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29/03/2023 | FRANCE | N°19/08995

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 29 mars 2023, 19/08995


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE



N° RG 19/08995 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MYZ3



[G]

C/

Société REGIE GELAS ET CHOMIENNE



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Novembre 2019

RG : 17/2167



COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 29 MARS 2023







APPELANT :



[U] [G]

né le 17 Février 1970 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



représent

é par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Karine THIEBAULT de la SELARL CABINET KARINE THIEBAULT, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



Société R...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 19/08995 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MYZ3

[G]

C/

Société REGIE GELAS ET CHOMIENNE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 28 Novembre 2019

RG : 17/2167

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 29 MARS 2023

APPELANT :

[U] [G]

né le 17 Février 1970 à [Localité 3]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

représenté par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Karine THIEBAULT de la SELARL CABINET KARINE THIEBAULT, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société RÉGIE GELAS ET CHOMIENNE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Ludovic GENTY de la SCP FROMONT BRIENS, avocat au barreau de LYON substitué par Me Hadrien DURIF, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 24 Janvier 2023

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Anne BRUNNER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 29 Mars 2023, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société ORALIA GELAS & CHOMIENNE est spécialisée dans les services immobiliers à destination des particuliers, et notamment la gestion locative, le syndic ainsi que l'intermédiation dans les transactions d'achats/vente et de location.

Le groupe NEXITY est actionnaire d'ORALIA depuis 2014.

M. [U] [G] a été embauché au sein de la société ORALIA GELAS & CHOMIENNE, selon contrat à durée déterminée à compter du 1er décembre 1992, renouvelé à compter du 1er avril 1993, en qualité de d'Employé du service comptable de gestion.

La relation de travail s'est poursuivie à durée indéterminée à compter du 1er avril 1994 en qualité d'Employé de bureau et Agent de maîtrise, puis de Responsable du service comptabilité.

La relation de travail était régie par la convention collective de l'immobilier.

Invoquant un nombre important de manquements professionnels, la société ORALIA remettait le 21 novembre 2016 à M. [G], en main propre contre décharge, une convocation à un entretien préalable fixé au 9 décembre 2016.

Par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 21 décembre 2016, la société ORALIA a notifié à M. [G] son licenciement pour insuffisance professionnelle, avec dispense de préavis rémunérée, dans les termes suivants :

« (') Pour mémoire, vous avez été embauché, par contrat de travail à durée indéterminée en date décembre 1992 et exercez depuis le 1er octobre 2002 les fonctions de Chef Comptable au sein du Cabinet GELAS ET CHOMIENNE.

En cette qualité, il vous appartient de piloter l'activité comptable de la structure, qu'il s'agisse de la comptabilité générale ou de la comptabilité mandants (gestion locative et copropriété).

Ainsi, conformément aux dispositions de votre contrat de travail et sans que cette liste ne soit exhaustive, nous vous avons confié les missions suivantes :

' En comptabilité générale :

- comptabiliser régulièrement les honoraires et les frais généraux du cabinet, conformément au plan comptable général du Groupe et aux instructions de la Direction Générale,

- établir les déclarations sociales et fiscales, mensuellement ou trimestriellement,

- réviser régulièrement les comptes, établir pour le 10 qui suit la fin de chaque trimestre, une situation comptable, rapprochée du budget, et la transmettre à la Direction Générale du Groupe,

- préparer le budget annuel, et d'une manière générale, transmettre à la Direction Générale du Groupe, toutes informations qu'elle sollicitera, tant d'ordre comptable, financier que statistique.

' En comptabilité service gestion locative :

- Suivre les encaissements,

- Suivre les comptes locataires,

- Suivre les comptes des mandants,

- Suivre l'établissement des comptes rendus de gestion,

- Suivre l'édition des renseignements destinés aux mandants pour leur permettre l'établissement de leur déclaration n°2044

' En comptabilité service copropriété :

- Suivre les encaissements,

- Suivre les comptes et la trésorerie des immeubles,

- Etablir ou contrôler les déclarations de charges sociales correspondantes,

- Etablir ou contrôler les comptes des immeubles

' Divers :

- Etablir les tableaux de synthèse financiers suivant les instructions données par la Direction Générale, permettant le suivi des comptes mandats, des comptes des immeubles et de l'activité des services,

- etc...

En d'autres termes, nous vous avons confié une mission essentielle au bon fonctionnement et à la pérennité du Cabinet, nécessitant des qualités professionnelles avérées ainsi qu'un sens de la rigueur indispensable eu égard au niveau de responsabilités confiées.

A ce titre, vous encadrez une équipe composée de 3 collaborateurs (2 comptables gérance et 1 comptable syndic), et êtes garant d'un traitement comptable rigoureux des portefeuilles gérés par le cabinet (1655 lots en copropriété, 1128 lots en gestion).

Or, au lieu de ce travail de qualité, nous déplorons vos graves carences dans l'exercice de vos missions, qu'il s'agisse du suivi de la comptabilité (notamment en Gérance), ou de la comptabilité générale du Cabinet, vos défaillances ayant des conséquences particulièrement néfastes sur les résultats du Cabinet GELAS et CHOMIENNE.

COMPTABILITE GERANCE :

En comptabilité Gérance, nous déplorons la légèreté particulièrement manifeste et blâmable avec laquelle vous avez assuré la gestion comptable de Monsieur [F] [J], ancien dirigeant de la Régie et titulaire de plusieurs SCI dont nous assurons la gestion depuis l'acquisition du cabinet par ORALIA, en vertu de plusieurs mandats :

- SCI BELLECOUR INVESTISSEMENT comprenant 104 lots (honoraires de gestion courante 73.800€ et honoraires annexes 24.500€)

- SCI BBRV comprenant 8 lots (honoraires de gestion courante 2.900,00€)

- SCI MARPAL comprenant 6 lots (honoraires de gestion courante 1.360,00€)

- SCI CHILDEBERT représentant 104 lots (honoraires de gestion courante 5.450,00€)

- SCI KVR comprenant 3 lots (honoraires de gestion courante 1.100,00€).

En dépit de l'importance capitale de ce client pour notre régie, nous déplorons vivement vos nombreuses défaillances dans la gestion comptable de ses mandats, celles-ci ayant conduit directement à la résiliation, fin octobre 2016, de l'ensemble des mandats précités à effet au 31 décembre prochain.

En effet, de nombreuses et régulières défaillances comptables, soulevées par Monsieur [J] dès l'année 2014 et qui se sont réitérées jusqu'en octobre 2016, ont généré la totale insatisfaction de celui-ci et conduit immanquablement à sa décision de rompre nos relations commerciales, comme en témoignent les illustrations reprises ci-après :

Aux termes de courriels des 31 décembre 2014, 14 et 26 janvier 2015, Monsieur [J] nous faisait part de son désaccord, à la suite de la réception de son compte-rendu de gestion du dernier trimestre 2014, quant au fait que les comptes avaient été arrêtés au 20 décembre 2014 et non au 31 décembre.

Monsieur [J] a ainsi mis en avant les conséquences préjudiciables de cette situation pour les associés de la SCI, dans la mesure où les loyers et charges dus par ses locataires et particulièrement les taxes foncières réclamées en fin d'année, n'ont pas été encaissées sur le même exercice comptable si le règlement avait été reçu après le 20 décembre. Dans le cadre de vos missions de Chef Comptable, vous auriez dû remonter cette situation à votre Direction Générale afin d'obtenir à titre dérogatoire, d'arrêter les comptes au 31 décembre 2014 pour tenir compte de la situation particulière de ce client.

Monsieur [J] déplorait également le traitement pour le moins tardif des taxes foncières, qui ont été quittancées majoritairement le 24 octobre 2014 alors qu'elles auraient dû l'être dès la 2ème quinzaine du mois de septembre ou, à tout le moins, dès leur réception début octobre.

Ce dernier nous faisait part également de ses vives doléances s'agissant du traitement de la facturation des honoraires des clauses pénales (frais de relance pour non-paiement pour les locataires de locaux commerciaux). Pour mémoire en effet, depuis son application groupe en 2013 et jusqu'au 30 septembre 2014, celle-ci n'a pas été opérée sur le compte propriétaire BELLECOUR INVESTISSEMENT dès lors que le locataire l'avait réglée. A compter de septembre 2014, les frais de relances ont été à nouveau directement facturés sur les locataires et non plus sur les propriétaires. Cependant certains anciens honoraires ont été facturés à tort sur le 4ème trimestre 2014 alors que ristournés aux locataires pour environ 400.00 euros.

La régularisation a été effectuée sur l'exercice 2015 sur 10 immeubles concernés du patrimoine. Monsieur [J] a, là encore, regretté que ces annulations n'aient pas été effectuées sur le même exercice.

En parallèle, Monsieur [J] a également déploré que le dépôt de garantie d'un locataire parti, d'un montant de 5710.00 euros a été remboursé à ce dernier à tort, deux fois. Fort heureusement, cette somme a pu être récupérée sur des encaissements de loyers.

En votre qualité de Chef Comptable, vous auriez dû contrôler préalablement et comptablement que ce dépôt de garantie avait déjà été réglé.

En octobre 2016, Monsieur [J] a été contraint, de déplorer l'absence d'établissement des charges locatives 2015 sur une partie importante de son patrimoine confié et de s'interroger à nouveau sur la récupération des taxes foncières, compte tenu des difficultés rencontrées au cours des précédentes années.

Enfin en novembre 2016, Monsieur [J] ainsi que son fils [C], ont remonté différentes difficultés rencontrées au cours de l'exercice comptable écoulé (affectations erronées concernant la TVA déductible, incohérence entre nos fichiers comptables et les relevés de gestion), celles-ci étant à l'origine d'un surcroît de travail non budgété pour Madame [X] [A], comptable intervenant pour le compte de la SCI.

En conséquence, vos défaillances dans la gestion comptable de son patrimoine ont altéré purement et la confiance de Monsieur [J] à l'égard de notre enseigne, l'obligeant ainsi à contrôler systématiquement votre travail, tout comme les tensions que vous avez générées et entretenues avec Madame [X] [A], et qui sont également à l'origine de la rupture des relations commerciales avec ce client.

Ainsi, et malgré l'attention toute particulière que vous deviez apporter à la gestion prioritaire de ce client particulier, il est manifeste que vous avez traité la situation avec une désinvolture inacceptable, si l'on considère le nombre de mandats confiés par ce client et les honoraires en jeu (110 k€).

Cette situation est d'autant plus inacceptable que, rappelons-le, vos défaillances avaient déjà contraint Monsieur [J], par le passé, à vous retirer une partie des missions initialement confiés à notre cabinet, au profit du cabinet CCI CONSEIL.

Elles génèrent un préjudice considérable, tant au plan financier qu'en termes d'image de marque et de réputation pour notre agence et nous redoutons les conséquences désastreuses que pourrait générer la résiliation des mandats confiés par nos clients en lien avec Monsieur [J] qui dispose d'un réseau considérable et dont l'enjeu est estimé à 50 k€.

Au-delà, nous constatons un manque d'encadrement et de suivi de l'activité des comptables placés sous votre responsabilité, obligeant vos collègues de travail des autres services d'intervenir directement auprès de vos collaborateurs comptables pour obtenir des retours (par exemple : absence de récupération des charges d'eau pour la SCI JEAN BAPTISTE fin 2013, régularisation des charges pour la SCI PARIS LUMIERE non faite au 31 décembre 2015...).

COMPTABILITE GENERALE :

Au-delà de vos missions essentielles dans le pilotage de la comptabilité mandants et du management de vos équipes, nous rappelons qu'à l'instar de vos homologues Chefs Comptables des cabinets ORALLA, vous devez assurer la préparation du budget annuel du cabinet GELAS et CHOMIENNE ainsi que son atterrissage, selon une procédure spécifique et détaillée communiquée par les fonctions support du Groupe ORALIA.

A cet effet, nous rappelons que pour l'année 2016, cette procédure vous a été rappelée lors du séminaire des 31 mai et 1 er juin 2016 réunissant l'ensemble des Chefs Comptables d'ORALIA.

A cette occasion, [Y] [D], Directeur Administratif et Financier du Groupe ORALIA, vous a donc exposé les directives relatives à la préparation de l'atterrissage au 31 décembre 2016 et l'établissement du budget 2017, ainsi que le calendrier de présentation budgétaire auprès de la direction générale 40 d'ORALIA, prévoyant une remontée des éléments budgétaires au 30 septembre 2016 pour ce qui concerne Gelas et Chomienne.

Il vous a également été rappelé qu'ORALIA était depuis le 1er avril 2014 une filiale du Groupe NEXITY, société cotée en bourse au premier marché et donc astreinte à la délivrance d'informations financières régulières.

L'établissement du budget, constitue donc une étape incontournable dans le pilotage d'un cabinet et à ce titre le planning d'élaboration budgétaire doit être respecté scrupuleusement afin de nous inscrire dans les délais de « centralisation » des données financières du groupe NEXITY.

Nous rappelons ainsi, le calendrier 2016 tel qu'il vous a été exposé :

' 16 septembre: préparation du budget « Honoraires et frais généraux» d'après la situation arrêtée au 30 Juin 2016.

' du 19 septembre au 11 Octobre : revue des budgets par l'équipe de [Y] [D] selon le planning communiqué.

' du 21 septembre au 14 octobre : tenue des réunions budgétaires avec la Direction Générale.

' du 15 Octobre au 20 octobre : analyse du budget consolidé par la Direction Générale

' 28 Octobre : présentation du budget à NEXITY.

A cette fin, vous disposiez, comme l'ensemble des Chefs comptables d'Oralia, des outils informatiques suivants :

' le système d'information ICS, CEGID pour la comptabilité ;

' un outil de suivi du compte de résultat du cabinet sur INTRALIA pour le suivi du contrôle budgétaire.

Force est de constater, que vous n'avez pas respecté le planning précité.

En effet, compte tenu de votre retard dans l'avancement de cette mission fondamentale, la Direction Générale n'a eu d'autre choix que de décaler la présentation du budget du cabinet, alors que toutes les filiales d'ORALIA avaient restitué et présenté leurs budgets dans les temps. C'est la raison pour laquelle, il vous a été accordé, exceptionnellement et sans y être obligés, de remonter votre budget pour le 17 octobre, soit un délai de 2 semaines supplémentaires, afin qu'il soit présenté le jour même devant la Direction Générale.

Or, en dépit de ce report exceptionnel, [Y] [D] constatait avec consternation, le 11 octobre 2016, que le taux de réalisation du budget était insuffisant sur INTRALIA.

De ce fait, nous avons été contraints, de faire intervenir en urgence [K] [E], comptable du siège, laquelle s'est déplacée dans vos locaux les 12 et 14 octobre 2016, afin de reprendre la main en urgence dans la finalisation de votre maquette budgétaire afin de pouvoir assurer une restitution des éléments budgétaires in extremis. Les situations du 30 juin et du 30 septembre ont été rendues le lendemain de la date butoir.

Vous ne pouvez ignorer que la réception tardive du budget de Gelas et Chomienne, ne nous a pas permis d'effectuer, comme pour l'ensemble des autres filiales, une analyse aussi approfondie de la projection budgétaire du cabinet en y apportant, si nécessaire, des mesures correctives, ce qui est parfaitement intolérable.

Cette situation, relative à la préparation du budget, est d'autant plus inadmissible qu'elle s'inscrit dans la continuité du mode de fonctionnement que vous avez régulièrement imposé à votre Direction et aux fonctions support ORALIA au cours des derniers mois (audit mandant au 1er trimestre, paramétrage du logiciel CEGID pour les SCI...). Malgré nos meilleurs efforts (report des échéances, mobilisation des équipes du Siège

en urgence pour vous suppléer...) pour vous permettre de remplir vos obligations, force est de constater que vous n'avez pas pris en compte l'importance de vos responsabilités si l'on considère votre manque de diligence dans la prise en compte des demandes émanant de la Direction Générale sur des sujets aussi fondamentaux que le suivi et l'élaboration des budgets.

En définitive, nous considérons que vous faites preuve d'une défaillance totale en termes d'implication dans le fonctionnement même de l'agence.

Enfin, et ainsi que nous vous l'avons indiqué lors de l'entretien préalable, nous avons découvert que, dans le cadre du mandat FONDATION PIERRE VEROTS vous avez procédé, de votre propre chef et sans information ni autorisation préalable, à une opération comptable consistant :

' à débiter le 19 septembre 2016 une somme globale de 60.000euros, correspondant à des revenus locatifs initialement et normalement affectés au compte de gestion de ce client,

' à l'affecter jusqu'au 30 septembre 2016 au crédit du compte de liaison honoraires de notre Cabinet,

' enfin, à la rebasculer à cette date sur le compte de gestion client, une telle opération comptable n'ayant d'autre effet, comme vous le savez parfaitement que :

- de faire baisser temporairement la pointe de trésorerie de notre Cabinet, constituée par les sommes, prises dans leur montant maximal, dont nous sommes redevables à tout moment à nos clients mandants et aux tiers, dans le cadre de notre activité d'administrateurs de biens,

- par là-même, d'empêcher tout surcoût de notre garantie financière qui pourrait résulter d'un dépassement de cette pointe de trésorerie, alors même que le surcoût en jeu serait, en l'occurrence, de 114€ annuels.

Il va sans dire que nous sommes parfaitement stupéfaits par cette écriture comptable parfaitement anormale, qui a pour effet, d'une part de travestir la réalité comptable vis-à-vis de notre assureur et de fausser, pendant la période donnée, les comptes visibles par nos clients sur notre extranet, ce qui pourrait générer d'importantes difficultés en cas de questionnement de ces derniers.

Nous vous informons que nous sommes donc amenés à procéder à toute vérification quant à ce type de pratiques particulièrement inquiétantes et qui pourrait être de nature à engager votre responsabilité.

En définitive, nous considérons que vous avez fait preuve d'une totale défaillance dans l'exécution des missions que nous vous avons confiées, celles-ci étant essentielles pour la bonne marche de la régie GELAS ET CHOMIENNE.

Compte tenu de votre niveau de poste, de revenus et de vos responsabilités, vos insuffisances et les dysfonctionnements en résultant ne sont pas acceptables et de nature à remettre en cause la confiance indispensable à notre collaboration.

Lors de l'entretien préalable, vous n'avez apporté aucun élément concret d'explication sur les griefs précités, vous contentant de vous retrancher derrière un manque de personnel au sein du service comptable et considérant avoir fait le maximum pour assurer vos missions avec rigueur.

Cette tentative d'explication visant à vous dédouaner ne fait que conforter, si besoin est, que vous n'avez pas pris la mesure des responsabilités qui vous ont été confiées.

Nous vous rappelons pourtant que nous vous avons apporté tout notre appui pour mener à bien votre mission à cet effet et que vous disposez de l'ensemble des moyens à cet effet, à savoir des outils informatiques performants, l'aide des fonctions support, ainsi que de nombreuses formations en particulier :

- « la fiscalité de la gestion locative »

- « CEGID- expert comptabilité »

- « Les fondamentaux du management des équipes et des hommes »,

- « Organiser le travail de son équipe »,

- Etc... (...)'

Par acte 17 juillet 2017 M. [G] a saisi le conseil des prud'hommes de Lyon de demandes liées à la contestation du bien fondé de son licenciement.

Par une seconde requête du 29 décembre 2017, M. [G] a saisi le conseil de prud'hommes d'une demande tendant à l'annulation de sa convention de forfait et au paiement de nombreuses heures supplémentaires.

Par jugement rendu le 28 novembre 2019, le conseil de prud'hommes de Lyon a :

- Ordonné la jonction des instances enregistrées sous le numéro RG 17/4679 avec l'instance

enregistrée sous le numéro RG 17/2167 et statué par un même et unique jugement en

application de l'article 367 du code de procédure civile

- Dit et jugé que le licenciement pour insuffisance professionnelle de M. [G] [U] est sans cause réelle et sérieuse

- Dit et jugé que la convention de forfait-jours est nulle

- Dit et jugé que M. [G] a réalisé des heures supplémentaires ;

- Dit et jugé que les 24 jours de congés payés pour la période allant du 1er juin 2013 au 31 mai 2014 sont dus

En conséquence,

-Fixé le salaire moyen brut de M. [G] à 5 020 euros ;

- Condamné la SAS Régie GELAS & CHOMIENNE à verser à M. [G] [U], les

sommes suivantes :

* 87 500 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

*10 000 euros à titre de dommages intérêts pour invalidation du forfait-jours ;

* 5 000 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour les heures supplémentaires ;

* 4 085,71 euros correspondant à 24 jours de congés payés pour la période allant du 1er juin 2013 au 31 mai 2014

* 1 700 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile. [']

- Débouté M. [G] [U] du surplus de ses demandes

- Débouté la SAS Régie GELAS & CHOMIENNE de ses demandes,

- Condamné la SAS Régie GELAS & CHOMIENNE aux entiers dépens de la présente instance.

La cour est saisie de l'appel interjeté le 27 décembre 2019 par M. [G].

Par conclusions notifiées le 28 octobre 2022, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, M. [G] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

- Dit et juger que son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse ;

- Dit et jugé que la convention de forfait en jours sur l'année est nulle et en tout état de cause inopposable ;

- Condamné la société Régie GELAS & CHOMIENNE à lui verser les sommes suivantes :

* 15 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du défaut d'organisation par l'employeur d'entretiens destinés à vérifier la charge de travail du salarié et sa compatibilité avec le droit au repos et à une vie personnelle et familiale du salarié,

* 4 085,71 euros correspondant aux 24 jours de congés payés pour la période du 1er juin 2013 au 31 mai 2014,

* Outre intérêts à compter de la demande.

- Réformant le jugement entrepris :

- Condamner la société Régie GELAS & CHOMIENNE à lui verser les sommes suivantes :

* 68 662,43 euros bruts à titre de rappels de salaires pour heures supplémentaires accomplies

du 21 décembre 2013 au 21 décembre 2016, se décomposant comme suit :

o du 21 décembre 2013 au 31 juillet 2014 : 804,09 euros,

o du 1er août au 31 décembre 2014 : 23 406,07 euros,

o du 1er janvier au 31 décembre 2015 : 21 081,50 euros,

o du 1er janvier au 21 décembre 2016 : 23 370,77 euros,

* 6 866,24 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 26 815,09 euros à titre d'indemnité compensatrice équivalente à ses droits acquis en

contrepartie obligatoire en repos correspondant à 877,17 heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent légal pour les années 2014 à 2016,

* Outre intérêts à compter de la demande

- Porter à 180 738 euros nets le montant des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 36 mois de salaire

Y ajoutant :

- Condamner la société Régie GELAS & CHOMIENNE à lui verser 30 123 euros nets au titre de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- Condamner la société Régie GELAS & CHOMIENNE à lui verser la somme de 3 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant la cour, en sus de la somme allouée de ce chef par les premiers juges

- Condamner la société Régie GELAS & CHOMIENNE aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions notifiées le 7 décembre 2022, auxquelles il est expressément fait référence pour un plus ample exposé, la Régie GELAS & CHOMIENNE demande à la cour de :

- Déclarer irrecevable la demande de M. [G] tendant à voir porter à 15 000 euros les dommages intérêts pour invalidation du forfait-jours ;

- Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud'hommes de Lyon le 28 novembre 2019, sauf en ce qu'il a débouté M. [G] de sa demande de dommages-intérêts équivalent à ses droits acquis en repos compensateurs ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :

Sur le caractère parfaitement justifié du licenciement de M. [G] pour insuffisance professionnelle

A titre principal :

- Dire et juger que le licenciement M. [G] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes au titre d'un licenciement sans

cause réelle et sérieuse,

A titre subsidiaire :

Dans l'hypothèse où la Cour considérerait que les demandes de dommages- intérêts formulées par M. [G] sont fondées :

- Constater que M. [G] échoue à démontrer l'étendue de son préjudice, et lui octroyer par conséquent une indemnité limitée au strict minimum,

- Dire et juger que les demandes de dommages-intérêts allouées à ce titre s'entendent

comme des sommes brutes avant CSG et CRDS,

Sur la validité de la convention de forfait de M.[G]

A titre principal :

- Débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes au titre de la nullité de sa convention de forfait.

A titre subsidiaire :

Dans l'hypothèse où la Cour considérerait comme nulle la convention de forfait de M.[G] :

- Débouter M. [G] de l'ensemble de ses demandes au titre des heures supplémentaires prétendument réalisées;

- Appliquer le décompte d'heures supplémentaires au vu des minimas conventionnels de branche

Sur la demande d'indemnité compensatrice relative à des congés payés non pris:

- Débouter M. [G] de sa demande fondée à ce titre

En tout état de cause

- Condamner M. [G] à verser à la société ORALIA GELAS & CHOMIENNE la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamner M. [G] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 décembre 2022.

MOTIFS

- Sur la validité de la convention de forfait :

M. [G] expose que :

- Il a été assujetti, selon avenant contractuel daté du 1er juin 2012, à un forfait de 218 jours de travail par an, pendant lesquels il lui était demandé d'effectuer sa mission « sans aucune référence horaire »,

- les dispositions de l'avenant n° 20 Bis du 6 novembre 2001 à la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988, applicable en l'espèce, ayant été jugées par la Cour de cassation comme n'étant pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail imposés aux salariés assujettis au forfait jours leur assure une protection suffisante de leurs droits à la santé et au repos (puisqu'elles se limitaient à prévoir un ou deux entretiens annuels par an entre les salariés concernés et l'employeur pour déterminer le calendrier prévisionnel de l'aménagement du temps de travail et la prise de jours de repos sur l'année ainsi que l'établissement d'un bilan annuel de la charge de travail sur l'année écoulée), la clause de forfait jours stipulée à son contrat de travail devra en tout état de cause être jugée comme nulle et de nul effet par la Cour ;

- l'avenant n°47 du 23 novembre 2010 qui est venu compléter le dispositif conventionnel jugé insuffisamment protecteur, ne peut avoir pour effet de régulariser des situations juridiques en cours, dés lors que cet avenant est antérieur à l'entrée en vigueur de la loi 'Travail' du 8 août 2016 ( Arrêt C.Cass du 19 octobre 2019) ;

- cet avenant n°47 n' a par ailleurs été étendu que par un arrêté publié au journal officiel le 18 juillet 2012, soit postérieurement à l'avenant au contrat de travail prenant effet au 1er juin 2012 ;

- les dispositions relatives aux cadres assujettis au « forfait reposant sur un décompte annuel en journées » (articles 19.9 et suivants) sont identiques à celles de l'avenant n° 20 Bis du 6 novembre 2001 qui ont été jugées insuffisantes au regard des droits fondamentaux des salariés notamment protégés par les normes internationales, selon l'analyse de la Cour de cassation dans son arrêt du 14 décembre 2016 ;

- comme les précédentes, les dispositions de l'avenant de 2010 se limitent à prévoir un ou deux entretiens annuels par an entre les salariés concernés et l'employeur pour déterminer le calendrier prévisionnel de l'aménagement du temps de travail et la prise de jours de repos sur l'année ainsi que l'établissement d'un bilan annuel de la charge de travail sur l'année écoulée ;

- il convient de souligner que, tirant les conséquences de cette insuffisance, les partenaires sociaux ont depuis lors négocié un nouvel avenant n°73 du 5 décembre 2017, (soit postérieurement à son licenciement, qui n'a été étendu que le 27 décembre 2018), lequel renforce substantiellement les garanties prévues au bénéfice des cadres assujettis au forfait annuel en jours, pour permettre le respect d'une charge de travail raisonnable et compatible avec leur vie personnelle.

M. [G] conclut en tout état de cause que la Régie GELAS & CHOMIENNE ne saurait se prévaloir de dispositions conventionnelles qu'elle n'a pas appliquées, telles que la mise à disposition du salarié de fiches mensuelles à compléter par ses soins ou encore l'entretien annuel relatif à la charge de travail que la société n'a jamais organisé.

La Régie GELAS & CHOMIENNE fait valoir en réponse que :

- à aucun moment l'avenant au contrat de travail de M. [G] ne fait référence à l'avenant n°20 bis du 6 novembre 2001 à la convention collective de l'immobilier,

- l'avenant n° 47 du 23 novembre 2010 est venu compléter le dispositif conventionnel de forfait-jours, par des stipulations suffisantes à assurer au salarié la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires,

- c'est donc naturellement cet avenant qui, à défaut d'accord d'entreprise, a vocation à s'appliquer, dés lors que ses dispositions conventionnelles sont entrées en vigueur en 2010, soit antérieurement à l'avenant contractuel signé par M.[G] en 2012.

Elle conclut qu'étant adhérente à l'organisation patronale UNIS, signataire de l'accord, elle peut donc se prévaloir des dispositions de l'avenant n°47 du 23 novembre 2010.

Quant à la mise en oeuvre des garanties prévues par cet accord, la Régie GELAS & CHOMIENNE expose que :

- elle recueillait les informations relatives à la charge de travail mensuelle, en demandant aux salariés d'enregistrer leurs congés et RTT dans le logiciel interne, intitulé 'FIGGO',

- M. [G] a bien fait l'objet d'entretiens individuels, au cours desquels il n'a soulevé aucune difficulté, et ce alors même qu'en sa qualité de n° 2 de l'entreprise, il pouvait échanger en toute liberté avec son supérieur hiérarchique,

- M. [G] n'a pu bénéficier de l'entretien individuel au cours des périodes d'arrêt maladie, notamment pour la moitié de l'année 2013.

****

L'avenant contractuel du 1er juin 2012 aux termes duquel les parties ont instauré une convention de forfait en jours de 218 jours sur l'année, précise que la convention collective applicable à la société du fait de son activité est la convention collective nationale de l'immobilier dans ses dispositions étendues.

Les dispositions de l'article 9 de l'avenant n° 20 du 29 novembre 2000 relatif à l'ARTT, dans sa rédaction issue de l'avenant n° 20 bis du 6 novembre 2001, à la convention collective nationale de l'immobilier du 9 septembre 1988, qui, dans le cas de forfait en jours, se limitent à prévoir, s'agissant de la charge et de l'amplitude de travail du salarié concerné, que l'employeur et l'intéressé définissent en début d'année, ou deux fois par an si nécessaire, le calendrier prévisionnel de l'aménagement du temps de travail et de la prise des jours de repos sur l'année et établissent une fois par an un bilan de la charge de travail de l'année écoulée, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié

La Régie GELAS & CHOMIENNE invoque l'application à la relation de travail de l'avenant n°47 du 23 novembre 2010 à la convention collective de l'immobilier et soutient que cet avenant est venu compléter le dispositif conventionnel de forfait-jours par des stipulations suffisantes à assurer au salarié la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires.

Mais l'avenant n°47 du 23 novembre 2010 a été étendu par arrêté du 5 juillet 2012 et publié au journal officiel du 18 juillet 2012, de sorte qu'à la date de la signature de l'avenant contractuel du 1er juin 2012, la Régie GELAS & CHOMIENNE ne pouvait se prévaloir de l'application des dispositions de l'avenant n°47.

Et la possibilité de mise en conformité d'un accord collectif avec l'article L. 3121-64 du code du travail résulte de la loi travail du 8 août 2016 qui est intervenue postérieurement à l'avenant n°47 du 23 novembre 2010. En effet, l'article 12 de la loi du 8 août 2016, énonce :

'I. - Lorsqu'une convention ou un accord de branche ou un accord d'entreprise ou d'établissement conclu avant la publication de la présente loi et autorisant la conclusion de forfaits annuels en heures ou en jours est révisé pour être mis en conformité avec l'article L. 3121-64 du code du travail, dans sa rédaction résultant de la présente loi, l'exécution de la convention individuelle de forfait annuel en heures ou en jours se poursuit sans qu'il y ait lieu de requérir l'accord du salarié.(...)'

Il en résulte que la mise en conformité de la convention collective de l'immobilier applicable à la relation contractuelle avec l'article L. 3121-64 du code du travail n'était possible qu'après la mise en oeuvre de la loi travail du 8 août 2016.

En tout état de cause, la Régie GELAS & CHOMIENNE qui se prévaut de l'avenant n°47 sus-visé ne démontre pas en quoi les modalités prévues par cet avenant seraient suffisamment protectrices de la santé du salarié dés lors que l'article 19.9 de l'avenant prévoit seulement que 'L'employeur et le cadre définissent en début d'année, ou deux fois par an si nécessaire, le calendrier prévisionnel de l'aménagement du temps de travail et de la prise des jours de repos sur l'année. Une fois par an, il établissent un bilan de la charge de travail de l'année écoulée.(...)', ce dont il résulte que les dispositions prévues par cet avenant quant aux modalités de contrôle de la charge de travail ne diffèrent en rien de celles de l'avenant n°20 bis du 6 novembre 2001 censurées par la jurisprudence.

La convention de forfait liant les parties ayant été conclue aux termes d'un accord collectif dont les stipulations n'assurent pas la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos journaliers et hebdomadaires, cette convention individuelle de forfait en jours est nulle, en raison de la nullité affectant le dispositif conventionnel qui lui sert de support.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a jugé que la convention de forfait en jours de M. [G] est nulle. Il convient en conséquence d'examiner la demande de M. [G] au titre des heures supplémentaires, le salarié étant fondé à invoquer un décompte horaire du temps de travail conformément au droit commun.

- Sur la demande de rappel d'heures supplémentaires :

M. [G] produit en pièce n°6 un décompte actualisé des heures supplémentaires au titre desquelles il sollicite un rappel de salaire. Il demande les sommes suivantes :

- du 21 décembre 2013 au 31 juillet 2014 : 804,09 euros,

- du 1er août au 31 décembre 2014 : 23 406,07 euros,

- du 1er janvier au 31 décembre 2015 : 21 081,50 euros,

- du 1er janvier au 21 décembre 2016 : 23 370,77 euros.

A l'appui de sa demande, M. [G] invoque :

- d'une part, les attestations de Mme [O], comptable syndic pendant 7 années, de Mme [B], qui a également travaillé sous sa responsabilité durant plus de cinq ans (du 15 avril 2010 au 31 août 2015) en qualité de comptable gérance, de Mme [T], qui a travaillé en qualité d'aide comptable gérance du 17 mai au 5 août 2016 ;

- son acceptation, durant un arrêt maladie, d'une connexion à distance sur le logiciel de comptabilité lui permettant de continuer à travailler à la suite de son hospitalisation du 19 au 25 mars 2014 pour une lombalgie invalidante ;

- un contexte de travail largement dégradé, le contraignant à travailler régulièrement tard le soir, le week end, les jours fériés ;

- son « bilan annuel d'expérience et de suivi » du 21 décembre 2012, où il alertait déjà son employeur sur « une surcharge de travail » et « l'investissement supplémentaire en temps de travail » qui avait été le sien durant l'année écoulée directement imputable au rachat de la Régie par ORALIA ;

- une nouvelle alerte sur la charge de travail en mars 2016, à l'occasion du remplacement intégral de l'équipe comptable.

La Régie GELAS & CHOMIENNE soutient au contraire que :

- elle n'a nullement demandé à M.[G] d'accomplir de telles heures,

- M. [G] était un cadre autonome, ne recevant de ce fait aucune consigne dans l'organisation de son service et n'ayant aucun horaire précis à respecter, de sorte que la société ne disposait d'aucun moyen de contrôler les heures de travail de son salarié ;

- le seul élément matériel qui serait à même d'étayer la théorie de M.[G] consiste en une liste de mails ;

- M. [G] n'a, à aucun moment, procédé à un décompte des heures de travail effectivement réalisées, et n'a pas indiqué, pour les jours concernés, l'heure de début et de fin de sa journée de travail, ni les activités accomplies,

- le décompte du salarié comporte de nombreuses incohérences et approximations, ce qui ne peut que jeter le discrédit sur l'ensemble de sa demande,

- elle n'a jamais demandé à M. [G] de travailler pendant ses arrêts maladie, et que c'est le salarié qui a pris l'initiative de demander à son employeur l'accès à une connexion à distance,

- elle a procédé au recrutement de deux salariés, Mme [M] et M. [R] pour pallier les absences de M. [G],

- elle n'a pas davantage demandé à M. [G] de travailler les week-end et en particulier les dimanches.

La Régie GELAS & CHOMIENNE met en cause la fiabilité et la pertinence du décompte produit par M. [G] au motif que le salarié a comptabilisé non pas les heures de travail qu'il aurait effectivement réalisées, mais des créneaux horaires au vu de l'heure d'envoi des mails qu'il produit. Et la Régie GELAS & CHOMIENNE pointe, pour les trois années objet de la demande, des incohérences en ce que le décompte mentionne des heures supplémentaires sur des créneaux où le salarié n'a envoyé aucun courriel ( ex: 1 heure supplémentaire entre 12H30 et 13H30 le mercredi 7 septembre 2016 alors qu'il n'a envoyé aucun mail durant cette période).

La Régie GELAS & CHOMIENNE conclut à l'existence de nombreuses incohérences et approximations affectant le décompte des heures supplémentaires réalisées par M. [G].

A titre infiniment subsidiaire, en cas d'annulation du forfait jours, la Régie GELAS & CHOMIENNE conclut que le calcul du rappel d'heures supplémentaire ne peut se faire sur la base du salaire forfaitaire qui est la contrepartie du forfait en jours, mais sur la base des salaires minima de la branche, applicables aux cadres.

****

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par son salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1, L. 3171-3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Le décompte produit par M. [G] en pièce n°6 se présente sous la forme d'un tableau indiquant pour chaque semaine des années 2016, 2015 et 2014, trois créneaux horaires : 12H30/13H30, 17H/18H30 et 18H30/9H00 et pour chacun des créneaux horaires, le nombre d'heures supplémentaires réalisées. Des codes couleur permettent d'identifier les heures réalisées à la maison avec liaison informatique, les heures réalisées au bureau et à la maison les jours fériés ou offerts, les heures réalisées à la maison et au bureau le lendemain matin, pendant les congés et les heures réalisées pendant les arrêts maladie.

Ce décompte répond à l'exigence de précision qui doit permettre à l'employeur de répondre en apportant ses propres éléments.

Si la société Régie GELAS & CHOMIENNE affirme qu'elle n'a jamais demandé à son salarié de travailler pendant ses week-end ou pendant ses arrêts maladie et que la demande de connexion à distance émane du seul salarié, il résulte cependant des nombreux échanges versés aux débats que M. [G] a maintenu des contacts réguliers avec ses collaborateurs pendant ses arrêts maladie, et a réalisé un certain nombre de tâches comptables, ce que la Régie ne pouvait ignorer compte tenu d'une part de l'instauration de la connexion à distance, d'autre part, du contenu des échanges entre M. [G], son service et son directeur général.

Ainsi, M. [G] indiquait par courriel du 30 mars 2014 adressé à M. [V], directeur général, qu'il venait de boucler la tenue de la trésorerie, s'apprêtait à remonter les produits syndic et gérance du cabinet et qu'il lui restait à valider les écritures de paie, notamment. Le 26 mars, il évoquait dans un courriel adressé à M. [J], son 'insistance et son intervention depuis l'hôpital'.

Le 23 juin 2016, M. [G] écrivait à M. [V], avec copie à l'ensemble du service :

' Je suis bloqué du dos au lit, les dents serrées et attends SOS médecin (...)

J'arrive à pianoter d'une main sur l'ordi à mes côtés.

Awa est également absente en cette journée de clôture des props.

J'ai appelé le siège qui m'a précisé que l'externalisation des CRG props partait ce soir après 20h.

Je vais essayer de gérer d'ici la clôture mais pour l'externalisation cela ne pourra se faire que du bureau. Je vous aviserai.

Je dois au préalable lancer les honos annexes, les honos de base, les assurances pertes de loyers, les particularités( cahier gris sur mon caisson noir qu'il faudra sortir en temps voulu) et autres (...)'

Il résulte par ailleurs des éléments produits par la société Régie GELAS & CHOMIENNE qu'elle a mis en place une organisation d'urgence puis une organisation temporaire adaptée selon les termes d'un courrier adressé à M. [G] le 26 septembre 2013, pour pallier son absence à compter du 8 avril 2013, ce qui correspond uniquement à un arrêt maladie mais pas aux absences de 2014 et 2016. La cour observe en outre que M. [V] évoque dans ce courrier la connexion à distance mise en place à compter du 15 avril en soulignant qu'elle n'a eu pour objet que l'obtention des informations que M. [G] était le seul à détenir, informations nécessaires à la continuité du service, et que l'ouverture d'une session informatique n'engendrait pas automatiquement un travail.

Mais, la mise en place d'une connexion à distance, pérennisée pendant plusieurs années et utilisée par M. [G] pendant ses arrêts maladie, l'existence d'échanges de courriels avec le service comptabilité relatifs à l'exécution de tâches précises au cours des dites périodes, ainsi que la confirmation par d'anciens membres du service comptable, comme Mme [N] [B], comptable gérance du 15 avril 2010 au 31 août 2015, Mme [L] [T], aide-comptable gérance du 17/05/2016 au 5/08/2016, Mme [H] [O], comptable syndic du 15/10/2009 au 4/02/2018, d'une activité professionnelle maintenue par M. [G] à distance, pendant ses arrêts maladie, établissent l'effectivité d'un maintien de l'activité professionnelle pendant ces périodes. En outre, la nature des échanges sus-visés démontre qu'il ne s'agissait pas seulement pour M. [G] de répondre à des demandes d'information, mais bien d'accomplir des tâches comptables.

S'agissant de la fiabilité du décompte horaire produit par M. [G], la société Régie GELAS & CHOMIENNE déduit de la longueur des laps de temps entre deux emails, que M. [G] a pu ne pas travailler, prendre 'probablement sa pause déjeuner', voire même la prolonger,' jetant le doute sur la durée de cette pause.' Une telle argumentation est vaine dés lors que ces temps n'ont fait l'objet d'aucun contrôle et qu'en tout état de cause, l'employeur qui n'établit pas que M. [G] ne restait pas à sa disposition pendant les temps consacrés à la pause déjeuner , notamment, n'est pas fondé à décompter ces temps de pause supposés du temps de travail.

Enfin, la charge de travail soutenue apparaît habituelle dés lors que le bilan annuel d'expérience du 10 octobre 2012, soulignait déjà :'(...)la surcharge exceptionnelle de cette année liée à l'harmonisation Oralia' ainsi 'qu''un investissement supplémentaire en temps de travail ( semaine moyenne de 44 heures toute l'année, qq journées de 12 h, travail à domicile).'

De même, il résulte de l'entretien d'engagement réciproque du 8 mars 2016 qu'une situation particulière a engendré une augmentation de la charge de travail. En effet, d'une part, l'équipe comptable a été remplacée intégralement avec quatre abandons de poste CDD comme en 2014, impliquant formation, accompagnement et prise en charge de tâches mandantes; d'autre part, le rachat par Nexity a modifié l'organisation des échéances comptables, celles-ci devenant plus précoces et nombreuses et nécessitant de nouveaux reportings sociaux.

Il résulte de cette évaluation, que la charge de travail supplémentaire imposée par ces réorganisations a reposé exclusivement sur M. [G] ainsi qu'en attestent ses collaboratrices, sans que la Régie GELAS & CHOMIENNE ne justifie de moyens supplémentaires pour y faire face.

Enfin, la société Régie GELAS & CHOMIENNE expose à titre infiniment subsidiaire qu'il ne peut être fait droit à la demande de rappel de salaire de M. [G] dés lors d'une part que l'annulation du forfait jours induit de se référer aux dispositions conventionnelles relatives aux salaires minima de la branche pour les cadres, d'autre part, que M. [G] qui a perçu en moyenne 58 198 euros au titre de l'année 2014, 59 150 euros au titre de l'année 2015 et 60 268 euros au titre de l'année 2016, soit une somme totale de 177 616 euros, a perçu en définitive 85 386 euros de plus que ce qu'il aurait perçu conformément aux minima conventionnels, de sorte qu'il a été rempli de ses droits.

Mais, la société Régie GELAS & CHOMIENNE qui ne tient aucun compte dans cette simulation de l'ancienneté de M. [G] dans le poste et qui ne démontre pas qu'en l'absence de forfait, M. [G] aurait été rémunéré suivant le minima conventionnel, n'est pas fondée à remettre en cause le taux horaire retenu par le salarié, sur la base de 151,67 heures par mois, ainsi que le salaire de base de 4 636 euros.

Compte tenu du décompte précis produit par M. [G] et des éléments concordants en faveur d'une charge de travail particulièrement soutenue, que ce soit pendant les heures de présence au bureau ou pendant les arrêts maladie du salarié, ainsi que certains week-end, et faute pour la société Régie GELAS & CHOMIENNE de répondre utilement à la demande du salarié en produisant ses propres éléments, la cour valide le décompte horaire versé aux débats par M. [G] et fait droit à la demande de ce dernier.

Le jugement déféré qui a fait droit à la demande au titre des heures supplémentaires en accordant à M. [G] une somme forfaitaire, est infirmé, et la société Régie GELAS & CHOMIENNE est condamnée à payer à M. [G] la somme de 68 662,43 euros bruts à titre de rappel de salaires, cette somme se décomposant comme suit :

*du 21 décembre 2013 au 31 juillet 2014 : 804,09 euros,

*du 1er août au 31 décembre 2014 : 23 406,07 euros,

*du 1er janvier au 31 décembre 2015 : 21 081,50 euros,

*du 1er janvier au 21 décembre 2016 : 23 370,77 euros,

outre la somme de 6.866,24euros bruts au titre des congés payés afférents.

- Sur la contre partie obligatoire en repos :

M. [G] soutient qu'il a accompli :

- 538,92 heures supplémentaires en 2014, soit 318,92 heures au-delà du contingent,

- 480 heures supplémentaires en 2015, soit 260 heures au-delà du contingent,

- 518,25 heures supplémentaires en 2016, soit 298,25 heures au-delà du contingent, soit un total de 877,17 heures au-delà du contingent légal d'heures supplémentaires.

Il demande en conséquence la somme de 26.815,09 euros se décomposant comme suit :

877,17 heures x 30,57 euros (soit le taux horaire calculé sur le seul salaire de base de M.[G] 4 636/151,67 heures).

Compte tenu des développements ci-avant, la cour fait droit à la demande de M. [G] et condamne la société Régie GELAS & CHOMIENNE à lui payer la somme de 26 815,09 euros au titre de la contre partie en repos.

- Sur le travail dissimulé :

L'article L 8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé, et l'article L 8 221-5 2° du même code dispose notamment qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié, le fait pour un employeur de mentionner sur les bulletins de paie un nombre d'heures inférieur à celui réellement accompli.

Au terme de l'article L 8223-1 du code du travail, le salarié auquel l'employeur a recours en commettant les faits prévus à l'article L 8221-5 précité a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Toutefois la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes et ouvrant droit à indemnité forfaitaire n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle et l'élément intentionnel ne peut se déduire de la seule absence de mention des heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

En l'espèce, M. [G] ne démontre pas la volonté de la Régie GELAS & CHOMIENNE d'occulter l'accomplissement des heures supplémentaires, de sorte que le salarié sera débouté de sa demande d'indemnité au titre du travail dissimulé.

- Sur la demande de dommages-intérêts au titre du défaut d'organisation par l'employeur d'un entretien annuel de suivi de la charge de travail du salarié :

M. [G] demande de confirmer le principe de la condamnation de la Régie par les premiers juges, à lui payer des dommages intérêts en raison de l'invalidation du forfait-jours, sauf à requalifier la dite condamnation en dommages-intérêts pour défaut d'organisation d'entretiens destinés à vérifier sa charge de travail et sa compatibilité avec son droit au repos et à une vie personnelle et familiale, et sauf à porter cette somme à 15 000 euros.

La Régie GELAS & CHOMIENNE soutient au contraire que M. [G] a bien fait l'objet d'entretiens individuels et d'un suivi régulier quant aux conditions d'exécution de sa convention de forfait jours, ce qu'il n'a jamais contesté; que compte tenu de sa position dans l'entreprise, la tenue de tels entretiens annuels formalisés et réguliers n'était pas dirimante, dés lors que M. [G] pouvait échanger en toute liberté avec son supérieur hiérarchique.

La Régie soutient qu'en tout état de cause, M. [G] ne justifie pas de son préjudice et que faute pour le salarié d'avoir formulé une demande d'infirmation de ce chef de jugement dans sa déclaration d'appel, sa demande tendant à voir la condamnation portée à 15 000 euros sera déclarée irrecevable.

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Il est constant que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles et il résulte des directives de Directives de l'Union européenne que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur.

Et toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires.

Il en résulte que le manquement aux règles relatives au suivi de la charge de travail du salarié constitue un manquement à l'obligation de sécurité.

Mais le constat d'un manquement à l'obligation de sécurité dans le cadre de l'exécution d'une convention de forfait en jours ne permet pas de retenir un préjudice 'nécessaire', de sorte qu'il appartient au salarié de démontrer le préjudice qui en aurait résulté.

En l'espèce, il résulte des débats que le principe d'un entretien annuel individuel destiné à évaluer la charge de travail de M. [G] et l'articulation entre cette charge de travail et sa vie personnelle et familiale n'a jamais été instauré par la Régie GELAS & CHOMIENNE qui ne peut s'exonérer de son obligation ni en invoquant l'absence de revendication du salarié, lequel n'est pas présumé avoir renoncé à faire valoir ses droits, ni l'existence d'entretiens informels lesquels n'offrent aucune garantie au salarié.

Il résulte des développements ci-avant que M. [G] a régulièrement alerté sur sa charge de travail sans être entendu, ni soutenu par des moyens renforcés; que sa charge de travail l'a contraint à poursuivre son activité professionnelle durant des arrêts maladie, situation que la Régie a cautionnée en favorisant la connexion informatique à distance du salarié ; que les griefs développés pour justifier son licenciement, notamment le grief tiré du retard dans la préparation du budget 2017 sont en lien avec sa charge de travail.

Il en résulte que l'absence d'évaluation de la charge de travail de M. [G] a fait peser un risque sur sa santé et a compromis son maintien dans son poste, ce qui caractérise son préjudice.

La cour estime que la réparation du préjudice qui résulte pour M.[G] du défaut d'organisation de l'entretien périodique d'évaluation de la charge de travail, doit être évalué à la somme de 5 000 euros. Le jugement est infirmé en ce sens.

- Sur la privation de jours de congés :

M. [G] soutient qu'il a acquis sur la période du 1er juin 2013 au 31 mai 2014 des jours de congés, dont 24 jours n'ont pu être pris du fait de sa charge de travail et ont fait l'objet d'un report sur la période du 1er juin 2015 au 31 mai 2016, étant ici précisé que ces reports étaient habituels au regard de l'impossibilité de fait dans laquelle le salarié était placé de prendre ses congés.

Il ajoute que l'employeur a ensuite unilatéralement supprimé ces jours du compteur de congés apparaissant sur son bulletin de salaire de juin 2016.

(pièce n°7 : bulletins de salaire mai 2013, juin 2013, mai 2014, juin 2014, mai 2015 et juin 2015, mai 2016 et juin 2016)

M. [G] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la Régie GELAS& CHOMIENNE à lui payer la somme de 4 085, 71 euros à titre d'indemnité compensatrice correspondant à 24 jours de congés payés pour la période du 1er juin 2013 au 31 mai 2014.

La Régie GELAS & CHOMIENNE soutient en réponse que la non prise, par M. [G], de ses congés payés ne lui est en rien imputable; en ce qui concerne la fiche de paie de juin 2016 et la « disparition » des jours acquis pour la période n-1, elle indique que :

-il s'agit simplement d'un changement d'affichage (et non de logiciel) ;

-sur la période 2015/2016, M.[G] a pris 14 jours de congés en août 2016 ;

-sur la période 2016-2017, il a acquis 21 jours de congés et le reliquat (soit 11 + 21 jours) lui a bien été payé sur son solde de tout compte. (Pièce n° 11)

L'employeur conclut qu'en tout état de cause, le salarié ne peut obtenir une indemnité compensatrice de congés payés au titre de la privation de jours de congés, mais simplement des dommages intérêts au regard du préjudice subi.

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La lecture des bulletins de salaire produits par M. [G] révèle que jusqu'au mois de juin 2015, les bulletins mentionnaient les congés acquis et restants au titre de l'exercice précédent et ceux au titre de l'exercice en cours et que la Régie GELAS & CHOMIENNE acceptait par conséquent le report des congés non pris sur l'exercice suivant.

A compter du mois de mai 2016, les congés payés ne sont plus mentionnés que sur une seule rubrique comportant les congés acquis et le solde. Le bulletin de salaire du mois de mai 2016 mentionne un solde de congés de 24 jours et celui du mois de juin 2016 un total de 25 jours acquis et un solde de 25 jours.

Il en résulte que la société Régie GELAS & CHOMIENNE n'apporte aucune justification à la perte effective du solde de 24 jours mentionné sur le bulletin de salaire du mois de mai 2016.

La société Régie GELAS & CHOMIENNE qui n'a pas mis son salarié en mesure de bénéficier des 24 jours de congés mentionnés sur le bulletin de salaire du mois de mai 2016, ne peut s'opposer au paiement d'une indemnité compensatrice de 4 085,71euros correspondant à ces 24 jours de congés payés pour la période allant du 1er juin 2013 au 31 mai 2014. Le jugement déféré est confirmé sur ce point.

- Sur le licenciement :

Il résulte des articles L.1232-1 et L.1232-6 du code du travail que le licenciement pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse et résulte d'une lettre de licenciement qui en énonce les motifs.

En vertu de l'article L.1235-1 du code du travail, le juge à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure de licenciement suivie et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, après avoir ordonné, au besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement fixe les limites du litige.

En l'espèce, il ressort de la lettre de licenciement dont les termes ont été restitués ci-dessus que la Régie GELAS & CHOMIENNE a licencié M. [G] pour cause réelle et sérieuse en invoquant :

1°) de nombreuses carences dans la gestion comptable de plusieurs mandats de M. [J], ancien dirigeant de la Régie avant son rachat par le cabinet ORALIA en 2012, ayant conduit à la résiliation de l'ensemble des mandats par M. [J] en octobre 2016.

Les plaintes de M. [J] portent sur :

- l'arrêt des comptes à une date non souhaitée

- le traitement tardif de taxes foncières et de la facturation des honoraires des clause pénales

- le remboursant à tort du dépôt de garantie d'un locataire à deux reprises

- l'absence d'établissement des charges locatives sur une partie importante de son patrimoine,

- un supplément d'intervention d'[X] [A], collaboratrice du cabinet, d'environ 30 heures pour le dernier bilan, soit un surcoût d'un peu plus de 2.000 euros par rapport au budget initial.

Sur ce premier grief, M. [G] fait valoir que :

- la rupture des relations commerciales entre M. [J] et la société Régie GELAS & CHOMIENNE, est connue et anticipée de longue date par l'employeur, dés lors que lorsqu'il avait cédé ses parts au groupe ORALIA, en fin d'année 2011, M. [J] s'était engagé à maintenir la gestion de ses dossiers jusqu'au départ à la retraite de sa gestionnaire principale, Mme [P] [W], prévu en fin d'année 2016 / début d'année 2017. Mme [P] [W], gestionnaire principale des dossiers de M. [J] depuis 40 ans, partie à la retraite le 31 janvier 2017, a immédiatement été réembauchée afin de poursuivre ce suivi au sein de la société ARTENA, dirigée par M. [Z] [I], ami proche de M. [J] et ancien directeur adjoint du groupe ORALIA ;

- s'agissant de la reddition des comptes 2014 de M. [J] au 20 décembre 2014 et non au 31 décembre 2014, le reproche est particulièrement ancien (près de deux ans à la date du licenciement !) et la clôture des comptes au 20 décembre de l'année civile avait été imposée par le groupe ORALIA, ce dont Mme [W], gestionnaire en charge du suivi des mandats de M. [J] (sa collaboratrice durant pas moins de 43 ans), aurait dû l'aviser ;

- s'agissant du prétendu retard de traitement des taxes foncières 2014, quittancées au 24 octobre 2014, elles ne pouvaient l'être plus tôt dés lors que M. [J] avait transmis les avis le 8 octobre 2014 ;

- quant au traitement de la facturation des honoraires sur clauses pénales (frais de relance pour non-paiement pour les locataires de locaux commerciaux), facturés « à tort sur le 4ème trimestre 2014 alors que ristournés aux locataires », l' erreur porte sur un montant de 387 euros et elle est la conséquence du retraitement manuel opéré pour ristourne exceptionnelle au client, impossible à réaliser via le logiciel de comptabilité CEGID.

****

Les raisons de la résiliation du mandat de gestion donné par la société Bellecour Investissement gérée par M. [J] sont exposées par ce dernier dans un courriel du 13 octobre 2016, adressé à M. [V], dans les termes suivants :

(...) Entre nous la confiance s'est distendue puis dissoute au cours de ces 5 dernières années dans une sorte d'irresponsabilité collective par ailleurs commune aux 'structures regroupées'. En bref, vous avez cessé au fil du temps de maintenir ce niveau d'exigence de qualité et de performance qui faisaient naguère la réputation exceptionnelle de cet établissement.(...)

Il ( le problème) tient dans la mauvaise qualité de l'action comptable qui affecte l'ensemble de votre gestion. Par exemple aujourd'hui même 12.10.2016, combien de comptes de charges locatives 2015 n'ont pas encore été établis'

Plus de 40% de notre par sans doute..... La récupération des taxes foncières basée sur des règles contractuelles a-t-elle été bien effectuée' On peut en douter, cette refacturation ayant déjà été omise 3 années consécutives sur un de nos importants locataires. Et que dire de la confusion permanente dans les libellés des opérations comptables. ( ...)'

Il en résulte une insatisfaction générale et ancienne ( 5 ans) qui ne met pas en cause M. [G] en particulier, mais l'organisation générale, et qui souligne par ailleurs qu'au cours des 5 dernières années, '5 ou 6 collaboratrices dans le poste de gestionnaire comptable se sont succédées', ce qui n'a guère contribué à l'amélioration de la situation.'

Il apparaît en outre que M. [V] a apporté, par un courriel du 14 janvier 2015, des réponses à certaines des questions soulevées par M. [J], notamment quant à la refacturation supposée tardive des taxes foncières 2014. Et la date de cette refacturation a été justifiée par la Régie GELAS & CHOMIENNE par une remise tardive des avis de paiement, le 8 octobre 2014, par la SCI Bellecour Investissement, de sorte qu'aucune défaillance ne saurait être imputée ni à la Régie, ni à M. [G] de ce chef.

S'agissant de la date de reddition des comptes, soit le 20 décembre 2014 au lieu du 31 décembre 2014 et des conséquences de l'arrêt des comptes une semaine plus tôt, à savoir l'encaissement des taxes foncières sur un autre exercice, il apparaît que M. [G] invoque l'application d'une directive du groupe Oralia sans être démenti sur ce point.

Ainsi, M. [G] indique dans sa lettre de contestation des motifs de son licenciement du 19 avril 2017, que le groupe les obligeait à arrêter les comptes des clients du 4ème trimestres 2016 encore plus tôt le 19/12 et le bilan du cabinet le 21 décembre, et qu'il avait dû intervenir pour tenir compte des exigences du client [J] sur ce point.

La réponse faite par M. [V] aux insatisfactions de M. [J] vient d'ailleurs confirmer les dires de M. [G]. En effet, il résulte du courriel sus-visé du 14 janvier 2015, que le compte rendu de gestion annuel 2014 a été transmis à M. [J] le 2 janvier 2015 et que 'la liste de tous les soldes débiteurs 2014 apurés entre le 18 décembre (2014) et le 10 janvier 2015 (lui) ont été communiqués le 13 janvier conformément à (sa) demande', la transmission de ce document distinct du compte de gestion annuel ne se justifiant que par l'arrêt des comptes au 18 décembre 2014.

Sur la facturation des honoraires des clauses pénales sur le propriétaire, M. [V] expose que: ' depuis son application Groupe en 2013 et jusqu'au 30 septembre 2014, celle-ci n'a pas été opérée sur le compte propriétaire Bellecour Investissement dés le moment où le locataire l'avait honorée. Dés septembre 2014 et conformément à la loi ALUR, les frais de relances ont été de nouveau directement et uniquement facturés sur les locataires et non plus sur le propriétaire.

Cependant certains anciens honoraires ont été facturés à tort sur le 4ème trimestre 2014 du fait de leur ancienneté alors que ristournés aux locataires pour une valeur de 387 euros. Le remboursement a été effectué sur l'exercice 2015 sur 10 immeubles concernés du patrimoine Bel'invest'.

L'erreur de facturation des clauses pénales apparaît en conséquence comme une erreur isolée et de faible gravité, justifiée par une modification du mode opératoire à compter du mois de septembre 2014, ce qui caractérise son caractère exceptionnel.

Enfin, alors même que les carences dans la gestion comptable des mandats de M. [J] concernent essentiellement l'exercice 2014, M. [G] n'a fait l'objet d'aucune observation de son employeur à la suite des réclamations de M. [J], mais a au contraire été reconnu dans son expérience de chef comptable, l'évaluation du 8 mars 2016 indiquant en conclusion, après avoir constaté que l'essentiel des objectifs était atteint, que '[U] s'est affirmé dans son rôle de chef comptable'.

Il en résulte que le premier grief n'est pas établi par la société Régie GELAS & CHOMIENNE.

2°) le manque d'encadrement et de suivi de l'activité des comptables placés sous sa responsabilité

Il est reproché à M. [G] de n'avoir pas su appréhender ses fonctions manageriales, ce qui a fait l'objet de l'observation suivante au terme de son évaluation pour 2016 :

' (...) Doit affirmer son rôle de manager vis à vis des équipes, tant gérance que copropriété, procéder à un contrôle et un suivi permanent en fixant des dates précises de reporting aux équipes qu'elles doivent impérativement respecter et veiller à la satisfaction client. '

La société Régie GELAS & CHOMIENNE s'appuie sur les courriels de Mme [P] [W], responsable du service des baux commerciaux de la société, en soutenant qu'il était fréquent que cette dernière intervienne directement auprès de l'équipe de M. [G] et en particulier auprès de Mme [S] pour rappeler à M. [G] des tâches inhérentes à son service. Ces courriels ont trait à la 'récupération de l'eau' et à la récupération des charges pour la SCI 'Les colonnes de Vendôme'.

Ces courriels relatifs à deux difficultés circonscrites, qui n'ont, pas plus que les carences objet du premier grief donné lieu à de quelconques observations ou rappels à l'ordre à l'égard de M. [G], ne permettent pas de caractériser un manque d'encadrement et de suivi de l'activité.

Ce deuxième grief sera également écarté.

3°) le retard de M. [G] dans la préparation du budget annuel 2017

La Régie GELAS & CHOMIENNE expose que M. [G] a été formé aux nouvelles exigences découlant du rachat de la société par le groupe Nexity et que son attention avait particulièrement été attirée sur le respect impératif du calendrier , soit la date du 30 septembre 2016, pour l'établissement du budget de la société ORALIA GELAS & CHOMIENNE, qu'il n'a pas respectée.

M. [G] invoque des alertes nombreuses et récurrentes sur les difficultés rencontrées pour respecter les délais. Il soutient qu'il a effectivement rendu les situations du 30 juin 2016 et du 30 septembre 2016, le lendemain à midi de la date butoir, et après avoir prévenu le siège qui ne lui a fait aucun reproche.

M. [G] soutient que ce sont les difficultés de l'équipe comptable gérance en sous-effectif qui l'ont obligé, de façon encore plus exceptionnelle au cours de l'année 2016 à s'impliquer complètement dans son travail au détriment du cabinet.

****

Il résulte des débats, que M. [G] a alerté sur ses difficultés à respecter les dates qui lui étaient imparties pour rendre les situations comptables tout au long de l'année 2016 et dés le 29 mars 2016 en invoquant : 'la situation actuelle très difficile avec le personnel comptable en sous-rendement '.

Ainsi, il indiquait à M. [V] :

- le 9 juillet : ' Malheureusement cette semaine, comme je le craignais du fait du départ d'Awa, j'ai passé tout mon temps sur la comptabilité gérance au détriment du cabinet. (...)

Résultat et cela m'inquiète, je n'ai pas pu commencer le budget 2017.(...)'

- le 25 juillet 2016 : ' Suite à l'entretien que je viens d'avoir avec [K], je t'informe que je ne pourrai jamais respecter l'échéance de notre budget cabinet 2017 et que je vais avoir besoin exceptionnellement d'un soutien de ton service.

Je me consacre entièrement depuis février 2016 à la comptabilité gérance puisque nous n'avons jamais pu remplacer un des deux comptables en congé maternité puis parental et que nous avons dû nous séparer le 4 juillet de notre deuxième comptable présente au cabinet depuis moins de 10 mois qui faisait preuve de trop d'insuffisance et demandait mon intervention systématique. (...)

Le 5 août 2016, M. [G] adressait un courriel de 'debrief' à M. [V] l'informant que l'avancement du budget du cabinet n'était qu' à 35% et listait les difficultés de service auxquelles il devait faire face.

Le 28 septembre 2016, M. [G] informait Mme [E] qu'il ne pourrait rendre la situation que le lendemain dans la matinée dans le meilleur des cas; qu'il lui restait le contrôle TVA et la provision IS.

Le 29 septembre 2016, M. [G] informait Mme [E] que la situation était terminée.

Le 5 octobre 2016, Mme [E] lui faisait la réponse suivante :

' Merci pour la situation, c'est parfait.

Juste pour la provision pour risque du débiteur HIRTZ scc, tu passes 8 747, 85 euros ( je suppose la totalité) hors on ne provisionne que la franchise 5 000 euros si vous avez un dossier chez Verspiren. '.

Il en résulte que M. [G] est parvenu, malgré un renouvellement de l'équipe comptable au cours de l'année 2016 et de nouvelles règles imposées à la société après son rachat par Nexity, à restituer, en dépassant le délai imparti d'une journée, une situation comptable ne suscitant pas d'autre commentaire que celui de Mme [E] : 'c'est parfait'.

La Régie GELAS & CHOMIENNE qui a l'exception de la collaboration de Mme [E] à hauteur d'une journée et demi pour l'élaboration du budget 2017, n'a pris aucune mesure pour pallier les différentes absences subies par le service, précisément pendant la période d'élaboration du budget, ne saurait faire grief à M. [G] de n'avoir pas respecté la date butoir du 30 septembre 2016.

Par ailleurs, la Régie évoque les conséquences de ce retard sans en justifier. Ainsi elle soutient que la réception tardive du budget n'a pas permis à la société d'effectuer, comme pour l'ensemble des autres filiales, une analyse aussi approfondie de la projection budgétaire du cabinet en y apportant, si nécessaire, des mesures correctives, sans apporter le moindre élément objectif sur ce point.

Dés lors, il n'est pas établi que les difficultés rencontrées par M. [G] pour respecter les délais, auraient eu de quelconques conséquences, que ce soit sur la qualité de son travail, ou sur la projection budgétaire du cabinet.

Ce troisième grief sera écarté.

4°) la mauvaise gestion du mandat « FONDATION PIERRE VEROTS »

Il est reproché à M. [G] de s'être livré à une opération comptable parfaitement anormale, sans autorisation ni information préalable de sa hiérarchie, consistant à :

« Débiter le 19 septembre 2016 une somme globale de 60.000euros, correspondant à des revenus locatifs initialement et normalement affectés au compte de gestion de ce client,

A l'affecter jusqu'au 30 septembre 2016 au crédit du compte de liaison honoraires de notre Cabinet, Enfin, à la rebasculer à cette date sur le compte de gestion client ».

M. [G] expose que si tant est qu'il soit l'auteur de cette opération comptable, ce dont il appartiendra à l'employeur de justifier, aucun reproche ne saurait lui être fait dés lors qu'en sa qualité de chef comptable, cadre autonome, il avait toute latitude pour procéder à ce type d'écriture, temporaire et aucunement préjudiciable ni pour le client, ni pour la régie.

M. [G] a néanmoins indiqué dans sa lettre de contestation de son licenciement que si cette opération a été faite dans l'intérêt financier du cabinet, pour lui éviter de payer un surcoût de garantie sur l'année entière pour un dépassement des fonds garantis de 10 jours, il n'est pas dans ses habitudes de procéder à de telles opérations.

Et la cour observe qu'au terme des débats, il s'agit du seul exemple d'opération litigieuse reproché à M. [G].

Dans ces conditions, compte tenu de l'ancienneté de M. [G] dans son poste, de ce qu'au cours d'une relation contractuelle de 24 ans, la société Régie GELAS & CHOMIENNE ne justifie d'aucune évaluation péjorative sur la qualité de son travail ou sur son engagement professionnel, d'aucune observation sur des carences ou défaillances professionnelles ; compte tenu en outre du manque d'effectif chronique et de l'importance du turn over au sein de l'équipe en charge de la comptabilité gérance, circonstances qui ont nécessairement impacté l'organisation du travail de M. [G], la société Régie GELAS & CHOMIENNE n'établit pas l'insuffisance professionnelle qu'elle reproche à son salarié.

Le jugement déféré est en conséquence confirmé en ce qu'il a jugé le licenciement de M. [G] dépourvu de cause réelle et sérieuse.

- Sur les dommages-intérêts :

En application des articles L.1235-3 et L.1235-5 du code du travail, M. [G] ayant eu une ancienneté supérieure à deux ans dans une entreprise occupant habituellement 11 salariés au moins, peut prétendre, en l'absence de réintégration dans l'entreprise, à une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Compte tenu de l'effectif de l'entreprise, dont il n'est pas contesté qu'il est habituellement de plus de 11 salariés, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [G] âgé de 46 ans lors de la rupture, de son ancienneté de plus 24 années, la cour estime que le préjudice résultant pour ce dernier de la rupture a été justement indemnisé par le conseil de prud'hommes, sur la base du salaire moyen brut de 5 020 euros.

En conséquence, le jugement qui a alloué à M. [G] la somme de 87 500 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice consécutif au caractère abusif du licenciement doit être confirmé. M. [G] est débouté de sa demande pour le surplus.

- Sur le remboursement des indemnités de chômage :

En application de l'article L.1235-4 du code du travail, il convient d'ordonner d'office le remboursement par l'employeur aux organismes intéressés des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de trois mois d'indemnisation; le jugement déféré sera confirmé de ce chef.

- Sur les demandes accessoires :

Il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a mis à la charge de la société Régie GELAS & CHOMIENNE les dépens de première instance et en ce qu'il a alloué à M. [G] une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La société Régie GELAS & CHOMIENNE , partie perdante au sens de l'article 696 du code de procédure civile, sera condamnée aux dépens d'appel.

L'équité et la situation économique respective des parties justifient qu'il soit fait application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais en cause d'appel dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt mis à disposition au greffe et contradictoirement

CONFIRME le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la SAS Régie GELAS & CHOMIENNE à payer à M. [G] la somme de 5 000 euros à titre d'indemnité forfaitaire pour les heures supplémentaires et sur le montant de l'indemnisation allouée au titre de l'invalidation du forfait-jours

INFIRME le jugement déféré sur ces chefs

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la société Régie GELAS & CHOMIENNE à payer à M. [G] les sommes suivantes :

* 68 662,43 euros bruts de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires réalisées du du 21 décembre 2013 au 21 décembre 2016,

* 6 866,24 euros bruts au titre des congés payés afférents,

* 26 815,09 euros au titre de la contre partie en repos.

* 5 000 euros de dommages-intérêts au titre du défaut d'organisation par l'employeur d'un entretien annuel de suivi de la charge de travail

DÉBOUTE M. [G] de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

ORDONNE à la société Régie GELAS & CHOMIENNE de remettre à M. [G] un certificat de travail, une attestation destinée au Pôle Emploi et un bulletin de salaire conformes au présent arrêt dans un délai de deux mois à compter de sa signification,

CONDAMNE la société Régie GELAS & CHOMIENNE à payer à M. [G] la somme de

3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais exposés en cause d'appel,

CONDAMNE la société Régie GELAS & CHOMIENNE aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 19/08995
Date de la décision : 29/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-29;19.08995 ?
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