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23/03/2023 | FRANCE | N°19/07992

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 23 mars 2023, 19/07992


N° RG 19/07992 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MWRP









Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 16 octobre 2019



RG : 2018j00779





SA BANQUE DE SAVOIE



C/



[E]

[L]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 23 Mars 2023







APPELANTE :



SA BANQUE DE SAVOIE agissant poursuites et diligences de ses représentants léga

ux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Adresse 6]



Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et par Me Clémence JULLIARD de ...

N° RG 19/07992 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MWRP

Décision du Tribunal de Commerce de LYON du 16 octobre 2019

RG : 2018j00779

SA BANQUE DE SAVOIE

C/

[E]

[L]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 23 Mars 2023

APPELANTE :

SA BANQUE DE SAVOIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938, postulant et par Me Clémence JULLIARD de la SELARL LEGI RHONE ALPES, avocat au barreau d'ANNECY

INTIMES :

M. [V] [E]

né le [Date naissance 2] 1976 à [Localité 7]

[Adresse 8]

[Adresse 8]

M. [Y] [L]

né le [Date naissance 3] 1980 à [Localité 9]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

Représentés par Me Charles CROZE de la SELARL AVOCANCE, avocat au barreau de LYON, toque : 757

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 20 Novembre 2019

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Janvier 2023

Date de mise à disposition : 23 Mars 2023

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, présidente, et Marianne LA-MESTA, conseillère, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL J&J (ci-après la société J&J) exploite un fonds de commerce de boulangerie-pâtisserie sis [Adresse 1] sous l'enseigne 'Tendance Gourmande'.

Le 2 avril 2015, la SA Banque de Savoie (ci-après la Banque de Savoie) a consenti à la société J&J deux prêts d'équipement d'un montant respectif de 180.000 euros au taux de 1,98% l'an, remboursable en 87 mensualités de 2.350, 55 euros assurance comprise (prêt n°08604764), et de 219.000 euros au taux de 1,98% l'an, remboursable en 84 mensualités de 2.859,84 euros assurance comprise (prêt n°08604763).

Par actes du même jour, MM. [V] [E] et [Y] [L] se sont chacun porté caution solidaire :

- du prêt n°08604764 dans la limite de la somme de 19.800 euros pour une durée de 87 mois,

- du prêt n°08604763 à concurrence de la somme de 24.090 euros pour une durée de 84 mois

Par jugement du 13 janvier 2016, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de redressement judiciaire au bénéfice de la société J&J et désigné la SELARL [X] [R], représentée par Me [X] [R], en qualité d'administrateur judiciaire, ainsi que la SELARL MJ Synergie, représentée par Me [F] [Z] en qualité de mandataire judiciaire.

Suivant courrier recommandé du 16 février 2016, la Banque de Savoie a déclaré une créance d'un montant total de 369.268,88 euros au passif de la société J&J, dont 199.424,91 euros au titre du prêt n°08604763 et 160.283,19 euros au titre du prêt n°08604764.

Par courriers du 16 février 2016, la Banque de Savoie a indiqué à MM. [L] et [E] qu'ils seront appelés à faire face à leurs engagements de caution à l'issue de la période d'observation.

Par jugement du 23 mars 2017, le tribunal de commerce de Lyon a arrêté le plan de redressement de la société J&J.

Suivant courriers du 7 février 2018, la Banque de Savoie a mis MM. [L] et [E] en demeure de lui régler chacun, dans un délai de 8 jours, la somme de 43.890 euros au titre de leur engagement de caution.

Ces mises en demeure étant restées sans effet, la Banque de Savoie a assigné MM. [L] et [E] devant le tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement contradictoire du 16 octobre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé que le jugement d'adoption du plan de redressement de la société J&J démontre l'acceptation de MM. [E] et [L] de maintenir leur cautionnement pendant toute la durée du plan et que ce n'est qu'en cas de résolution de celui-ci que la Banque de Savoie serait fondée à activer les cautions,

- débouté en conséquence la Banque de Savoie de ses demandes formées envers MM. [E] et [L], ès-qualité de cautions,

- débouté la Banque de Savoie de ses autres demandes,

- condamné la Banque de Savoie à payer à MM. [E] et [L] la somme de 1.000 euros chacun au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la Banque de Savoie aux entiers dépens.

La Banque de Savoie a interjeté appel par acte du 20 novembre 2019.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 9 juillet 2020 fondées sur les articles L.622.-28 et L.631-20 du code de commerce, ainsi que sur les articles 1103, 1353, 2288 et 2293 du code civil, la Banque de Savoie demande à la cour :

- d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes formées envers MM. [E] et [L],

statuant à nouveau,

- de constater l'absence d'engagement écrit de MM. [E] et [L],

- de dire que faute d'acceptation écrite des cautions l'accord en date du 21 novembre 2016 est devenu caduc,

- de constater que le premier dividende n'a pas été versé conformément au plan de redressement adopté par jugement en date du 23 mars 2017,

- de dire qu'elle est recevable et bien fondée à activer les engagements de caution,

- de condamner M. [E] à lui payer la somme de :

- 24.090 euros au titre du prêt n°08604763, outre intérêts à taux légal à compter du 7 février 2018, date de la mise en demeure, jusqu'à complet règlement,

- 19.090 euros au titre du prêt n°08604764, outre intérêts à taux légal à compter du 7 février 2018, date de la mise en demeure, jusqu'à complet règlement,

- de condamner M. [L] à lui payer la somme de :

- 24.090 euros au titre du prêt n°08604763, outre intérêts à taux légal à compter du 7 février 2018, date de la mise en demeure, jusqu'à complet règlement,

- 19.090 euros au titre du prêt n°08604764, outre intérêts à taux légal à compter du 7 février 2018, date de la mise en demeure, jusqu'à complet règlement,

- de condamner solidairement MM. [E] et [L] à payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner solidairement les mêmes aux entiers dépens d'instance et d'appel, ceux d'appel étant distraits au profit de Me Laffly ' Lexavoué Lyon sur son affirmation de droit,

- d'ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.

A l'appui de ses prétentions, la Banque de Savoie fait valoir :

- que si dans un premier temps, elle a indiqué à l'administrateur judiciaire qu'elle était encline à accepter le règlement de ses créances à 100% sur 15 ans et à ne pas réclamer les sommes dues aux cautions sous réserve du bon fonctionnement du plan et d'un engagement écrit de leur part au maintien de leur garantie tout au long du plan, elle n'a finalement donné son accord que les dispositions relatives au débiteur principal, sans renonciation à agir contre les cautions en l'absence d'engagement écrit de leur part,

- qu'en application de l'article L.631-20 du code de commerce, l'adoption du plan de redressement autorise la reprise des poursuites par les créanciers à l'encontre des personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté réelle,

- qu'en leur qualité de cautions averties disposant des compétences nécessaires pour apprécier la portée de leurs engagements, MM.[E] et [L] sont mal fondés à se prévaloir des dispositions de l'article L.332-1 du code de la consommation relatives à la disproportion,

- qu'en tout état de cause, MM.[E] et [L] ne rapportent aucunement la preuve du caractère disproportionné des engagements souscrits, puisque dans leurs écritures, ils affirment qu'à la date de signature des actes, leurs revenus respectifs étaient de 2.000 euros par mois et que M.[E] était propriétaire d'un bien immobilier acquis en août 2014,

- que ce dernier se borne à affirmer qu'il a acheté ce bien pour 85.000 euros sans produire aucun justificatif à l'appui de ses dires, tout en reconnaissant avoir été en mesure de contracter un prêt pour le financer à 100% sur 25 ans, ce qui démontre sa solvabilité suffisante au moment de son engagement de caution,

- que de son côté, M.[L] a lui-même fait l'acquisition de sa résidence principale pour un montant de 285.000 euros quelques mois seulement après la signature de son engagement de caution,

- qu'ayant été autorisée, par ordonnance du président du tribunal de commerce en date du 27 mars 2018, à inscrire une hypothèque judiciaire sur le bien appartenantà M.[E] pour la somme de 43.890 euros, elle peut agir à son encontre en vue de l'obtention d'un titre exécutoire, comme le prévoit l'article R.511-7 du code des procédures civiles d'exécution,

- qu'en vertu de l'article 2293 du code civil, MM.[E] et [L] sont tenus non seulement du principal de la dette, mais aussi de tous ses accessoires, y compris les intérêts de retard,

- que faute pour MM.[E] et [L] de justifier de leurs ressources et charges actuelles, leur demande de délais de paiement ne peut qu'être rejetée.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 novembre 2020, fondées sur les articles 1103, 1342, 1343-5, 2288, 2290 et 2298 du code civil, ainsi que sur les articles L.332-1 du code de la consommation et L.631-20 du code de commerce, MM. [E] et [L] demandent à la cour de :

- dire recevables et bien fondées leurs demandes,

à titre principal,

- juger que la Banque de Savoie a renoncé à les actionner en qualité de cautions des prêts souscrits par la société J&J le 2 avril 2015 en cas de respect des échéances du plan de redressement de la société J&J arrêté par le jugement du tribunal de commerce de Lyon le 23 mai 2017,

- constater que la société J&J a réglé les deux premières échéances du plan de redressement et qu'en conséquence, le plan de redressement de la société J&J est à ce jour parfaitement exécuté,

- rejeter les contestations développées par la Banque de Savoie,

en conséquence,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Banque de Savoie de sa demande de paiement de la somme de 43.890 euros formulée à l'encontre de chacun d'entre eux,

à titre subsidiaire, en cas de réformation du jugement entrepris, si la cour venait à considérer que le jugement arrêtant le plan de redressement ne fait pas obstacle aux poursuites initiées par la Banque de Savoie,

- juger que leurs engagements de cautionnement du 2 avril 2015 au bénéfice de la Banque de Savoie afin de garantir les prêts n°08604763 et n°08604764 sont disproportionnés par rapport à leurs revenus et biens respectifs,

- juger que la Banque de Savoie ne peut se prévaloir de leurs actes de cautionnement du 2 avril 2015,

- rejeter les contestations développées par la Banque de Savoie,

en conséquence, statuant à nouveau,

- débouter la Banque de Savoie de sa demande de paiement de la somme de 43.890 euros formulée à l'encontre de chacun d'entre eux,

à titre plus subsidiaire, en cas de réformation du jugement entrepris, si la cour venait à considérer que le jugement de plan ne fait pas obstacle aux poursuites initiées par la Banque de Savoie et que les engagements de cautions ne sont pas manifestement disproportionnés,

- juger que la déchéance du terme des contrats de prêts cautionnés n'a pas été prononcée par la Banque de Savoie,

- juger, en conséquence, que la déchéance du terme des actes de cautionnement du 2 avril 2015 ne peut être prononcée par la Banque de Savoie à leur encontre,

- rejeter les contestations développées par la Banque de Savoie,

en conséquence, statuant à nouveau,

- débouter la Banque de Savoie de sa demande de paiement de la somme de 43.890 euros formulée à l'encontre de chacun d'entre eux,

encore plus subsidiairement, en cas de réformation du jugement entrepris, si la cour venait à considérer que le jugement de plan ne fait pas obstacle aux poursuites initiées par la Banque de Savoie, que les engagements de cautions ne sont pas manifestement disproportionnés et que la Banque de Savoie peut solliciter l'intégralité des engagements de cautions,

- juger que les mises en demeure qui leur ont été adressées le 7 février 2018 sont dépourvues d'objet,

- juger, en conséquence, que les courriers du 7 février 2018 ne peuvent être le point de départ d'intérêts de retard,

- statuant à nouveau, débouter la Banque de Savoie de sa demande de paiement d'intérêts de retard à compter du 7 février 2018,

à titre infiniment subsidiaire,

- juger qu'ils n'ont pas les ressources nécessaires pour rembourser la somme de 43.890 euros chacun demandée par la Banque de Savoie,

- statuer à nouveau, autoriser, en conséquence, un échelonnement du paiement de leur dette de 43.890 euros chacun sur une période de deux ans à compter de la signification de l'arrêt à intervenir,

en tout état de cause,

- condamner la Banque de Savoie à leur payer la somme de 2.000 euros chacun sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'au paiement des entiers dépens de l'instance.

MM.[E] et [L] exposent en substance :

- que dans le cadre des discussions avec l'administrateur judiciaire en vue de l'élaboration d'un plan de redressement, la Banque de Savoie s'est unilatéralement engagée, aux termes d'un courriel du 21 novembre 2016, à ne pas appeler les cautions dans le cas où le débiteur principal exécuterait correctement le plan de redressement prévoyant un règlement de sa créance sur 15 ans,

- que sur la base de ces négocations, Me [R], es-qualités, a proposé un plan de redressement conforme aux conditions de remboursement voulues par la Banque de Savoie, ledit plan ayant ensuite été adopté par le tribunal de commerce par jugement du 23 mars 2017,

- qu'en actant l'accord de la Banque de Savoie pour un paiement sur 15 années, le tribunal a nécessairement fondé sa décision sur le mail du 21 novembre 2016 faisant état d'une absence de démarche à l'égard des cautions dans cette hypothèse,

- que la société J&J a procédé au règlement des deux premières échéances du plan, de sorte qu'en l'absence de défaillance du débiteur principal et donc de résolution du plan de redressement, la Banque de Savoie est tenue par son engagement de ne pas actionner les cautions,

- qu'à défaut de confirmation du jugement entrepris, la cour devra retenir que leurs engagements respectifs de caution étaient manifestement disproportionnés au sens de l'article L.332-1 du code de la consommation, disposition dont peuvent se prévaloir toutes les cautions, qu'elles soient averties ou non,

- qu'en effet, en cas de défaillance de la société J&J dans le remboursement de ses emprunts, ils se sont engagés à régler une somme mensuelle de 5.210,39 euros, alors qu'en avril 2015, ils percevaient tous deux des revenus de 2.000 euros par mois, ainsi qu'il ressort de leur avis d'imposition 2014, que M.[L] n'avait, à cette date, aucun patrimoine immobilier et que M.[E] était endetté pour avoir souscrit un emprunt sur 25 ans afin d'acquérir, le 29 août 2014, un bien immobilier pour un montant de 85.000 euros,

- qu'au jour de l'assignation délivrée par la Banque de Savoie, la disproportion demeurait, puisque leurs ressources mensuelles respectives étaient de 1.559,36 euros, que l'emprunt immobilier de M.[E] courait encore sur 19 années et que M.[L] avait acquis sa résidence principale pour la somme de 285.000 euros le 15 juillet 2015 au moyen d'un crédit à hauteur de 100% du prix sur une durée de 25 ans,

- qu'en tout état de cause, il s'avère que la Banque de Savoie n'a pas invoqué la déchéance du terme des contrats de prêt avant l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la société J&J,

- qu'en effet, lors de sa déclaration de créance, la Banque de Savoie a indiqué que les sommes dues au titre des deux prêts cautionnés correspondaient à des créances à échoir, et non à des créances échues,

- que dans la mesure où la déchéance du terme n'était pas encourue par le débiteur principal, la Banque de Savoie ne pouvait, en application des articles 2288, 2290 et 2298 du code civil, la prononcer contre les cautions,

- que contrairement à ce que prétend la Banque de Savoie, l'autorisation donnée par le juge de l'exécution de pratiquer une mesure conservatoire est sans lien avec le quantum des sommes dues par la caution,

- qu'au demeurant, les courriers leur ayant été adressés le 7 février 2018 par la Banque de Savoie ne sauraient être qualifiés de mise en demeure, puisque celle-ci leur a indiqué de manière erronée que l'adoption du plan de redressement rendait immédiatement exigible leur engagement, alors que la clause des actes de cautionnement prévoyant la déchéance du terme dans un tel cas de figure doit être réputée non écrite,

- qu'en outre, la déchéance du terme dont se prévaut la Banque de Savoie porte manifestement sur les contrats de prêt et non sur le cautionnement,

- que faute de mise en demeure valable, la Banque de Savoie n'est pas fondée à réclamer le paiement d'intérêts de retard à compter du 7 février 2018,

- qu'au regard de leurs ressources respectives actuelles, à savoir 1.647, 03 euros par mois pour M.[L] et 2.358,66 euros pour M.[E] avant prélèvement à la source, ils ne peuvent rembourser la somme de 43.890 euros sans mettre en péril leur situation financière personnelle de manière durable, ce qui justifie qu'en cas de condamnation au paiement de ces sommes, ils se voient accorder des délais de paiement sur une durée de 2 ans par application de l'article 1343-5 du code civil.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 18 décembre 2020, les débats étant fixés au 26 janvier 2023.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 24 janvier 2023, fondées sur les articles 802, 803 et 907 du code de procédure civile, MM. [E] et [L] demandent à la cour de :

- révoquer l'ordonnance de clôture en date du 18 décembre 2020,

- renvoyer l'affaire à la mise en état afin de permettre aux parties de conclure compte tenu de la liquidation du débiteur principal,

- réserver les dépens.

Ils observent ainsi que par jugement en date du 13 décembre 2021, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la résolution du plan et la liquidation judiciaire de la société J&J, ce qui a une incidence directe sur la présente instance et sur les cautionnements qu'ils ont régularisés.

A l'audience du 26 janvier 2023, la Banque de Savoie fait savoir qu'elle s'oppose à cette demande de rabat de l'ordonnance de clôture.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient à titre liminaire d'observer que les demandes de constat et dire et juger ne constituent pas des prétentions mais uniquement un rappel des moyens et qu'il n'y a donc pas de lieu de statuer sur ce point, la cour n'en étant pas saisie.

Il est également précisé que le litige n'est pas soumis au droit du cautionnement issu de l'ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021, puisque les contrats de cautionnement litigieux sont antérieurs au 1er janvier 2022.

Il doit encore être noté que la demande d'exécution provisoire formulée par la Banque de Savoie dans ses dernières conclusions est sans objet en cause d'appel.

Sur la révocation de l'ordonnance de clôture

Selon l'article 802 du code de procédure civile, applicable à la procédure ordinaire avec représentation obligatoire devant la cour d'appel en vertu de l'article 907 du même code, après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office. Sont cependant recevables, en vertu de l'alinéa 2 du même article, les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture

L'article 803 du code de procédure civile énonce quant à lui que l'ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s'il se révèle une cause grave depuis qu'elle a été rendue.

En l'espèce, à l'audience du 26 janvier 2023, après débat contradictoire entre les avocats des parties, la cour a refusé de faire droit à la demande de Me Croze, conseil de MM.[E] et [L] tendant au rabat de l'ordonnance de clôture, et retenu l'affaire en considérant que les conditions de l'article 803 précité ne sont pas remplies en l'absence de toute démonstration d'une cause grave survenue depuis que l'ordonnance de clôture a été rendue.

En effet, s'il est indéniable que le jugement de liquidation judiciaire dont les intimés font état à l'appui de leurs conclusions aux fins de renvoi à la mise en état a été rendu le 13 décembre 2021, soit postérieurement à la clôture des débats, il convient dans le même temps de relever que MM. [E] et [L] se bornent à alléguer que la liquidation du débiteur principal a une incidence directe sur les cautionnements qu'ils ont souscrits, sans cependant évoquer les moyens nouveaux qui pourraient être développés en conséquence de cette décision du tribunal de commerce et qui nécessiteraient la formalisation d'écritures d'une tout autre teneur que celles précédemment notifiées le 9 novembre 2020.

Il est au demeurant à noter que le débiteur principal concerné par la procédure de liquidation judiciaire n'est pas partie à la présente instance.

Sur l'exigibilité des sommes dues au titre des cautionnements

Il est au préalable rappelé que la cour n'est pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation ni de procéder à des recherches que ses constatations rendent inopérantes. Il lui appartient d'examiner en premier lieu les prétentions des parties dont l'accueil est de nature à influer sur la solution du litige, sans s'arrêter à l'ordre dans lequel elles sont présentées, dès lors qu'elles tendent toutes à la même fin. A ce titre, la cour examinera en premier lieu les moyens tirés du défaut d'exigibilité, par le créancier, des sommes dues au titre du cautionnement.

Sur la renonciation unilatérale de la banque à agir contre les cautions

Il résulte des dispositions de l'article 1100-1 du code civil, dans sa version issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, applicable au cas d'espèce, puisque les échanges litigieux entre la Banque de Savoie et l'administrateur judiciaire sont intervenus en novembre 2016, que la renonciation à un droit ne se présume pas, l'acte unilatéral par lequel une partie renonce à son droit d'agir en justice devant être fait en pleine connaissance de cause, de manière claire, précise et non équivoque.

En l'occurrence, le courriel envoyé le 21 novembre 2016 par le service contentieux de la Banque de Savoie dans le cadre des négocations en vue de l'élaboration du plan de redressement judiciaire, dont excipent MM.[E] et [L], lequel figure en annexe du projet de plan de redressement établi par la SELARL [X] [R] (pièce n°4 des intimés) indique : ' nous sommes enclins à accepter le règlement de nos créances à 100% sur 15 ans avec un engagement écrit des cautions au maintien de leur garantie tout au long du plan de redressement judiciaire pour garantir sa bonne exécution. De ce fait, nous nous engagerions à ne pas réclamer les sommes aux cautions si, et seulement si, le plan de redressement judiciaire fonctionne'.

Dans un second mail daté du 15 décembre 2016, également annexé au projet de plan de redressement, la Banque de Savoie fait savoir à l'administrateur judiciaire qu'elle confirme son 'accord pour un règlement à 100 % de notre créance sans intérêt et sur une période de 15 ans'. sans cependant s'engager en parallèle à ne pas poursuivre les cautions.

Il ne peut pas se déduire des termes du premier message électronique de la Banque de Savoie à l'administrateur judiciaire un engagement non équivoque de cette dernière à ne pas poursuivre les cautions en cas d'adoption du plan de redressement judiciaire, dès lors que celui-ci est rédigé au conditionnel et subordonne en outre cette éventuelle renonciation à un engagement écrit des cautions.

Le second courriel ne fait aucune référence à l'existence d'un écrit de cette nature de la part des cautions et n'évoque même plus le sort des cautionnements, la Banque de Savoie se bornant uniquement à donner son accord pour l'échelonnement de ses créances vis-à-vis du débiteur principal, la société J&J.

Aucune reconciation claire et dépourvue d'ambiguité de la société Banque de Savoie à son droit d'agir à l'encontre des cautions pendant l'exécution du plan de redressement ne peut donc résulter des deux mails précités.

La circonstance selon laquelle le plan de redressement a ensuite été adopté par le tribunal de commerce dans les termes souhaités par la Banque de Savoie, à savoir un remboursement de ses créances par la société J&J sur 15 ans avec abandon des intérêts ne saurait faire échec à cette analyse, dans la mesure où les cautions ne sont pas parties au plan, de sorte que son adoption ne peut en aucun cas emporter engagement de ces dernières à maintenir leur cautionnement pendant la durée de son exécution.

En conséquence, c'est à tort que les premiers juges ont débouté la Banque de Savoie de ses demandes à l'encontre de MM.[L] et [E], en considérant que ce n'est qu'en cas de résolution du plan que celle-ci serait fondée à activer les cautions.

Le jugement entrepris sera dès lors réformé de ce chef.

Il sera en tout état de cause observé que du fait de la résolution du plan de redressement et de l'ouverture corrélative de la liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 13 décembre 2021, le moyen de MM [L] et [E] tiré de la renonciation à agir de la Banque de Savoie à leur encontre tant que le plan serait correctement exécuté par le débiteur principal est devenu totalement inopérant.

Sur la déchéance du terme

L'article L.622-29 du code de commerce dispose que le jugement d'ouverture ne rend pas exigibles les créances non échues à la date de son prononcé. Toute clause contraire est réputée non écrite.

Il résulte par ailleurs des dispositions de l'article 2290 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 15 septembre 2021, que le cautionnement ne doit pas excéder ce qui est dû par le débiteur.

Il s'ensuit que la déchéance du terme qui n'est pas encourue par le débiteur principal, objet d'une procédure de redressement judiciaire, ne peut être invoquée contre la caution et que le jugement d'ouverture du redressement judiciaire ne rend pas exigibles à l'égard de la caution les créances non échues à la date de son prononcé.

Mais si la déchéance intervient en vertu des stipulations du contrat ou du seul fait du non paiement des échéances postérieurement au jugement d'ouverture, la caution sera tenue de son engagement.

En outre, aux termes des dispositions combinées des articles L.622-28 et L.631-20 du code de commerce, dans leur version applicable à la cause, la caution ne peut se prévaloir des dispositions du plan de redressement et la suspension des poursuites dont elle pouvait exciper cesse à compter du jour où le plan a été adopté.

La caution, qui n'est pas habilitée à faire état des remises consenties par le créancier dans le cadre du plan de redressement du débiteur, est donc tenue de la partie exigible de la dette à la suite de l'adoption dudit plan, c'est-à-dire de la part des mensualités du prêt qui n'auraient pas été payées par le débiteur en redressement judiciaire.

Dans le cas présent, il y a lieu de relever que la Banque de Savoie ne démontre, ni même ne soutient, avoir provoqué la déchéance du terme des deux prêts avant le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire du débiteur principal.

Il sera d'ailleurs souligné que la déclaration formalisée par ses soins le 16 février 2016 auprès du mandataire judiciaire (pièce n°5 de l'appelante) ne mentionne que des créances à échoir pour chacun des deux prêts cautionnés par MM.[L] et [E] et que la décision d'admission rendue le 24 octobre 2016 par le juge commissaire porte également uniquement sur des montants à échoir.

Cependant, contrairement à ce que soutiennent MM.[L] et [E] dans leur écritures, l'absence de déchéance du terme ne doit pas conduire au rejet pur et simple de la demande de la banque, mais seulement à la détermination de la dette au titre des échéances devenues successivement exigibles et non réglées selon les modalités contractuellement prévues, puisque les cautions ne peuvent invoquer à leur profit le rééchelonnement de la dette résultant du plan de redressement, qui ne bénéficie qu'au débiteur principal.

Or, force est de constater que selon le tableau d'amortissement et les stipulations du contrat, le prêt n°08604763 prévoyait un remboursement en 84 mensualités de 2.859,84 euros assurance incluse s'échelonnant jusqu'au mois de mai 2022, tandis que le prêt n°08604764 comportait 87 mensualités de 2.350,55 euros assurance incluse, dont la dernière devait être réglée en août 2022.

Il s'ensuit qu'à l'heure actuelle, les deux prêts sont arrivés à terme et que toutes les sommes restant dues selon les modalités contractuelles sont échues et donc exigibles de la part des cautions, ce qui rend vaine toute discussion sur la déchéance du terme.

Il doit en tout état de cause être noté que l'article R.511-7 du code des procédures civiles d'exécution impose au créancier qui ne dispose pas d'un titre exécutoire, d'introduire, dans le mois suivant l'exécution de la mesure conservatoire autorisée à l'encontre de la caution, une procédure tendant à l'obtention d'un tel titre, de sorte que cette obtention ne peut être subordonnée à l'exigibilité de la créance à l'égard de la caution.

En l'occurrence, il est démontré par la Banque de Savoie qu'aux termes d'une ordonnance rendue le 27 mars 2018 par le président du tribunal de commerce de Lyon, elle a été autorisée à prendre une inscription provisoire d'hypothèque au préjudice de M.[E] sur le bien immobilier lui appartenant situé [Adresse 4] pour la somme de 43.890 euros, la décision précisant d'ailleurs que la banque devra engager une procédure dans le délai d'1 mois à compter de la mesure en vue de l'obtention d'un titre exécutoire, à moins qu'elle n'en ait déjà un (pièce n°14 de l'appelante).

L'obligation dans laquelle elle se trouvait d'assigner M.[E] devant le tribunal de commerce suite à cette inscription d'hypothèque judiciaire provisoire, dûment dénoncée à l'intéressée le 4 mai 2018 (pièce n°15 de l'appelante) aurait donc également conduit à écarter le moyen tiré de l'absence de déchéance du terme du prêt.

Sur le caractère disproportionné des engagements de caution

L'article L.341-4 du code de la consommation (dans sa version antérieure au 1er juillet 2016 issue de l'article 11 de la loi n°2003-721 du 1er août 2003), applicable aux cautionnements litigieux signés le 2 avril 2015, dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Ces dispositions peuvent être invoquées par toute caution personne physique, qu'elle soit ou non avertie.

Il appartient à la caution qui prétend que son engagement était disproportionné au jour de la souscription, de le prouver.

En revanche, si l'engagement était disproportionné au jour de la souscription, il incombe au créancier, qui entend se prévaloir du cautionnement, de démontrer que le patrimoine de la caution lui permet d'y faire face au moment où elle est appelée, soit au jour de l'assignation.

La disproportion s'apprécie au jour de la conclusion de l'engagement au regard du montant de celui-ci et des biens et revenus de la caution en prenant en compte son endettement global.

Si le créancier a recueilli ces éléments auprès de la caution, la disproportion s'apprécie au vu des déclarations de la caution dont le créancier, en l'absence d'anomalies apparentes, n'a pas à vérifier l'exactitude. A défaut de fiche mentionnant les déclarations de la caution sur ces éléments, celle-ci est autorisée à rapporter librement la preuve de la disproportion.

En l'espèce, il convient d'abord de relever que la Banque de Savoie allègue à tort que l'article L.341-4 précité ne pourrait être utilement invoqué par MM. [L] et [E], dans la mesure où la qualité de caution avertie ne constitue pas un motif d'exclusion du bénéfice de ces dispositions légales.

L'analyse des pièces du dossier de l'appelante révèle par ailleurs que la Banque de Savoie ne verse aucun document renseigné par MM.[L] et [E] préalablement ou concomitamment à leurs engagements de caution faisant état de leurs biens et revenus, ainsi que de leur endettement.

Ces derniers peuvent donc exciper de tous éléments utiles à leur convenance en vue d'établir la disproportion dont ils se prévalent.

A cet égard, M.[L] produit :

- son avis d'imposition 2014 faisant apparaître, d'une part, qu'il a perçu un revenu net imposable de 28.424 euros pour l'année 2013, tandis que les ressources de sa compagne se sont élevées à 24.000 euros au cours de la même période, d'autre part, que le couple a réglé des mensualités de 234 euros entre janvier 2015 et octobre 2015 au titre de l'impôt sur le revenu (pièce n°7 des intimés),

- une attestation de Me [D], Notaire à [Localité 9], certifiant que le 15 juillet 2015, elle a reçu l'acte authentique de vente d'un appartement de type T3 dans un ensemble immobilier situé à [Localité 9] et [Localité 10] dont M.[L] et Mme [M] se sont portés acquéreurs pour la somme de 285.000 euros (pièce n°13 des intimés),

- une offre de prêt immobilier révélant que cet achat a été financé grâce à un emprunt de 250.000 euros, remboursable en 300 mensualités de 1.179,68 euros assurance incluse (pièce n°14 des intimés).

De son côté, M.[E] établit:

- que son revenu annuel net imposable en 2013 était de 26.250 euros et qu'il a payé des mensualités de 89 euros entre janvier 2015 et octobre 2015 au titre de l'impôt sur le revenu (pièce n°8 des intimés),

- que le 29 août 2014, il a fait l'acquisition d'un bien immobilier situé [Adresse 4], en l'occurrence un studio de 20,76 m², moyennant le prix de 78.500 euros, financé au moyen d'un prêt d'un montant de 76.120 euros remboursable en 240 échéances de 426,04 euros chacune (pièce n°11 des intimés).

S'agissant du passif de M.[L], il convient de relever que celui-ci n'est pas fondé à inclure dans celui-ci l'emprunt de 250.000 euros contracté pour l'achat de sa résidence principale, dans la mesure où celui-ci a été souscrit plus de 3 mois après la signature de ses engagements de caution.

Pour le même motif, il ne peut pas non plus être tenu compte du bien immobilier acquis en juillet 2015 pour évaluer son patrimoine, puisqu'il n'en était pas encore propriétaire lorsqu'il s'est engagé en qualité de caution.

M.[L] affirme dans ses écritures qu'il ne détenait aucun actif immobilier ou mobilier à la date où il s'est engagé comme caution, ce qui n'est pas contesté par la Banque de Savoie.

Dans ce contexte, seuls ses revenus doivent être pris en considération pour apprécier sa capacité à faire face à ses deux engagements de caution.

A cet égard, il y a lieu d'observer qu'il ne rapporte pas la preuve du montant de ses ressources durant l'année 2015. Toutefois, il soutient ne pas avoir connu de changement de situation professionnelle entre 2013 et 2015, puisque dans ses dernières conclusions, il évoque des revenus de l'ordre de 2.000 euros par mois à la date de signature de l'acte de cautionnement.

Il est à noter que ces affirmations ne sont pas contredites par la Banque de Savoie qui reprend d'aillleurs ces montants dans ses propres écritures.

Or, il convient de relever qu'avec des ressources annuelles disponibles inférieures à la somme de 30.000 euros en avril 2015, M. [L] était dans l'incapacité de faire face aux deux engagements de caution d'un montant global de 43.890 euros, compte tenu des charges fiscales et des dépenses incompressibles de la vie courante, même partagées par moitié avec sa compagne, qu'il devait par ailleurs supporter.

Il en était a fortiori de même pour M.[E], puisque ses revenus annuels en 2013 étaient légèrement inférieurs à ceux de M. [L] et qu'il justifiait assumer en sus le remboursement d'un crédit immobilier pour un montant annuel de 5.112, 48 euros.

Il était certes propriétaire d'un bien immobilier acquis en août 2014, mais au regard du montant de l'emprunt grevant ce bien, la valeur résiduelle nette de cet actif ressortissait à moins de 10.000 euros en 2015.

Le patrimoine et les ressources disponibles de M.[E] en avril 2015 ne lui permettaient donc pas non plus d'honorer les deux engagements de caution d'un montant global de 43.890 euros.

Il est par conséquent suffisamment démontré par MM. [L] et [E] que les engagements de caution contractés le 2 avril 2015 étaient manifestement disproportionnés à leurs revenus et biens.

Il échet dès lors de vérifier si la Banque de Savoie rapporte la preuve que les cautions, au moment où elles ont été appelées en paiement, étaient en mesure de répondre aux obligations résultant de leurs engagements.

Force est à cet égard de constater que la Banque de Savoie ne produit aucune pièce relative aux revenus et au patrimoine des consorts [L] et [E] au mois de mai 2018, étant rappelé que l'assignation en paiement devant le tribunal de commerce a été délivrée le 3 mai 2018.

En conséquence, faute d'établir qu'au moment où ils ont été attraits en justice, MM. [L] et [E] disposaient de capacités contributives et/ou d'un patrimoine suffisants leur donnant la possibilité d'honorer le paiement de la somme qui leur était réclamée, la Banque de Savoie est mal fondée à se prévaloir du cautionnement.

Et sans plus ample discussion sur les autres chefs de demande formés par les intimés qui deviennent sans objet, il convient de rejeter les réclamations financières de la Banque de Savoie à l'encontre des cautions, ce qui conduit, par ces motifs substitués, à la confirmation du jugement entrepris, en ce qu'il a débouté l'appelante de ses demandes.

Sur les dépens et les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Succombant en toutes ses prétentions, la Banque de Savoie supportera les dépens d'appel comme ceux de première instance, le jugement étant par conséquent confirmé sur ce point.

Il l'est également s'agissant de la condamnation de la Banque de Savoie à verser à MM. [L] et [E] la somme de 1.000 euros chacun sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît enfin équitable d'allouer à MM. [L] et [E] une indemnité de 1.500 euros chacun au titre des frais irrépétibles qu'ils ont exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant dans les limites de l'appel,

Rejette la demande de révocation de l'ordonnance de clôture,

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a jugé que le jugement d'adoption du plan de redressement de la société J&J démontre l'acceptation de MM.[L] et [E] de maintenir leur cautionnement pendant toute la durée du plan et que ce n'est qu'en cas de résolution de celui-ci que la Banque de Savoie serait fondée à activier les cautions,

Statuant à nouveau et ajoutant,

Dit que les cautionnements de M. [Y] [L] et M. [V] [E] sont manifestement disproportionnés,

Dit que la SA Banque de Savoie ne peut se prévaloir des engagements de caution de M. [Y] [L] et de M. [V] [E] pour obtenir le paiement, par chacun d'entre eux, de la somme totale de 43.180 euros (24.090 + 19.090) avec intérêts au taux légal à compter du 7 février 2018,

Condamne la SA Banque de Savoie aux dépens d'appel,

Condamne la SA Banque de Savoie à verser à M. [Y] [L] et M. [V] [E] la somme de 1.500 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/07992
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;19.07992 ?
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