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19/01/2023 | FRANCE | N°20/03059

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 19 janvier 2023, 20/03059


N° RG 20/03059 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7X3









Décision du Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond du 28 mai 2020

( chambre 9 cab 09 F)





RG : 18/12060





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 19 Janvier 2023







APPELANTE :



S.A.S. KODIAK INVESTISSEMENTS

[Adresse 3]

[Localité 9]



Représentée par Me Eric POUDE

ROUX, avocat au barreau de LYON, toque : 520









INTIMES :



Mme [N] [S] épouse [R]

née le 18 Octobre 1930 à SUIN (71220)

[Adresse 2]

[Localité 8]



M. [Y] [R]

né le 27 Septembre 1954 à Trévoux (01600)

[Adresse 7]

[Localité 4]



...

N° RG 20/03059 - N° Portalis DBVX-V-B7E-M7X3

Décision du Tribunal Judiciaire de LYON

Au fond du 28 mai 2020

( chambre 9 cab 09 F)

RG : 18/12060

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 19 Janvier 2023

APPELANTE :

S.A.S. KODIAK INVESTISSEMENTS

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentée par Me Eric POUDEROUX, avocat au barreau de LYON, toque : 520

INTIMES :

Mme [N] [S] épouse [R]

née le 18 Octobre 1930 à SUIN (71220)

[Adresse 2]

[Localité 8]

M. [Y] [R]

né le 27 Septembre 1954 à Trévoux (01600)

[Adresse 7]

[Localité 4]

M. [U] [R]

né le 21 Février 1957 à Jallieu (38300)

[Adresse 5]

[Localité 6]

Représentés par la SCP SARDIN ET THELLYERE (ST AVOCATS), avocat au barreau de LYON, toque : 586

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 22 Juin 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 20 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 19 Janvier 2023

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Anne WYON, président

- Dominique DEFRASNE, conseiller

- Julien SEITZ, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Selon promesse unilatérale de vente conclue le 13 février 2018, Mme [S] veuve [R] et ses deux fils, [Y] et [U] [R], indivisaires, (ci-après les consorts [R]), ont promis à la société Kodiak investissements, de lui vendre un tènement immobilier cadastré section E n° [Cadastre 1], commune de [Localité 8], sur lequel est édifiée une maison d'habitation située [Adresse 2], moyennant le prix de 600'000 euros.

Des conditions suspensives d'usage étaient prévues à l'acte et notamment une condition suspensive d'obtention d'un prêt immobilier par l'acquéreur qui s'obligeait à déposer un dossier de demande d'un ou plusieurs prêts dans un délai de 15 jours calendaires et à en justifier au promettant à première demande par tous moyens de preuve écrits.

Il était encore prévu à l'acte que : « La condition suspensive sera réalisée en cas d'obtention d'un ou plusieurs accords définitifs de prêts au plus tard le 15 juin 2018 ; cette obtention devra être portée à la connaissance du promettant par le bénéficiaire au plus tard dans les 5 jours suivant l'expiration de ce délai ; à défaut de réception de cette lettre dans le délai fixé, le promettant aura la faculté de mettre le bénéficiaire en demeure de justifier de la réalisation ou de la défaillance de la condition sous huitaine, par lettre recommandée avec avis de réception au domicile ci-après élu ; passé ce délai de huit jours sans que le bénéficiaire ait apporté les justificatifs, la condition sera censée défaillie et les présentes seront donc caduques de plein droit, sans autre formalité et ainsi, le promettant retrouvera son entière liberté mais le bénéficiaire ne pourra recouvrer l'indemnité d'immobilisation qu'il aura, le cas échéant, versée qu'après justification qu'il a accompli les démarches nécessaires pour l'obtention du prêt, et que la condition n'est pas défaillie de son fait ; à défaut, l'indemnité d'immobilisation restera acquise au promettant. »

L'acte stipulait enfin que la promesse était consentie pour une durée expirant le 17 septembre 2018 à 18 heures.

Par mail du 6 juin 2018, le notaire du bénéficiaire de la promesse de vente a sollicité des promettants un report de la date limite d'obtention du financement contenue à l'acte, sans pour autant modifier la date de réitération par acte authentique, mais les consorts [R] ont refusé cette demande par mail en réponse du 7 juin suivant.

Par lettre recommandée avec avis de réception du 21 juin 2018, adressée au siège social de la société Kodiak investissements, les consorts [R] ont mis en demeure cette dernière d'avoir à leur justifier sous huitaine, de l'obtention d'un prêt.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2018, les consorts [R], invoquant l'absence de justification de la réalisation de la condition suspensive tenant à l'obtention d'un prêt par le bénéficiaire de la promesse, ont indiqué à la société Kodiak investissements que la promesse unilatérale de vente était caduque.

Le 6 août 2018, la société Kodiak investissements a fait publier la promesse de vente du 13 février 2018 au service de la publicité foncière de [Localité 9].

Saisi à l'initiative de la société Kodiak investissements d'une demande de vente forcée, par actes d'huissier de justice des 2 et 6 novembre 2018, le tribunal judiciaire de Lyon, par jugement du 28 mai 2020, a constaté la caducité de la promesse de vente et en conséquence rejeté toutes les demandes de la société Kodiak investissements, dit que l'indemnité d'occupation serait acquise aux consorts [R], condamné la société Kodiak investissements à payer à ces derniers la somme de 13'500 euros à titre de dommages et intérêts, celle de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens, rejetant les autres demandes des parties.

Le tribunal a essentiellement retenu que les consorts [R] n'ont pas été informés de l'obtention d'un accord définitif d'un ou plusieurs prêts au 20 juin 2018, soit dans les cinq jours à compter de la date butoir prévue au 15 juin 2018 ; qu'ils ont adressé à la société Kodiak investissements une lettre recommandée avec accusé de réception avec mise en demeure d'en justifier le 21 juin suivant, que le délai de réponse expirait en conséquence le vendredi 29 juin et que le seul échange démontré dans ce délai est le mail de l'étude notariale du « 23 juin » dont il n'est pas établi que la pièce jointe constitue la preuve de l'obtention par l'acquéreur d'un accord définitif de prêt.

La société Kodiak investissements a relevé appel par déclaration du 17 juin 2020.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées et notifiées le 2 février 2021, elle demande à la cour de :

- réformer le jugement susvisé en toutes ses dispositions,

- déclarer parfaite la vente du 13 février 2018 conclue entre les parties,

- dire que faute par les parties de signer l'acte de vente dans le délai de 15 jours de l'invitation officielle par lettre recommandée avec accusé de réception adressée à chacune des parties qui leur sera faite par le notaire rédacteur saisi par la société Kodiak investissements, l'arrêt à intervenir vaudra acte de vente du bien précité à son profit, selon les conditions exprimées à la promesse de vente du 13 février 2018, le prix étant alors remis au notaire pour être consigné à la Caisse des dépôts et consignations afin d'être remis à Madame [N] Veuve [R], Monsieur [Y] [R] et Monsieur [U] [R], à leur demande et une fois les formalités de mutation accomplies, ainsi que toutes formalités permettant à l'acquéreur une jouissance paisible du bien,

- dire que l'acte et l'arrêt seront publiés à la conservation des hypothèques,

- condamner solidairement Madame [N] veuve [R], Monsieur [Y] [R] et Monsieur [U] [R] à payer à la société Kodiak investissements les sommes de :

- 20'000 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation du préjudice financier né du retard pris dans la réitération de la promesse unilatérale de vente,

- 27'042,82 euros à titre de dommages-intérêts en indemnisation du préjudice en lien avec le remboursement qu'elle a dû opérer au profit de l'acquéreur final, qui a dû renoncer à son acquisition en raison du retard pris dans la réalisation de la vente, ainsi qu'en indemnisation de l'ensemble des dépenses engagées elle-même au titre de la mise en place du projet immobilier,

- débouter les consorts [R] de leurs demandes indemnitaires au titre du préjudice de jouissance et du préjudice moral,

- condamner solidairement Madame [N] Veuve [R], Monsieur [Y] [R] et Monsieur [U] [R] aux dépens avec distraction au profit de Me Pouderoux, avocat et à payer à la société Kodiak investissements les sommes de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais exposés devant le premier juge et 4 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Aux termes de leurs conclusions déposées et notifiées le 19 février 2021, les consorts [R] concluent à la confirmation du jugement en toutes ses dispositions et y ajoutant, demandent à la cour qu'il soit fait injonction à la société Kodiak investissements de donner toutes instructions à son notaire afin d'obtenir dans les 15 jours de la signification de l'arrêt, la mainlevée de la publication de la promesse de vente au service de la publicité foncière, sous astreinte de 500 euros par jour de retard et que la cour condamne la société Kodiak investissements à leur payer les sommes de :

- 20'706 euros arrêtés au 18 février 2021, sauf à parfaire jusqu'à la justification du caractère définitif de la décision à intervenir et de la radiation de la publication de la promesse de vente, au titre de la privation de jouissance de leur bien,

- 1 094 euros en remboursement des taxes foncières,

- 8 000 euros à Madame [N] veuve [R] et 6 000 euros chacun à Monsieur [Y] [R] et Monsieur [U] [R], à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

et ordonne en tant que de besoin la radiation de la publication de la promesse de vente au service de la publicité foncière aux frais avancés des intimés en disant que les frais afférents seront compris dans les dépens d'instance, la capitalisation des intérêts courant à compter de l'arrêt à intervenir, par année entière.

Les intimés sollicitent enfin la condamnation de la société Kodiak investissements aux dépens et au paiement d'une somme de 5 000 euros chacun en application de l'article 700 du code de procédure civile, en demandant à la cour de dire et juger qu'en cas d'exécution forcée de la décision à intervenir, les sommes relevant du droit proportionnel prévu par l'article A 444-32 du code de commerce seront mises à la charge de la société Kodiak investissements et s'ajouteront aux condamnations prononcées.

L'ordonnance de clôture de la procédure a été prononcée le 22 juin 2021.

Il convient de se référer aux conclusions des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS ET DECISION

I Sur l'absence de réalisation de la condition suspensive d'obtention d'un prêt :

Il résulte des articles 1103 et 1104 du code civil que les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits, et qu'ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

En application de l'article 1193, ils ne peuvent être modifiés ou révoqués que du consentement mutuel des parties, ou pour les causes que la loi autorise.

Selon l'article 1304-6 du même code, en cas de défaillance d'une condition suspensive, l'obligation est réputée n'avoir jamais existé ; cette défaillance entraîne la caducité de la vente, sans qu'y fasse obstacle l'apport tardif des justifications de la réalisation de la condition suspensive.

La condition suspensive d'obtention d'un prêt est réputée accomplie dès la présentation par un organisme de crédit d'une offre régulière de prêt, ferme et sans réserve, caractérisant l'obtention d'un prêt conforme aux stipulations de la promesse.

Il appartient ainsi au juge de rechercher si la société Kodiak investissements justifie avoir transmis dans le délai imparti, aux consorts [R], les éléments justifiant de l'obtention d'un accord définitif d'un ou plusieurs prêts au titre de l'opération immobilière qu'elle projetait à [Localité 8].

Le premier juge a très justement relevé que :

- il est établi qu'au mercredi 20 juin 2018, soit dans les 5 jours de la date butoir prévue pour justifier de l'obtention d'un prêt par l'acquéreur, la société Kodiak investissements n'avait pas porté à la connaissance des promettants qu'un accord définitif d'un ou plusieurs prêts lui avait été accordé ; il appartenait alors à cette dernière de justifier de cette condition dans les 8 jours de l'envoi par les consorts [R], de leur mise demeure par lettre recommandée avec accusé de réception adressée le 21 juin 2018.

- la société Kodiak investissements ne produit qu'un seul échange intervenu dans le délai de huitaine susvisé, consistant dans un mail adressé par son notaire au notaire des promettants, le 28 juin 2018 à 16 h 30, ayant pour objet la « vente des consorts [R]/Kodiak investissements », annonçant une pièce jointe intitulée « 1er page offre de prêt » et rédigé dans les termes suivants :

« Mon cher confrère,

Dans le cadre du dossier visé sous-rubrique, je vous confirme que mes clients ont obtenu leur financement ainsi qu'il résulte de l'attestation ci-jointe.

Je vous laisserai le soin d'avertir vos clients, qui avaient mis en demeure ma cliente d'avoir à justifier de l'obtention de son financement.

Je vous prie de me croire,

votre bien dévoué

P/O Me Sarrau »

Le premier juge a alors exactement relevé que dans une première communication de pièces la société Kodiak investissements avait omis la pièce jointe puis avait produit à ce titre, le 18 octobre 2019, un courrier de la banque daté du 19 juin 2018 qui ne répond pas à l'intitulé de la pièce jointe présentée comme la première page de l'offre de prêt ;

que par ailleurs dans un mail du 3 juillet suivant demandant confirmation de la réception du mail du 28 juin, le notaire de l'acquéreur a demandé au notaire des consorts [R], confirmation de la réception de l'information donnée aux promettants de l'obtention du financement dans les délais impartis en précisant avoir en sa possession un mail du 12 juin 2018 contenant accord de financement par l'établissement bancaire, sans mentionner l'existence du courrier du 19 juin précédent.

Force est de constater qu'aucun élément, pas plus en cause d'appel que devant le premier juge, ne permet de constater que la première page d'une offre de prêt émise par la banque, a été transmise aux consorts [R] par la société Kodiak investissements.

Le tribunal a alors justement analysé le mail du 12 juin 2018 en considérant qu'il ne pouvait valoir accord définitif de prêt dans la mesure où la chargée d'affaires de la banque indique d'une part « avoir un accord de financement sur votre dossier de Limonest selon les modalités détaillées dans la fiche concours jointe en PDF » et s'engage à faire « passer la lettre d'accord du financement dès que possible », un tel engagement ne pouvant suffire à constater l'accord de financement ferme et sans réserve, puisqu'une lettre doit suivre pour cela.

Le premier juge a encore justement analysé le courrier de la banque adressé le 19 juin 2018 à la société Kodiak investissements en considérant, notamment aux termes de son quatrième paragraphe, que la banque entendait, par ce document, formaliser une simple lettre d'intention, afin de « travailler de concert pour les besoins de l'opération» immobilière envisagée par cette dernière, indiquant expressément que ce courrier « n'est en aucun cas constitutif du contrat de crédit constatant l'octroi du financement, local contrat devra être négocié de bonne foi entre les parties. »

En cause d'appel, la société Kodiak investissements produit (pièce n° 30), un mail émanant du chargé d'affaires professionnels immobiliers auprès de la banque, adressée au dirigeant de la société le 11 septembre 2020 aux termes duquel il est indiqué :

« Bonjour,

Notre lettre d'accord datée du 19 juin 2018 pour votre dossier de [Localité 8] a été émise pour vous signifier notre intention de vous accompagner sur ce projet.

À ce stade de l'opération, l'autorisation administrative n'était pas encore définitive, condition sine qua non à notre intervention qui est la règle avec l'ensemble de nos clients.

Tous concours accordés aux professionnels de l'immobilier sont toujours réalisés après avoir réuni l'ensemble des conditions de mise en place. Ce qui était chose faite pour votre acquisition. Cordialement. »

De telles explications ne permettent nullement de s'assurer qu'un accord définitif d'un ou plusieurs prêts avait été donné à la société Kodiak investissements avant le 15 juin 2018, les rappels ainsi faits aux termes de cet échange permettant au contraire de constater que les parties n'en étaient qu'au stade de la négociation.

La société Kodiak investissements prétend par ailleurs en cause d'appel que les offres de prêt ont été transmises directement au notaire sans être signées au préalable dans la mesure où il avait été prévu un prêt notarié ; elle produit à ce titre un mail adressé le 27 juillet 2020 par la banque à la société Kodiak investissements, aux termes duquel il est indiqué que « pour faire suite à votre demande, ci-joint notre accord de financement du 12/06. Le contrat étant notarié, les offres de prêt avaient été transmises au notaire. Elles n'ont donc pas dû être signées. Restant à votre disposition. ...(...) ».

Il s'avère cependant qu'à aucun moment, le notaire des promettants ou celui du bénéficiaire n'a indiqué avoir reçu les éléments d'une offre de prêt lui permettant de les inclure dans l'acte de vente en réitération, les éléments du dossier même complétés en cause d'appel ne permettant nullement à la cour de constater qu'un accord définitif d'un ou plusieurs prêts avait été transmis aux promettants avant le 15 juin 2018 ni dans le délai de huitaine suivant la mise en demeure du 21 juin suivant.

Le premier juge a donc très justement considéré que la promesse de vente est ainsi devenue caduque de plein droit, sans autre formalité, le 29 juin 2018.

Il convient dès lors de faire droit à la demande des consorts [R] tendant à voir constater cette caducité et par conséquent faire injonction, sous astreinte, à la société Kodiak investissements, de donner mainlevée de la publication de cette promesse, qu'elle a fait publier le 6 août 2018 malgré la confirmation par les promettants, par lettre recommandée avec accusé de réception du 2 juillet 2018, de leur intention de se prévaloir de cette caducité et malgré l'absence de tout nouvel envoi par elle-même entre temps de nouvelles pièces justifiant de l'obtention définitive d'un prêt ; le jugement qui avait fait droit à cette demande aux termes de sa motivation a omis de prononcer cette condamnation au titre de son dispositif et le jugement sera donc complété en ce sens.

À défaut de mainlevée réalisée à l'initiative de la société Kodiak investissements, la radiation de la mesure de publicité sera ordonnée en tant que de besoin, aux frais de cette dernière.

Le jugement critiqué doit par ailleurs être confirmé en ce qu'il a rejeté toutes les demandes présentées par la société Kodiak investissements relativement à la vente, y compris celles présentées à titre indemnitaire.

II Sur le sort de l'indemnité d'immobilisation :

Le tribunal a très justement considéré, dans des termes pertinents qui répondent à l'argumentation des parties soulevée en cause d'appel et que la cour adopte, que l'indemnité d'immobilisation versée par la société Kodiak investissements sera acquise aux promettants dans la mesure où le bénéficiaire de la promesse de vente ne justifie pas avoir accompli les démarches nécessaires pour l'obtention des prêts, notamment en déposant une demande de prêt dans les 15 jours calendaires de la signature de la promesse.

III Sur les demandes indemnitaires présentées par les consorts [R] :

Le tribunal a considéré qu'aux termes de la promesse, les parties avaient estimé à 714 euros par mois le préjudice d'immobilisation pour le vendeur dans le cadre d'une promesse qui aurait dû être réitérée le 17 septembre 2018 et a alloué aux consorts [R], sur la base de cette évaluation, une somme de 13 500 euros en réparation de leur préjudice de privation de bien arrêté à la date du jugement.

Ils réclament en cause d'appel une somme de 26 706 euros arrêtée au 18 février 2021, date de dépôt de leurs dernières conclusions, somme à parfaire jusqu'à la date du caractère définitif de l'arrêt à intervenir et de la radiation effective de la publication au service de la publicité foncière.

L'indemnisation accordée à juste titre par le tribunal aux consorts [R], qui ont été empêchés de disposer de leur bien, de le donner à bail ou de rechercher un nouvel acquéreur en l'état de la publication de la promesse de vente le 6 août 2018 par la société Kodiak investissements, doit prendre en compte la privation supplémentaire subie par les intéressés et arrêtée au jour du présent arrêt et non à la date de la mainlevée de la mesure de publicité, compte tenu de l'astreinte ordonnée par la cour à ce titre.

Une juste somme de 37 128 euros à titre de dommages-intérêts doit en conséquence être allouée aux consorts [R], à la charge de la société Kodiak investissements.

Une somme de 1 094 euros engagée par les propriétaires au titre des taxes foncières réglées en 2018 et 2019 doit par ailleurs être ajoutée à l'indemnisation du préjudice né de la privation du bien.

Les consorts [R] n'établissent aucune faute ayant fait dégénérer en abus le droit d'agir en justice ou de former appel de la société Kodiak investissements, notamment au regard de l'âge avancé de Mme [R], de sorte qu'il y a lieu de les débouter de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive.

IV Sur les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile:

La société Kodiak investissements qui succombe doit être condamnée aux dépens qui ne comprendront pas les sommes visées par l'article A 444-32 du code de commerce qui sont à la charge exclusive du créancier.

L'équité commande l'octroi en cause d'appel, au bénéfice des consorts [R], ensemble, et à la charge de la société Kodiak investissements, qui succombant ne peut qu'être déboutée en sa demande de ce chef, d'une indemnité de procédure de 5 000 euros.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement rendu le 28 mai 2020 par le tribunal judiciaire de Lyon sauf en ce qu'il a condamné la société Kodiak investissements à payer à Mme [N] [S] épouse [R], M. [Y] [R] et M. [U] [R], ensemble, une somme de 13 500 euros à titre de dommages-intérêts,

Statuant à nouveau de ce chef et y ajoutant,

Condamne la société Kodiak investissements à payer à Mme [N] [S] épouse [R], M. [Y] [R] et M. [U] [R], ensemble, les sommes de :

- 37 128 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice né de la privation de jouissance de leur bien immobilier,

- 1 094 euros en remboursement des frais engagés au titre de l'acquittement des taxes foncières 2018 et 2019,

outre de ces sommes intérêts au taux légal à compter du jugement à concurrence des sommes allouées par le jugement et à compter du présent arrêt pour le surplus,

Ordonne la capitalisation des intérêts à compter du présent arrêt,

Fait injonction à la société Kodiak investissements de faire procéder, dans un délai de 15 jours à compter de la signification du présent arrêt, à la mainlevée de la mesure de publication de la promesse de vente au service de la publicité foncière, concernant le bien immobilier situé [Adresse 2], cadastré section E n° [Cadastre 1], sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de l'expiration du délai de 15 jours susvisé,

Ordonne en tant que de besoin la radiation de cette publication au service de la publicité foncière aux frais de la société Kodiak investissements,

Déboute Mme [N] [S] épouse [R], M. [Y] [R] et M. [U] [R] de leurs demandes en dommages-intérêts pour procédure abusive,

Déboute Mme [N] [S] épouse [R], M. [Y] [R] et M. [U] [R] de leur demande au titre de l'article A 444-32 du code de commerce,

Condamne la société Kodiak investissements aux dépens,

Déboute la société Kodiak investissements de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à Mme [N] [S] épouse [R], M. [Y] [R] et M. [U] [R], ensemble, une somme de 5 000 euros de ce chef.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 20/03059
Date de la décision : 19/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-19;20.03059 ?
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