La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

27/03/2023 | FRANCE | N°22/02231

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 27 mars 2023, 22/02231


N° R.G. Cour : N° RG 22/02231 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGJE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT



ORDONNANCE DU 27 Mars 2023



contestations

d'honoraires



























DEMANDEUR :



M. [Y] [X] assisté de ses curatrices Madame [D] [F] et l'ASSTRA

[Adresse 1]

[Localité 3]



avocats postulants : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON (toque 475)


r>avocat plaidant : Maître Florence CECCON, avocat au barreau de LYON (toque 1216)







DEFENDERESSE :



S.E.L.A.R.L. CABINET CLAPOT-[W]

[Adresse 4]

[Localité 2]



Représentée par Me Marion PONTILLE substituant Me [R] [...

N° R.G. Cour : N° RG 22/02231 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OGJE

COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRESIDENT

ORDONNANCE DU 27 Mars 2023

contestations

d'honoraires

DEMANDEUR :

M. [Y] [X] assisté de ses curatrices Madame [D] [F] et l'ASSTRA

[Adresse 1]

[Localité 3]

avocats postulants : la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON (toque 475)

avocat plaidant : Maître Florence CECCON, avocat au barreau de LYON (toque 1216)

DEFENDERESSE :

S.E.L.A.R.L. CABINET CLAPOT-[W]

[Adresse 4]

[Localité 2]

Représentée par Me Marion PONTILLE substituant Me [R] [W]-[K] de la SELARL CABINET CLAPOT - [W], avocat au barreau de LYON (toque 189)

Audience de plaidoiries du 14 Février 2023

DEBATS : audience publique du 14 Février 2023 tenue par Pierre BARDOUX, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, délégataire du Premier Président dans les fonctions qui lui sont spécialement attribuées selon ordonnance du 2 janvier 2023 assisté de Sylvie NICOT, Greffier.

ORDONNANCE : contradictoire

prononcée publiquement le 27 Mars 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile;

signée par Pierre BARDOUX, Conseiller et Sylvie NICOT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

''''

EXPOSE DU LITIGE

Mme [V] [F], ses fils [M] [X] et [Y] [X] ont pris attache avec la SELARL Cabinet Clapot-[W] (Clapot-[W]) pour qu'elle représente leurs intérêts dans l'action judiciaire d'ores et déjà engagée à la suite de l'accident de la circulation dont a été victime M. [Y] [X] le 30 septembre 2012.

Par requête enregistrée le 22 juin 2021, Mme [F] et MM. [M] et [Y] [X], ce dernier assisté par l'association tutélaire Rhône Alpes (AssTRA), sa curatrice aux biens, et par Mme [F], sa curatrice à la personne, ont saisi le bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Lyon d'une contestation des honoraires de la SELARL Clapot-[W] en soutenant la nullité de la convention d'honoraires, et en demandant la restitution des d'honoraires indûment perçus et la fixation des honoraires de l'avocat en fonction des diligences accomplies.

Par décision du 21 février 2022 le bâtonnier de l'ordre des avocats de Lyon :

- a écarté des débats le courrier de la partie demanderesse du 16 février 2022 en ce qu'il est tardif,

- à l'égard de M. [Y] [X], a dit que :

' il n'y a pas lieu de faire application de l'article 464 alinéas 1 et 2 du Code civil,

' la règle de l'article 10 de la loi 71-1130 du 31 décembre 1971 n'a pas été enfreinte,

' il n'est pas démontré l'existence de violence morale imputable à la SELARL Clapot-[W],

' l'honoraire de résultat perçu par la SELARL Clapot-[W] est excessif et qu'il convient de le réduire de 100 000 € HT, soit 120 000 € TTC,

' la SELARL Clapot-[W] doit, en conséquence, restituer à M. [Y] [X] la somme de 120 000 € TTC,

- statué sur les contestations de Mme [F] et de M. [M] [X],

- débouté les parties de toutes autres demandes.

La décision du bâtonnier a été notifiée à M. [Y] [X] et à ses curatrices Mme [F] et l'AssTRA par lettres recommandées du 21 février 2022 dont il a été accusé réception le 23 février 2022.

Par courrier déposé le 21 mars 2022, M. [Y] [X], assisté de ses curatrices Mme [F] et l'AssTRA, a formé un recours contre cette décision.

Par décision du 20 septembre 2022, le délégué du premier président a ordonné la réouverture des débats pour permettre le rétablissement d'un débat pleinement contradictoire.

A l'audience du 14 février 2023 devant le délégué du premier président, les parties s'en sont remises à leurs écritures, qu'elles ont soutenues oralement.

Dans son dernier mémoire déposé au greffe par RPVA le 16 janvier 2023, M. [X] assisté de ses curatrices, demande au délégué du premier président d'infirmer la décision du bâtonnier et de :

- déclarer irrecevable la demande formulée par la SELARL Clapot-[W] tendant à voir déclarer prescrite l'action qu'il a engagée à son encontre, en ce qu'il s'agit d'une prétention nouvelle non formulée en première instance,

- dire que l'action engagée par M. [X] n'est pas prescrite,

à titre principal

- fixer le montant des honoraires dus à la SELARL Clapot-[W] en fonction des diligences accomplies, compte tenu de l'absence de convention d'honoraires valablement régularisée,

- fixer le montant des honoraires devant être restitués par la SELARL Clapot-[W] selon les diligences effectivement accomplies,

- à titre subsidiaire, fixer le montant des honoraires dus à la SELARL Clapot-[W] en fonction des diligences accomplies, compte tenu de la nullité affectant la convention d'honoraires, constitutive d'un pacte de quota litis,

- à titre très subsidiaire, fixer le montant des honoraires dus à la SELARL Clapot-[W] en fonction des diligences accomplies, compte tenu de la nullité affectant la convention d'honoraires,

en toute hypothèse,

- fixer le montant des honoraires devant être restitués par la SELARL Clapot-[W] selon les diligences effectivement accomplies, sa situation de fortune et la difficulté de l'affaire,

- fixer à 46 125,04 € le montant des honoraires dus à la SELARL Clapot-[W] compte tenu des diligences effectivement accomplies,

- condamner la SELARL Clapot-[W] à lui restituer les sommes indûment perçues au titre de ses honoraires,

- en tout état de cause, condamner la SELARL Clapot-[W] à lui payer à la somme de 4 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens.

M. [X] soutient que son action n'est pas prescrite et que cette prescription n'a pas été invoquée devant le bâtonnier et constitue une demande nouvelle qui ne peut être accueillie en appel.

Il fait valoir que la prescription en matière de contestation d'honoraires d'avocat est quinquennale, en application des dispositions des articles 2224 et suivants du Code civil et que le délai de prescription court à compter de la date à laquelle le mandat de l'avocat a pris fin, soit le 4 décembre 2017, date du jugement ayant liquidé son préjudice.

Il soutient qu'en l'absence de signature de sa part, Mme [F] n'avait pas encore le pouvoir d'engager son fils, n'ayant été désignée comme curatrice qu'à partir du 16 octobre 2014. Il relève que Mme [F] n'a pas pu l'engager sur le fondement de la gestion d'affaires, les conditions n'étant pas réunies. Il soutient qu'il n'y avait pas d'urgence et que Mme [F] a agi pour son propre compte.

Il précise que son absence de signature de la convention d'honoraires est incontestable dans la mesure où étant hospitalisé à ce moment-là, il n'était pas en capacité de signer la convention.

Il prétend qu'une convention aurait dû être régularisée en raison de l'existence d'honoraires de résultat et en conclut que seuls les honoraires de diligence sont dus dans ce cas.

Il estime que la convention d'honoraires est nulle en ce qu'elle est constitutive d'un pacte de quota litis étant donné que les honoraires fixes s'élèvent à 1 200 € TTC et les honoraires de résultat à 611 162,84 € c'est-à-dire une somme 500 fois supérieure aux honoraires fixes.

Il réfute l'existence d'une autorisation du juge des tutelles quant aux prélèvements opérés par la SELARL Clapot-[W]. Il estime que l'autorisation préalable du juge des tutelles doit être expresse et faire suite à une requête et en déduit que les honoraires dus ne pouvaient pas être des honoraires de résultat mais seulement des honoraires de diligences.

A titre subsidiaire, M. [X] invoque un vice du consentement provenant de sa situation de particulière faiblesse et de vulnérabilité et de la situation de choc de Mme [F].

Il ajoute que l'exploitation de leur ignorance caractérise la violence morale dont ils ont été victimes. Il affirme que cette incapacité a conduit à la prise en charge globale de la famille [X] [F].

Enfin, il fait valoir que le montant des honoraires doit être restitué par la SELARL Clapot-[W] et conteste le calcul fait par le bâtonnier sur le montant des restitutions. Il estime que les honoraires demeurés perçus par la SELARL Clapot-[W] reviennent à le priver de son indemnisation au titre du poste d'assistance à tierce personne.

Dans son dernier mémoire déposé le 14 décembre 2023, la SELARL Clapot-[W] demande au délégué du premier président de :

- faire droit à son appel incident,

- rejeter comme étant injustifiée et non fondée la contestation tirée de l'inexistence de la convention d'honoraires,

- rejeter comme étant irrecevables et, en tout état de cause, injustifiées et non fondées, les demandes tendant à voir constater la nullité de la convention d'honoraires,

- juger irrecevables la contestation et la demande de restitution de l'honoraire de résultat réglé par M. [X] après service rendu,

- rejeter l'intégralité des demandes de M. [X] assisté de ses curatrices comme étant irrecevables, injustifiées et non fondées,

subsidiairement,

- fixer le montant des honoraires dus par M. [X] en fonction des diligences accomplies et dûment justifiées sans que l'éventuelle restitution mise à sa charge ne puisse excéder celle décidée par le bâtonnier dans sa décision du 21 février 2022,

- juger irrecevables et en tout état de cause injustifiées et non fondées les demandes tendant à voir constater la nullité de la convention d'honoraires litigieuse,

- en tout état de cause, condamner M. [X], assisté de ses curatrices, à lui verser la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance.

La SELARL Clapot-[W] soutient que Mme [F] était légitime à engager son fils par la signature de la convention d'honoraires au titre de la gestion d'affaires dans l'attente de sa désignation en qualité de curatrice sur le fondement des articles 436 et 1301 du Code de procédure civile et qu'à supposer que la nullité invoquée soit justifiée, la prescription de l'action est de cinq ans. Elle conteste la recevabilité de la demande de nullité de la convention d'honoraires à raison de cette prescription.

Elle observe que l'investissement de Mme [F] dans le suivi du dossier, le nombre d'appels téléphoniques et de correspondances échangées, sa présence aux opérations d'expertises contradictoires ainsi qu'aux réunions préparatoires la rende légitime à engager son fils par la signature de la convention d'honoraires litigieuse, à tout le moins au titre de la gestion d'affaires.

Elle prétend que l'autorisation du juge des tutelles n'est pas nécessaire pour la conclusion d'une convention d'honoraires de résultat entre un avocat et une personne sous curatelle renforcée.

Elle indique que ni M. [X] ni sa curatrice n'ont formulé d'observations sur les honoraires ou de critiques sur le travail effectué jusqu'à ce que l'AssTRA soit désignée et que dans un dossier avec de tels enjeux pour la victime, il était dans l'intérêt de M. [X] de travailler dans un premier temps sans convention. Elle souligne en outre que le juge des tutelles n'a émis aucune critique à l'égard de la convention d'honoraires dans une procédure qui a duré plus de 6 années.

Elle souligne le rôle déterminant des avocats spécialisés en dommage corporel et ajoute que l'assistance et la représentation a duré près de sept années pour la procédure amiable et judiciaire et la procédure devant le juge des tutelles.

Elle fait valoir qu'il est fréquent de fixer un honoraire forfaitaire à une somme faible en matière de droit du dommage corporel et que l'honoraire de résultat peut être supérieur au principal et sans proportionnalité.

Elle fait état de 250 correspondances échangées avec Mme [F] ainsi que plus de 1 000 échanges téléphoniques.

Elle affirme qu'aucun élément ne permet de démontrer un état de dépendance de M. [X] à son égard, ni d'un quelconque abus et conteste ainsi l'existence d'un vice du consentement. Elle rappelle que le règlement est intervenu sur la base d'une autorisation de prélèvement expressément prévue par la convention d'honoraires signée le 7 mars 2013.

Pour satisfaire aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux mémoires régulièrement déposés et notamment ceux ci-dessus visés.

MOTIFS

Attendu que la recevabilité du recours formé par M. [X] n'est pas discutée et les dates de notification et de recours ne peuvent y conduire ;

Attendu que la décision du bâtonnier n'est pas discutée en ce qu'a été rejetée la demande d'annulation de la convention d'honoraires du 7 mars 2013 mise en avant par la SELARL Clapot-[W], fondée sur une altération des facultés mentales de M. [X] et sur l'application de l'article 464 du Code civil ;

Attendu, d'ailleurs, qu'il est maintenant clairement reconnu et non contesté que seule Mme [F] a signé cette convention d'honoraires ; que l'existence même de ce contrat rend inopérantes les discussions entre les parties sur le caractère impératif ou non de la signature d'une telle convention pour réclamer le paiement d'honoraires de résultat ;

Attendu qu'il convient de relever que la SELARL Clappot-[W] ne soutient pas l'irrecevabilité pour prescription de la contestation d'honoraires présentée au bâtonnier, mais que cette fin de non-recevoir vise les moyens de nullité articulés à l'encontre de cette convention ; qu'une autre irrecevabilité au titre d'un paiement après service rendu est en revanche opposée à cette contestation, mais elle suppose l'examen primordial de l'existence d'un engagement de M. [X] par la convention d'honoraires du 7 mars 2013 qui conditionne les modalités de facturation et d'acceptation explicite des honoraires facturés ;

Sur l'existence d'un engagement de M. [X] au titre de la convention d'honoraires du 7 mars 2013

Attendu que M. [X] soutient qu'il n'a pas signé la convention d'honoraires établie par la SELARL Clapot-[W] et que sa mère, Mme [F], signataire de la convention, n'avait pas pouvoir pour engager son fils ;

Qu'il n'est pas contesté par le cabinet d'avocat que M. [X] n'a pas signé personnellement cette convention d'honoraire et la question de l'éventuel défaut de capacité de M. [X], au titre d'une altération de ses facultés, est dès lors inopérante ;

Attendu que M. [X] n'est pas fondé à se prévaloir d'une nullité au titre de cette altération de facultés en ce que la SELARL Clappot-[W] ne lui oppose pas un engagement fondé sur sa signature personnelle de la convention d'honoraires ;

Attendu que l'article 436 du Code civil dispose :

«Le mandat par lequel la personne protégée a chargé une autre personne de l'administration de ses biens continue à produire ses effets pendant la sauvegarde de justice à moins qu'il ne soit révoqué ou suspendu par le juge des tutelles, le mandataire étant entendu ou appelé.

En l'absence de mandat, les règles de la gestion d'affaires sont applicables.

Ceux qui ont qualité pour demander l'ouverture d'une curatelle ou d'une tutelle sont tenus d'accomplir les actes conservatoires indispensables à la préservation du patrimoine de la personne protégée dès lors qu'ils ont connaissance tant de leur urgence que de l'ouverture de la mesure de sauvegarde. Les mêmes dispositions sont applicables à la personne ou à l'établissement qui héberge la personne placée sous sauvegarde.» ;

Attendu que la SELARL Clappot-[W] affirme que Mme [F] a signé la convention d'honoraires, pour la défense des intérêts de son fils [Y], dans le cadre de la gestion d'affaires prévue par le texte susvisé du Code civil ;

Attendu qu'il convient tout d'abord de relever que dans son courrier de saisine du bâtonnier en contestation des honoraires payés à la SELARL Clappot-[W], le conseil des consorts [X]-[F] a fait valoir que «Mme [F] et son fils [Y] [X] ont régularisé une convention d'honoraires avec le cabinet de [R] [W]» et l'absence de convention régularisée avec Mme [F] à titre personnel et avec son fils [M] [X] ;

Que la signature apposée par Mme [F] a ainsi été reconnue comme ne concernant que la défense des intérêts personnels de son fils [Y] [X] et ce dernier ne manque pas de se contredire en affirmant dans le cadre de ce recours que sa mère n'avait échangé avec le cabinet d'avocat que pour son propre compte, alors surtout que la convention du 7 mars 2013 mentionne expressément que les cocontractants sont « M. [Y] [X], et sa mère Mme [D] [F]» ;

Attendu qu'il résulte du jugement rendu le 16 octobre 2014 par le juge des tutelles du tribunal d'instance de Lyon que ce juge a été saisi le 19 avril 2013 au visa d'un certificat médical du 25 mars 2013 et a organisé une curatelle au profit de M. [X] en la confiant à sa mère, Mme [F], qui s'est vue confier en outre le pouvoir de percevoir seule les revenus, celui d'assurer seule le règlement des dépenses auprès des tiers ;

Que cette mesure de protection a été sollicitée postérieurement d'une part à ce qu'un premier avocat soit missionné pour la défense des intérêts des consorts [X], et au changement d'avocat avec la mission ensuite confiée à la SELARL Clappot-[W] ; que ne peut ainsi être invoquée une incompatibilité de la gestion d'affaires avec une mesure de protection mise en place plus de 18 mois après la signature de la convention ;

Attendu qu'en l'état des éléments mis en avant par M. [X] concernant l'altération de ses facultés mentales suite à son accident et jusqu'à tout le moins au moment de la signature par sa mère de la convention d'honoraires litigieuse, de nature à l'empêcher de contracter avec un avocat pour la défense de ses intérêts, il peut être retenu que sa mère a été celle qui a pris naturellement l'initiative de gérer les affaires de son fils concernant l'indemnisation des lourds préjudices qu'il subissait ; que M. [X] est bien malvenu de se prévaloir, au regard de cette altération affirmée de ses facultés, d'une absence d'autorisation explicite donnée à sa mère pour signer cette convention d'honoraires ;

Attendu qu'il n'est pas plus pertinent à invoquer une absence d'urgence, cette urgence ne constituant nullement un critère déterminant de l'existence d'une gestion d'affaires ;

Attendu qu'en l'état de ce que la mesure de protection ensuite mise en place était limitée à une curatelle, supposant uniquement une assistance par la curatrice, et de ce que le juge des tutelles n'était pas saisi au jour de la signature de la convention d'honoraires, M. [X] est infondé à soutenir la nécessité d'une autorisation du juge des tutelles avant de signer une telle convention d'honoraires surtout sans tenter de se prévaloir d'un texte du Code civil qui l'imposerait ; qu'il en est d'ailleurs de même concernant les paiements effectués dans le cadre de l'exécution de cette convention, les parties invoquant des règles qui concernent la mesure de tutelle ;

Que M. [X] ne peut se prévaloir d'un défaut de pouvoir de sa mère, en ce que la SELARL Clappot-[W] lui oppose une gestion d'affaires et non l'existence d'un quelconque mandat exprès dont il dit d'ailleurs avoir été dans l'incapacité de signer ;

Attendu que dans le cadre d'une gestion d'affaires, il est constant que la personne dont l'affaire a été bien administrée doit remplir les engagements que le gérant a contractés en son nom ; qu'il n'est pas affirmé par M. [X] que ses affaires n'ont pas été bien administrées par sa mère dans le cadre de la saisine de la SELARL Clappot-[W] et même par la signature d'une convention d'honoraires, dont seule la nullité est invoquée ;

Attendu qu'il convient dès lors de retenir que M. [X] a été engagé par la signature de sa mère gérant de manière diligente ses affaires par la convention d'honoraires du 7 mars 2023 ;

Sur l'irrecevabilité de la contestation des honoraires à raison d'un paiement dit réalisé après service rendu

Attendu que la SELARL Clappot-[W] invoque l'application de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971 pour affirmer que les honoraires de l'avocat ne peuvent donner lieu à contestation et encore moins à restitution lorsque ceux-ci ont d'ores et déjà été payés par le client après service rendu et que dès lors que le principe et le montant de l'honoraire ont été acceptés par le client après service rendu, il n'appartient ni au bâtonnier ni au premier président de le réduire ;

Qu'elle soutient l'irrecevabilité de la contestation des honoraires présentée au bâtonnier le 21 mars 2021 car M. [X] a procédé au paiement de ses honoraires après service rendu, même dans le cadre d'une autorisation de prélèvement ;

Attendu qu'il résulte des articles 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 et 1134 devenu 1103 du Code civil, que le paiement après service rendu, dont la remise en cause est interdite, n'est pas subordonné à la fin de la mission de l'avocat et peut s'entendre des diligences facturées au fur et à mesure de leur accomplissement ;

Qu'il incombe à la SELARL Clappot-[W] d'établir que les paiements effectués par l'intermédiaire de prélèvements sur des indemnisations ou provisions portées au crédit d'un compte CARPA ont été réalisés en connaissance de cause et en particulier au visa d'une facturation détaillant clairement les postes facturés ;

Attendu que comme le bâtonnier l'a relevé avec pertinence, la SELARL Clappot-[W] ne précise pas dans le compte détaillé qu'il produit la date à laquelle chacune de ses factures a été réglée ; que surtout une grande partie des factures qu'elle produit ne font état que de «provisions sur honoraires» en dehors de celles des 5 juillet, 14 août 2019 et 10 novembre 2020 qui sont totalement imprécises en ce qu'elles ne mentionnent que le poste «Honoraires» sans plus d'éléments sur leur mode de calcul ;

Attendu qu'il ne pouvait ainsi être retenu que M. [X] assisté de ses curatrices a pu procéder par le biais de prélèvement autorisés par avance à un paiement en toute connaissance de cause des honoraires facturés, ceux imputés à titre de provision étant en tout état de cause insusceptibles de correspondre à la facturation inhérente à la couverture d'un service rendu ;

Attendu que le bâtonnier a retenu à bon droit avoir gardé ses pouvoirs d'appréciation des honoraires contestés et cette fin de non recevoir devait être rejetée ;

Sur le moyen de prescription opposé par la SELARL Clappot-[W] à la nullité de la convention d'honoraires

Attendu que la SELARL Clappot-[W] invoque au visa de l'article 2224 du Code civil l'irrecevabilité des demandes d'annulation à raison d'une prescription quinquennale car ces demandes sont présentées par M. [X] plus de huit années après la signature de la convention ;

Attendu que M. [X] soutient sans viser un texte précis l'irrecevabilité de ce qu'il qualifie de demande de prescription comme nouvelle en appel ;

Attendu que l'article 277 du décret du 27 novembre 1991 régissant notamment la procédure de fixation des honoraires dispose «qu'il est procédé comme en matière civile pour tout ce qui n'est pas réglé par le présent décret» ;

Attendu que l'article 564 du Code de procédure civile visé par la SELARL Clappot-[W] qui indique à tort qu'il n'est pas susceptible de recevoir application dans le cadre du présent recours, est inopérant à régir la recevabilité d'un moyen de défense de prescription tel que celui invoqué par le cabinet d'avocat, car ce texte ne prévoit une irrecevabilité que pour les prétentions formées en appel ;

Que cette prescription est en effet invoquée pour s'opposer à une prétention adverse et il est en tout état de cause constant qu'une telle fin de non-recevoir est susceptible d'être invoquée en tout état de cause ;

Attendu que cette exception d'irrecevabilité présentée par M. [X] doit être rejetée ;

Attendu que l'article 2224 du Code Civil dispose que « les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer » ;

Attendu que l'action du client en restitution d'honoraires est soumise à la prescription quinquennale de droit commun et son point de départ se situe au jour de la fin du mandat de l'avocat, comme le relève M. [X] ; que la demande de nullité est soumise au même régime en ce qu'elle tend à cette restitution d'honoraires ;

Attendu que la SELARL Clappot-[W] ne soutient pas la prescription de la contestation de ses honoraires et estime à tort que le point de départ de la prescription des demandes de nullité est la date de la signature de la convention, sans d'ailleurs s'expliquer en l'espèce sur le moment effectif où M. [X] aurait été personnellement en capacité de connaître les faits qui permettaient de s'en prévaloir ; qu'elle ne peut différencier le régime de prescription en fonction des prétentions soumises au juge de l'honoraire ;

Qu'un délai de moins de cinq années s'est écoulé depuis la fin du mandat, soit à une date à tout le moins postérieure à la décision liquidant le préjudice de M. [X], rendue le 14 décembre 2017, et le 21 mars 2021 date à laquelle ce dernier a sollicité du bâtonnier la nullité de la convention d'honoraires ; qu'au surplus, les factures qui ne constituent pas des demandes de provision datées des 5 juillet, 14 août 2019 et 10 novembre 2020 susceptibles de constituer la révélation concrète d'une réclamation d'honoraires de résultat n'auraient pas pu conduire non plus à retenir une prescription quinquennale ;

Attendu que cette fin de non-recevoir fondée sur la prescription doit être rejetée et les demandes tendant à la nullité de la convention d'honoraires sont déclarées recevables temporellement ;

Sur la violence morale invoquée par M. [X]

Attendu qu'avant d'examiner la demande de nullité fondée sur une violation de la prohibition édictée par l'alinéa 3 de 10 de la loi du 31 décembre 1971 dans ses dispositions alors en vigueur, il convient en effet d'apprécier le moyen de nullité fondé sur un vice du consentement invoqué par M. [X] ; qu'avant de déterminer si une des clauses du contrat le vicie, il est nécessaire de déterminer l'existence d'un consentement valablement donné ;

Attendu qu'aux termes de l'article 1109 du Code civil, dans sa version en vigueur au jour de la signature de la convention d'honoraires, «Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.» ; que l'article 1143 du même code actuellement en vigueur et cité par la SELARL Clappot-[W] ne s'applique qu'aux contrats signés postérieurement au 1er octobre 2016 ; 

Que si M. [X] ne précise pas le fondement juridique du moyen fondé sur la violence morale, il doit être rappelé qu'il lui appartient d'en rapporter la preuve ;

Attendu que M. [X] affirme que Mme [F] et lui-même étaient dans une situation de faiblesse psychologique telle qu'ils s'en sont entièrement remis à la SELARL Clapot-[W], acceptant « les yeux fermés » tout ce qu'elle leur avait proposé, cette situation résultant des conséquences dramatiques de l'accident de la circulation que M. [X] avait subi le 30 septembre 2012 ;

Qu'il ajoute que ce cabinet d'avocats avait proposé à sa mère une prise en charge globale allant jusqu'à proposer l'intervention d'un expert-comptable et d'un conjoint d'un des associés de la SELARL Clapot-[W] pour les recherches immobilières ;

Attendu que comme ce dernier l'a relevé dans ses écritures, les éventuels démêlés de M. [X] avec cet intervenant extérieur au cabinet d'avocat ne peuvent ici être examinés et ils sont d'ailleurs retenus comme inopérants à établir une violence, une offre de service élargie n'y correspondant manifestement pas alors surtout que cette intervention est postérieure à la signature de la convention ;

Attendu que le bâtonnier a motivé à bon droit que devaient être caractérisés des agissements intentionnels de l'avocat en évoquant la nécessité d'un abus et il est nécessaire de rappeler que la violence invoquée doit avoir déterminé Mme [F] à signer la convention d'honoraires ;

Attendu qu'il ressort des explications des parties dans leurs mémoires successifs que les premiers contacts ont été noués entre Mme [F] et la SELARL Clapot-[W] dans la première quinzaine du mois de décembre 2013, à la suite de l'intervention de Me [Z] [J], comme en attestent les courriers du 18 décembre 2013 émis par le cabinet destinés notamment à cet avocat, faisant état d'un rendez-vous du 17 décembre 2012, et la réponse apportée par Me [Z] [J] dans son courrier du 14 janvier 2013 ;

Attendu qu'aucun autre document n'est fourni pour refléter les rapports entre Mme [F] et la SELARL Clapot-[W] entre le 17 décembre 2012 et le 7 mars 2013, ce délai pouvant être présumé comme ayant permis à Mme [F] de prendre le temps de réfléchir et de discuter des conditions effectives de l'intervention de l'avocat et surtout n'accrédite pas l'existence d'une pression telle que l'urgence invoquée par M. [X] pour une signature rapide de la convention arguée de nullité ;

Attendu que le bâtonnier a retenu avec pertinence que ces seuls éléments conduisaient à considérer une capacité effective de Mme [F] de veiller aux intérêts de son fils, de comprendre l'économie de la convention d'honoraires faisant prendre en charge une grande partie de l'activité de l'avocat par l'intermédiaire d'honoraires de résultat ;

Qu'il ne ressort d'ailleurs d'aucune des pièces du débat que l'association AssTRA, curatrice aux biens de M. [X] depuis le 7 septembre 2018, ait fait valoir à la SELARL Clapot-[W] une difficulté concernant l'exécution de cette convention d'honoraires de résultat, alors que des provisions dépassant les 1 000 € HT de forfait d'honoraires fixes avaient été couvertes par prélèvements pour un total de 11 800 € HT, au moment où Mme [F] était seule curatrice ;

Que les comptes de gestion déposés chaque année par Mme [F] n'ont pas plus attiré l'attention du juge des tutelles ;

Attendu qu'aucun courrier ou courriel versé aux débats ne reflète une difficulté concernant la mise en oeuvre de cette convention avant un courrier du 27 avril 2021, émanant de Mme [F], curatrice à la personne, ce courrier ne faisant d'ailleurs pas état d'une quelconque violence morale ; que ce vice du consentement n'a été invoqué que lors de la saisine du bâtonnier ;

Attendu que M. [X] défaille ainsi à établir que sa mère ait été placée dans un état de dépendance dont la SELARL Clapot-[W] aurait abusé, et sa demande d'annulation de la convention pour violence morale ne pouvait qu'être rejetée ;

Sur le moyen de nullité fondé sur l'article 10 alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971

Attendu que ce texte dans sa version en vigueur au jour de la signature de la convention issue de la réforme du 13 décembre 2011, mais qui n'a pas été modifié ensuite dans sa lettre, dispose :

«Toute fixation d'honoraires qui ne le serait qu'en fonction du résultat judiciaire est interdite. Est licite la convention qui, outre la rémunération des prestations effectuées, prévoit la fixation d'un honoraire complémentaire en fonction du résultat obtenu ou du service rendu.» ;

Attendu qu'en l'espèce, la convention d'honoraires a prévu :

- des honoraires forfaitaires d'un montant de 1 000 € HT,

- des honoraires complémentaires de résultat réglés au fur et à mesure des provisions perçues calculés sur l'intégralité des sommes obtenues et selon un pourcentage de 10 % HT ;

Attendu que M. [X] soutient que la convention d'honoraires du 7 mars 2013 viole les dispositions susvisées et la prohibition de l'honoraire qui ne serait qu'en fonction du résultat obtenu, en relevant la disproportion existant entre le montant des honoraires fixes de 1 200 € TTC et celui des honoraires de résultat d'un total de plus de 611 000 € TTC et surtout que le pourcentage affecté au résultat aurait dû être plus réduit ;

Qu'en l'espèce, il n'est pas contestable que la lettre même du texte susvisé ait été respectée en ce qu'un honoraire de diligences a été stipulé et payé ;

Attendu que M. [X] argumente de manière inopérante à venir au soutien de sa demande de nullité sur le caractère disproportionné du taux de 10 % des honoraires de résultat alors qu'il lui appartient ici de caractériser que l'honoraire forfaitaire de 1 200 € était manifestement dérisoire au regard des circonstances alors connues par rapport au montant des honoraires de résultat, ce caractère manifeste étant destiné à établir que l'honoraire fixe n'a été contractuellement prévu que pour contourner artificiellement l'interdiction de la fixation d'honoraires uniquement centrés sur le résultat ;

Attendu que l'appréciation de ce caractère manifestement dérisoire est à réaliser de manière concrète en fonction des différents éléments qui doivent guider l'avocat dans la fixation de sa rémunération ;

Qu'il peut être reporté à l'article 11 du Règlement Intérieur National de la profession d'avocat visé au dispositif de la décision du bâtonnier pour déterminer les règles de cette fixation par l'avocat soit :

«La rémunération de l'avocat est fonction, notamment, de chacun des éléments suivants conformément aux usages :

' le temps consacré à l'affaire,

' le travail de recherche,

' la nature et la difficulté de l'affaire,

' l'importance des intérêts en cause,

' l'incidence des frais et charges du cabinet auquel il appartient,

' sa notoriété, ses titres, son ancienneté, son expérience et la spécialisation dont il est titulaire,

' les avantages et le résultat obtenus au profit du client par son travail, ainsi que le service rendu à celui-ci,

' la situation de fortune du client.» ;

Attendu que le bâtonnier a retenu avec pertinence que devaient être pris en compte la nature de l'affaire et la situation économique de M. [X] et a relevé sans être contredit que les honoraires fixes destinés initialement à être réglés dès la signature de la convention équivalaient à un mois de salaire du client avant son accident, alors même qu'une provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice n'est identifiée comme ayant été versée par l'assureur qu'au mois de mars 2013 ;

Que suivant la pièce 2 de la SELARL Clapot-[W], M. [X] a perçu de l'assureur les provisions suivantes :

- 18 000 € en mars 2013,

- 30 000 € en juin 2013,

- 50 000 € en octobre 2013,

- 150 000 € en juin 2014,

- 30 000 € en mars 2015,

- 50 000 € en juin 2015,

- 50 000 € en août 2015,

- 50 000 € en septembre 2015,

- 50 000 € en août 2016,

- 50 000 € en août 2017 ;

Attendu que le montant de 1 200 € d'honoraires forfaitaires a été qualifié à tort par le bâtonnier comme «étant d'une extrême modicité» et contrairement à ce qu'il a retenu et de ce qui est mis en avant par M. [X], ce montant n'est pas à mettre en rapport uniquement avec le montant prévisible des honoraires de résultat mais doit être évalué au regard de l'ampleur et du coût des diligences prévues pour être engagées au moment de la signature de la convention et de la faculté du client à les assumer financièrement ;

Attendu que son caractère manifestement dérisoire est à apprécier en fonction des équilibres alors recherchés par les parties entre la prise en charge successive de la réalité du coût des diligences de l'avocat au décours d'une procédure d'indemnisation susceptible d'être longue, ce qui a été le cas en l'espèce où le jugement a été rendu près de cinq années après la saisine du cabinet d'avocat, et une limitation de cette prise en charge par le biais de prélèvements d'un pourcentage des provisions, et à reporter au versement final de l'indemnisation l'imputation du coût réel des diligences ;

Qu'en effet, au regard de la faible fortune de M. [X] et dans le cadre d'une convention d'honoraires prévoyant une facturation au temps passé, les provisions alors susceptibles d'être facturées successivement auraient été prélevées sur les provisions d'indemnisation prévues pour lui être payées, ce qui était de nature à obérer sa possibilité de faire face à ses blessures et à son lourd handicap ;

Attendu que cette somme de 1 200 € n'était pas manifestement dérisoire et le choix de proposer une convention d'honoraire de résultat ne manifestait pas une fraude de l'avocat pour n'obtenir sa rémunération que par le biais du résultat de son travail, mais pouvait être le signe d'une volonté d'accompagner le client dans une démarche d'indemnisation susceptible d'être longue et complexe, sans certitude que les provisions versées soient en capacité de couvrir à la fois les contraintes de la prise en charge du handicap et le coût du travail de la SELARL Clapot-[W] ;

Attendu que la convention litigieuse ne violait ainsi pas la prohibition de l'article 10 alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971 ;

Attendu qu'en conséquence, les demandes d'annulation présentées par M. [X] sont rejetées ;

Qu'en application de l'article 1134 ancien du Code civil, applicable au regard de la date de la convention d'honoraires, et de l'article 10 de la loi du 31 décembre 1971, les honoraires de l'avocat doivent être appréciés au regard de l'application de la convention d'honoraires et comme l'a motivé le bâtonnier, demeurent soumis à l'appréciation du juge de l'honoraire ;

Sur l'appréciation à réaliser de l'honoraire de résultat

Attendu que si le bâtonnier et le premier président à sa suite, statuant en qualité de juges de l'honoraire, apprécient souverainement, d'après les conventions des parties et les circonstances de la cause, le montant de l'honoraire dû à l'avocat, il ne leur appartient pas de le réduire dès lors que le principe et le montant de l'honoraire de résultat a été clairement prévu dans la convention d'honoraires sauf si cet honoraire complémentaire convenu présente un caractère exagéré au regard du service rendu ;

Attendu que l'appréciation de la proportionnalité entre le service rendu et l'honoraire de résultat doit être réalisée en l'état des éléments concrets du litige entre l'avocat et son client comme des circonstances particulières de l'espèce, et le juge de l'honoraire se prononce au regard de la consistance de ce service, et plus précisément du volume et de la complexité des diligences accomplies par l'avocat pour parvenir au résultat obtenu dans l'intérêt du client ;

Attendu que cette appréciation de la proportionnalité du complément d'honoraires n'a pas plus à être effectuée au regard d'un aléa ou d'un manque d'aléa concernant le résultat destiné à être obtenu par l'avocat mais en fonction du résultat effectivement acquis ;

Attendu que M. [X] soutient que le montant des honoraires qui devraient demeurer perçus par la SELARL Clapot-[W] selon la décision du bâtonnier, parait fort contestable en ce que cela reviendrait encore à le priver du poste « assistance à tierce personne », d'un montant de 491 162,84 € TTC et qu'il s'agit d'une pratique prohibée par les usages propres aux avocats exerçant en matière de réparation du préjudice corporel, et à tout le moins par la morale, car cela revient ni plus ni moins à priver le client d'une indemnisation dont il a un besoin vital ;

Attendu qu'il convient de rappeler que le juge de l'honoraire ne peut pas se prononcer directement ou indirectement sur le respect par l'avocat de ses obligations déontologiques et il ne lui appartient pas davantage de déterminer les éventuelles fautes disciplinaires invoquées par son client ;

Attendu que M. [X] ne fournit d'ailleurs aucun élément concret susceptible de confirmer l'existence d'une poursuite de la SELARL Clappot-[W] concernant le respect de ses obligations déontologiques, en faisant état de celles «habituellement engagées» et pas plus d'un usage propre à la profession de ne pas calculer l'honoraire de résultat sur les indemnisations correspondant à un besoin vital ;

Qu'il est d'ailleurs difficile de réserver ce caractère vital à l'indemnisation de la tierce personne, M. [X] ayant également été indemnisé à hauteur de 108 939,13 € au titre de la perte future de gains professionnels qui est largement susceptible de répondre à cette même définition car couvrant la perte de capacité de se procurer des revenus ;

Attendu que par son jugement du 4 décembre 2017, le tribunal de grande instance de Strasbourg a fait bénéficier personnellement à M. [X] d'un solde d'indemnisation de son préjudice à hauteur de 5 703 415,13 € en sus des provisions versées à hauteur de 480 000 € mais il convient de relever que la créance de la CPAM a été fixée à hauteur de 1 540 480,73 € au titre de son recours subrogatoire ;

Que la SELARL Clappot-[W] a elle-même en partie reconnu le caractère excessif du taux uniforme de 10 % prévu dans la convention d'honoraires en ayant accepté de réduire à 8 % le taux de l'honoraire de résultat sur la somme allouée pour financer l'assistance par tierce personne ;

Attendu que les honoraires de résultat payés correspondent à environ 9,89 % des indemnisations fixées alors que le bâtonnier a réduit ce pourcentage à un peu moins de 8 % de cette totalité des sommes allouées par le tribunal de grande instance de Strasbourg ;

Attendu qu'il ressort du listing produit par la SELARL Clappot-[W] en pièce 19 qu'elle dit avoir engagé des diligences pour une durée de 408 heures et 12 minutes de travail et ne sont versées aux débats pour éclairer sur l'ampleur et la complexité de ces diligences que :

- l'examen contradictoire du Dr [C], médecin conseil de l'assureur adverse, daté du 26 juin 2013,

- des courriers adressés au juge des tutelles,

- un courriel reçu le 16 juillet 2014 d'un ergothérapeute du centre médical de [6] à [Localité 5],

- deux courriels envoyés les 7 octobre 2015 et 30 janvier 2018 par Mme [F],

- un courrier du 6 novembre 2015 reçu du Laboratoire d'accessibilité et d'ergonomie, transmettant un rapport de ce laboratoire également joint,

- un courrier du 19 juin 2017 reçu du juge des tutelles concernant un contrat de travail destiné à assurer l'assistance de vie de M. [X],

- le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Strasbourg,

- un rapport d'expertise amiable du Dr [C] du 26 février 2015 ;

Attendu que ces éléments sont plus que parcellaires pour éclairer le juge de l'honoraire sur la technicité particulière mise en oeuvre et surtout sur l'apport effectif de ce cabinet spécialisé en matière de préjudice corporel qu'est la SELARL Clappot-[W] ;

Qu'ils objectivent en tout état de cause l'intervention d'un médecin conseil au profit de M. [X] lors des opérations d'expertise réalisée par l'expert d'assurance le Dr [C] ce qui a pu amener ce dernier à évoluer dans son appréciation de l'ampleur du préjudice ;

Attendu que la lecture du jugement liquidant le préjudice est malheureusement d'aucun secours pour repérer l'influence réelle des diligences engagées sur le résultat obtenu en faveur de M. [X] ;

Attendu que malgré une réouverture des débats alors que la discussion portait particulièrement sur la nullité de la convention d'honoraires, la SELARL Clappot-[W] n'a pas entendu produire les différents documents qui auraient été nécessaires pour déterminer le coût de ses diligences en fonction des seuls critères de l'article 10 susvisé, à tort invoqués par M. [X] ;

Attendu que les documents fournis comme le listing des diligences engagées permettent néanmoins au regard de la technicité et de la complexité inhérente à la liquidation d'un préjudice résultant d'un lourd handicap, de déterminer que le savoir-faire et les outils déployés par la SELARL Clappot-[W] ont participé en large part au succès des demandes d'indemnisation en particulier s'agissant de la durée d'intervention de la tierce personne pour laquelle le juge n'a pas suivi le diagnostic de l'expert mais également concernant le versement d'un capital au lieu du service d'une rente ;

Attendu qu'en raison de cette carence probatoire et au regard d'une influence non contestable des diligences engagées, il convient de réduire à la somme de 300 000 € TTC les honoraires de résultat exagérés par rapport au service rendu et payés à la SELARL Clappot-[W] et de condamner cette dernière à en restituer le solde soit 309 962,84 € (montant des honoraires payés par M. [X] de 611 162,84 € avec déduction des honoraires fixes de 1 200 € TTC de la somme minorée des honoraires de résultat) ;

Attendu qu'il convient ainsi de faire droit partiellement au recours de M. [X] et de rejeter le recours incident de la SELARL Clapot-[W] , la décision du bâtonnier étant réformée sur la seule fixation proportionnée de l'honoraire de résultat ;

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Attendu que chaque partie succombe dans le cadre de ce recours et doit garder la charge de ses propres dépens, les demandes présentées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile ne pouvant prospérer ;

PAR CES MOTIFS

Le délégué du premier président, statuant publiquement et par ordonnance contradictoire,

Rejetons l'exception d'irrecevabilité soulevée par M. [Y] [X],

Déclarons recevable la contestation d'honoraires présentée au bâtonnier de l'ordre des avocats de Lyon par M. [Y] [X],

Rejetons les demandes d'annulation présentées par M. [Y] [X] :

Faisant droit partiellement au recours de M. [Y] [X] et statuant à nouveau sur l'appréciation de la proportionnalité des honoraires de résultat et sur leur montant ;

Fixons à 300 000 € le montant des honoraires de résultat pouvant être réclamés à M. [Y] [X],

Condamnons la SELARL Cabinet Clapot-[W] à rembourser à M. [Y] [X] la somme de 309 962,84 €,

Confirmons pour le surplus la décision entreprise,

Disons que chaque partie doit garder la charge de ses propres dépens et rejetons les demandes respectivement présentées au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

LE GREFFIER LE MAGISTRAT DELEGUE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 22/02231
Date de la décision : 27/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-27;22.02231 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award