N° RG 19/08147 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MW5C
Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond du 10 septembre 2019
RG : 2018j00829
[Z]
C/
Sté.coopérative Banque Pop. BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
3ème chambre A
ARRET DU 09 Février 2023
APPELANT :
M. [C] [Z]
né le [Date naissance 1] 1972 à [Localité 7]
[Adresse 2]
[Localité 5]
Représenté par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547, postulant et par Me Anne-Marie REGNIER, avocat au barreau de LYON, toque : 842
INTIMEE :
BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par Me Florence CHARVOLIN de la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON, toque : 1086 substituée par Me MOLARD-BOUDIER, avocat au barreau de LYON
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Date de clôture de l'instruction : 05 Décembre 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Décembre 2022
Date de mise à disposition : 02 Février 2023
Audience tenue par Aurore JULLIEN, présidente, et Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,
assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Composition de la Cour lors du délibéré :
- Patricia GONZALEZ, présidente
- Aurore JULLIEN, conseillère
- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée
Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
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EXPOSÉ DU LITIGE
M. [C] [Z] (ci- après M. [Z]) était le gérant de la SARL JNG et de la SARL Life-Style.
Par acte sous seing privé du 31 juillet 2008, la Banque Populaire Loire et Lyonnais, aux droits de laquelle vient la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes (ci-après la Banque Populaire) a consenti un prêt à la société Life-Style pour un montant de 178.300 euros remboursable en 84 mensualités au taux de 5,10% l'an. Par acte sous seing privé du même jour, M. [Z] s'est porté caution solidaire de ce prêt à hauteur de 64.188 euros.
Par acte sous seing privé du 31 octobre 2012, la Banque Populaire a consenti un second prêt à la société Life-Style pour un montant de 30.000 euros remboursable en 60 mensualités au taux de 4,50% l'an. Par acte sous seing privé du même jour, M. [Z] s'est porté caution solidaire de ce prêt à hauteur de 36.000 euros.
Par acte sous seing privé du 7 novembre 2012, la Banque Populaire a consenti un prêt à la société JNG pour un montant de 140.000 euros remboursable en 84 mensualités au taux de 4,10% l'an. Par acte sous seing privé du même jour, M. [Z] s'est portée caution solidaire de ce prêt à hauteur de 84.000 euros.
Par jugement du 10 juillet 2014, le tribunal de commerce de Lyon a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre des sociétés Life-Style et JNG.
Par acte du 2 septembre 2014, la Banque Populaire a déclaré ses créances.
Par jugement du 24 juin 2015, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société JNG. La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du tribunal de commerce de Lyon du 10 décembre 2015.
Par courrier du 27 juillet 2015 dont il a été accusé réception le 30 juillet 2015, la Banque Populaire a mis en demeure M. [Z] de lui régler la somme de 62.840,59 euros au titre de son engagement de caution pour la société JNG
Par jugement du 1er juillet 2015, le tribunal de commerce de Lyon a prononcé la liquidation judiciaire de la société Life-Style. La procédure a été clôturée pour insuffisance d'actif par un jugement du tribunal de commerce de Lyon du 7 avril 2016.
Par courrier du 7 juillet 2015 dont il a été accusé réception le 9 juillet 2015, la Banque Populaire a mis en demeure M. [Z] de lui régler la somme de 32.371,81 euros au titre de son engagement de caution pour la société Life-Style.
Par échange de courriers en juin 2016, les parties ont trouvé un accord pour étaler le montant des remboursements.
Par courrier du 26 février 2018 dont il a été accusé réception le 28 février 2018, la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes, venant aux droits de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, a mis en demeure M. [Z] de lui régler la somme de 83.901,28 euros au titre de son engagement de caution pour la société JNG.
Par courrier en date du 28 février 2018 dont il a été accusé réception, la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes a mis en demeure M. [Z] de lui régler la somme de 38.645,27 euros au titre de son engagement de caution pour la société Life-Style.
Par acte d'huissier du 14 mai 2018, la Banque Populaire Auvergne Rhône a assigné M. [Z] devant le tribunal de commerce de Lyon.
Par jugement contradictoire du 10 septembre 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :
- dit que M. [Z] ne démontre pas le caractère disproportionné de la caution qu'il a signée en 2008,
- dit que M. [Z] ne démontre pas le caractère disproportionné des cautions qu'il a signées en 2012,
- dit que M. [Z] ne démontre pas la violation du devoir de mise en garde par la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes,
En conséquence,
- condamné M. [Z] à payer à la Banque Populaire Rhône-Alpes les sommes suivantes :
- 69.987,60 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,10% l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07043766, ès-qualités de caution solidaire,
- 10.675,12 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,10% l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07023530, ès-qualités de caution solidaire,
- 25.957,45 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,50% l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07043730, ès-qualités de caution solidaire,
- débouté la Banque Populaire Rhône-Alpes de sa demande de dommages-intérêts,
- ordonné l'échelonnement des paiements des sommes dues par M. [Z] à la Banque Populaire Rhône Alpes en 23 versements mensuels de 600 euros et le solde le 24ième mois, le premier versement ayant lieu dans les quinze jours de la signification du présent jugement, mais que, faute pour lui de payer à bonne date une seule des mensualités prévues, la totalité des sommes restant dues deviendra immédiatement exigible,
- prononcé l'exécution provisoire de la décision,
- ordonné la capitalisation des intérêts, dans les termes et conditions de l'article 1154 anciens du code civil,
- condamné M. [Z] à payer la somme de 750 euros à la Banque Populaire Rhône-Alpes en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné aux entiers dépens ainsi qu'aux frais relatifs à toutes mesures conservatoires,
M. [Z] a interjeté appel par acte du 26 novembre 2019.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 4 septembre 2020, M. [Z] a demandé à la cour, par voie d'infirmation du jugement, de :
- le recevoir en ses conclusions
Y faisant droit,
- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- Dit qu'il ne démontre pas le caractère disproportionné des cautions,
- Dit qu'il ne démontre pas la violation du devoir de mise en garde par la Banque Populaire Rhône-Alpes,
- le confirmer sur le reste,
Puis, statuant à nouveau :
A titre principal,
- constater qu'il est une caution non avertie,
- constater que la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes a manqué à ses obligations au titre du devoir de mise en garde,
- constater la disproportion entre ses engagements de caution et sa situation lors de la souscription et lors de son appel,
- constater que le comportement de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes est dolosif,
- constater que la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes n'a pas régulièrement déclaré sa créance,
- constater que la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes n'a pas respecté ses obligations au titre de l'information annuelle de la caution,
En conséquence,
- prononcer la nullité et l'inopposabilité de ses trois actes de cautionnement,
- condamner la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes au paiement de la somme de 50.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à son devoir de mise en garde,
- condamner la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
- confirmer l'échéancier consenti en première instance.
M. [Z] a fait valoir tout d'abord, qu'il ne pouvait être retenu comme étant une caution avertie en faisant état des éléments suivants :
- le fait que les juges du fond ont fait une erreur en retenant qu'il était averti en 2012 puisqu'il exerçait en tant que dirigeant d'entreprise depuis plusieurs années en contradiction avec la jurisprudence et sans preuve en outre qu'il disposait une formation concernant la gestion des entreprises
- le fait qu'il n'a été gérant que de deux sociétés, la société JNG et la société Life Style.
Il a fait état de ce que la Banque Populaire avait manqué à son devoir de mise en garde en excipant des moyens suivants :
- l'absence de motivation du Tribunal de Commerce sur ce point
- l'absence de preuve de ce qu'il avait une bonne compréhension de la nature des engagements souscrits.
Concernant la disproportion de ses engagements, M. [Z] a mis en avant les éléments suivants :
- l'absence de motivation sérieuse du jugement concernant l'engagement de 2008 et le fait qu'il est en contradiction avec la jurisprudence habituelle, et les mentions erronées concernant le montant de ses actifs
- le caractère erroné de la prise en compte au titre de ses actifs des parts (50%) de la société Life Style et de la moitié du fonds de commerce de cette dernière qui ne sont d'aucun apport concernant sa capacité financière en 2008, étant rappelé que la société avait été constituée en 2007 avec dès lors une faible valeur des parts sans compter que la valeur du fonds de commerce était grevée d'un emprunt de 75.000 euros consenti par la Banque Populaire
- les faibles revenus de la société Life Style au terme de son premier bilan
- concernant les cautionnements de 2012, le fait qu'il n'a pas été tenu compte de ce qu'il avait deux jeunes enfants à charge, de la nature de ses engagements financiers concernant ses crédits personnels, mais aussi la société, et le fait qu'il était déjà engagée en tant que caution
- le caractère important de son endettement et le fait que sa situation personnelle n'avait pas été analysée en octobre 2012 alors même que les prêts, hypothèques et cautionnements étaient indiqués sur les fiches de patrimoine
- le fait qu'en 2008, sa situation financière ne lui permettait de dégager qu'un reste à vivre de 800 euros en tenant compte des ressources de la famille mais aussi des charges fixes, et le fait que les éléments comptables et financiers de la société Life Style ne peuvent être pris en compte, l'engagement de caution représentant deux plus que son revenu annuel avec un endettement supérieur à 33%
- le fait qu'en 2012, ses deux engagements de caution ont mené à un engagement global sept fois supérieur à ses revenus annuels.
Concernant le comportement dolosif de la Banque Populaire, M. [Z] a mis en avant les éléments suivants :
- l'absence d'information concernant la nature de la garantie Oseo, consentie au titre des prêts du 31 juillet 2008 et du 7 novembre 2012,
- la nature indifférente des conditions générales qui sont comprises comme relevant d'un contrat d'adhésion.
Concernant le défaut de déclaration de créance régulière de l'intimée, M. [Z] a fait valoir les éléments suivants :
- le fait que la déclaration de créance a été signée par un salariée du service recouvrement sans qu'aucun pouvoir ne soit joint à la déclaration
- l'absence d'accusé de réception de cette déclaration
- l'absence de vérification par le mandataire liquidateur et le fait qu'elle n'a pas été portée au passif de la société
- l'expiration du délai pour réaliser la déclaration de créances.
Concernant l'absence d'information annuelle de la caution, M. [Z] a mis en avant les moyens suivants :
- l'absence de toute correspondance à son profit de la banque s'agissant des obligations
- le fait que les pièces versées au débat ont été établies pour les moyens de la cause
- le fait que la seule information de M. [Z] n'est intervenue que par l'assignation.
À titre subsidiaire, M. [Z] a sollicité le maintien des délais de paiement octroyés, étant indiqué qu'il a fait l'objet d'une mesure de licenciement le 1er septembre 2020, ayant entrepris de verser la somme de 600 euros par mois pour s'acquitter des condamnations mises à sa charge en première instance.
Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 7 mai 2020 fondées sur l'ancien article 1134 du code civil, les articles 1217, 1231-1, 1343-2, 2288 et suivants du code civil, l'ancien article L.341-4 du code de la consommation et l'article L.313-22 du code monétaire et financier, la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes a demandé à la cour de :
- débouter M. [Z] de l'intégralité de ses demandes,
- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :
- jugé que M. [Z] n'est pas une caution non avertie,
- jugé qu'elle n'était pas tenue d'un devoir de mise en garde,
- jugé que les engagements de caution souscrits par M. [Z] n'étaient pas disproportionnés,
- condamné M. [Z] à lui payer les sommes suivantes :
- 69.987,60 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,10% l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07043766, ès-qualités de caution solidaire,
- 10.675,12 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,10% l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07023530, ès-qualités de caution solidaire,
- 25.957,45 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,50 % l'an à compter du 30 mars 2018, date d'arrêté des comptes, au titre du solde exigible du prêt n°07043730, ès-qualités de caution solidaire,
- 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens et frais relatifs à toutes mesures conservatoires,
- ordonné la capitalisation des intérêts,
Y ajoutant,
- juger qu'elle n'a commis aucun dol,
- juger que sa déclaration de créances est régulière,
- juger qu'elle a rempli son obligation d'information annuelle de la caution,
- condamner M. [Z] aux entiers dépens de l'instance, dont ceux d'appel assortis du droit de recouvrement direct pour Me Charvolin conformément à l'article 699 du code de procédure civile ainsi qu'aux frais relatifs à toutes mesures conservatoires.
Concernant l'absence de devoir de mise en garde, la Banque Populaire a fait valoir les éléments suivants :
- le fait qu'il n'appartient pas au banquier dispensateur de crédit, sauf à porter atteinte au principe de non-immixion, de se faire juge de l'opportunité du crédit et d'orienter la décision de son client de quelque façon que ce soit,
- le fait que le devoir de mise en garde doit être retenu quand deux conditions cumulatives existent à savoir une caution non avertie et un risque d'endettement excessif
- le fait qu'en 2012, M. [Z] avait créé depuis 2007 la société Life Style, et bénéficiait de fait des connaissances suffisantes pour ne plus être considéré comme une caution non avertie, l'expérience en tant que gérant devant être retenue
- le fait qu'il n'existait aucun risque d'endettement excessif.
Concernant l'absence de disproportion, la Banque Populaire a mis en avant les moyens suivants, au visa de l'ancien article L 341-4 du code de la consommation :
- le fait qu'en 2008, la fiche de renseignement de caution indiquait que M. [Z] percevait un salaire de 2.000 euros par mois, étant rappelé que le souscripteur est tenu d'un devoir de loyauté lorsqu'il remplit la fiche d'information et que la banque n'a pas à engager des investigations
- le fait qu'en 2007, M. [Z] était détenteur d'un compte-courant d'associé d'un montant de 41.586,64 euros auprès de la société Life Style, ainsi que de 50% des parts sociales de celle-ci, pour un capital social de 10.000 euros, et qu'en outre le fonds de commerce de la société était évalué à la somme de 83.500 euros
- l'absence de preuve par M. [Z] de toute disproportion entre son patrimoine et l'engagement souscrit étant rappelé que le compte-courant d'associé doit être pris en compte de même que le capital social s'agissant d'une valeur nominale des parts, et que la lecture des bilans démontre que si la société Life Style était redevable de 69.000 euros au titre d'emprunts bancaires
- le fait que pour examiner la question de la proportion de l'engagement, il convient d'envisager tout le patrimoine détenu, et non les seuls revenus
- pour les engagements de caution de 2012, le fait que l'examen des fiches de caution et avis d'imposition de M. [Z] permet de déterminer que ce dernier percevait des revenus de 40.800 euros par an, état propriétaire d'un bien immobilier sis à [Localité 6] de 75.000 euros grevé d'un prêt de 120.000 euros (acquisition et travaux du bien), était propriétaire d'un fonds de commerce sis 20 cours de la liberté évalué à la somme de 410.000 euros qui n'était grevé d'aucune charge, détenait des parts sociales de la société JNG dont le capital social s'élevait à 141.000 euros, et bénéficiait d'un compte-courant d'associé auprès de la société Life Style pour 59.135 euros, et que la valeur résiduelle du fonds de commerce pour cette dernière, une fois déduit les emprunts, était fixé à 214.094 euros
- le caractère questionnant du prêt concernant l'acquisition du bien à [Localité 6] s'agissant d'une offre émise en février 2010, signée en décembre 2010, alors que l'acte de vente indique un achat au comptant.
Concernant le dol allégué par M. [Z] concernant l'absence d'explication sur la garantie Oseo, la Banque Populaire a fait valoir les éléments suivants :
- le fait que les conditions générales, signées et paraphées par M. [Z], indiquent que le cautionnement apporté s'ajoute aux garanties déjà données à la Banque Populaire, sans compter que la mention manuscrite indique que la caution renonce au bénéfice de discussion et de division
- l'article 2 des conditions générales « Conditions de la garantie » qui indique la garantie ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant et ne peut en aucun cas être invoquée par les tiers, notamment par le bénéficiaire et ses garants pour contester tout ou partie de leur dette.
S'agissant de la régularité de la déclaration de créances de la Banque Populaire, l'intimée a fait valoir les moyens suivants :
- le fait que ce moyen est développé pour la première fois en cause d'appel, se heurtant à l'autorité de chose jugée
- le fait que ni M. [Z], ni les sociétés JNG et Life Style n'ont contesté cette déclaration de créances après l'avis d'admission, ce qui empêche toute contestation ultérieure.
S'agissant de l'information annuelle de la caution, la Banque Populaire a indiqué les éléments suivants :
- les lettres d'information annuelle à la caution, versée au débat, qui démontrent le respect de son obligation
- le fait que si la cour estime que l'information n'est pas suffisante, elle ne pourra que juger que la déchéance du droit aux intérêts cessera à compter de la délivrance de l'assignation qui a informé M. [Z] des sommes dues en qualité de caution.
La procédure a été clôturée par ordonnance du 29 janvier 2021, les débats étant fixés au 7 décembre 2022.
Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de Procédure Civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la recevabilité des demandes au titre de la régularité de la déclaration de créance
L'article 564 du code de procédure civile dispose que à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait.
M. [Z] entend soulever l'irrégularité de la déclaration de créances de la Banque Populaire à la procédure de liquidation judiciaire des sociétés JNG et Life Style.
Il convient de rappeler que la recevabilité de la déclaration de créance s'apprécie dans le cadre du contentieux soulevé devant le juge-commissaire et qu'en l'état, M. [Z], pas plus que les sociétés concernées par les procédures de liquidation judiciaire n'ont formé de recours contre cette déclaration de créances.
De fait, la décision d'admission rendue par le juge-commissaire est devenue définitive et la cour ne saurait non plus se prononcer sur un contentieux soulevé pour la première fois à hauteur d'appel et en dehors de sa compétence.
La demande présentée par M. [Z] sera donc déclarée irrecevable.
Sur le dol allégué par M. [Z]
L'article 1134 du code civil dispose, dans sa version applicable au litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, et doivent être exécutées de bonne foi.
L'article 1116 du code civil dans sa version applicable au litige dispose que Le dol est une cause de nullité de la convention lorsque les man'uvres pratiquées par l'une des parties sont telles, qu'il est évident que, sans ces man'uvres, l'autre partie n'aurait pas contracté.Il ne se présume pas et doit être prouvé.
M. [Z] prétend ne pas avoir reçu les informations nécessaires concernant la garantie OSEO, et met en avant à ce titre le fait qu'il n'était pas une caution avertie.
Toutefois, il doit être relevé que M. [Z] a paraphé et signé les conditions générales concernant la garantie Oséo, notamment les articles 2 et 5, qui prévoient le caractère subsidiaire de l'intervention puisqu'elles stipulent que que « la garantie ne bénéficie qu'à l'établissement intervenant », qu' « elle ne peut être en aucun cas invoquée par les tiers, notamment par la bénéficiaire du concours et ses garants », et que ce n'est que lorsque « toutes les poursuites utiles ont été épuisées » qu' Oséo « règle la part finale de risque au prorata de sa part de risque ».
En l'état, M. [Z] échoue à démontrer que la Banque Populaire aurait usé de termes non adaptés pour lui présenter cette garantie, le menant à méconnaître l'engagement et la portée de la garantie Oséo. De même, il échoue à rapporter la preuve de man'uvres dolosives de la part de la banque quant aux conditions de mise en 'uvre de cette garantie.
Le dol devant être prouvé par la partie qui l'invoque, il ne peut qu'être constaté que M. [Z] échoue à rapporter cette preuve.
Dès lors, le moyen présenté devra être rejeté et la décision déférée confirmée.
Sur la disproportion
L'article L314-4 du code de la consommation dispose qu'un créancier professionnel ne peut se prévaloir d'un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l'engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.
Il appartient à la caution de rapporter la preuve de ce que l'engagement était manifestement disproportionné.
Les parts sociales dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée font partie du
patrimoine devant être pris en considération pour l'appréciation de ses capacités financières au jour de son engagement.
Il convient de rappeler que les parts sociales de même que les comptes courants d'associés, doivent être pris en considération pour l'appréciation des biens et revenus à la date de la souscripteur d'un engagement.
Concernant l'engagement de caution de 2008, M. [Z] a remis une fiche contenant les renseignements relatifs à son patrimoine, étant rappelé que le souscripteur est tenu d'un devoir de loyauté envers la banque sur les renseignements qu'il lui communique.
Cette fiche permet de relever un revenu mensuel de 2.000 euros, la propriété de 50% des parts de la société Life Style et de 50% du fonds de commerce de cette société, le bilan faisant apparaître une valorisation du fonds de commerce à hauteur de 85.000 euros, soit in fine un actif de 47.500 euros pour un passif déclaré de 11.500 euros par an pour un engagement envisagé de 64.188 euros.
Aucune disproportion manifeste n'est relevée dans cet engagement qui ne saurait être déclaré inopposable à l'appelant.
Concernant les engagements de caution d'octobre et novembre 2012, pour lesquels M. [Z] entend faire valoir qu'il se trouvait à cette époque dans une situation d'endettement supérieure à 33%, sans pour autant que cela puisse avoir une influence, le caractère proportionné ou disproportionné ne s'appréciant pas sur cette base mais sur la réalité du patrimoine et des engagements existants.
La fiche de renseignement versée au débat permet de noter que M. [Z] dit percevoir des revenus annuels pour 40.800 euros, être propriétaire d'un bien immobilier d'une valeur de 75.000 euros qui serait grevé d'un prêt de 120.000 euros, un questionnement existant au regard de l'indication d'un achat au comptant dans l'acte notarié, et être également propriétaire d'un fonds de commerce valorisé à la somme de 410.000 euros, non grevé, outre la détention de parts sociales de la société JNG dont le capital social est valorisé à 141.000 euros et un compte-courant d'associé pour 59.135 euros dans la société Life Style.
Il est relevé par ailleurs que M. [Z] ne se trouvait pas dans une situation de défaut de paiement concernant ses engagements antérieurs.
S'agissant du fonds de commerce, la lecture du bilan 2012 permet de noter qu'il était grevé pour des emprunts et dettes à hauteur de 195.906 euros soit une valeur restante de 214.094 euros.
Au regard de ces éléments, aucune disproportion manifeste dans l'engagement de caution n'est relevée, M. [Z] disposant d'un patrimoine disponible suffisant.
Dès lors, la décision déférée sera confirmée en ce qu'elle a rejeté les demandes de M. [Z] concernant le cautionnement.
Sur le devoir de mise en garde
La banque est tenue à un devoir de mise en garde à l'égard d'une caution non avertie lorsque, au jour de son engagement, celui-ci n'est pas adapté aux capacités financières de la caution ou s'il existe un risque de l'endettement né de l'octroi du prêt garanti, lequel résulte de l'inadaptation du prêt aux capacités financières de l'emprunteur.
M. [Z] a entendu faire valoir que la banque était redevable à son égard d'un devoir de mise en garde, puisqu'il était une caution non avertie à la souscription de ses engagements.
Toutefois, il convient de rappeler que le devoir de mise en garde n'est mis en 'uvre que lorsque la caution est non avertie et lorsque l'engagement présente un risque d'endettement excessif.
Les éléments suscités démontrent qu'en 2008, M. [Z] était effectivement un jeune dirigeant ne disposant pas d'une expérience acquise dans la gestion d'entreprise ou la souscription de concours financiers et ne pouvait être considéré comme une caution avertie.
Cependant, le devoir de mise en garde ne peut être imposé à la banque que si l'engagement souscrit était disproportionné aux capacités financières de l'emprunteur, soit la société Life-Style.
Les éléments financiers relatifs à cette société ne permettent pas de retenir que l'engagement souscrit en 2008 était disproportionné par rapport à la situation financière de la société ou bien la mettait en péril, étant rappelé que la société était encore active en 2012.
Dès lors, la Banque Populaire n'était pas redevable à l'égard de M. [Z] d'un devoir de mise en garde lors de la souscription de son engagement de caution en 2008.
Concernant l'engagement de caution de 2012, il est constant qu'à cette date, M. [Z] était gérant de deux sociétés, dont la société Life-Style pour laquelle il avait donné une garantie en 2008, et disposait ainsi d'une expérience dans le domaine de la gestion d'entreprise, pouvant comprendre la portée des engagements des sociétés, mais aussi, connaissait le mécanisme relatif à la constitution d'un engagement de caution.
Dès lors, M. [Z] doit être considéré comme une caution avertie lors de la souscription de son engagement de caution en 2012, et ne peut prétendre imposer bénéficier d'une obligation de conseil ou de mise en garde à son profit.
Les moyens présentés par M. [Z] ne peuvent ainsi prospérer. Dès lors, la décision déférée devra être confirmée sur ce point.
Sur l'information annuelle de la caution
L'article L312-22 du code monétaire et financier dispose que les établissements de crédit ou les sociétés de financement ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.
La réalisation de cette obligation légale ne peut en aucun cas être facturée à la personne qui bénéficie de l'information.
Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.
En l'espèce, M. [Z] met en avant l'absence d'information annuelle de la caution. Il revient uniquement à la banque de rapporter la preuve de l'envoi de l'information annuelle.
Si la banque verse au débat la courrier des copies adressés, elle ne fournit pas cependant la preuve d'un envoi desdits courriers d'information.
Dès lors, il convient de prononcer la déchéance du droit aux intérêts conventionnels jusqu'à la date de la délivrance de l'assignation qui a porté information de la caution, la décision étant partiellement infirmée à ce titre.
Sur les autres demandes
M. [Z] succombant en la présente instance, il sera condamné à en supporter les entiers dépens.
L'équité commande d'accorder à la Banque Populaire une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
M. [Z] sera condamné à lui verser la somme de 2.000 euros à ce titre.
PAR CES MOTIFS,
La Cour, statuant publiquement, dans les limites de l'appel
Déclare irrecevable la demande relative à la régularité de la déclaration de créance formée par M. [C] [Z],
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a fait droit à la demande relative à l'imputation des intérêts conventionnels sur les sommes à payer,
Statuant à nouveau sur ce point
Condamne M. [C] [Z] à payer à la SA Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes les sommes suivantes :
- 69.987,60 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,10% l'an à compter du 14 mai 2018, date de l'assignation devant le Tribunal de Commerce, au titre du solde exigible du prêt n°07043766, ès-qualités de caution solidaire,
- 10.675,12 euros outre intérêts au taux conventionnel de 5,10% l'an à compter du 14 mai 2018, date de l'assignation devant le Tribunal de Commerce, au titre du solde exigible du prêt n°07023530, ès-qualités de caution solidaire,
- 25.957,45 euros outre intérêts au taux conventionnel de 4,50% l'an à compter à compter du 14 mai 2018, date de l'assignation devant le Tribunal de Commerce, au titre du solde exigible du prêt n°07043730, ès-qualités de caution solidaire
Y ajoutant
Condamne M. [C] [Z] à supporter les entiers dépens de l'instance,
Condamne M. [C] [Z] à payer à la Société Coopérative Banque Populaire Rhône Alpes la somme de 2.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE