La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/04/2023 | FRANCE | N°22/03623

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 06 avril 2023, 22/03623


N° RG 22/03623 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OJZJ









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 mai 2022



RG : 2022f262







[W]

S.A.S. DELTINVEST



C/



LA PROCUREURE GENERALE

S.E.L.A.R.L. [Z] [Y]

S.A.S. VITAE RESIDENCES

S.A.S. TERRESENS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 06 Avril 2023





APPELANTS :r>


M. [F] [W]

[Adresse 3]

[Localité 7]



S.A.S. DELTINVEST prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 11]



Représentées par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIP...

N° RG 22/03623 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OJZJ

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 06 mai 2022

RG : 2022f262

[W]

S.A.S. DELTINVEST

C/

LA PROCUREURE GENERALE

S.E.L.A.R.L. [Z] [Y]

S.A.S. VITAE RESIDENCES

S.A.S. TERRESENS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 06 Avril 2023

APPELANTS :

M. [F] [W]

[Adresse 3]

[Localité 7]

S.A.S. DELTINVEST prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Localité 11]

Représentées par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et par Me Pierre-Alain BOUHÉNIC et Thibaut LEFORT de la Bouhenic & Avocats, avocats au barreau de PARIS, plaidant par Me BESNARD, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES :

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 2]

[Localité 9]

En la personne d'Olivier NAGABBO, avocat général

S.E.L.A.R.L. [Z] [Y] représentée par maître Marie DUBOIS, venant aux droits de la SELARL ALLIANCE MJ suivant jugement du tribunal de commerce de LYON du 3 août 2021, ès qualités de liquidateur judiciaire de la société VITAE RESIDENCES, désignée à ces fonctions par jugement du tribunal de commerce de LYON du 11 mai 2021

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentée et plaidant par Me Aurélien BARRIE de la SELARL POLDER AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T 1470

S.A.S. VITAE RESIDENCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

C/o Splash Eurl

[Adresse 12]

[Localité 1]

défaillante

S.A.S. TERRESENS prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Eric CESAR de la SELARL LEGI AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 664, substitué et plaidant par Me GIRARDON, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Février 2023

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 16 Février 2023

Date de mise à disposition : 06 Avril 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt par défaut rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Vitae Résidences, qui exploitait des résidences de services pour seniors et prenait à bail des immeubles permettant l'exploitation de cette activité a été constituée entre les sociétés Terresens et Lavorel Groupe en vue du rachat des actifs et activités de la société Odalia Résidences dans le cadre d'un plan de cession.

Dans le cadre de ce plan de cession, la société Vitae Résidences a notamment repris le bail conclu avec la société Deltinvest et le bail conclu avec les époux [W] concernant des biens situés dans la résidence [Adresse 13].

Par ordonnance du 29 septembre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Blois à condamné la société Vitae Résidences à payer à la société Deltinvest une somme de 73.991,20 euros au titre de loyers et charges impayés. Les mesures d'exécutions diligentées les 23 octobre 2020, 8 décembre 2020 et 10 mars 2021 sur une partie des comptes bancaires de la société Vitae Résidences sont demeurées infructueuses.

Par acte extra judiciaire du 29 mars 2021, la société Deltinvest a assigné en liquidation judiciaire la société Vitae Résidences.

Par jugement du 11 mai 2021, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société Vitae Résidences, a fixé la date de cessation des paiements au 1er avril 2020 et désigné la Selarl Alliance MJ en qualité de liquidateur judiciaire.

Par jugement du 3 août 2021, le tribunal de commerce de Lyon a transféré les mandats de la Selarl Alliance MJ à la Selarl [Z] [Y] représentée par Me [Z] [Y].

Par courriers des 22 juin et 12 juillet 2021, M. [W] et la société Deltinvest ont déclaré des créances respectivement de 19.223,07 euros et 177,381,57 euros au titre des loyers et charges impayées au passif de la société Vitae Résidences.

M.[W] et la société Deltinvest ont été désignés en qualité de contrôleur de la liquidation judiciaire de la société Vitae Résidences respectivement par ordonnance du 15 septembre et 5 octobre 2021.

Par convention du 29 décembre 2020, la société Terresens et la société Lavoral Groupe ont cédé à M. [G] et à M. [T] 189.000 actions des 210.000 actions existantes de la société Vitae Résidences à hauteur de 94.500 actions chacun pour la somme de 1 euro symbolique. Aux termes de cette convention, les sociétés cédantes ont consenti à abandonner la totalité de leur compte courant d'associé créditeur dans les livres de la société Vitae Résidences pour une somme totale de 33.621,55 euros, sans clause de retour à meilleure fortune. L'acte stipulait également qu'afin de faciliter la reprise de l'exploitation par les cessionnaires, notamment dans le cadre des accords à trouver avec les propriétaires des lots exploités par la société sur une révision des loyers, la société Terresens s'engageait à opérer « pendant une durée maximum de 6 mois, une avance mensuelle en compte-courant, d'un montant de 8.333 euros par mois, soit 50.000 euros sur la période de 6 mois ».

Par courrier du 12 juillet 2021, le liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences à sollicité le paiement de cette somme de 50.000 euros. La société Terresens s'est opposée à ce paiement. Les parties ont recherché une solution amiable et selon protocole transactionnel signé par la société Terresens le 18 novembre 2021, cette dernière s'est engagée à verser une somme globale et forfaitaire de 30. 000 euros correspondante à 60 % de la somme initialement prévue de 50.000 euros.

Par requête du 23 novembre 2021, déposée au greffe du tribunal de commerce de Lyon le 25 novembre 2021, la Selarl [Z] [Y], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences, a sollicité du juge-commissaire de la procédure de liquidation judiciaire de la société Vitae Résidences l'autorisation de transiger avec la société Terresens, sous réserve de l'homologation par le tribunal de commerce de Lyon.

Par ordonnance du 16 décembre 2021, le juge commissaire a fait droit à cette demande et le liquidateur judiciaire a signé le protocole transactionnel.

Par jugement du 18 janvier 2022, le tribunal de commerce de Lyon a homologué la transaction proposée par la Selarl [Z] [Y], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences et la société Terresens.

Par requête déposée au greffe du tribunal de commerce de Lyon le 1er février 2022, la société Deltinvest et M. [W] ont exercé un recours aux fins d'annulation, à tout le moins de réformation, contre l'ordonnance rendue le 16 décembre 2021 par le juge-commissaire de la société Vitae Résidences ayant autorisé le liquidateur judiciaire à transiger. Cette affaire a été enrôlée sous le RG n°22F00262.

Par jugement réputé contradictoire du 6 mai 2022 (RG n°2022F262), le tribunal de commerce de Lyon a :

-déclaré irrecevable le recours de la société Deltinvest et de M. [W],

- condamné la société Deltinvest et M. [W] à payer, chacun à la Selarl [Z] [Y], ès-qualité de liquidateur de la société Vitae Résidences, une somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Deltinvest et M. [W] aux entiers dépens de l'instance

M.[W] et la société Deltinvest ont interjeté appel par acte du 19 mai 2022 Mme le Procureure Générale, la Selarl [Z] [Y], ès-qualités, la société Vitae Résidences et la société Terresens.

Par conclusions d'incident déposées le 19 septembre 2022, la société Deltinvest et M. [W] ont saisi le président de la chambre commerciale de la cour d'appel de Lyon aux fins de voir déclarer irrecevable l'appel incident de la Selarl [Z] [Y], ès-qualités notifiées le 17 août 2022 et à tout le moins de déclarer irrecevables ces conclusions en ce qu'elles forment appel incident et de la condamner à leur payer chacun la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Par ordonnance du 13 décembre 2022 la présidente de la 3ème chambre de la cour d'appel de Lyon a rejeté la demande de la société Deltinvest et de M. [W], dit que le sort des dépens de l'incident est joint à celui des dépens au fond et dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 20 septembre 2022 M. [W] et la société Deltinvest demandent à la cour au visa des articles R.661-2, R. 662-1, L. 642-24, R. 642-41, L. 651-2 et L.653-4 du code de commerce, des articles 408, 582 et 583 du code de procédure civile et des articles 1180 et 2044 du code civil de :

à titre principal,

- infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

et statuant à nouveau,

- les déclarer recevables à agir à l'encontre de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 16 décembre 2021,

- prononcer la nullité de l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 16 décembre 2021,

subsidiairement,

- infirmer l'ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lyon le 16 décembre 2021,

en tout état de cause,

- juger n'y avoir lieu à autoriser la Selarl [Z] [Y], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences, à signer le protocole litigieux,

- débouter la Selarl [Z] [Y], ès-qualités, de sa demande à être autorisée à transiger et à signer le protocole litigieux,

- condamner la Selarl [Z] [Y], ès-qualités, à leur régler chacun la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la Selarl [Z] [Y], ès-qualités, aux entiers dépens de l'instance.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 1 février 2022, la Selarl [Z] [Y], ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences, demande à la cour sur le fondement des articles L.622-20, R.621-21 et R.622-18 du code de commerce de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a notamment déclaré irrecevable le recours formé par la société Deltinvest et M. [W] à l'encontre de l'ordonnance rendue par M. le juge-commissaire le 16 décembre 2021,

- débouter la société Deltinvest et M. [W] de l'intégralité de leurs demandes et moyens,

- condamner la société Deltinvest et M. [W] à lui payer chacun une somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Deltinvest et M. [W] aux entiers dépens de la présente instance.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 3 août 2022, la société Terresens demande à la cour, sur le fondement de l'article 122 du code de procédure civile, des articles L.622-20 et suivants du code de commerce et des articles R.621-18 et suivants du code de commerce de :

- déclarer la société Deltinvest et M. [W] irrecevables en leurs demandes faute de qualité et d'intérêt à agir,

- débouter la société Deltinvest et M. [W] de leurs prétentions et demandes tendant à voir prononcer la nullité de l'ordonnance rendue le 16 décembre 2021 et subsidiairement l'infirmation de cette ordonnance ainsi que de voir juger n'y avoir lieu à autoriser la Selarl [Z] [Y] à signer le protocole litigieux,

- condamner la société Deltinvest et M. [W] à lui payer la somme de 4.000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La société Vitae Résidences, à qui la déclaration d'appel a été signifiée par acte du 22 juin 2022, n'a pas constitué avocat.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 février 2023, les débats étant fixés au 16 février 2023.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande en nullité de l'ordonnance du juge commissaire du 16 décembre 2021 autorisant le liquidateur judiciaire à transiger

La Selarl [Z] [Y], ès-qualités expose que :

-selon la Cour de cassation, un contrôleur n'a pas qualité pour former un recours sur le fondement de l'article R.621-21 du code de commerce contre une ordonnance rendue à la demande du mandataire judiciaire ou du liquidateur, par le juge-commissaire,

-seul le liquidateur judiciaire peut agir dans l'intérêt collectif des créanciers de la société Vitae Résidences dans le cadre des actions en recouvrement de créances,

-les contrôleurs ne peuvent justifier de leur qualité à agir en l'absence de carence du liquidateur judiciaire qu'ils n'ont d'ailleurs jamais mis en demeure s'agissant du protocole transactionnel c'est à dire s'agissant du recouvrement des créances et alors que l'ordonnance querellée a été rendue à sa demande,

-la mise en demeure dont se prévalent des appelants a été adressée au liquidateur judiciaire le 4 février 2022 soit postérieurement à l'introduction du recours contre l'ordonnance du juge commissaire déposée au greffe du tribunal de commerce le 1er février 2022 et son objet est différent de l'objet du recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire puisque cette mise en demeure porte sur les sanctions patrimoniales et commerciales à engager à l'encontre des dirigeants de la société Vitae Résidences alors que le recours exercé contre l'ordonnance concerne le protocole conclu dans le cadre de recouvrement des actifs de cette société,

-le recours visé à l'article R.621-21 du code de commerce n'est ouvert qu'aux parties, ce que ne sont pas les appelants, qui sont contrôleurs et créanciers et aux personnes dont les droits et obligations sont directement affectés, ce qui n'est pas non plus le cas des appelants, dont les droits ne sont qu'indirectement affectés par l'ordonnance à laquelle il est reproché de transiger sur la responsabilité des dirigeants de la société Vitae Résidences,

-aucun avis n'est requis du contrôleur pour valider un protocole transactionnel, les contrôleurs n'ont pas à être convoqués par le juge-commissaire et l'ordonnance n'a pas à leur être notifiée

La société Terresens estime pour sa part que :

-si en application de l'article R.622-18 et L.622-20, les créanciers nommés contrôleurs peuvent engager toute action utile dans l'intérêt collectif des créanciers en cas de carence du mandataire qui en a la charge ce n'est qu'à la condition préalable d'une mise en demeure non suivie d'effet dans le délai de deux mois. Or ces conditions ne sont pas remplies en l'espèce puisque la déclaration de recours contre l'ordonnance du juge commissaire a été déposée au greffe du tribunal de commerce le 1er février 2022, la mise en demeure adressée au liquidateur judiciaire l'a été le 4 février 2022 et qu'aucune inaction du liquidateur judiciaire, auquel on reproche au contraire son action de s'être fait autoriser à régulariser la transaction, n'est démontrée,

-selon la Cour de cassation, un contrôleur n'a pas qualité pour former un recours contre une ordonnance rendue à la demande du mandataire judiciaire ou du liquidateur, par le juge-commissaire,

Les appelants exposent que :

-la jurisprudence confère aux contrôleurs la qualité de personnes dont les droits et obligations sont affectés par les ordonnances du juge commissaire, et qu'à ce titre la notification faite par courrier simple à la société Deltinvest par le greffe du tribunal de l'ordonnance du juge commissaire confirme cette qualité au sens de l'article R.621-21 du code de commerce, étant relevé que le non respect de la formalité à l'égard de M. [W] ne lui enlève pas cette qualité, mais empêche le délai de recours contre l'ordonnance de courir,

-le législateur confère aux contrôleurs la possibilité de palier la carence du mandataire judiciaire, laquelle est établie puisqu'ils ont mis en demeure le liquidateur le 4 février 2022 d'engager des poursuites contre les dirigeants de la société Vitae Résidences,

-la loi permet à toute personne justifiant d'un intérêt de soulever une nullité absolue et qu'en l'espèce, le protocole a été signé le 18 novembre 2021, seule date figurant sur le document, soit avant que le juge-commissaire n'autorise, par ordonnance du 16 décembre 2021, le liquidateur judiciaire à signer le protocole, de sorte qu'il encourt la nullité absolue et l'ordonnance qui l'a autorisé encourt également cette nullité absolue,

L'article L.621-11 du code de commerce donne aux contrôleurs une mission de protection de l'intérêt collectif des créanciers et l'article R.621-21 du même code permet à toute personne dont les droits sont affectés de former recours des ordonnances du juge-commissaire.

Par ailleurs, l'article L.622-20 du code de commerce dispose que : « le mandataire judiciaire désigné par le tribunal a seul qualité pour agir au nom et dans l'intérêt collectif des créanciers. Toutefois, en cas de carence du mandataire judiciaire, tout créancier nommé contrôleur peut agir dans cet intérêt dans des conditions fixées par décret en Conseil d'État ».

Enfin, l'article R. 622-18 précise qu'en application du premier alinéa de l'article L. 622-20, l'action d'un créancier nommé contrôleur, dans l'intérêt collectif des créanciers, n'est recevable qu'après une mise en demeure adressée au mandataire judiciaire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception restée infructueuse pendant deux mois à compter de la réception de celle-ci.

Il résulte de ces dispositions, que tout créancier nommé contrôleur peut agir en défense de l'intérêt collectif des créanciers, mais seulement en cas de carence de l'organe exprimant cet intérêt. Il en résulte qu'un contrôleur n'a pas qualité pour former sur le fondement de l'article R.621-21 précité, un recours contre une ordonnance rendue à la demande du mandataire ou du liquidateur, par le juge commissaire (Cass.com.,30 janv.2019, n°17-20.793).

Dès lors, le moyen tiré de la carence du liquidateur judiciaire n'est pas fondé, alors que l'ordonnance du juge commissaire du 16 décembre 2021 autorisant le liquidateur judiciaire à transiger avec la société Terresens, débitrice de la société liquidée, Vitae Résidences, a été rendue sur saisine de ce dernier, ce qui empêche de conclure à son inaction, étant relevé que cette prétendue carence ne saurait au demeurant résulter de la mise en demeure d'avoir à engager des poursuites en sanction patrimoniales contre les dirigeants de la société Vitae Résidences adressée par les appelants au liquidateur judiciaire le 4 février 2022, soit postérieurement à l'introduction du recours contre l'ordonnance du juge commissaire déposée au greffe du tribunal de commerce le 1er février 2022, laquelle mise en demeure ne pouvant en outre avoir que pour effet de permettre aux contrôleurs d'agir en responsabilité contre les dirigeants de la société liquidée en lieux et places du liquidateur judiciaire.

Le moyen tiré de ce qu'en tant que contrôleurs, M. [W] et la société Deltinvest peuvent se prévaloir de la qualité de « personnes dont les droits et obligations sont affectées » ne peut davantage prospérer, alors qu'un contrôleur n'a pas qualité pour former, sur le fondement de l'article R.621-21 un recours contre une ordonnance rendue, à la demande du mandataire ou du liquidateur, par le juge commissaire dès lors qu'en application des articles L. 622-20 et R. 622-18 précités, réservés aux contrôleurs, ces derniers ne peuvent ainsi agir qu'en cas de carence du mandataire et selon cette procédure particulière.

Enfin, la prétendue nullité du protocole transactionnel régularisé entre la société Terresens et le liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences dont au demeurant il n'est pas sollicité le prononcé dans le cadre de la présente instance, n'est en tout état de cause pas de nature à entraîner la nullité de l'ordonnance du juge commissaire ayant autorisé la transaction, étant relevé qu'il n'est ni allégué, ni a fortiori démontré l'existence d'un vice affectant cette ordonnance. Il s'ensuit que le moyen tiré de la recevabilité des appelants à agir en nullité absolue de l'ordonnance autorisant la transaction résultant de la nullité absolue affectant le protocole transactionnel doit également être écarté.

En conséquence, il convient de déclarer irrecevable M. [W] et la société Deltinvest, ès-qualité de contrôleurs, à agir en nullité de l'ordonnance rendue le 16 décembre 2021 par le juge commissaire autorisant le liquidateur judiciaire de la société Vitae résidences à transiger et de confirmer le jugement déféré.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Parties succombantes, M. [W] et la société Deltinvest doivent supporter les dépens de première instance et d'appel comme la totalité des frais irrépétibles exposés et verser aux appelants une indemnité de procédure ce qui conduit à la confirmation des condamnations prononcées à ces titres par le tribunal de commerce à leur encontre et aux décisions précisées dans le dispositif.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré,

Ajoutant,

Condamne M. [W] et la société Deltinvest à verser à la société Terresens une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Condamne M. [W] et la société Deltinvest à verser à la Selarl [Z] [Y], ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Vitae Résidences une indemnité de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel,

Condamne M. [W] et la société Deltinvest aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/03623
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;22.03623 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award