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02/02/2023 | FRANCE | N°19/02351

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 02 février 2023, 19/02351


N° RG 19/02351

N° Portalis DBVX-V-B7D-MJGW









Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond du 20 février 2019



RG : 2017j965





[N]

[O]



C/



SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE RHONE ALPES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 02 FÉVRIER 2023







APPELANTS :



M. [T] [J]

[Adresse 3]<

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[Localité 2]



Mme [X] [O] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Représentés par Me Maxime COULON, avocat au barreau de LYON, toque : 808





INTIMÉE :



SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE RHONE ALPES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]



Repré...

N° RG 19/02351

N° Portalis DBVX-V-B7D-MJGW

Décision du Tribunal de Commerce de LYON au fond du 20 février 2019

RG : 2017j965

[N]

[O]

C/

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE RHONE ALPES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 02 FÉVRIER 2023

APPELANTS :

M. [T] [J]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Mme [X] [O] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentés par Me Maxime COULON, avocat au barreau de LYON, toque : 808

INTIMÉE :

SA CAISSE D'EPARGNE ET DE PRÉVOYANCE DE RHONE ALPES

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée par Me Frédéric ALLEAUME de la SCP GRAFMEYER BAUDRIER ALLEAUME JOUSSEMET, avocat au barreau de LYON, toque : 673

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 19 Novembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 07 Décembre 2022

Date de mise à disposition : 02 Février 2023

Audience tenue par Aurore JULLIEN, présidente, et Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistées pendant les débats de Clémence RUILLAT, greffière.

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon offre du 7 avril 2010 acceptée le 20 avril 2010, Mme [X] [J] née [O] et M. [T] [J] ont souscrit auprès de la SA Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes (la banque) un emprunt immobilier d'un montant de 70.120 euros au taux de 4,05 % et au Taux Effectif Global (TEG) de 5,11 % l'an.

Estimant qu'il existait des erreurs dans la détermination du taux effectif global de leur contrat de prêt, les époux [J] se sont rapprochés de la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes afin de trouver une issue amiable à ce différend, par courrier recommandé en date du 10 janvier 2017 dont il a été accusé réception le 16 janvier 2017.

Par courrier en date du 6 mars 2017, la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes a donné une suite défavorable à leur demande.

Par acte du 23 mai 2017, M. [J] et Mme [J] née [O] ont fait délivrer assignation à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes devant le tribunal de commerce de Lyon.

Par jugement contradictoire du 20 février 2019, ce tribunal a :

dit les demandes de Mme [J] née [O] et M. [J] irrecevables comme étant prescrites,

débouté la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

débouté les parties de 1'ensemble de leurs autres demandes,

condamné solidairement Mme [J] née [O] et M. [J] à payer à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes la somme de 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné solidairement Mme [J] née [O] et M. [J] aux entiers dépens de l'instance.

M. [J] et Mme [O] épouse [J] ont interjeté appel par acte du 3 avril 2019.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 26 octobre 2020 M. et Mme [J] demandent à la cour, sur le fondement de l'article L.110-4 I du code de commerce, des articles 1304 et 2224 du code civil et des articles L.313-1 et suivants du code de la consommation, de :

réformer le jugement déféré en ce qu'il les a déboutés de leurs demandes et dit leur action prescrite,

Et statuant à nouveau :

A titre principal,

dire et juger que le TEG de leur contrat de prêt est erroné,

annuler la clause d'intérêts conventionnels stipulés dans le contrat de prêt,

A titre subsidiaire,

dire et juger que le TEG de leur contrat de prêt est erroné,

dire et juger que la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes sera déchue des intérêts conventionnels de leur prêt,

En tout état de cause,

enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes de faire application du taux d'intérêt légal en vigueur à la date d'acceptation de l'offre de prêt et ce, en lieu et place du taux d'intérêt conventionnel prévu dans leur prêt,

enjoindre à la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes d'avoir à communiquer un tableau d'amortissement basé sur le taux d'intérêt légal en vigueur à la date de souscription du contrat, sous astreinte de 500 euros à compter de l'arrêt à intervenir,

condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes à leur payer la somme de 12.467,55 euros arrêtée au 16 mars 2016, à parfaire ensuite de la communication du tableau d'amortissement rectifié,

débouter la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

condamner la société Caisse d'épargne et de prévoyance Rhône-Alpes à leur payer une somme de 3.000 euros au titre des frais irrépétibles de l'article 700 du code de procédure civile,

condamner la même aux entiers dépens de l'instance dont distraction au profit de Me Coulon, avocat sur son affirmation de droit.

Par conclusions notifiées par voie dématérialisée le 2 novembre 2020, la société Caisse d'épargne et de prévoyance de Rhône-Alpes demande à la cour sur le fondement des articles 9, 31 et 122 du code de procédure civile, de l'article L.110-4 du code de commerce, des articles 1304, 1315, 2224 et 1907 du code civil et des articles L.312-8, L.312-33, L.313-1 et suivants et R.313-1 et suivants du code de la consommation, de :

A titre principal,

confirmer le jugement déféré,

y ajoutant condamner solidairement M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,

condamner M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

déclarer M. [J] et Mme [O] prescrits en leurs actions,

les déclarer en conséquence irrecevables,

condamner solidairement M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,

condamner solidairement M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre subsidiaire,

débouter comme non fondés M. [J] et Mme [O] en leur action,

condamner solidairement M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 5.000 euros pour procédure abusive,

condamner solidairement M. [J] et Mme [O] à lui payer la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens,

A titre très subsidiaire,

dire et juger n'y avoir lieu à déchéance de ses droits aux intérêts,

à défaut, limiter la déchéance de ses droits aux intérêts à 1.00 euro,

débouter M. [J] et Mme [O] de l'ensemble de leurs autres prétentions à son encontre.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 29 janvier 2021, les débats étant fixés au 7 décembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la prescription de l'action en nullité de la stipulation prévoyant l'intérêt conventionnel

Au soutien de son moyen de prescription de l'action de M. et Mme [J], la banque fait valoir que le délai de prescription de 5 ans commence à courir à la date à laquelle l'emprunteur était en mesure de déceler lui-même à la lecture de l'acte l'erreur notamment lorsque les mentions de l'acte faisaient par elle-mêmes apparaître cette erreur, ce qui est le cas en l'espèce alors que :

s'agissant du grief tenant au fait que le TEG n'a pas intégré les frais liés à la période de préfinancement (intérêts intercalaires et assurance décès invalidité), l'offre de prêt du 10 avril 2010 stipule expressément que le coût total du crédit et le TEG ne tiennent pas compte des intérêts intercalaires, de la prime de raccordement d'assurance et le cas échéant des primes d'assurance de la phase de préfinancement,

s'agissant du grief selon lequel le calcul du TEG n'aurait pas intégré les frais de garantie, l'offre de prêt précise un montant de 463 euros de frais de garantie (évaluation) et à supposer que cette évaluation ait été erronée, il leur appartenait d'agir à compter du 11 mai 2011 date d'établissement de leur compte chez le notaire faisant apparaître un montant acquitté de frais de garantie distinct de celui figurant au contrat,

s'agissant du grief selon lequel le TEG serait erroné comme calculé sur 360 jours, l'offre de prêt stipule expressément que durant le préfinancement et durant la phase d'amortissement, les intérêts sont calculés sur 360 jours,

à supposer que ce TEG soit erroné du fait d'un calcul des intérêts conventionnels sur une année de 360 jours au lieu de 365 jours, il suffisait de lire l'offre pour constater que les intérêts n'étaient pas calculés sur 365 jours.

La banque considère donc qu'à la date de l'assignation délivrée contre elle le 23 mai 2017, le délai de prescription de 5 ans était expiré.

En réponse M et Mme [J] soutiennent qu'ils sont de simples consommateurs et ne disposaient d'aucune connaissance particulière en matière de financement et de mathématique financière pour recalculer le TEG de leur prêt étant précisé que les anomalies sont relatives à la non intégration des frais de garantie, des intérêts liés à la période de préfinancement dans le TEG et au calcul des intérêts sur une année lombarde et non sur une année civile.

Ils considèrent n'avoir pu prendre conscience du caractère erroné du TEG que le 16 mars 2016, date du rapport de M. [U], de sorte que le délai de prescription n'a commencé à courir qu'à compter de cette date.

L'action sanctionnant une irrégularité affectant le taux effectif global d'un emprunt est enfermée dans le délai de prescription de 5 ans de l'article 2224 du code civil, issu de la loi du 17 juin 2008 réformant la prescription.

L'action sanctionnant une irrégularité affectant le taux effectif global d'un emprunt se prescrit par cinq ans conformément à l'article L.110-4 du code de commerce dans sa version modifiée par la loi n°2008-561 du 17 juin 2008 entrée en vigueur le 19 juin 2008.

Le délai de prescription court à compter du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'erreur. Lorsque l'erreur peut être décelée par l'emprunteur à la lecture de l'acte, c'est à compter de la conclusion du contrat, que la prescription court.

En outre, dès lors que l'acte de prêt ne présentait aucune complexité particulière et que son examen révèle les erreurs ou irrégularités alléguées, cela suffit à faire ressortir que les emprunteurs sont en mesure de déceler, par eux-mêmes, à la simple lecture de l'acte, les vices affectant le taux effectif global.

En l'espèce, il convient d'observer que les anomalies affectant le calcul du TEG dont se prévalent les appelants, tenant au défaut d'intégration des intérêts liés à la période de préfinancement et des frais de garantie dans la détermination du taux, pouvaient être décelées par la seule lecture de l'offre de prêt du 7 avril 2010 acceptée le 20 avril 2010 laquelle stipule expressément que « le coût total du crédit et le taux effectif global ne tiennent pas compte des intérêts intercalaires, de la prime de raccordement d'assurance et le cas échéant des primes d'assurance de la phase de préfinancement » et mentionne expressément des frais de garantie d'un montant évalué à 437 euros.

De même, l'anomalie tenant au calcul des intérêts sur une année lombarde et non sur une année civile également dénoncée par M. et Mme [J], pouvait être décelée par la seule lecture de l'offre de prêt du 7 avril 2010 acceptée le 20 avril 2010 laquelle stipule expressément que « durant le préfinancement les intérêts sont calculés sur le montant des sommes débloquées, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours » et que « durant la phase d'amortissements, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d'intérêt indiqué ci-dessus sur la base d'une année bancaire de 360 jours, d'un semestre de 180 jours, d'un trimestre de 90 jours et d'un mois de 30 jours ».

Il se déduit de ces éléments que ces stipulations de l'offre de prêt, permettaient à M. et Mme [J], emprunteurs profanes, de comprendre, dès sa signature, que les intérêts liés à la période de préfinancement n'étaient pas pris en compte dans le taux effectif global, que des frais de garantie de 437 euros étaient intégrés dans le coût du TEG et que les intérêts étaient calculés sur une année de 360 jours, de sorte que la date de cette signature le 20 avril 2010, constituait le point de départ du délai de prescription de l'action tendant à la déchéance du droit aux intérêts et de l'action en nullité de la stipulation de l'intérêt conventionnel. Ainsi à la date de l'assignation délivrée contre la banque le 23 mai 2017, le délai de prescription des actions en déchéance et en nullité, qui a commencé à courir le 20 avril 2010, était expiré depuis le 20 avril 2017, de sorte que les premiers juges ont exactement retenus que ces actions sont prescrites. Il convient donc de confirmer le jugement déféré et de déclarer irrecevables les demandes formées par M. et Mme [J].

Sur la procédure abusive

L'exercice d'une action en justice constitue un droit et ne dégénère en abus pouvant donner naissance à des dommages et intérêts que dans le cas de malice, de mauvaise foi ou d'erreur grossière équipollente au dol.

En l'espèce, ni les circonstances du litige, ni les éléments de la procédure, ne permettent de caractériser à l'encontre de M. et Mme [J] une faute de nature à faire dégénérer en abus, le droit de se défendre en justice. Il n'est pas fait droit à la demande de dommages-intérêts formée à ce titre et le jugement déféré est ainsi confirmé.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Partie perdante, M. et Mme [J] doivent supporter les dépens de première instance et d'appel comme les frais irrépétibles qu'ils ont exposés et verser à la Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes une indemnité de procédure de 3.000 euros, à hauteur d'appel celle allouée en première instance étant confirmée.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré,

Condamne in solidum M. et Mme [J] à verser à la société Caisse d'Epargne et de Prévoyance Rhône-Alpes une indemnité de procédure de 3.000 euros, en cause d'appel,

Condamne in solidum M. et Mme [J] aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/02351
Date de la décision : 02/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-02;19.02351 ?
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