régulièrement avisé, non représenté

AUTRE PARTIE :

Madame [U] [H], en qualité de mandataire judiciaire été régulièrement avisé. A l'audience, elle est non comparante, non représentée.

Le dossier a été préalablement communiqué au Ministère Public qui a fait valoir ses observations écrites.

*********

Nous, Véronique MASSON-BESSOU, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, désignée par ordonnance de madame la première présidente de la cour d'appel de Lyon du 2 janvier 2023 pour statuer à l'occasion des procédures ouvertes en application des articles L.3211-12 et suivants du code de la santé publique, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Assistée de Jihan TAHIRI, Greffière placée, pendant les débats tenus en audience publique,

Ordonnance prononcée le 04 Mai 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signée par Véronique MASSON-BESSOU, Conseiller, et par Jihan TAHIRI, Greffière placée, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

**********************

[V] [D] a été admise en soins psychiatriques à temps complet sans consentement au centre hospitalier de [Localité 3] selon la procédure de péril imminent, au visa de l'article , L 3212-I-II 2° du Code de la santé publique, ce à compter du 4 Août 2021.

La mesure a été régulièrement renouvelée puis transformée en programme de soins par décision du directeur du centre hospitalier de [Localité 3] en date du 20 juin 2022, prise sur la base d'un certificat médical du même jour établi par le Docteur [B] , psychiatre de l'établissement.

Le programme de soins a été mensuellement renouvelé jusqu'au 6 avril 2023, date à laquelle le directeur du centre hospitaliser de [Localité 3] a ordonné une réintégration de la patiente en soins psychiatriques contraints sous la forme d'une hospitalisation complète, sur avis du Docteur [P], psychiatre de l'établissement en date du 6 avril 2023

Par ordonnance du 12 avril 2023, le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Lyon a autorisé le maintien de l'hospitalisation complète en soins psychiatriques contraints de [V] [D].

Par déclaration reçue au greffe de la Cour le 27 avril 2023, le conseil de [V] [D] a interjeté appel de cette décision, faisant valoir à l'appui de son appel que :

- la procédure d'admission en soins psychiatriques n'est pas régulière ,

- l'état de [V] [D] ne nécessite pas de soins psychiatriques sous contrainte,

[V] [D] souhaite bénéficier d'une mainlevée de son hospitalisation et qu'une expertise médicale concernant son état de santé devrait en tout état de cause être réalisée.

* * * * * * * * * * * * * * *

L'affaire a été évoquée à l'audience du 4 mai 2023.

A l'audience, le conseil de [V] [D] a sollicité la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte en raison d'irrégularités procédurales, et a développé les termes de ses conclusions N°2, selon lesquelles il fait valoir en substance :

-que la décision du Juge des libertés du 12 avril 2023 maintenant le placement en soins contraints n'a pas été notifiée à [V] [D], en contravention avec les dispositions de l'article R.3211-16 du Code de la santé publique, alors qu'elle doit être notifiée dans les meilleurs délais, que cela lui fait nécessairement grief et a porté atteinte à ses droits puisqu'elle n'a pu connaître les raisons de son maintien en hospitalisation et les voies de recours qui lui étaient offertes ;

-qu'aucun avis médical avant audience n'a été émis à l'occasion de la procédure devant le juge des libertés, en contravention avec les dispositions de l'article L.3211-12-1 du Code de la santé publique.

Il a ajouté qu'en tout état de cause, la mesure prise ne se justifiait pas et a sollicité une expertise médicale.

Il a enfin demandé que le centre hospitalier de [Localité 3] soit condamné à verser à [V] [D] la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

[V] [D], comparante, a été entendu en ses observations.

Le ministère public, par conclusions du 4 mai 2023, a requis la confirmation de l'ordonnance attaquée, la procédure étant selon lui régulière et fondée.

Il observe notamment dans ses conclusions :

- qu'un avis médical avant audience a bien été établi par le Docteur [P] le 7 avril 2023, contrairement à ce que soutient le conseil de [V] [D] ;

- que si l'ordonnance rendue par le juge des libertés le 12 avril 2023 a été notifiée à [V] [D] le 27 avril 2023, il ressort du certificat circonstancié du Docteur [P] du 28 avril 2023 que l'état de santé de la patiente n'a pas permis la notification sus-visée avant la date rappelée.

SUR QUOI

- Sur la recevabilité de l'appel:

En vertu de l'article R 3211-18 du Code de la santé publique l 'ordonnance du juge des libertés est susceptible d'appel devant le premier président de la Cour d'appel ou son délégué, dans un délai de dix jours à compter de sa notification.

En l'espèce, les pièces de la procédure établissent que l'ordonnance du du juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de Lyon en date du 12 avril 2023 a été notifiée à [V] [D] le 27 avril 2023, date à laquelle elle en a fait appel par la voie de son conseil .

Il s'ensuit que son appel est recevable.

- Sur la régularité de la procédure:

Aux termes de l'article L 3216-1 du Code de la santé publique, la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.

Le juge des libertés et de la détention connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L. 3211-12 et L. 3211-12-1.

Dans ce cas, l'irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n'entraîne la mainlevée de la mesure que s'il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l'objet ;

Concernant la notification de l'ordonnance du juge des libertés, l'article R.3211-16 du Code de la santé publique dispose :

« L'ordonnance est notifiée sur place aux parties présentes à l'audience ainsi qu'au conseil de

la personne faisant l'objet de soins psychiatriques qui en accusent réception. Le juge leur fait

connaître verbalement le délai d'appel et les modalités suivant lesquelles cette voie de recours

peut être exercée. Il les informe que seul l'appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d'appel ou son délégué.

La notification aux parties qui n'ont pas comparu en personne est faite dans les meilleurs délais par tout moyen permettant d'en établir la réception. »

En l'espèce, il ressort de l'examen des pièces de la procédure :

- que [V] [D] n'a pas comparu à l'audience du Juge des libertés du Tribunal judiciaire de Lyon du 12 avril 2023;

- que l'ordonnance du 12 avril 2023 n'a pas été notifée à [V] [D] par l'hôpital, en dépit d'une demande du bureau des admissions du 12 avril 2023;

- que ce n'est que lorsque le conseil de [V] [D] s'est rendu à l'hôpital de [Localité 3] le 27 avril 2023 à la demande de [V] [D], que l'ordonnance du 12 avril 2023 a été notifiée à [V] [D], soit 16 jours après qu'elle ait été rendue dans un contexte où, aux termes des dispositions précitées, la notification doit avoir lieu dans les meilleurs délais .

Par ailleurs, rien ne permet de retenir que l'état de santé de [V] [D] faisait obstacle à ce que la décision lui soit notifiée, étant observé qu'aucun certificat ou avis médical n'a été établi en ce sens et qu'un certificat médical daté du lendemain de la date de notification (Docteur [P], 28 avril 2023) ne saurait valider l'irrégularité antérieure, outre qu'il ne ressort aucunement du dit certificat, qui opère une synthèse du parcours médical de [V] [D], que celle-ci n'était pas apte en raison de son état de santé à recevoir notification de l'ordonnance du 12 avril 2023.

Or, cette absence de notification fait à l'évidence grief à [V] [D] et a porté atteinte à ses droits puisque d'une part elle n'a pas eu connaissance 'dans les meilleurs délais' d'une décision restrictive de sa liberté individuelle et des raisons pour lesquelles elle était maintenue dans le cadre de l'hospitalisation sous contrainte, et que d'autre part elle n'a pas eu connaissance des voies de recours dont elle disposait pour contester la décision et des formalités qu'il convenait d'entreprendre à cette fin.

Dès lors, l'irrégularité procédurale soulevée par le conseil de [V] [D] est fondée et il convient, sans qu'il soit nécessaire d'examiner les autres moyens d'irrégularité soulevés par son conseil, d'infirmer l'ordonnance du 12 avril 2023 et d'ordonner la mainlevée de l'hospitalisation en soins psychiatriques contraints prononcée au bénéfice de [V] [D] .

Enfin, il ressort des différents certificats médicaux produits aux débats, notamment celui du Docteur [P] du 28 avril 2023 que [V] [D] est connue pour un trouble bipolaire qui évolue depuis plusieurs années, son état de santé ayant justifié plusieurs hospitalisations sous contrainte avec en alternance des programmes de soins, et qu'il nécessite un suivi régulier, ce que la patiente a d'ailleurs reconnu à l'audience .

Il convient dans ce contexte de faire application des dispositions de l'article L3111-12-1 III du Code de la santé publique et de différer de 24 heures les effets de la présente décision, afin de permettre, selon ce que les médecins jugeront opportun, la mise en place d'un programme de soin.

-Sur les demandes accessoires

Les dépens de la présente procédure, au regard de sa nature, doivent être pris en charge par le Trésor public.

Or, seule la partie tenue aux dépens peut être condamnée sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile .

Il en résulte que la demande présentée par [V] [D] sur le fondement sus-visé à l'encontre du Centre hospitalier de [Localité 3] doit être rejetée .

PAR CES MOTIFS

Déclarons l'appel de [V] [D] recevable en la forme,

Infirmons l'ordonnance attaquée et ordonnons la mainlevée de la mesure d'hospitalisation en soins psychiatriques sans consentement dont fait l'objet [V] [D] ;

Disons que la présente ordonnance prendra effet dans un délai maximum de 24 heures courant à compter de sa notification, afin de permettre, selon ce que les médecins jugeront opportun, la mise en place d'un programme de soin;

Laissons les dépens à la charge du trésor public.

Rejetons la demande présente par [V] [D] sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile à l'encontre du centre hospitalier de [Localité 3] .

Le Greffier, Le Conseiller délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 23/03524
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;23.03524 ?
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