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09/03/2023 | FRANCE | N°22/05469

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 09 mars 2023, 22/05469


N° RG 22/05469 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OOKB















Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE au fond du 07 juillet 2022



RG : 2021j507











[G]



C/



SELARL MJ SYNERGIE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 09 Mars 2023







APPELANT :



M. [C] [G]

né le [Date

naissance 1] 1987 à [Localité 7] (13)

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représenté par Me Sylvain NIORD de la SELAS D.F.P & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 71





INTIMEE :



SELARL MJ SYNERGIE représentée par Maître [M] [R] agissant qualité de liquidateur judici...

N° RG 22/05469 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OOKB

Décision du Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE au fond du 07 juillet 2022

RG : 2021j507

[G]

C/

SELARL MJ SYNERGIE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 09 Mars 2023

APPELANT :

M. [C] [G]

né le [Date naissance 1] 1987 à [Localité 7] (13)

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représenté par Me Sylvain NIORD de la SELAS D.F.P & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 71

INTIMEE :

SELARL MJ SYNERGIE représentée par Maître [M] [R] agissant qualité de liquidateur judiciaire de Monsieur [L] exerçant en son nom personnel sous l'enseigne CRISTALU

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475, postulant et par Me Prisca WUIBOUT de la SELARL UNI9TE DE DROIT DES AFFAIRES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 27 Juillet 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 18 Janvier 2023

Date de mise à disposition : 09 Mars 2023

Audience présidée par Aurore JULLIEN, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [X] [L], entrepreneur individuel, exerçait une activité d'achat et vente de vérandas et abris de piscine.

Le 6 mars 2019, M. [L] a déposé au greffe du tribunal de commerce de Saint-Étienne une demande d'ouverture de liquidation judiciaire.

Par jugement du 13 mars 2019, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a prononcé l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire au bénéfice de M. [L], désigné la Selarl MJ Synergie, représentée par Me [R], ès-qualités de liquidateur judiciaire et fixé la date de cessation des paiements provisoirement au 1er mars 2019.

Le 18 avril 2019, un inventaire des biens a été réalisé par Me [W], commissaire-priseur judiciaire. M. [L] a fait état d'un véhicule immatriculé [Immatriculation 6]. Il a déclaré l'avoir cédé à M. [G] pour remboursement d'un prêt de 20.000 euros.

Par courrier recommandé du 24 avril 2019, la Selarl MJ Synergie, ès-qualités de liquidateur judiciaire de M. [L], a mis en demeure M. [L] de restituer certains véhicules non déclarés au commissaire-priseur lors de cet inventaire.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 7 juin 2019, la Selarl MJ Synergie a mis en demeure M. [L] de lui communiquer le certificat de cession, l'acte de prêt et tout justificatif inhérent à la cession du véhicule immatriculé [Immatriculation 6]. M. [L] a répondu ne pas être en possession du certificat de cession.

Par acte d'huissier du 9 mars 2020, la Selarl MJ Synergie, ès-qualités de liquidateur judiciaire de M. [L], a assigné M. [L] devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne afin de voir reporter la date de cessation des paiements.

Par acte d'huissier du 9 septembre 2020, la société MJ Synergie, a sollicité du tribunal de commerce de Saint-Étienne la condamnation de M. [L] à la faillite personnelle. Dans le cadre de cette procédure, M. [L] a remis au liquidateur judiciaire, une reconnaissance de dette au bénéfice de M. [G] d'un montant de 30.000 euros, un relevé de compte et une carte grise biffée cédée du véhicule immatriculé [Immatriculation 6] en date du 12 mars 2019.

Par jugement du 3 février 2021, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a prononcé le report de la date de cessation des paiements au 13 septembre 2017. M. [L] a interjeté appel.

Par acte d'huissier du 30 juin 2021, la société MJ Synergie, a assigné M. [G] devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne aux fins de le voir condamner à restituer la somme de 30.000 euros correspondant à la dation en paiement.

Par arrêt du 13 janvier 2022, la cour d'appel de Lyon a fixé la date de cessation des paiements au 31 août 2018.

Par jugement contradictoire du 7 juillet 2022, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

- jugé que la dation en paiement opérée le 12 mars 2019 entre M. [L] et M. [G] était nulle,

- condamné M. [G] à régler à la Selarl MJ Synergie, prise en la personne de Me [R] agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de M. [L], la somme de 30.000 euros outre intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement,

- condamné M. [G] à payer la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à la Selarl MJ Synergie prise en la personne de Me [R], agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de M. [L],

- dit que les dépens dont frais de greffe taxés et liquidés à 70,69 euros sont à la charge de M. [G],

- prononcé l'exécution provisoire du jugement,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes.

M. [G] a interjeté appel par acte du 27 juillet 2022.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 4 octobre 2022 fondées sur l'article L.632-1 du code de commerce et l'article 1342 du code civil, M. [G] demande à la cour de :

- déclarer recevable et bien fondé son appel,

- réformer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

Et statuant à nouveau,

- le déclarer tiers acquéreur de bonne foi,

- débouter la Selarl MJ Synergie prise en la personne de Me [R] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

À l'appui de sa position, M. [G] a fait valoir les éléments suivants :

- le caractère légal de la dation comme paiement d'une dette, en ce qu'elle permet d'éteindre l'obligation du débiteur et transmet au créance la propriété du bien donné en paiement

- le fait que la dation en paiement ne peut être attaquée, lorsqu'elle est intervenue dans la période suspecte, que par le biais d'une action paulienne s'il est estimé par le débiteur que le paiement est intervenu en fraude de ses droits, ce que prévoit l'article 1341-2 du code civil

- le fait que M. [G] est créancier de bonne foi, sans compter qu'il était créancier certain de M. [L], peu important que les sommes prêtées aient été virées sur le compte du fils de ce dernier, sans compter qu'il n'a été destinataire d'aucune information concernant la date de cessation des paiements ou l'ouverture d'une procédure collective

- la fixation de la date de cessation des paiements au 31 août 2018 étant rappelé que la dation est intervenue le 13 mars 2019.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 17 octobre 2022 fondées sur l'article L.632-1 du code de commerce, la Selarl MJ Synergie a demandé à la cour de :

- confirmer le jugement déféré,

En conséquence,

- déclarer sa demande recevable et bien fondée,

En conséquence,

- déclarer nulle la dation en paiement opérée en date du 12 mars 2019,

- condamner M. [G] à lui régler la somme de 30.000 euros outre intérêt au taux légal à compter de la décision à intervenir

- condamner M. [G] en cause d'appel à payer la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner M. [G] aux entiers dépens.

À l'appui de sa position, la société MJ Synergie a fait valoir les moyens suivants :

- la fixation de la date de cessation des paiements au 31 août 2018

- le fait que lors de l'inventaire du 18 avril 2019, M. [L] a fait état de la propriété de plusieurs véhicules dont un véhicule Maserati immatriculé [Immatriculation 6], qu'il déclarait avoir cédé à M. [G] en remboursement d'un prêt de 20.000 euros, sans pour autant remettre au liquidateur judiciaire le certificat de cession, l'acte de prêt ou tout justificatif relatif à la transaction

- la transmission uniquement dans le cadre d'une audience, le 16 mars 20é1 de documents à sa voir une reconnaissance de dette de 30.000 euros au profit de M. [G] et non 20.000 euros comme indiqué en début de procédure, un relevé de compte, et une carte grise biffée avec la mention « cédée le 12 mars 2019 à 14h00 » du véhicule Maserati.

L'intimée a rappelé les éléments suivants concernant la nullité de la vente :

- la nullité de plein-droit, en vertu de l'article L632-1 du Code de commerce des paiements de dettes échues, faits autrement qu'en espèce, effets de commerce, virements, bordereaux de cessions et tout autre mode de paiement communément admis dans le cadre des relations d'affaires lorsqu'ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements, la jurisprudence ayant déjà été amenée à se prononcer dans le sens de la nullité de la remise de matériel ou marchandise en paiements, ou de remise de véhicules

- le fait que le liquidateur judiciaire n'exerce pas une action paulienne, qui ne saurait lui être imposée pour faire annuler une dation en paiement, mais une action de nullité de plein-droit au visa de l'article susmentionné du code de commerce, les nullités facultatives relevant d'un autre texte

- le fait que le critère de bonne foi de M. [G] est indifférent dans la présente situation

- l'interdiction de la dation en paiement pendant la période suspecte, étant rappelé que ce mode de paiement n'est pas un mode habituel de paiement dans les relations d'affaires

- le fait que l'activité de M. [L] portait sur l'installation d'abris de piscine et l'absence de lien du prêt consenti par M. [G] avec cette situation, étant rappelé en outre que les sommes octroyées au titre du prêt ont été virées non sur le compte de la société mais sur celui du compte du fils de M. [L]

- le fait que M. [G] a obtenu le remboursement d'un prêt consenti au fils de M. [L] par le biais d'un véhicule appréhendé dans le cadre de la procédure collective

- l'intervention de la dation en paiement pendant la période suspecte, soit entre le 31 août 2018, date de la cessation des paiements, et la date du jugement d'ouverture de la procédure collective le 13 mars 2019

- le dépôt par M. [L] le 6 mars 2019 d'une déclaration de cessation des paiements et la réalisation de la dation le 13 mars 2019, soit le jour de l'audience à laquelle il était convoqué par le tribunal pour statuer sur sa demande.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 10 janvier 2023, les débats étant fixés au 18 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les demandes de M. [G]

L'article L641-14 alinéa 1 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, dispose que 'Les dispositions des chapitres IV, à l'exception de celles de l'article L. 624-17, et V du titre II du présent livre relatives à la détermination du patrimoine du débiteur et au règlement des créances résultant du contrat de travail ainsi que les dispositions du chapitre II du titre III du présent livre relatives aux nullités de certains actes s'appliquent à la procédure de liquidation judiciaire'.

L'article 632-1 du code de commerce dans sa rédaction applicable au litige dispose que 'I. Sont nuls, lorsqu'ils sont intervenus depuis la date de cessation des paiements, les actes suivants : Tout paiement pour dettes échues, fait autrement qu'en espèces, effets de commerce, virements, bordereaux de cession visés par l'article L. 313-23 du code monétaire et financier ou tout autre mode de paiement communément admis dans les relations d'affaires'.

En l'espèce, la dation en paiement date du 12 mars 2019 à 14h00, et porte selon l'appelant sur le règlement d'une dette de 30.000 euros par la remise d'un véhicule Maserati Quattro, propriété de M. [L].

Il est constant que M. [L] a fait l'objet d'une procédure collective pour laquelle il a déposé un état de cessation des paiements en date du 6 mars 2019, en indiquant le 1er mars 2019 comme la date de cessation des paiements, et que la date de cessation des paiements a été fixée judiciairement au 31 août 2018, le jugement d'ouverture de la procédure collective datant du 13 mars 2019.

L'action ouverte par l'article L632-1 du code de commerce est une action en nullité de plein droit de certains actes accomplis depuis la date de cessation des paiements, la dation en paiement ne relevant pas d'un mode de paiement communément admis dans les relations d'affaires.

Il est erroné pour M. [G] de prétendre que la société MJ Synergie ne pouvait agir que par le biais d'une action paulienne pour attaquer la dation en paiement alors même que le liquidateur judiciaire a exercé son action au visa du texte susvisé dans le respect des dispositions propres aux procédures collectives.

La nullité envisagée par le texte est une nullité de plein-droit et ne saurait s'effacer en raison de la bonne foi alléguée de la partie ayant reçu la dation en paiement, le texte fondant l'action ne prévoyant pas d'exceptions.

Eu égard à ces éléments, la nullité de la dation en paiement du 12 mars 2019 ne pouvait qu'être prononcée.

Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont prononcé la nullité de la dation en paiement et condamné subséquemment M. [G] à payer à la société MJ Synergie la somme de 30.000 euros outre intérêts au taux légal en raison de la nullité de la dation en paiement, faite pour l'équivalent de cette somme qui devait rester dans le patrimoine de la liquidation judiciaire de M. [L] et a été soustraite à la procédure.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement déféré dans son intégralité.

Sur les demandes accessoires

M. [G] succombant en la présente instance, il sera condamné à en supporter les entiers dépens.

L'équité commande d'accorder à la société MJ Synergie une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

En conséquence, M. [G] sera condamné à lui verser la somme de 2.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel

Confirme la décision déférée dans son intégralité,

Y ajoutant

Condamne M. [C] [G] à supporter les entiers dépens de la procédure d'appel,

Condamne M. [C] [G] à payer à la SELARL MJ Synergie représentée par Me [M] [R], ès qualité de liquidateur judiciaire de M. [X] [L] la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/05469
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;22.05469 ?
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