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04/05/2023 | FRANCE | N°20/06591

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 04 mai 2023, 20/06591


N° RG 20/06591 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NIEG















Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 02 novembre 2020



RG : 2019j1133











[K]

[C]



C/



S.A. CRÉDIT LYONNAIS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 04 Mai 2023







APPELANTS :



M. [W] [K]
>[Adresse 4]

[Localité 1]



Mme [T] [C] épouse [K]

[Adresse 4]

[Localité 1]



Représentés par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant, et ayant pour avocat plaidant Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO DUBUCQ, avoc...

N° RG 20/06591 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NIEG

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 02 novembre 2020

RG : 2019j1133

[K]

[C]

C/

S.A. CRÉDIT LYONNAIS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 04 Mai 2023

APPELANTS :

M. [W] [K]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Mme [T] [C] épouse [K]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentés par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant, et ayant pour avocat plaidant Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO DUBUCQ, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

INTIMEE :

S.A. CRÉDIT LYONNAIS agissant poursuites et diligences de la Direction Recouvrement domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Pierre BUISSON, avocat au barreau de LYON, toque : 140, postulant et par Me Karine DABOT de la SELARL MATHIEU DABOT & ASSOCIES, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE, substituée et plaidant par Me BENEJAM, avocat au barreau d'AIX-EN-PROVENCE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 25 Novembre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Février 2023

Date de mise à disposition : 04 Mai 2023

Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte authentique du 25 juillet 2005, M. [W] [K] et Mme [T] [C] épouse [K] ont signé un prêt immobilier après la SA Crédit Lyonnais pour un montant de 425.380 euros sur 212 mois. Le taux effectif global était de 5,609%.

Par acte sous-seing privé du 9 mars 2006, les époux [K] ont signé un nouveau prêt avec la société Crédit Lyonnais pour réaliser des travaux pour un montant de 50.000 euros sur 120 mois, avec un taux effectif global de 5,285 %.

Suivant lettre recommandée avec accusé de réception du 17 décembre 2015, le Crédit Lyonnais a mis en demeure M. et Mme [K] de payer la somme de 16.807,39 euros au titre des échéances impayées depuis le 1er août 2015 au titre du prêt immobilier et intérêts de retard dans un délai de quinze jours sous peine de prononcé de la déchéance du terme.

Le 5 mars 2016, M. [K] a régularisé une reconnaissance de dette avec un échéancier de remboursement. Cet échéancier n'a pas été respecté.

Par acte du 6 mars 2017, la société Crédit Lyonnais a fait délivrer un commandement de payer valant saisie afin d'obtenir le paiement de la somme de 272.408,08 euros, à défaut de paiement, la poursuite de la saisie du bien immobilier. Ce commandement de payer étant demeuré sans effet, par acte extrajudiciaire du 16 mai 2017, la société Crédit Lyonnais a assigné les époux devant le juge de l'exécution des saisies immobilières du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence. Par jugement du 26 février 2018, le tribunal a validé la procédure de saisie immobilière et ordonné la vente aux enchères publiques de l'immeuble saisi. Ce jugement a été confirmé par arrêt du 8 novembre 2018 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence. Par un arrêt du 22 janvier 2020, la première chambre civile de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi en cassation des époux [K].

Par acte extrajudiciaire du 13 novembre 2017, les époux [K] ont assigné la société Crédit Lyonnais devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir des dommages-intérêts du fait de leur taux d'endettement excessif.

Par jugement contradictoire du 2 novembre 2020, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé acquise la prescription quinquennale à compter du 6 mars 2011,

- jugé irrecevable l'action en responsabilité entamée par M. et Mme [K] à l'encontre de la société Crédit Lyonnais,

- jugé arrêtée la créance, que détient la société Crédit Lyonnais à l'encontre de M. et Mme [K], à la somme de 272.408,08 euros, outre intérêt à courir jusqu'à parfait règlement au taux de 7,40% l'an, conformément au jugement rendu le 26 février 2018 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence,

- condamné solidairement M. et Mme [K] à payer la somme de 2.000 euros à la société Crédit Lyonnais au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné solidairement M. et Mme [K] aux entiers dépens.

M. [K] et Mme [C] épouse [K] ont interjeté appel par acte du 25 novembre 2020.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 25 juin 2021 fondées sur les articles 1240 et 2224 du code civil, les articles L.312-12 et L.312-14 du code de la consommation et les articles 699 et 700 du code de procédure civile, M. [K] et Mme [C] épouse [K] demandent à la cour de :

- déclarer recevable et fondé leur appel,

y faisant droit,

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

et, statuant à nouveau,

- déclarer recevable et non-prescrite leur action,

à titre principal,

- condamner la société Crédit Lyonnais à leur verser la somme de 475.379 euros au titre du préjudice né du manquement à l'obligation de mise en garde,

à titre subsidiaire,

- condamner la société Crédit Lyonnais à leur verser la somme de 220.083,34 euros au titre du préjudice né du manquement au devoir de conseil,

en tout état de cause,

- débouter la société Crédit Lyonnais de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

les décharger des condamnations prononcées contre eux en principal, intérêts, frais et accessoires,

- ordonner le remboursement des sommes qui auront pu être versées en vertu de l'exécution provisoire de la décision entreprise, en principal, intérêts, frais et accessoires, avec intérêts au taux légal à compter de leur versement, et ce au besoin à titre de dommages-intérêts,

- condamner la société Crédit Lyonnais à porter et leur payer la somme de 5.000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Crédit Lyonnais à tous les dépens,

- dire que ceux d'appel pourront être recouvrés directement par Me Dubucq, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 3 mai 2021, la société Crédit Lyonnais demande à la cour de :

in limine litis,

- confirmer la décision de première instance,

- confirmer l'irrecevabilité de l'action en responsabilité exercée par les consorts [K] à son encontre en raison de l'acquisition de la prescription quinquennale depuis le 16 juillet 2010,

en tout état de cause,

- juger que M. et Mme [K] ont la qualité d'emprunteurs avertis,

- juger qu'il ne peut être constaté aucun risque d'endettement excessif compte tenu des revenus et du patrimoine de M. et Mme [K] au moment de la souscription des prêts litigieux,

en conséquence,

- débouter M. et Mme [K] de leur demande de condamnation à son égard sur le fondement du manquement à une obligation de mise en garde,

- débouter M. et Mme [K] de leur demande de condamnation à son égard sur le fondement du manquement à un devoir de conseil,

- condamner M. et Mme [K] à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 16 novembre 2021, les débats étant fixés au 9 février 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de M. et Mme [K]

À l'appui de la recevabilité de leur action, M. et Mme [K] ont fait valoir :

- la signature d'un premier prêt le 25 juillet 2005 et d'un second le 9 mars 2006 auprès du Crédit Lyonnais

- l'objet de la présente action qui a pour objet la reconnaissance de la responsabilité du Crédit Lyonnais pour défaut de mise en garde des emprunteurs au titre de l'endettement excessif dans l'hypothèse d'une perte d'emploi

- la révélation du dommage uniquement lorsque les appelants ont connu des difficultés financières, alors qu'ils ne pouvaient avoir conscience de l'ampleur de leurs difficultés en l'absence d'informations lors de la souscription des prêts

- l'existence d'un dommage postérieur lié à la faute de la banque révélé uniquement lors de la perte d'emploi et des difficultés financières subséquentes, notamment en août 2015 avec les premiers impayés non régularisés et la réception de lettre de mise en demeure le 17 décembre 2015

- la signature de bonne foi d'un échéancier en 2016 afin de régulariser la situation

- l'introduction de l'instance le 13 novembre 2017 soit moins de deux ans après le premier impayé non régularisé.

Pour sa part, le Crédit Lyonnais a conclu à l'irrecevabilité des demandes et a fait valoir :

- la mise en 'uvre de la procédure du fait de la mise en 'uvre en parallèle d'une procédure de saisie immobilière pour défaut de paiement, alors que les appelants ont payé les échéances pendant plus de 10 ans sans émettre de critique

- le caractère dilatoire de l'action qui n'a pas empêché la poursuite de la procédure de saisie immobilière

- l'application des dispositions de l'article 2224 du code civil qui prévoit une prescription de 5 années, étant rappelé que le prêt date de 2007, et que la prescription de l'action en responsabilité pour manquement au devoir de mise en garde part de la date de conclusion des prêts, le dommage résultant d'un manquement à l'obligation de mise en garde consistant en une perte de chance de ne pas contracter qui se manifeste dès l'octroi du crédit

- le caractère inapplicable de l'arrêt visé par M. et Mme [K] dans leurs écritures à la présente espèce, en ce que l'espèce était différente puisque portant sur un devoir de mise en garde sur des risques liés à la défiscalisation, à la viabilité économique d'un investissement locatif, le tout dans le cadre de l'octroi de prêts assortis d'un report de 2 ans durant laquelle les versements étaient limités et donc durant laquelle l'emprunteur ignorait légitimement son dommage

- s'agissant du risque d'endettement excessif allégé par M. et Mme [K] dans l'hypothèse d'une perte d'emploi, le rappel que lors de la signature des prêts, il avaient connaissance de leur taux d'endettement et ne peuvent prétendre découvrir douze ans après la situation, étant rappelé que ce ne sont pas les conditions de conclusion du prêt qui ont abouti au défaut de paiement mais la perte de revenus des appelants à compter d'août 2015

- le caractère inopérant de la fixation de la prescription à compter du premier impayé non régularisé.

L'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

Il est constant que le point de départ du délai de l'action en prescription pour manquement à l'obligation de mise en garde d'une banque a pour point de départ la date de conclusion des contrats de prêts sachant que le dommage résultant d'une défaut de mise en garde consiste en une perte de chance de ne pas contracter, perte de chance qui se manifeste lors de l'octroi des crédits.

En l'espèce, les appelants entendent reprocher au Crédit Lyonnais un défaut de mise en garde et un manquement à son devoir de conseil pour ne pas les avoir informé d'un prétendu risque d'endettement excessif notamment dans l'hypothèse d'une perte d'emploi alors que ce taux était connu par les appelants dès la souscription des deux contrats de prêts.

En outre, il est constant que les difficultés financières de M. et Mme [K] sont sans lien avec la seule souscription des prêts puisque les premiers impayés non régularisés ne sont intervenus qu'en 2015 en raison de leur perte d'emploi soit une période de près de dix ans sans aucune difficulté.

Dès lors, c'est à raison que les premiers juges ont retenu la prescription de l'action de M. et Mme [K] à compter du 9 mars 2011 soit cinq ans après la souscription du prêt complémentaire et ont déclaré irrecevable l'action des intéressés.

Il convient dès lors de confirmer la décision déférée dans son intégralité.

Sur les demandes accessoires

M. et Mme [K] échouant en leurs prétentions, il convient de les condamner à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande d'accorder au Crédit Lyonnais une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

M. et Mme [K] seront condamnés à lui verser à ce titre la somme de 3.500 euros.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Confirme dans son intégralité la décision déférée,

Y ajoutant

Condamne M. [W] [K] et Mme [T] [C] épouse [K] à supporter les entiers dépens de l'instance d'appel,

Condamne M. [W] [K] et Mme [T] [C] épouse [K] à payer à la SA Le Crédit Lyonnais la somme de 3.500 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/06591
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;20.06591 ?
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