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20/02/2023 | FRANCE | N°23/01216

France | France, Cour d'appel de Lyon, Jurid. premier président, 20 février 2023, 23/01216


COUR D'APPEL DE LYON



JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT



ORDONNANCE DU 20 FÉVRIER 2023

statuant en matière de soins psychiatriques





N° RG 23/01216 - N° Portalis DBVX-V-B7H-OZFO



Appel contre une décision rendue le 09 février 2023 par le Juge des libertés et de la détention de [Localité 3].



APPELANTE :



Mme [Z] [B] [I]

née le 31 Octobre 1964 à [Localité 4] (CAMEROUN)



Actuellement hospitalisée au centre psychothérapique de [5] à [Localité 3]



c

omparante assistée de Maître Manon JAILLET, avocat au barreau de LYON, commis d'office





INTIME :



CENTRE PSYCHOTHERAPIQUE DE [5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]



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COUR D'APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 20 FÉVRIER 2023

statuant en matière de soins psychiatriques

N° RG 23/01216 - N° Portalis DBVX-V-B7H-OZFO

Appel contre une décision rendue le 09 février 2023 par le Juge des libertés et de la détention de [Localité 3].

APPELANTE :

Mme [Z] [B] [I]

née le 31 Octobre 1964 à [Localité 4] (CAMEROUN)

Actuellement hospitalisée au centre psychothérapique de [5] à [Localité 3]

comparante assistée de Maître Manon JAILLET, avocat au barreau de LYON, commis d'office

INTIME :

CENTRE PSYCHOTHERAPIQUE DE [5]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 1]

non comparant, régulièrement avisé, non représenté

Madame [K] [S], en qualité de tiers demandeur à la mesure a été régulièrement avisé. A l'audience, elle est non comparante, non représentée.   

Le dossier a été préalablement communiqué au Ministère Public qui a fait valoir ses observations écrites.

* * * * * * * * *

Nous, Stéphanie ROBIN, Conseiller à la cour d'appel de Lyon, désignée par ordonnance de madame la première présidente de la cour d'appel de Lyon du 02 janvier 2023 pour statuer à l'occasion des procédures ouvertes en application des articles L.3211-12 et suivants du code de la santé publique, statuant contradictoirement et en dernier ressort,

Assistée de Charlotte COMBAL, Greffier, pendant les débats tenus en audience publique,

Ordonnance prononcée le 20 Février 2023 par mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile,

Signée par Stéphanie ROBIN, Conseiller, et par Charlotte COMBAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * * * * * * * * * * * * * * * * * * *

Par décision du 31 janvier 2023, le directeur du Centre psychothérapique de [5] de [Localité 3] a prononcé l'admission en soins psychiatriques sans consentement à la demande d'un tiers, dans le cadre de la procédure d'urgence,conformément aux articles L 3211-2-2, L3212-1 et L 3212-3 et suivants du code de la santé publique, de : Mme [Z] [B] [I] née le 31 octobre 1964 à [Localité 4] (Cameroun).

Par décision du 3 février 2023, le directeur du centre hospitalier a fixé les modalités de prise en charge de Mme [Z] [B] [I], sous la forme d'une hospitalisation complète.

Par requête en date du 6 février 2023, le directeur du centre hospitalier a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de [Localité 3], afin qu'il soit statué sur la poursuite de l'hospitalisation complète au-delà de 12 jours.

Par ordonnance rendue le 9 février 2023, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de [Localité 3] a autorisé le maintien en hospitalisation complète de Mme [Z] [B] [I] sans son consentement, pour lui prodiguer des soins psychiatriques au-delà d'une durée de 12 jours.

Par courrier remis à l'audience de la cour d'appel de Lyon du 16 février 2023, audience au cours de laquelle Mme [Z] [B] [I] a contesté la décision d'admission du 31 janvier 2023, Mme [Z] [B] [I] a déclaré former appel de la décision du juge des libertés et de la détention du 9 février 2023, en faisant valoir que les motifs de ce recours étaient détaillés dans ses courriers précédents du 6 février 2023.

La procureure générale a conclu dans un avis du 16 février 2023 à l'irrecevabilité de l'appel, celui ci reproduisant le courrier d'appel formé à l'encontre de la décision d'admission du 31 janvier 2023, appel déclaré irrecevable par décision du 16 février 2023, puisqu'il portait non pas sur une décision du juge des libertés et de la détention, mais sur la décision d'admission du 31 janvier 2023. En effet, les motifs énoncés sont du 6 février donc antérieurement à la décision du 9 février 2023. Subsidiairement, le ministère public a conclu à la confirmation de la décision du juge des libertés et de la détention.

Le 17 février 2023, l'avocate de Mme [Z] [B] [I] a interjeté appel de la décision du 9 février 2023 de prolongation de l'hospitalisation sous contrainte au delà d'une durée de douze jours, faisant valoir d'une part qu'une nouvelle mesure d'hospitalisation sous contrainte avait été prise le 31 janvier 2023, et qu'elle était irrégulière pour avoir été prise juste après la décision de mainlevée de la mesure d'hospitalisation sous contrainte du 30 janvier 2023 par le juge des libertés et de la détention. Ensuite, l'avocate de Mme [Z] [B] [I] soutient que cette dernière souhaite rejoindre sa famille au Cameroun, ce qui est de nature à améliorer son état de santé.

Par un avis du 20 février 2022, le ministère public a complété son avis précédent, en indiquant que la procédure était régulière et rappelant les dispositions de l'article L 3212- 3 du code de la santé publique.

L'affaire a été évoquée lors de l'audience du 20 février 2023 à 13heures30.

À cette audience, Mme [Z] [B] [I] a comparu en personne, assistée de son avocat Maître Manon Jaillet.

Mme [Z] [B] [I] et son conseil ont indiqué avoir eu connaissance du certificat médical de situation établi par le docteur [M] [F] [O] le 17 février 2023, ainsi que des conclusions de la procureure générale.

Mme [Z] [B] [I] a contesté cet avis médical et réitéré sa demande de mainlevée de la mesure d'hospitalisation sans consentement, en indiquant qu'elle avait été hospitalisée sur de fausses bases, ne s'étant pas présentée dévêtue à la mairie mais avec des vêtements adaptés. Elle demande à pouvoir sortir de l'hôpital pour prendre contact avec ses interlocuteurs.

Maître Manon Jaillet, avocate de Mme [Z] [B] [I], a été entendue en ses explications.

Elle réitère les moyens soulevés dans son courrier d'appel, invoquant tout d'abord une irrégularité de la procédure, l'hôpital ayant repris une mesure d'admission pour contourner l'irrégularité de la précédente, estimant qu'il avait ainsi cherché à contourner ses propres erreurs.

Ensuite, elle estime que la mainlevée de la mesure doit être prononcée sur le fond, les différents certificats médicaux n'étant pas suffisamment précis sur la mise en danger de Mme [Z] [B] [I], la précarité sociale ne pouvant fonder la mesure.

MOTIFS

Sur la recevabilité de l'appel

L'appel formé par l'avocate de Mme [Z] [B] [I], parvenu au greffe de la cour dans les délais légaux est recevable.

Sur la régularité de la procédure

Aux termes de l'article L 3212-3 du code de la santé publique, en cas d'urgence, lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, le directeur d'un établissement mentionné à l'article L 3222-1 peut à titre exceptionnel, prononcer à la demande d'un tiers l'admission en soins psychiatriques d'une personne malade au vu d'un seul certificat émanant le cas échéant d'un médecin exerçant dans l'établissement.

En l'espèce, si la mesure d'hospitalisation sous contrainte prononcée à l'encontre de Mme [Z] [L] [I] a été levée le 30 janvier 2023, une nouvelle demande d'admission en soins psychiatriques à la demande d'un tiers, sa soeur, a été formée le lendemain, le 31 janvier 2023, compte tenu de la détérioration de sa situation.

Ainsi, le certificat médical du 31 janvier 2023 du docteur [X] relève que Mme [L] a été hospitalisée le 3 septembre 2022 pour décompensation psychotique. Malgré la fragilité de sa situation, elle a demandé à sortir et peu après sa sortie, ses proches se sont à nouveau inquiétés. Le médecin constate le 31 janvier 2023 que les idées délirantes de thématique paranoïaque sont toujours bien envahissantes et anxiogènes chez cette patiente, qui demande avec insistance sa sortie, mais est dans le déni de sa pathologie, étant précisé qu'elle avait interrompu toute prise en charge psychiatrique, ne la jugeant pas nécessaire.

Le retentissement cognitif de sa pathologie mentale avec des troubles du discernement et du jugement avérés ne permettent pas de recueillir son consentement aux soins. Ses troubles constituent une urgence, avec un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade et nécessitent des soins immédiats.

Dans ces conditions, rien n'interdit de reprendre une mesure d'hospitalisation sous contrainte, dans la mesure où les conditions légales sont réunies, ce qui est le cas en l'espèce.

La procédure est ainsi régulière.

Sur la demande de main-levée de la mesure de soins psychiatriques

Il appartient au juge judiciaire, selon les dispositions de l'article L 3211-3 du code de la santé publique, de s'assurer que les restrictions à l'exercice des libertés individuelles du patient sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis.

En l'espèce, Mme [Z] [B] [I] présente une pathologie psychotique et a fait l'objet d'une décompensation. C'est dans ce contexte qu'une nouvelle admission dans le cadre d'une hospitalisation sous contrainte, sous la forme d'une hospitalisation complète a été prise.

Le certificat médical des 24 heures du docteur [M] [F] [O] du 1er février 2023, mentionne une psychose chronique délirante avec des convictions inébranlables, dans un registre délirant avec des implications en milieu social et relationnel. Mme [Z] [B] [I] est convaincue de ne pas être malade et de ne pas être obligée de prendre un traitement. Le risque de mise en danger est décrit comme très important en cas de sortie prématurée, la précarité de la situation sociale de Mme [Z] [B] [I] étant parallèlement mise en exergue, cette dernière étant sans revenu, sans eau, sans électricité, bientôt expulsable avec des conflits par rapport à ses voisins vis à vis de son comportement.

Le certificat médical des 72 heures du docteur [D] souligne l'absence de critique de son état et une absence de stabilisation de ce dernier, la poursuite de la mesure sous contrainte sous la forme d'une hospitalisation complète étant nécessaire.

Le certificat médical d'avant audience devant le juge des libertés et de la détention du 7 février 2023 note certes la disparition de la production délirante et des troubles du comportement, mais une absence de stabilisation, nécessitant le maintien de l'hospitalisation complète et une surveillance constante, avec un risque de mise en danger en cas de sortie prématurée. La patiente demeure dans le déni de la pathologie et de la nécessité de soins.

Le certificat de situation du docteur [M] [F] [O] du 17 février 2023 note la persistance de la négation de la pathologie psychiatrique et la nécessité de soins, dans un contexte où les possibilités de vivre de manière autonome s'amenuisent, Mme [Z] [B] [I] refusant néanmoins toute démarche de mesure de protection. La mesure de soins sans consentement demeure justifiée pour éviter une nouvelle mise en danger en cas de sortie prématurée.

Le déni des troubles et la nécessité de soins dans le cadre d'une hospitalisation complète sont ainsi avérés et la mise en danger et le risque d'atteinte grave à l'intégrité physique sont en lien avec des éléments médicaux et sa pathologie, pour laquelle la nécessité de soins n'est pas admise. Dès lors, la mesure n'est pas fondée uniquement sur la précarité sociale, contrairement à ce qui est soutenu.

Il résulte de ces différentes considérations que le maintien de Mme [Z] [B] [I], dans le dispositif de soins psychiatriques sans consentement sous la forme d'une hospitalisation complète est justifié, cette mesure s'avérant en outre proportionnée à son état mental au sens de l'article L 3211-3 du code de la santé publique.

Il convient en conséquence de confirmer la décision du juge des libertés et de la détention.

PAR CES MOTIFS

Déclarons l'appel recevable ;

Confirmons l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

Laissons les dépens à la charge du trésor public.

Le greffier, Le conseiller délégué,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Jurid. premier président
Numéro d'arrêt : 23/01216
Date de la décision : 20/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-20;23.01216 ?
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