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06/04/2023 | FRANCE | N°22/04746

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 06 avril 2023, 22/04746


N° RG 22/04746 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OMOH







Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 15 juin 2022



RG : 2021f00165











[W]

[W]

S.A.R.L. LG FINANCES



C/



[X]

[X]

[X]

[X]

LA PROCUREURE GENERALE

SASU AMS GROUP

SELARL MJ SYNERGIE

SASU DECO METAL





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A

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ARRET DU 06 Avril 2023







APPELANTS :



M. [M] [W] pris en sa qualité de gérant de la société LG FINANCES

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 7]



M. [M] [W]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Lo...

N° RG 22/04746 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OMOH

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT-ETIENNE du 15 juin 2022

RG : 2021f00165

[W]

[W]

S.A.R.L. LG FINANCES

C/

[X]

[X]

[X]

[X]

LA PROCUREURE GENERALE

SASU AMS GROUP

SELARL MJ SYNERGIE

SASU DECO METAL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 06 Avril 2023

APPELANTS :

M. [M] [W] pris en sa qualité de gérant de la société LG FINANCES

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 7]

M. [M] [W]

né le [Date naissance 3] 1975 à [Localité 14]

[Adresse 2]

[Localité 7]

S.A.R.L. LG FINANCES représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit sège

[Adresse 2]

[Localité 7]

Représentés par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, toque : 1106, postulant et plaidant par Me Thomas COURADE du cabinet Beside Avocats, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 1]

[Localité 10]

En la personne d'Olivier NAGABBO, avocat général

M. [V] [T] [R] [X] en toutes ses qualités visées à l'acte introductif d'instance du 10 février 2021 et à la déclaration d'appel

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 12]

[Adresse 8]

[Localité 6]

SAS DECO METAL prise en la personne de son mandataire ad'hoc, Monsieur [V] [X]

[Adresse 9]

[Localité 7]

SAS AMS GROUP agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié ès qualités audit siège

[Adresse 9]

[Localité 7]

M. [V] [T] [R] [X] pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la SAS DECO METAL désigné par ordonnance du Président du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE du 9 février 2021

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 12]

[Adresse 8]

[Localité 6]

M. [V] [T] [R] [X] agissant en qualité de Président de la société AMS GROUP

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 12]

[Adresse 8]

[Localité 6]

M. [V] [T] [R] [X]

né le [Date naissance 4] 1966 à [Localité 12]

[Adresse 8]

[Localité 6]

Représentés par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547, postulant et plaidant par Me Prisca WUIBOUT de la SELARL UNITE DE DROIT DES AFFAIRES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

SELARL MJ SYNERGIE Mandataires Judiciaires représentée par Maître [O] [L] es-qualité de mandataire judiciaire et de liquidateur judiciaire de la société DECO METAL SAS, nommée à ces fonctions suivant jugements du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE en date des 12 février 2020 et 24 juin 2020

[Adresse 11]

[Adresse 13]

[Localité 5]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et plaidant par Me Anthony SCARFOGLIERO de la SELARL SVMH AVOCATS, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Février 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Février 2023

Date de mise à disposition : 06 Avril 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SASU Déco Métal a été créé en 2010 par M. [M] [W] pour exercer une activité de fabrication de menuiserie aluminium, serrurerie, tôlerie et peinture industrielles. Elle avait pour principale cliente la société AMS Concept. Ces deux sociétés étaient dirigées par M. [W] et leur capital social détenus par la SARL LG Finances gérée par M. [W].

Le 29 novembre 2019, suite à une cession des titres, le capital social des société Déco Métal et AMS Concept a été transféré à la SAS AMS Group dirigée par M. [V] [X].

Par jugement du 12 février 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société Déco Métal, désigné la Selarl MJ Synergie en qualité de mandataire judiciaire et fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 10 février 2020. Par jugement du même jour, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a également ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice des sociétés AMS Concept et AMS Group.

Par ordonnance du 19 avril 2020, le juge-commissaire de la procédure collective de la société AMS Group a désigné un technicien afin de d'examiner les conditions dans lesquelles sont intervenues les cessions des actions des sociétés AMS Concept et Déco Métal le 29 novembre 2019.

Par jugements du 24 juin 2020, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a converti les procédures de redressement judiciaire en procédure de liquidation judiciaire.

Le technicien a déposé son rapport définitif le 22 décembre 2020. Il conclut que la société Déco Métal se trouvait en état de cessation des paiements dès le 31 décembre 2018.

Par acte extrajudiciaire du 10 février 2021, la Selarl MJ Synergie, ès-qualités de liquidation judiciaire de la société Déco Métal, a saisi le tribunal de commerce de Saint-Etienne afin de voir reporter la date de cessation des paiements au 31 décembre 2018.

Par jugement contradictoire du 15 juin 2022, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- prononcé le report de cessation des paiements de la société Déco Métal,

- fixé la date de cessation des paiements au 31 décembre 2018,

- dit que conformément aux dispositions de l'article R. 641-9 susvisé, la présente décision fera l'objet d'une notification au débiteur par les soins de Monsieur le greffier,

- dit que les publicités de la présente décision seront faits d'office par le greffier,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

M. [W], en qualité de gérant de la société LG Finances, M. [W] et la société LG Finances ont interjeté appel par acte du 27 juin 2022.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 7 février 2023 fondées sur les articles L. 631-1, L. 631-8 et L. 641-1 du code de commerce, M. [W] pris en sa qualité de gérant de la société LG Finances, M. [W] et la société LG Finances ont demandé à la cour de :

- dire bien fondé leur appel,

- réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- juger que la société Déco Métal n'était pas en état de cessation de paiements au 31 décembre 2018,

- débouter la Selarl MJ Synergie, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Déco Métal, de sa demande de report de date de cessation des paiements de ladite société ainsi que de l'intégralité de ses autres demandes,

- débouter M. [X], pris en sa qualité de président de la société Déco Métal, M. [X] pris en sa qualité de président de la société AMS Group, M. [X] pris en sa qualité de mandataire ad hoc de la société Déco Métal, M. [X], la société AMS Group et la société Déco Métal de l'intégralité de leurs demandes comme infondées,

- condamner la Selarl MJ Synergie, ès-qualités, à lui payer la somme de 25.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des procédures de première instance et d'appel,

- ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

À l'appui de leurs positions, les appelants font valoir les éléments suivants :

- la nécessité de revoir le passif exigible puisque le mandataire judiciaire ne rapporte pas la preuve de ce que les créances intragroupes étaient réclamées, sans compter que les avances en trésorerie et créances intragroupes ne constituent pas un passif exigible, sans compter que la dette n'était ni certaine ni liquide

- la nécessité de prendre en compte, dans l'actif disponible les réserves de crédit et lignes autorisées, y compris dans le groupe, au profit de la société Deco Metal

- la nécessité de tenir compte du facteur temps dans l'analyse de la cessation des paiements

- le défaut de prise en compte par le mandataire judiciaire de l'appartenance de la société Deco Metal à un groupe, dont la comptabilité consolidée démontrait une absence de cessation des paiements au regard des flux financiers entre les différentes entités

- l'existence de rapports de différents cabinets d'experts comptables ou commissaire aux comptes faisant état de la viabilité de la situation

- l'absence d'irrégularité de la comptabilité et de cessation des paiements au 31 décembre 2018

- la baisse significative des dettes de la société Deco Metal entre le 31 décembre 2018 et le 30 juin 2019 ce qui démontre qu'elle ne pouvait se trouver en état de cessation des paiements (400.000 euros de baisse)

- le fait que la société AMS ne se trouvait pas en état de cessation des paiements au 31 décembre 2018, ce qui dès lors ne saurait rejaillir sur la société Deco Metal, sans compter que celle-ci, sur l'année 2018 a enregistré des chiffres en progression, son CA étant stable d'année en année

- l'analyse consolidée du groupe qui montre que celui-ci disposait d'une santé florissante

- sur la valorisation des stocks, l'absence d'incidence sur l'état de la société et sur un éventuel état de cessation des paiements

- concernant les investissements opérés sur les années 2017 et 2018, le fait que la situation a été validée par le commissaire aux comptes de la société AMS Concept et que son mode de comptabilisation n'a aucune incidence sur la situation de Deco Metal

- s'agissant du passif exigible, sa diminution au cours du premier semestre 2019 ce qui démontre que la société pouvait faire face à la situation avec son activité, étant rappelé que tout le passif n'était pas exigible contrairement à ce qui est retenu par le technicien,

- l'absence de toute dette exigible au 31 décembre 2018 : concernant les emprunts pour lesquels aucun défaut de paiement n'était constaté, les dettes sociales et fiscales pour lesquelles la société était à jour, des dettes fournisseurs hors groupe mais aussi pour les autres dettes ou encore concernant les comptes-courants d'associés qui n'étaient pas réclamés

- le fait que le technicien n'a retenu au titre du passif exigible que les dettes internes au groupe alors même qu'elles n'étaient pas réclamées , le mandataire judiciaire devant dès lors rapporter la preuve de ce que ces dettes étaient exigibles pour démontrer que la société Deco Plus était en état de cessation des paiements

- le fait que ces dettes ne dépassaient pas le plafond indiqué dans la convention de trésorerie prévu au groupe, fixé à 1 million d'euros, et que les dettes ont toutes été soldées début 2019

- un actif disponible qui permettait à la société Deco Metal de fonctionner sans difficulté, au regard de la trésorerie consolidée du groupe, étant rappelé que le fonctionnement du groupe ne permettait pas le maintien de la trésorerie sur les comptes de la société Deco Metal

- la nature des encaissements à venir de la part de la société AMS qui permettaient systématiquement à la société Deco Metal de fonctionner et d'honorer ses charges, des encaissements intervenant dès janvier 2019 à ce titre.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 6 février 2023 fondées sur les articles L. 631-1, L. 631-8, R. 631-13 et suivants et L. 641-4 du code de commerce, la Selarl MJ Synergie, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Déco Métal, a demandé à la cour de :

- rejeter toutes fins, moyens, conclusions et demandes contraires des appelants,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à sa demande et a reporté au 31 décembre 2018 la date de cessation des paiements de la société Déco Métal,

- ordonné l'emploi des dépens en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

À l'appui de sa position, la société MJ Synergie a mis en avant les points suivants :

- la performance de la société Deco Metal concernant l'exercice clos en 2017 et en 2018, montrant une baisse de celles-ci, ainsi que ses actifs et passifs démontrant qu'au 31 décembre 2018, la société n'avait plus de disponibilités (0 k€) contre 22 K€ au 31 décembre 2017, soit une dégradation forte de l'actif sur la période

- le caractère indifférent de l'existence de créances intra groupe étant rappelé que l'actif disponible s'entend de l'actif disponible ou réalisable à bref délai, et que les créances à recouvrer ne constituent un actif disponible que si elles peuvent l'être de façon certaine et quasi immédiate et qu'en l'espèce, le solde de trésorerie de la société Deco Metal reste négatif jusqu'au mois de mai, ce qui démontre qu'à cette date, la société était en état de cessation des paiements depuis plus de 45 jours

- le contenu du rapport du technicien qui pointe le caractère excessif des délais de règlements des créances intra groupe, pointant que les sommes dues par la société AMS à Déco Metal, payée de manière partielle et avec retard, empêchent cette dernière de régler les sommes dues à la holding, la société LG finances et le fait que les sommes dues ont été intégrées dans la convention de remboursement des créances entre M. [W] et M. [X] le 29 novembre 20198, mettant en évidence que l'absence de paiement des dettes dues à Déco Metal par AMS a généré pour la première des difficultés de trésorerie

- le passif de la société Déco Metal avec une augmentation conséquente en fin d'exercice 2018, sans compter le montant déclaré à l'ouverture de la procédure collective en février 2020 de 1.106.549,08 euros outre 319.836 euros à titre provisionnel et contesté pour partie

- l'obligation faite par l'article L631-1 du code de commerce de tenir compte du passif exigible, même si non exigé, donc des créances en compte courant et des dettes intra-groupe

- le caractère anormal des délais de règlements dans le groupe des créances fournisseurs, notamment des management fees dû à la société Deco Metal, ce qui démontre l'incapacité de LG Finances à régler ses fournisseurs (sachant que ces frais correspondent à 75% des frais de personnels et auraient dû être réglés mensuellement sachant que les salaires sont réglés chaque fin de mois), cette dernière reconnaissant qu'elle employait une grande partie du personnel de direction du groupe, à charge pour elle de refacturer la masse salariale afférente à ses filiales

- le fait que la société Deco Metal, lors de la cession de titres, a réglé sa dette fournisseur, conséquente, l'absence de compensation démontrant sa volonté de ne pas renoncer à sa créance, et étant rappelé qu'au 31 décembre 2018, la société Deco Plus devait 259.000 euros à LG Finances au titre des management fees, alors que ses disponibilités étaient nulles

- un fonctionnement fondé sur le retard de paiement au sein du groupe qui montre l'importance des difficultés des filiales AMS et Deco Metal

- le fait que conformément à la jurisprudence, il est régulier d'apprécier l'état de cessation des paiements de chaque société d'un groupe de manière individuelle, sans compter que le rapport du technicien met en évidence le fait que la survie de Deco Metal n'est due qu'à des manipulations comptables de LG finances permettant de masquer la réalité de la situation économique tout en préservant la société holding

- la dégradation de la situation de Deco Metal dès la clôture des comptes au 31 décembre 2018, en corrélation avec la situation de AMS Concept, principal client, cette dernière opérant une diversification sans y être préparée, avec des pertes in fine, d'où un impact sur Deco Metal

- une trésorerie obérée à compter de janvier 2019 sans compter que la société Deco Metal ne réalisait pas d'inventaire de son stock, donc l'impossibilité d'avoir une valorisation, la réalisation de gros investissements en matériel en 2017 et 2018 financés par des emprunts et l'impossibilité de vérifier la facture de 380.000 euros sur la même période par AMS, qui correspond au chiffre des investissements, l'établissement d'avoirs au profit de AMS pour solder le compte client, sans justificatifs, et le fait qu'au 30 juin 2019, 91% des créances clients de Deco Metal sont relatives à AMS

- l'existence de dettes fiscales au 31 décembre 2018, qui viennent porter l'endettement à 994.990 euros au 31 décembre 2018 étant rappelé qu'au 31 décembre 2018, le résultat net de la société était de 105.000 euros.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 6 février 2023 fondées sur les articles L. 631-1 et suivants du code de commerce, la société Déco Métal, la société AMS Groupe et M. [X] en ses qualités de président de la société Déco Métal, mandataire ad hoc de la société Déco Métal, président de la société AMS Groupe et en son nom personnel ont demandé à la cour de :

- rejeter toutes fins, moyens et conclusions contraires,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fait droit à la demande de report de la date de cessation des paiements de la société Déco Métal au 31 décembre 2018,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Au soutien de leur position, les intimés ont mis en avant les points suivants :

- le contenu du rapport du technicien qui pointe qu'au 31 décembre 2018, la société Deco Metal restait devoir 259 K€ à LG Finances, correspondant aux factures non réglées d'avril à décembre 2018, et l'évolution incessante de ce solde qui atteindra 303 K€ lors de la cession au titre des management fees qui auraient dû être réglés mensuellement

- la dégradation financière de la société dès la clôture des comptes au 31 décembre 2018 et une trésorerie obérée dès janvier 2019,

- l'existence de graves anomalies comptables, les postes actifs du bilan étant erronés étant rappelé que si AMS a une activité de pose, le prix facturé par Déco Metal à celle-ci intègre une part de main d''uvre qui est déjà facturé au client final, ce qui entraîne un transfert anormal du profit d'AMS vers Déco Métal in fine, sans compter le fait que AMS, au 30 juin 2019, indique être en attente d'avoirs de la part de Deco Metal

- l'absence de logiciel de gestion chantier qui ne permet pas d'obtenir d'éléments clairs qui fonderaient ces flux financiers, les avoirs étant émis afin de piloter les résultats financiers des sociétés, et l'absence d'inventaire des stocks

- l'importance des investissements de la société Deco Metal en 2018 par des emprunts et la corrélation avec la facture de travaux par AMS sur la même période,

- le défaut de règlements des management fees à la société LG finances

- l'impossibilité en l'absence de logiciel de gestion, de déterminer la rentabilité et le coût associés à chaque chantier, ce qui créé une confusion des flux entre les deux sociétés

- le fait que la direction par M. [X] n'a duré que quelques semaines et ne saurait être rendue responsables des difficultés antérieures,

- la démonstration de ce que seules des manipulations comptables ont permis de maintenir artificiellement la société Deco Metal.

Le ministère public dans son avis transmis au parties, a requis la confirmation du jugement déféré.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 février 2023, les débats étant fixés au 16 février 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la date de fixation de l'état de cessation des paiements de la société Déco Métal

L'article L631-1 alinéa 1 du code de commerce dispose qu'il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements.

L'article L631-8 du Code de Commerce dispose dans ses alinéas 1 et 2 : le tribunal fixe la date de cessation des paiements après avoir sollicité les observations du débiteur. A défaut de détermination de cette date, la cessation des paiements est réputée être intervenue à la date du jugement d'ouverture de la procédure.

Elle peut être reportée une ou plusieurs fois, sans pouvoir être antérieure de plus de dix-huit mois à la date du jugement d'ouverture de la procédure. Sauf cas de fraude, elle ne peut être reportée à une date antérieure à la décision définitive ayant homologué un accord amiable en application du II de l'article L. 611-8. L'ouverture d'une procédure mentionnée à l'article L. 628-1 ne fait pas obstacle à l'application de ces dispositions.

- Sur la situation financière de la société Déco Metal

Il sera rappelé que le passif exigible correspond au passif échu c'est-à-dire à l'ensemble des dettes arrivées à échéance dont le créancier peut réclamer le paiement à tout moment, à moins qu'un moratoire n'ait été consenti au débiteur, ce dernier devant rapporter la preuve de l'existence du moratoire.

Il convient également de rappeler que l'actif disponible est constitué des sommes ou valeurs dont l'entreprise peut immédiatement disposer pour assurer le paiement d'une dette quel qu'en soit le montant, s'agissant notamment de liquidités, de valeurs mobilières immédiatement réalisables de même que la valeur d'un fonds de commerce.

S'agissant d'une convention de trésorerie entre sociétés d'un groupe, il convient de vérifier si le financement relève d'une faculté laissée à leur bon vouloir, ou non afin de déterminer si elle relève d'une réserve de crédit ou non.

Dans le cadre de l'ouverture de la procédure collective, le passif a été déclaré pour un montant de 1.426.385,08 euros.

En outre, le rapport du technicien nommé par le tribunal pour analyser la situation économique de la société Déco Métal a relevé l'état des dettes suivant à la clôture des exercices :

- exercice 2017 : dettes d'un montant de 1.341 K€

- exercice 2018 : dettes d'un montant de 1.422 K€

- exercice 2019 : dettes d'un montant de 1.007 K€.

La structuration de l'activité de la société Déco Métal menait à faire dépendre celle-ci des commandes et de ses relations avec la société AMS, société faisant partie de la holding LG Finances.

Il convient de rappeler que la détermination du passif porte sur le passif exigible, et non sur le passif exigé, dès lors, les créances fournisseurs détenus par la SARL LG finances sur la société Déco Métal devaient être retenues contrairement à ce qu'affirment les appelants, sauf à tronquer le passif réel de la société placée en procédure collective.

L'analyse des dettes de la société Déco Metal à l'égard de la société LG Finances montre un retard de paiement conséquent des management fees dus à cette dernière, avec la mise en évidence de délais de règlement conséquents, étant rappelé que si la convention entre les deux sociétés ne prévoit pas de délais de règlements, les frais en question auraient dû être payés chaque mois puisqu'ils correspondaient, à 75%, à des frais concernant les salaires et les charges sociales qui sont acquittés sur une base mensuelle.

En outre, il est erroné pour la société LG Finances de prétendre qu'elle a renoncé au paiement de ses créances puisque celles-ci ont été apurées lors de la cession des titres de la société Déco Metal, avec un solde de 259K€ restant à régler en fin d'année 2018 au titre des management fees.

Par ailleurs, le rapport du technicien met en évidence qu'aucune des factures sur ce type de frais n'a été réglée de juillet à décembre 2018.

Si les appelants entendent faire valoir le soutien apporté aux filiales, ce soutien met cependant en évidence les difficultés financières de celles-ci.

Enfin, la situation financière de la société Déco Metal ne saurait être appréciée au regard de la situation du groupe auquel elle appartient, étant rappelé que la situation de chaque société dans un groupe doit être appréciée individuellement en conformité avec les dispositions des articles L631-1 et L640-1 du code de commerce.

À la clôture de l'exercice comptable au 31 décembre 2018, la société Déco Metal ne dispose d'aucune trésorerie lui permettant de faire face à son passif puisque la trésorerie est notée comme étant à -70K€ par le technicien désigné, sachant que le passif est fixé à 1.910.987 euros.

L'analyse des actifs de la société Déco Metal à compter du 31 décembre 2018, permet de relever que cette dernière ne dispose d'aucune trésorerie, celle-ci étant négative de manière constante de janvier 2019 à avril 2019 inclus, soit un délai de plus de 45 jours.

S'agissant des créances détenues sur des tiers, celles-ci ne sont pas mobilisables également, étant rappelée qu'elles portent sur la société AMS qui ne les règle pas, et bénéficiera, sans aucune base comptable ou facture, d'avoirs sur lesdites créances au détriment de la comptabilité de la société Déco Metal. Sur l'intégralité de l'année 2019, seuls les mois de mai, juin, juillet et août 2019 présenteront un solde positif pour la société Déco Metal, la situation se dégradant à nouveau.

Les appelants entendent faire valoir l'existence de créances entre les sociétés du groupe qui devraient être retenues au titre de l'actif, toutefois, la notion d'actif disponible renvoie à la possibilité de mobiliser immédiatement les sommes dues, ce qui n'est pas le cas d'une créance entre société d'un groupe, l'historique comptable mis en avant par le technicien démontrant le retard conséquent de paiement entre les différentes sociétés du groupe et notamment entre AMS et la société Déco Metal.

Dès lors, aucune créance n'était mobilisable à court terme au profit de la société Déco Metal, et ne saurait être prise en compte au titre de l'actif disponible, d'autant plus que l'existence même de créances entre la société Déco Metal et la société AMS est sujette à caution en raison des avoirs consentis courant 2019.

Enfin, aucun suivi n'était mis en 'uvre s'agissant des chantiers entre les deux sociétés, ce qui ne permettait pas une gestion claire.

De la sorte, aucun actif disponible supplémentaire ne saurait être retenu.

- Sur la date de cessation des paiements

Au regard de ce qui précède, la date de cessation des paiements de la société Déco Metal doit être fixée au 31 décembre 2018 étant rappelé qu'à cette date, la société Déco Metal ne disposait d'aucune trésorerie, celle-ci étant négative, pour faire face à des dettes exigibles pour un montant de 1.910.987 euros.

Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont retenu cette date.

En conséquence, la décision déférée sera confirmée dans son intégralité.

Sur les demandes accessoires

M. [W] et la SARL LG Finances succombant en la présente instance, ils seront condamnés solidairement à supporter les entiers dépens de l'instance d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Confirme le jugement déféré dans son intégralité,

Y ajoutant

Condamne M. [M] [W] et la SARL LG Finances à supporter les entiers dépens de l'instance d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/04746
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;22.04746 ?
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