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27/04/2023 | FRANCE | N°20/00966

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 27 avril 2023, 20/00966


N° RG 20/00966 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M3D6















Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 21 janvier 2020



RG : 2018j1628











S.A. BNP PARIBAS



C/



[L]

[F]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 27 Avril 2023







APPELANTE :



S.A. BNP PARIBAS représentée par l

e Président de son Conseil d'Administration en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]



Représentée par Me Peggy JOUSSEMET de la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673





INTIMES :



M. [R] [L]

[Adres...

N° RG 20/00966 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M3D6

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 21 janvier 2020

RG : 2018j1628

S.A. BNP PARIBAS

C/

[L]

[F]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 27 Avril 2023

APPELANTE :

S.A. BNP PARIBAS représentée par le Président de son Conseil d'Administration en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentée par Me Peggy JOUSSEMET de la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673

INTIMES :

M. [R] [L]

[Adresse 3]

[Localité 4]

M. [V] [I]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentés par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 06 Février 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 09 Février 2023

Date de mise à disposition : 27 Avril 2023

Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrate rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

MM. [R] [L] et [V] [I] étaient associés et co-gérant de la SARL Croissance.net.

Par acte sous seing privé du 7 avril 2009, la SA BNP Paribas a accordé à la société Croissance.net un prêt de 225.000 euros remboursable en 84 mensualités destiné à l'acquisition d'un fonds de commerce. Ce crédit était assorti d'un engagement de caution solidaire et indivisible de MM. [L] et [I] à concurrence de 30% du montant de l'encours du prêt et dans la limite de la somme de 77.625 euros pour une durée de 108 mois.

Par jugement du 4 avril 2011, le tribunal de commerce de Chambéry a placé la société Croissance.net en redressement judiciaire. La société BNP Paribas a déclaré sa créance au passif de la société Croissance.net pour un montant de 167.759,02 euros.

Par jugement du 9 mars 2012, le tribunal de commerce de Chambéry a arrêté la cession des éléments d'actif de la société Croissance.net au profit de la SAS XL Group, à charge notamment pour le repreneur de poursuivre le contrat de prêt accordé par la société BNP Paribas.

Par courrier du 13 mars 2012, la société BNP Paribas a mis en demeure la société XL Group de payer les échéances du prêt. Cette mise en demeure n'a pas été suivie d'effet.

Par jugement du 14 mai 2012, le tribunal de commerce de Chambéry a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire. La société BNP Paribas a déclaré sa créance à titre privilégié et nanti d'un montant de 176.210.58 euros en principal au passif de la société Croissance.net.

Par courrier recommandé du 18 septembre 2012, la société BNP Paribas a mis en demeure MM. [L] et [I] d'exécuter leurs engagements de cautions.

Par acte extrajudiciaire du 25 juin 2013, la société BNP Paribas a assigné la société XL Group devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne. Par jugement du 5 juin 2014, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a renvoyé l'affaire au tribunal de commerce de Lyon.

Par acte extrajudiciaire des 1er et 2 juillet 2013, la BNP Paribas a assigné MM. [L] et [I] devant le tribunal de commerce de Lyon. Parallèlement, MM. [L] et [I] ont fait assigner la société XL Groupe. Par ordonnance du 17 janvier 2014, le juge rapporteur du tribunal de commerce de Lyon a ordonné la jonction des instances. Par jugement du 19 juin 2015, le tribunal de commerce de Lyon a notamment condamné la société XL Group à payer la somme de 148.093,01 euros à la société BNP Paribas et MM. [L] et [I] à payer chacun la somme de 52.863,17 euros au titre de leur engagement de caution.

En l'absence de règlement de la part de la société XL Groupe, la société BNP Paribas s'est adressé à un huissier de justice. Par exploit du 16 octobre 2015, l'huissier a délivré à la société XL Group un commandement aux fins de saisie vente. Par exploit du 21 octobre 2015, l'huissier a fait pratiquer une saisie attribution entre les mains de la société Crédit Lyonnais. Par acte du 23 octobre 2015, la saisi a été dénoncée à la société XL Group.

Par jugement du 28 octobre 2015, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société XL Group. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 9 novembre 2016.

Par acte du 11 février 2016, la société BNP Paribas a fait délivrer un commandement aux fins de saisie vente à MM. [L] et [I]. En l'absence de proposition de règlement, une saisie attribution a été diligentée le 1er mars 2016. Elle a été dénoncée à M. [I] le 8 mars 2016. Par acte extrajudiciaire du 8 avril 2016, M. [I] a fait assigner la société BNP Paribas devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Lyon afin d'obtenir notamment la mainlevée de la saisie attribution et la condamnation de la société BNP Paribas pour saisie abusive. Par jugement du 7 juillet 2016, le juge de l'exécution a dit régulière et fondée la saisie attribution pratiquée le 1er mars 2016.

Par acte extrajudiciaire du 9 octobre 2018, MM. [L] et [I] ont assigné la société BNP Paribas devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de faire sanctionner l'inaction de la société BNP Paribas à l'égard de la société XL Group.

Par jugement contradictoire du 21 janvier 2020, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé MM. [L] et [I] recevables et bien fondés dans leur demande,

- jugé que l'inaction de la société BNP Paribas constitue une négligence dommageable pour les cautions, MM. [L] et [I], nécessitant réparation,

- condamné la société BNP Paribas au paiement de la somme de 32.287,90 euros à MM. [L] et [I], cautions, au titre de dommages-intérêts,

- ordonné à la société BNP Paribas d'effectuer une compensation à hauteur de 32.287,90 euros sur les engagements de caution de MM. [L] et [I], somme à partager à parts égales entre les cautions,

- rejeté comme inutiles ou non fondées toutes autres demandes des parties,

- condamné la société BNP Paribas au paiement de la somme de 1.000 euros chacun à MM. [L] et [I], au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société BNP Paribas aux entiers dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.

La société BNP Paribas a interjeté appel par acte du 6 février 2020.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 11 août 2021 fondées sur les articles 1351 et 1103 (ancien 1134) du code civil et l'article 564 du code de procédure civile, la société BNP Paribas a demandé à la cour de :

à titre principal :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a déclaré recevable les demandes MM. [L] et [I], telles que résultant de leur assignation du 8 octobre 2018 à son encontre,

- déclarer irrecevables les demandes de MM. [L] et [I] à son encontre, telles que résultant de leur assignation du 8 octobre 2018 devant le tribunal de commerce de Lyon à son encontre, et de leurs dernières conclusions dans le cadre de la présente instance devant la cour d'appel de Lyon,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a :

- condamné au paiement de la somme de 32.287,90 euros à MM. [L] et [I], cautions, au titre de dommages-intérêts, et en conséquence lui a ordonné d'effectuer une compensation à hauteur de 32.287,90 euros sur les engagements de cautions de MM. [L] et [I], sommes à partager à parts égales entre les cautions,

- condamné au paiement de la somme de 1.000 euros chacun à MM. [L] et [I], au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné aux entiers dépens de l'instance,

- rejeter comme irrecevables les demandes de MM. [L] et [I] à son encontre, telles que résultant de leur assignation du 8 octobre 2018 devant le tribunal de commerce de Lyon, à son encontre, et de leurs dernières conclusions dans le cadre de la présente instance, devant la cour d'appel de Lyon,

à titre subsidiaire et au fond :

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

- l'a condamné au paiement de la somme de 32.287,90 euros à MM. [L] et [I], cautions, au titre de dommages-intérêts, et en conséquence lui a ordonné d'effectuer une compensation à hauteur de 32.287,90 euros sur les engagements de caution de MM. [L] et [I], somme à partager à parts égales entre les cautions,

- l'a condamné au paiement de la somme de 1.000 euros chacun à MM. [L] et [I], au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- l'a condamné aux entiers dépens de l'instance,

- rejeter comme non-fondées les demandes de MM. [L] et [I] à son encontre,

en tout état de cause,

- condamner solidairement MM. [L] et [I] à lui payer la somme de 4.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner MM. [L] et [I] en tous les dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 2 juin 2021 fondées sur les articles 1134 et 1147 anciens du code civil, MM. [L] et [I] ont demandé à la cour de :

- débouter la société BNP Paribas de toutes ses fins, moyens et prétentions les déclarant mal fondés,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a dit recevable et bien fondé leur action et a jugé que l'inaction de la société BNP Paribas constituait une négligence dommageable pour les cautions nécessitant réparation,

- le réformer s'agissant du quantum qui leur a été alloué,

et statuant à nouveau,

- condamner la BNP Paribas à régler à M. [L] la somme de 54.443,80 euros à titre de dommages-intérêts,

- ordonner la compensation entre cette somme et celle due à la société BNP Paribas au titre de son engagement de caution,

- condamner la société BNP Paribas à régler à M. [I] la somme de 60.435,32 euros à titre de dommages-intérêts,

- ordonner la compensation entre cette somme et celle due à la société BNP Paribas au titre de son engagement de caution,

- juger que la société BNP Paribas remboursera l'intégralité des sommes qu'ils ont versés comme détaillé au point 28 infra ainsi que les sommes qu'ils ont versées mensuellement à l'étude Chastagnaret en vertu du jugement d'instance sur les saisies des rémunérations, somme à parfaire au jour de l'arrêt à intervenir,

subsidiairement,

- confirmer le jugement déféré,

en tout état de cause,

- condamner la société BNP Paribas à leur régler la somme de 4.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société BNP Paribas aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de la SCP Aguiraud Nouvellet en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 25 novembre 2021, les débats étant fixés au 9 février 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité des demandes de M. [L] et M. [I]

Au soutien de l'irrecevabilité, la société BNP Paribas a fait valoir :

- le non-respect du principe de concentration des moyens par les cautions qui n'ont pas, dans le cadre de la première instance avec la société XL Group, fait valoir tous les moyens, ne pouvant dès lors engager une nouvelle instance

- le fait que l'obligation de concentration des moyens rend irrecevable toute demande, nouvelle ou non, qui ne tend qu'à remettre en cause, par un moyen nouveau non formé en temps utile, la condamnation irrévocable prononcée lors de la première instance

- soit en l'espèce, la tentative de remettre en cause le jugement devenu définitif en obtenant des dommages et intérêts pour compenser la créance de l'appelante.

Pour leur part, M. [L] et M. [I] ont fait valoir :

- l'absence d'autorité de chose jugée en l'absence d'identité de cause et d'objet par rapport à l'instance précédente, s'agissant d'une instance en responsabilité contre la banque

- le fait que la concentration ne s'applique que sur les moyens présentés et non sur les demandes.

Il est constant que s'il incombe au demandeur de présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci, il n'est pas tenu de présenter dans la même instance toutes les demandes fondées sur les mêmes faits.

L'instance introduite par M. [L] et M. [I] porte sur la mise en 'uvre de la responsabilité de la banque car ils estiment qu'elle n'a pas respecté l'obligation mise à sa charge dans le jugement rendu par le Tribunal de Commerce de Lyon du 8 juin 2015 dont le dispositif indiquait que la banque devait tout mettre en 'uvre pour alléger le poids de la dette garantie avant de se tourner vers les cautions.

Il est constant par ailleurs que la banque a mis en 'uvre des mesures d'exécution forcée dont la validité a été conformée par le Juge de l'exécution statuant sur les mesures de saisie-attribution ou de saisie des rémunérations, venant confirmer le caractère liquide et exigible de la créance de la société BNP Paribas.

Les demandes portées par M. [L] et M. [I] procèdent des mêmes faits mais pas du même fondement juridique que lors de l'instance ayant mené à la décision du 8 juin 2015.

Dès lors, elles seront déclarées recevables.

Sur la faute de la société BNP Paribas et le lien de causalité avec les préjudices de M. [L] et M. [I]

Sur ce point, la société BNP Paribas a fait valoir :

- l'absence de perte de chance telle qu'alléguée par les cautions étant rappelé les différentes procédures menées par l'appelante à l'encontre de XL Group : jugement du Tribunal de Commerce du 19 juin 2015, signifié le 3 juillet 2015 et devenu définitif, mise en 'uvre de mesures de recouvrement forcées par le biais de saisie-vente, de saisie-attribution revenue infructueuse le 21 octobre 2015 et dénoncée le 23 octobre 2015

- le placement en redressement judiciaire de la société XL Group le 25 octobre 2015 empêchant la poursuite des mesures de recouvrement

- l'absence de faute ou de harcèlement de la banque à l'encontre de M. [L] et M. [I], qui par l'envoi de courriers les a informés en 2011 et 2012 en qualité de caution de la situation de la situation de XL Group, et de faute concernant le prononcé de la déchéance du terme

- l'information des intimés par lettre du 18 juin 2012 de la liquidation judiciaire du débiteur principal suivie d'une lettre de rappel du 18 septembre 2012

- l'envoie d'une mise en demeure aux fins de paiement, le 13 mars 2013, préalable nécessaire à l'assignation délivrée le 25 juin 2013

- le prononcé de la déchéance du terme au moment nécessaire, qui a permis de minorer le capital restant dû, ce, dans l'intérêt du créancier mais aussi des cautions

- la limitation des engagements de M. [L] et M. [I] à 30% de l'encours du prêt dans la limite de 77.625 euros sans qu'il n'y ait d'erreur matérielle dans le jugement

- le respect du jugement par la mise en 'uvre de mesure de recouvrement contre XL group avant de se tourner contre les cautions, alors même que celles-ci pouvaient être appelées immédiatement

- l'absence de preuve d'un conflit d'intérêt entre la société BNPP et la société XL Group,

- l'impossibilité de mobiliser la garantie Oseo avant d'avoir tenté vainement de mobiliser les autres garanties d'où la nécessité de diligenter des mesures de recouvrement forcée à l'encontre des cautions

- l'absence de preuve d'un préjudice personnel des cautions étant rappelé que la société BNP Paribas bénéficie d'un titre exécutoire.

Pour leur part, M. [L] et M. [I] ont fait valoir :

- la négligence de la banque qui n'a pas diligenté de mesures à l'encontre de la société XL Group de mars 2012 à octobre 2015, ne permettant pas de décharger les cautions

- le défaut de prononcé immédiat de la déchéance du terme du prêt garanti

- le harcèlement exercé à leur encontre par la banque par l'envoi de courriers multiples entre 2012 et 2015 alors qu'aucune démarche n'était réalisée à l'encontre de la débitrice principale

- l'existence d'un conflit d'intérêts entre la société BNP Paribas et la société XL Group, la première ayant financé la première dans son projet de reprise de la société garantie initialement, et l'absence de toute démarche pour prendre des sûretés à l'égard du repreneur

- l'absence de mise en 'uvre de la garantie OSEO par la société BNP Paribas qui a empêché la diminution de la dette alors que cette garantie couvrait 70% de l'engagement de prêt

- l'enrichissement sans cause de la société BNP Paribas puisqu'elle entend obtenir le paiement de 60% de la dette alors qu'elle ne pouvait que réclamer 30% de l'encours dans la limite de 77.625 euros alors qu'elle entend réclamer à l'encontre de M. [I] la somme de 53.663,17 euros et 52.863,17 euros à l'encontre de M. [L]

- l'existence d'un préjudice constitué par les sommes réclamées à tort par la société BNP Paribas qui n'a pas fait les démarches nécessaires pour alléger le sort des cautions, étant rappelé que les intimés font l'objet de saisies sur salaire, avec minoration de leurs possibilités financières

- l'existence d'un préjudice constitué par les sommes réclamées à tort par la société BNP Paribas étant rappelé que celle-ci n'a pas fait les démarches nécessaires aux fins de recouvrement auprès de la débitrice principale, et étant rappelé que les deux intimés font l'objet de saisies sur salaire suivant jugements rendus par le Tribunal d'instance le 6 décembre 2018, et ayant minoré de fait leurs possibilités financières

L'article 1134 du code civil dispose, dans sa version applicable au litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, et doivent être exécutées de bonne foi.

Il appartient à M. [L] et M. [I] de démontrer l'existence d'une faute de la part de la société BNP Paribas ayant entraîné une perte de chance et donc un préjudice à leur détriment, les menant dès lors à procéder au paiement des sommes auxquelles ils ont été condamnés suivant jugement du Tribunal de Commerce de Lyon du 19 juin 2015.

En l'état, s'agissant du grief relatif à l'absence de mesures prises entre 2012 et 2015 à l'encontre de la débitrice principale et du défaut du prononcé de la déchéance du terme au plus tôt, il sera relevé que la société BNP Paribas a procédé aux mises en demeure nécessaires et a prononcé la déchéance du terme en temps voulu, étant rappelé que la demande intervenait dans une situation de reprise d'une entreprise par la société XL Group.

Les délais mis en avant par les intimés ne relèvent pas d'une carence de la banque. En outre, il est relevé que le jugement définitif rendu en 2015 a confirmé la créance de la banque à l'encontre de la société XL Group et des cautions, sans qu'aucune responsabilité ne soit retenue à son encontre.

S'agissant des courriers adressés sur la période de 2012 à 2015 à M. [L] et M. [I], qualifiés de harcèlement par ces derniers, il sera relevé que ces courriers procèdent des informations nécessaires aux cautions concernant la défaillance du débiteur principal mais aussi les procédures mises en 'uvre.

De même les courriers d'information sur la mise en 'uvre d'une procédure collective, mais aussi de mise en demeure préalable à une assignation ne sont pas des courriers pouvant être qualifiés de fautifs s'agissant au contraire d'information nécessaire dans un processus contentieux, aucun terme menaçant n'étant relevé dans les courriers en question.

S'agissant des mesures mises en 'uvre postérieurement au jugement, la société BNP Paribas justifie des tentatives de recouvrement mises en 'uvre à l'encontre de la société XL Group pour recouvrer sa créance et des échecs connus, de même que de l'impossibilité de procéder in fine au recouvrement.

S'agissant du défaut de recours à la garantie Oseo, il sera relevé que cette garantie ne saurait intervenir avant que toutes les garanties n'aient été mises en 'uvre, ce qui exclut dès lors ce recours avant que des mesures de recouvrement forcées ne soient mises en 'uvre à l'encontre des cautions et soient considérées comme vaines.

S'agissant du conflit d'intérêts allégué par M. [L] et M. [I], il est constaté qu'aucune preuve n'est rapporté à ce titre. Par ailleurs, la société BNP Paribas justifie de ce que le tribunal de commerce de Chambéry a procédé au choix de la société XL Group dans le cadre d'un plan de reprise et qu'un financement ne relève pas d'un intérêt particulier, et qu'en outre, les intimés ne démontrent pas une volonté particulière de les poursuivre à défaut de la société XL Group.

S'agissant de poursuites au-delà de l'engagement des cautions, renvoi sera fait au dispositif du jugement rendu le 19 juin 2015 qui a condamné M. [L] au paiement de la somme de 52.863,17 euros au titre de son engagement de caution et qui a condamné M. [I] au paiement de la somme de 52.867,17 euros au titre de son engagement de caution et que d'aucune manière, étant rappelé l'autorité de chose jugée affectée à cette décision en application de l'article 1351 du code civil dans sa version applicable au litige, les intimés ne peuvent remettre en cause cette condamnation.

En l'absence de faute de la part de la société BNP Paribas, il convient dès lors d'infirmer la décision déférée dans son intégralité et de rejeter toutes les demandes présentées par M. [L] et M. [I].

Sur la demande reconventionnelle de M. [L] et M. [I] aux fins de remboursement des sommes versées au titre de l'exécution du jugement du Tribunal de Commerce de Lyon du 19 mars 2015

Sur ce point, la société BNPP a fait valoir :

- l'irrecevabilité de cette demande présentée pour la première fois à hauteur d'appel devant la cour

- l'objet de la demande qui a pour but de procéder à l'indemnisation d'un préjudice lié à l'exécution d'un jugement

- à tout le moins, si ces demandes étaient recevables, le défaut de preuve du préjudice, étant rappelé que M. [I] sollicite le remboursement des sommes que le Juge de l'Exécution du Tribunal Judiciaire de Lyon a validé au titre de la mesure de saisie-attribution dans son jugement du 7 juillet 2016, ce qui revient à remettre en cause une décision définitive, l'intimé ne pouvant prétendre subir un préjudice équivalent, sans compter que la somme de 5.239,89 euros a déjà été déduite par le juge saisi

- le même raisonnement s'agissant de M. [L].

Sur ce point, M. [L] et M. [I] ont fait valoir :

- concernant l'irrecevabilité de la demande de compensation alléguée par la société BNP Paribas, les intimés ont fait valoir qu'il ne s'agit pas de demandes nouvelles puisque portant aux mêmes fins qu'en première instance, soit l'indemnisation de leurs préjudices

- le fait qu'à tout le moins, leur préjudice ne saurait être inférieur à celui de première instance.

L'article 564 du code de procédure civile dispose que à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.

En l'espèce, la demande présentée par M. [L] et M. [I] à titre de compensation n'est pas une demande nouvelle puisque portant sur les mêmes fins qu'en première instance, à savoir l'indemnisation de leurs préjudices.

Toutefois, si ces demandes sont recevables, elles seront rejetées étant rappelé l'infirmation de la décision de première instance.

Sur les demandes accessoires

M. [L] et M. [I] échouant en leurs prétentions, ils seront condamnés à supporter les dépens de première d'instance et d'appel.

L'équité commande d'accorder à la société BNP Paribas une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile qui sera fixée à la somme de 1.500 euros.

M. [L] et M. [I] seront condamnés solidairement à payer à la société BNP Paribas cette somme.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Infirme dans son intégralité la décision déférée

Statuant à nouveau

Déclare recevables les demandes de M. [L] et M. [I],

Déboute M. [L] et M. [I] de l'intégralité de leurs demandes,

Condamne M. [L] et M. [I] à supporter les dépens de première instance et d'appel,

Condamne solidairement M. [L] et M. [I] à payer à la SA BNP Paribas la somme de 1.500 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 20/00966
Date de la décision : 27/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-27;20.00966 ?
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