La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/05/2023 | FRANCE | N°19/06582

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 04 mai 2023, 19/06582


N° RG 19/06582 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MTIK









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 02 septembre 2019



RG : 2018j1232







SARL CLS CONSEILS



C/



SARL JUDI@SOCIAL





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 04 Mai 2023







APPELANTE :



SARL CLS CONSEILS représentée par son gérant en exercic

e domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Emmanuel MOUCHTOURIS de la SELARL SOCIETE D'AVOCATS SAINT CYR AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1830





INTIMEE :



SARL JUDI@SOCIAL représentée par mad...

N° RG 19/06582 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MTIK

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond du 02 septembre 2019

RG : 2018j1232

SARL CLS CONSEILS

C/

SARL JUDI@SOCIAL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 04 Mai 2023

APPELANTE :

SARL CLS CONSEILS représentée par son gérant en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Emmanuel MOUCHTOURIS de la SELARL SOCIETE D'AVOCATS SAINT CYR AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1830

INTIMEE :

SARL JUDI@SOCIAL représentée par madame [W] [N], gérante

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Patricia SEIGLE de la SELAS SEIGLE. SOUILAH. DURAND-ZORZI, avocat au barreau de LYON, toque : 2183

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 19 Mai 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Mars 2023

Date de mise à disposition : 04 Mai 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La Sarl CLS Conseils exploite un fonds libéral d'expertise comptable et de commissariat aux comptes. Son capital social est détenu par la holding Sarl Epysod, elle-même détenue par quatre associés dont Mme [W] [N]. A compter du 11 février 2017, Mme [N] a quitté ses fonctions d'associée dans des conditions conflictuelles.

La Sarl Judi@Social exerce une activité de réalisation de prestations de conseil notamment en matière sociale et des affaires. Cette société est gérée par Mme [N] qui n'a pas la qualité d'expert-comptable. Elle avait pour donneur d'ordre exclusif la société CLS Conseils.

Le 11 février 2017, la société Judi@Social et la société CLS Conseils ont signé une convention de prestation de service pour une durée déterminée afin de cesser les relations existantes entre les deux sociétés. La convention prévoyait notamment que la société CLS Conseils verserait à la société Judi@Social une redevance forfaitaire de 46.200 euros HT en six mensualités. Ce contrat n'a pas été exécuté jusqu'à son terme par les parties.

Par acte extrajudiciaire le 2 août 2018, la société Judi@Social a assigné la société CLS Conseils devant le tribunal de commerce de Lyon afin d'obtenir notamment la somme de 18.840 euros TTC au titre du contrat du 11 février 2017 et la somme de 18.191,52 euros TTC au titre d'une facture impayée du 18 mai 2017 relative à la régularisation des prestations 2016.

Par jugement contradictoire du 2 septembre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- condamné la société CLS Conseils à payer à la société Judi@Social la somme de 15.400 euros HT (18.480 euros TTC) en application du contrat entre les parties,

- condamné la société CLS Conseils à payer à la société Judi@Social la somme de 15.159,60 euros HT (18.191,52 euros TTC) au titre de la régularisation des prestations de l'année 2016,

- rejeté la demande de la société CLS Conseils au titre du chiffre d'affaires prétendument détourné et des prestations prétendument non effectuées,

- débouté la société Judi@Social de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

- condamné la société CLS Conseils à payer à la société Judi@Social la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- rejeté comme non fondés toutes autres demandes, moyens, fins et conclusions contraires des parties,

- condamné la société CLS Conseils à supporter les entiers dépens.

La société CLS Conseils a interjeté appel par acte du 26 septembre 2019.

* * *

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 20 décembre 2019 fondées sur les articles 1603 et 1134 ancien du code civil, la société CLS Conseils demande à la cour de :

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions exceptées en ce qu'il a débouté la société Judi@Social de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

y revenant,

- rejeter l'intégralité des demandes de la société Judi@Social,

- condamner la société Judi@Social à lui verser la somme de 89.750 euros au titre du chiffre d'affaire détourné par la société Judi@Social,

- condamner la société Judi@Social à lui verser la somme de 27.720 euros au titre des prestations non effectuées,

- condamner la société Judi@Social à lui verser la somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts,

- condamner la société Judi@Social à lui verser la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel.

* * *

                                   

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 3 septembre 2020 fondées sur les articles 1103 et 1104 du code civil, la société Judi@Social demande à la cour de :

- rejeter toutes demandes, fins, moyens et conclusions contraires,

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il l'a débouté de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive,

statuant à nouveau de ce chef,

- condamner la société CLS Conseils à lui payer 10.000 euros de dommages-intérêts pour résistance abusive,

y ajoutant,

- condamner la société CLS Conseils à lui payer 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- condamner la société CLS Conseils aux entiers dépens d'appel.

                                                                                                                                

La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 mai 2021, les débats étant fixés au 1 mars 2023

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il est précisé que le litige est soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat litigieux est postérieur au 1er octobre 2016.

Sur l'exécution de la convention du 11 février 2017

La société CLS Conseils fait valoir que :

- l'intimée réalise des prestations de conseil juridique en droit social notamment, au profit des entreprises, et par le biais de cette structure, sa gérante était associée dans la holding Epysod puis elle a revendu ses parts pour un prix considérable intégralement réglé,

- Mme [N] a obtenu dans le même temps le bénéfice d'une convention de prestation de services d'une durée strictement limitée à 6 mois, pour finaliser les dossiers en cours, et dans cette convention, il était insisté sur le respect de la clientèle de la concluante pour éviter son détournement ; en contrepartie, Mme [N] a été rémunérée à hauteur de 7.700 euros HT par mois, sans contraintes,

- sur la somme de 18.400 euros, Mme [N] a affirmé avoir été exonérée d'exécution de prestations, mais elle a produit deux factures évoquant justement de telles prestations ; le tribunal de commerce est allé au delà de ses demandes en lui accordant une somme au titre de l'exécution du contrat et non de l'exécution effective de prestations, et il a éludé la question du départ de 4 clients seulement sur un portefeuille de 600,

- Mme [N] connaissait les raison du non paiement des prestations pour mai et juin 2017 car elle ne respectait pas son obligation de respect de la clientèle et de discrétion sur les raisons de son départ ; il lui a été demandé de limiter sa présence physique au bureau et elle a été exonérée du suivi courant des clients mais elle devait continuer à suivre ses dossiers en cours mais elle n'a plus suivi le moindre dossier au prétexte inexact d'une rupture de son accès à distance mais elle a en plus entamé un large détournement de clientèle, en se faisant notamment passer pour avocate alors qu'elle avait été mise en garde par l'Ordre, et pour détourner la clientèle, Mme [N] est entrée au service du cabinet d'avocats Epsilon et nombre de clients de la concluante ont suivi,

- elle n'a donc pas exécuté les prestations prévues, et celles-ci relèvent de l'exercice illégal de la profession d'avocat subsidiairement, l'intitulé de ses factures ne se rattache pas à une prestation, et elle a profité de cette période pour détourner la clientèle,

- le tribunal l'a retenu pour 4 clients sans en tirer de conséquences, alors qu'il s'agit de la quasi intégralité de son activité de conseil ; ces clients anciens pouvaient rester sur 4 années,

- le tribunal de commerce n'a pas répondu à sa demande reconventionnelle et Mme [N] doit restituer 7.700 euros sur les mois de février à avril.

La société Judi@Social réplique que :

- elle a été uns structure créée à l'origine par M. [B] et Mme [N] qui ne pouvaient être gérants au sein d'Epysod puisque non experts-comptables, et ils pouvaient être rémunérés comme les autres associés avec le statut de travailleur non salarié ; elle était le département juridique et social de CLS Conseils et connue comme tel des clients,

- selon la convention du 11 février 2017, il était dû une redevance forfaitaire payable en 6 mensualités pour 6 mois d'activité mais les 4 premiers termes n'ont pas été payés à la bonne date et la société CLS Conseils a mis un terme par anticipation au contrat sans payer les dernières redevances, Mme [N] a été enjointe de le plus se rendre au bureau et il a été mis fin à ses accès internet,

- il n'y a eu aucun manquement à une obligation de discrétion (non prévue par la convention) puisque Mme [N] a avisé les clients de son départ par loyauté et correction,

- les prestations ont été réalisées dans des conditions difficiles et étaient licites, alors que l'appelante a tenté d'empêcher leur réalisation ; l'intitulé des factures a toujours été le même, les prestations ont été réalisées pour l'appelante ; cette dernière a déposée une plainte dont elle ne justifie pas auprès du conseil de l'Ordre pour se pré-constituer un élément pour éviter de payer, ce qui constitue un chantage,

- il n'y a eu aucun détournement de clientèle, Mme [N] n'a pas signé la convention à titre personnel, les tableaux récapitulatifs de chiffre d'affaires ne sont justifiés par aucune pièce comptable, les pièces adverses n'établissent aucun détournement,

- il n'y a lieu à aucune restitution, au vu de la convention et du comportement adverse.

Sur ce,

Selon l'article 1193 du code civil, 'Les contrats ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise'.

Selon l'article 1212 du même code, 'Lorsque le contrat est conclu pour une durée déterminée, chaque partie doit l'exécuter jusqu'à son terme'.

En l'espèce, sur la rémunération, l'article 3 du contrat stipule que 'la rémunération des prestations a été déterminée en fonction de la poursuite des services souhaités par le bénéficiaire CLS Conseils). Aussi, en contrepartie des prestations réalisées par le Prestataire, et compte tenu de leur nature et de la durée de la convention, le Bénéficiaire versera au prestataire (Judisocial) une redevance forfaitaire de 46.200 € HT TVA en sus correspondant aux 6 mois d'activité. La redevance sera payable en six mensualités de 7.700 € HT chacune le dernier jour de chaque mois sous déduction des factures adressées directement aux clients CLS Conseils durant cette période. La première mensualité sera payée le 31 janvier 2017".

L'article 6 précise que la rémunération est due au prestataire même au cas où le bénéficiaire mettrait fin à la convention par anticipation, et à titre d'indemnité.

Pour sa part, l'article 4 dispose que' 'Obligations du prestataire

Le Prestataire s'engage à déployer toute la diligence professionnelle requise afin de fournir tous les services, documents et informations auxquels il est tenu en vertu de la

présente Convention et à tout mettre en 'uvre pour fournir au Bénéficiaire des services satisfaisants.

Il est toutefois expressément reconnu que le Prestataire ne pourra en aucun cas être tenu pour responsable de la mauvaise utilisation ou de la non-utilisation par le Bénéficiaire des directives

et recommandations qu'il sera amené à donner en vertu de la Convention ou, des services qu'il

sera amené à fournir.

Le Prestataire devra collaborer et organiser le Département Juridique et Social du Bénéficiaire. Le Prestataire devra traiter les demandes de service selon l'ordre dans lequel elles lui sont parvenues et devra faire en sorte que les délais d'exécution soient compatibles avec la nature de la prestation demandée et le degré d'urgence que celle-ci pourra représenter'.

Ainsi, la convention litigieuse ne mentionne aucun horaire de travail et ne détaille pas les prestations à réaliser.

Pour justifier de la non exécution de la convention, la société appelante se prévaut de manquements adverses, d'où les modalités mises en oeuvre par elle.

Sur le manque de discrétion allégué, il est produit un mail de M. [E] [X] dénommé 'attestation' et indiquant qu'en qualité d'ancien directeur général de GHD France, Mme [N] l'avait informée début mai 2017 de ce qu'elle ne travaillait plus pour le cabinet CLS Conseils. Le message de M. [X] ne caractérise cependant nullement un manquement à une obligation de discrétion, s'agissant d'une simple information de courtoisie non confidentielle(les causes du départ ne sont pas précisées notamment) et manifestement sans incidence sur le secret des affaires. Aucune obligation 'de discrétion' contractuelle ne s'opposait par ailleurs au renseignement donné. Ce grief n'est pas fondé et ne peut justifier la modification des conditions de travail et ne refus de paiement.

S'agissant de l'absence de prestations alléguée, il résulte des pièces du dossier :

- que dans le cadre d'un échange de sms, M. [T] a évoqué un départ anticipé de mme [N] et proposé un rendez-vous pour en discuter le 8 mai, que Mme [N] a indiqué être 'ok' si elle était payée intégralement jusqu'au 30 juin,

- que par courrier du 8 mai 2017 l'appelante, prenant prétexte d'une mauvaise ambiance au bureau et précisant 'comme nous en avons convenu ensemble' a demandé à Mme [N] de ne plus se représenter au bureau, la concluante indiquant devoir gérer son agenda et précisant la payer comme si elle venait jusqu'au 30/06. Elle indiquait qu'il était seulement demandé à Mme [N] d'être disponible pour des conseils et suivis des dossiers,

- qu'un courrier circulaire du 9 mai 2017 était également envoyé à divers interlocuteurs avec Mme [N] en copie pour leur indiquer ces modalités en précisant que Mme [N] était exonérée du suivi courant des clients mais qu'elle continuait à suivre les dossiers en cours et passerait au bureau pour récupérer, consulter, imprimer ou poster les dossiers concernés comme CCE Bourgogne, ER2A ou GDH, que le même jour, CLS Conseils indiquait à son informaticien et à Mme [N] que 'dans la précipitation, nous avons demandé de couper l'accès à distance de [W] ainsi que ses mails', qu'il convenait d'opérer une nouvelle connexion puisque Mme [N] continuait à suivre ses dossiers et devait pouvoir accéder à l'ensemble de ses documents.

Il est justifié par un constat d'huissier du 10 mai 2017 que Mme [N], à cette date, n'avait plus accès à distance à son poste de travail. Si la société appelante produit une attestation du 28 septembre 2018 de la société Interface, dont un prestataire informatique atteste que Mme [N] s'est fait remettre ses accès complets au système d'information de la société le 10 mai 2017, ce courrier dont les informations techniques sont invérifiables ne rapporte pas la preuve du maintien ou rétablissement de cette connexion.

Il apparaît donc que la bénéficiaire de la convention en a ainsi modifié unilatéralement les modalités d'exécution sans justifier d'un accord de Mme [N] par aucune pièce, que manifestement cette dernière était privée d'outils indispensables à la réalisation des prestations convenues.

Par ailleurs, la société appelante se contente d'affirmer une absence de diligences sans offre de preuve tandis que l'intimée justifie de diligences concrètes (pièce 50). Elle ne peut se prévaloir de l'intitulé des factures sous prétexte d'un intitulé elliptique alors qu'elle avait jusque là accepté de telles factures. Ce motif est donc totalement inopérant. L'appelante ne peut donc refuser le paiement des factures aux motifs d'une inexécution de prestations de son adversaire.

Sur l'exercice de la profession d'avocat, la société CLS Conseils produit un mail de M. [Z] [L] indiquant 'sur les conseils amicale de Maître [N]....' (Sic). Toutefois, ce message qui n'émane pas de Mme [N] mais d'un tiers est insuffisant à établir un exercice illégal de la profession d'avocat par cette dernière, le témoin pouvant tout à fait s'être mépris sur la qualité de son interlocutrice et ce dernier a d'ailleurs contesté que Mme [N] se soit présentée comme avocate. Quant au courrier de l'ordre des avocats de Lyon du 11 mai 2017, ils ne fait état que 'd'inquiétudes' au regard de renseignements donnés à l'Ordre sur le fait que Mme [N] serait 'visiblement susceptible de vous trouver en infraction'..., ce qui est totalement inopérant à établir la véracité d'un manquement. Cet élément est donc totalement inopérant pour justifier un refus de règlement des sommes dues au titre de la convention.

S'agissant du détournement de clientèle allégué, il est fait état d'un débauchage massif qui n'est pas avéré alors que les pièces 15 à 17 constituées par des courriers de la société Epsilon avocats demandant la transmission de dossiers concernent quatre clients.

L'article 7 du contrat stipule '' Clause de non détournement de clientèle et de non débauchage

Au terme des présentes, le Prestataire et/ou [W] [N] s'engagent à ne pas détourner directement ou indirectement et de manière déloyale les clients du Bénéficiaire dans les domaines du Social et des Affaires confiés dans le cadre de la présente Convention.

Cette clause est limitée sur une durée de trois ans. Elle reflète l'esprit des Parties afin de protéger le Bénéficiaire de tout acte de déloyauté de la part du Prestataire.

Plus généralement, le Prestataire et/ou [W] [N] s'engagent à ne pas avoir de comportement de nature à créer une confusion dans l'esprit d'un client du Bénéficiaire.

Pareillement, le Prestataire et/ou [W] [N] s'engagent à ne pas débaucher le personnel salarié du Bénéficiaire. Toutefois, les Parties n'exclut pas qu'un accord pourra intervenir entre elles pour le travail partagé de certains collaborateurs du Bénéficiaire.

En cas de manquement à ces obligations, le Bénéficiaire se réserve le droit de poursuivre le Prestataire et/ou [W] [N] en remboursement du préjudice effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de la concurrence déloyale ainsi constatée'.

La société CLS Conseils produit un courrier de la société Trident indiquant que Mme [N] les avait contacté après son départ du cabinet pour proposer ses services dans la réalisation des assemblées générales de la société mais qu'il n'avait pas été donné suite à cette proposition.

Or, l'attestation de la société Trident totalement elliptique, ne comporte aucune date précise et ne caractérise pas la réalité d'un débauchage intervenant en violation de la stipulation contractuelle susvisée.

Il est ensuite relevé que les courriers se rapportant à des transferts de dossiers n'émanent pas de l'intimée.

Par ailleurs, la société CCE Bourgogne atteste de l'absence de démarches de Mme [N] auprès d'elle et indique l'avoir contacté parce qu'elle suivait les dossiers sur le plan juridique. Il n'est pas contesté d'autre part que l'appelante a renvoyé cette société vers Mme [N] qui pouvait poursuivre ce dossier compliqué. Il ne résulte donc pas des productions de la société appelante un comportement fautif de la société intimée qui justifierait une inexécution contractuelle au titre des dossiers CCE Bourgogne, Sci les Cigales et Scm LGE.

S'agissant des sociétés EZRA Sud ouest, aucune manoeuvre de débauchage n'est justifiée non plus et il n'est pas démenti que ces sociétés étaient déjà en relation avec le cabinet d'avocats Epsilon dans le cadre d'un litige.

Aucune preuve d'un débauchage massif de clientèle par l'intimée n'est en conséquence établi, étant souligné au surplus que la pièce 25 établie par l'appelante pour faire état d'une perte de chiffre d'affaire concernant plusieurs sociétés dont certaines ne sont pas concernées par le transfert incriminé dans les conclusions de CLS Conseils a été manifestation établie pour les besoins de la cause et se révèle totalement inopérante.

Il découle de ce qui précède que la société CLS Conseils qui échoue à établir un comportement fautif adverse la dégageant de ses propres obligations doit régler le solde des mensualités, le jugement étant confirmé en ce qu'il a fait droit à cette demande. Par voie de conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de restitution de sommes de la société CLS Conseils.

Sur la demande de la société CLS Conseils au titre d'un chiffre d'affaires détourné

Dans la mesure où aucun comportement fautif de Mme [N] et par voie de conséquence de la société Judi@Social, la société appelante échoue à établir le bien fondé de sa demande de dommages intérêts à ce titre et le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention.

Sur la régularisation des prestations de l'année 2016

L'appelante soutient que, sur la somme de 18.191,52 euros pour 'régularisation de prestation 2016", il est demandé paiement d'une facture du 18 mai 2017 qui n'a aucun fondement et fait double emploi avec une autre qui a été réglée pour 8.200 euros de sorte que seule la différence serait due le cas échéant. Elle précise que le complément de prix visé par son courrier du 8 mai 2017 est le solde de paiement du rachat des parts sociales de Mme [N] dans le capital social de la société Epysod dont un échelonnement était prévu jusqu'au 30 juin 2017.

L'intimée rétorque que c'est l'appelante qui l'a elle-même arrêtée au titre du bilan pour Judi@Social, qu'elle est dans le détail de l'actif circulant, que Mme [N] devait recevoir les mêmes prestations que les autres associés et que la facture en pièce 20 adverse est un faux.

Sur ce,

Le courrier du 8 mai 2017 évoque un complément de prix en plus de la rémunération convenue mais sans plus de précision de sorte qu'il ne peut être affirmé que la société appelante s'est engagée à payer le complément 2016 réclamé au vu de cette simple formulation.

La pièce 20 de l'appelante est une facture 144 au nom de Mme [N], portant sur une 'prestation complémentaire' de 8.200 euros. Cette facture précède celle dont le paiement est réclamé et qui fait état d'une régularisation de prestations. Elle est manifestement douteuse puisque la facture du 30 avril 2017 qui a été acquittée par l'appelante pour le mois d'avril 2017 (montant TTC de 9.240 euros) porte le même numéro de sorte que la facture litigieuse apparaît ainsi avoir été établie pour les besoins de la cause. Il ne peut donc rien en être déduit même si un montant de 8.200 euros a bien été réglé, ce qui peut tout à fait correspondre à une prestation distincte comme indiqué par l'intimée de sorte qu'il n'y a pas lieu de déduire ce montant de la somme réclamée.

Ensuite, les pièces comptables de l'intimée dont il n'est pas contesté qu'elles étaient établies par la société CLS Conseils et auxquelles les deux parties se réfèrent intègrent une somme de 15.159,6 euros 'créance client factures à établir' . La somme réclamée est donc justifiée, et doit s'entendre Ht à défaut de précision contraire.

En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a fait droit à cette prétention.

Sur les dommages intérêts

La société appelante qui succombe sur ses prétentions n'est pas fondée à demander paiement de dommages intérêts et le jugement est confirmé sur ce point.

La société intimée fait ensuite valoir la particulière mauvaise foi de son adversaire à l'origine d'une résistance abusive et nuisible et souligne le retard de paiement des premières échéances puis leur non versement, l'interdiction faite au prestataire de ne plus accéder à ses bureaux, la coupure de ses identifiants de connexion et de messagerie, le caractère vexatoire de la rupture et le refus de paiement d'une facture. Elle affirme qu'elle n'a plus d'activité depuis trois ans depuis la rupture de la convention et ne reste active que pour les besoins de la procédure d'où des frais importants de 3.480 euros par an.

Elle met en avant ses pièces 56 (extrait de son compte de résultat) et 49 demande d'honoraires d'huissier de justice).

Toutefois, ces éléments sont insuffisants à rapporter la preuve d'un préjudice né d'un comportement fautif de l'appelante alors que notamment les causes de cessation d'activité de l'intimée ne sont nullement établies. Aucun préjudice né du caractère vexatoire de l'attitude adverse n'est non plus établi par l'intimée de même qu'un préjudice distinct d'intérêts de retard.

Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens d'appel sont à la charge de l'appelante, laquelle versera à son adversaire en cause d'appel la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

           

Confirme le jugement déféré.

Y ajoutant,

Condamne la société CLS Conseils à verser à la société Judi@Social la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

Condamne la société CLS Conseils aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/06582
Date de la décision : 04/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-04;19.06582 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award