N° RG 21/07593 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N4OP
Décision du
Juge aux affaires familiales de ROANNE
Au fond
du 16 septembre 2021
RG : 20/00248
ch n°
[K]
C/
[O]
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE LYON
2ème Chambre B
ARRET DU 12 Janvier 2023
APPELANT :
M. [E] [F] [K]
né le 18 Janvier 1955 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté par Me Sandrine BUISSON, avocat au barreau de ROANNE
INTIMEE :
Mme [Y] [O]
née le 28 Janvier 1958 à [Localité 9]
[Adresse 4]
[Localité 5]
Représentée par Me Julie BURDIN de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE
* * * * * *
Date de clôture de l'instruction : 25 Octobre 2022
Date des plaidoiries tenues en audience publique : 17 Novembre 2022
Date de mise à disposition : 12 Janvier 2023
Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :
- Anne-Claire ALMUNEAU, président
- Françoise BARRIER, conseiller
- Carole BATAILLARD, conseiller
assistés pendant les débats de Priscillia CANU, greffier
A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.
Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,
Signé par Anne-Claire ALMUNEAU, président, et par Priscillia CANU, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.
* * * *
EXPOSÉ DES FAITS
M. [E] [K] et Mme [Y] [O] ont vécu en concubinage pendant 40 ans et se sont séparés au mois d'octobre 2016.
Ils ont eu deux enfants en commun :
- [T] [K], née le 21 avril 1980 au [Localité 5]
- [M] [K], née le 30 août 1983 au [Localité 5]
Ils sont désormais grands-parents de quatre petits-enfants.
Par acte notarié du 28 mai 2002, M. [K] et Mme [O] ont acquis en indivision une maison d'habitation sise au [Localité 5] (Loire), [Adresse 2], cadastrée sous la section AD et le n°[Cadastre 1] au prix de 103 600 euros, dont 2 287 euros au titre des biens mobiliers compris dans l'immeuble.
Les frais liés à la vente se sont élevés à 4 954 euros.
Cette acquisition a été financée pour l'essentiel par un prêt souscrit auprès de la Banque populaire du Massif Central, aujourd'hui Banque populaire Auvergne Rhône-Alpes. Le remboursement des échéances était prélevé sur le compte personnel de M. [K].
M. [K] a également réglé seul des travaux à l'aide de fonds personnels et d'un prêt souscrit auprès de la même banque.
Le 30 octobre 2018, l'immeuble indivis a été vendu au prix de 172 000 euros, selon acte notarié de Me [H] [W], qui a procédé au remboursement par anticipation du capital restant dû sur le prêt immobilier pour la somme de 51 063,11 euros et au paiement des frais d'agence à hauteur de 9 000 euros, de sorte que le notaire a séquestré la somme de 111 376,89 euros.
Le 21 mai 2019, Me [W] a dressé un procès-verbal de difficultés en suite du désaccord des parties portant sur la répartition du solde du prix de la vente du bien immobilier indivis.
Par acte d'huissier de justice du 28 avril 2020, M. [E] [K] a fait assigner Mme [Y] [O] aux fins de :
- dire son assignation recevable,
- constater qu'aucun partage amiable n'a pu intervenir,
- dire n'y avoir lieu à recourir à la procédure de partage complète de l'article 1364 du code de procédure civile,
- dire que la masse à partager se compose :
au titre de l'actif, du solde du prix de vente du bien immobilier à hauteur de 111 376,89 euros,
au titre du passif, de la créance qu'il détient sur l'indivision à hauteur de 111 376,89 euros,
- dire que ses droits dans le cadre de la présente liquidation s'élèvent à la somme de 111 376,89 euros correspondant à sa créance sur l'indivision,
- dire que les droits de Mme [O] dans le cadre de la liquidation de l'indivision ayant existé entre eux sont nuls,
- le déclarer attributaire du solde du prix de vente du bien immobilier, actuellement séquestré dans la comptabilité de l'étude de Me [W],
- condamner Mme [O] à lui verser la somme de 1 813 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner Mme [O] aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions, M. [K] a formulé les mêmes demandes et a demandé en outre à titre subsidiaire de :
- constater que les opérations de partage sont complexes,
- désigner un notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage du régime matrimonial ayant existé entre eux, avec pour mission de dresser un projet liquidatif dans le délai d'un an,
- dire qu'en cas d'accord sur le projet liquidatif soumis au terme du délai imparti, le juge commis constatera la fin de la procédure,
- dire qu'en revanche, s'il persiste des points de désaccord, le notaire désigné transmettra un procès-verbal qui servira de base à la rédaction du juge chargé du contrôle des opérations de partage et qui sera soumis à la juridiction pour statuer sur les difficultés existantes,
- commettre un juge afin de surveiller les opérations de partage,
- surseoir à statuer sur l'ensemble des demandes formées par Mme [O].
Il a également demandé, en tout état de cause, la condamnation de Mme [O] à lui verser la somme de 2 773 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions, Mme [Y] [O] demandait au juge aux affaires familiales de :
- dire recevable l'assignation délivrée par M. [K],
- dire n'y avoir lieu à recourir à la procédure de partage complète de l'article 1364 du code de procédure civile,
- dire que la masse à partager se compose du boni de la vente à hauteur de 111 376,89 euros,
- dire que ses droits dans le cadre de la présente liquidation s'élèvent à 55 688,89 euros,
- dire que les droits de M. [K] dans le cadre de la présente liquidation s'élèvent à 55 688,89 euros,
- rejeter la demande de créance formulée par M. [K] au titre de la prise en charge des prêts,
- le débouter de toutes fins ou prétentions plus amples ou contraires,
À titre subsidiaire :
- constater que Mme [O] s'en rapporte sur la demande de recours à la procédure de partage complet et à la désignation d'un notaire, autre que Me [W],
- condamner en tout état de cause M. [K] à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
Par jugement du 16 septembre 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Roanne a :
- déclaré recevable l'assignation en partage délivrée par M. [K],
- dit n'y avoir lieu à une procédure de partage complète par application de l'article 1364 du code de procédure civile,
- dit que la masse active à partager s'élève à la somme de 111 376,89 euros au titre du solde du prix de vente du bien immobilier indivis séquestré chez Me [W], notaire à [Localité 8],
- dit que les droits de M. [K] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros,
- dit que les droits de Mme [O] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros,
- débouté M. [K] de sa demande tendant à se voir reconnaître créancier de l'indivision à hauteur de la somme de 111 376,89 euros dans la présente liquidation,
- débouté M. [K] d'une part et Mme [O] d'autre part de leurs demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [K] aux dépens de l'instance,
- débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires.
Par déclaration du 14 octobre 2021, M. [K] a interjeté appel du jugement en ce qu'il a :
- dit n'y avoir lieu à une procédure de partage complète par application de l'article 1364 du code de procédure civile ;
- dit que la masse active à partager s'élève à la somme de 111 376,89 euros au titre du solde du prix de vente du bien immobilier indivis séquestré chez Me [H] [W], notaire à [Localité 8] (Loire) ;
- dit que ses droits dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros ;
- dit que les droits de Mme [O] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros ;
- l'a débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître créancier de l'indivision à hauteur de la somme de 111 376,89 euros dans la présente liquidation ;
- les a déboutés de leurs demandes respectives au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
- l'a condamné aux dépens de l'instance ;
- débouté les parties de leurs autres demandes, plus amples ou contraires.
Au terme de conclusions notifiées le 23 décembre 2021, M. [E] [K] demande à la cour de :
À titre principal :
- infirmer le jugement frappé d'appel rendu le 16 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Roanne :
en ce qu'il a dit que la masse active à partager s'élève à la somme de 111 376,89 euros au titre du solde du prix de vente du bien immobilier indivis séquestré chez Me [H] [W], notaire à [Localité 8] (Loire) et qu'il a dit que les droits de M. [K] et de Mme [O] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros chacun ;
en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître créancier de l'indivision à hauteur de la somme de 111 376,89 euros dans la présente liquidation ;
en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamné aux dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau :
- dire n'y avoir lieu à recourir à la procédure de partage complète de l'article 1364 du code de procédure civile ;
- dire que la masse à partager se compose :
au titre de l'actif du solde du prix de vente du bien immobilier, à hauteur de 111 376,89 euros
au titre du passif de la créance détenue par lui sur l'indivision à hauteur de 111 376,89 euros,
- dire que ses droits dans le cadre de la présente liquidation s'élèvent à 111 376,89 euros, correspondant à la créance qu'il détient sur l'indivision,
- dire que les droits de Mme [O] dans le cadre de la liquidation de l'indivision ayant existé entre elle-même et M. [K] sont nuls,
- en conséquence, le déclarer attributaire du solde du prix de vente du bien immobilier, actuellement séquestré à la comptabilité de l'étude de Me [H] [W],
- débouter Mme [O] de toutes autres fins ou prétentions contraires comme injustifiées et non fondées ;
À titre subsidiaire :
- infirmer le jugement frappé d'appel rendu le 16 septembre 2021 par le tribunal judiciaire de Roanne :
en ce qu'il a dit n'y avoir lieu à une procédure de partage complète par application de l'article 1364 du code de procédure civile ;
en ce qu'il a dit que la masse active à partager s'élève à la somme de 111 376,89 euros au titre du solde du prix de vente du bien immobilier indivis séquestré chez Me [H] [W], notaire à [Localité 8] (Loire) et en ce qu'il a dit que les droits de M. [K] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros et les droits de Mme [Y] [O] dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros ;
en ce qu'il l'a débouté de sa demande tendant à se voir reconnaître créancier de l'indivision à hauteur de la somme de 111 376,89 euros dans la présente liquidation ;
en ce qu'il l'a débouté de sa demande au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et en ce qu'il l'a condamné aux dépens de l'instance ;
Statuant à nouveau :
- constater que les opérations de partage sont complexes,
- en conséquence, désigner un notaire pour procéder aux opérations de comptes, liquidation et partage du régime matrimonial ayant existé entre Mme [O] et M. [K], avec pour mission de dresser un projet d'état liquidatif dans le délai d'un an,
- dire qu'en cas d'accord sur le projet liquidatif soumis au terme du délai imparti au notaire désigné, le juge commis constatera la fin de la procédure,
- dire qu'en revanche, s'il persiste des points de désaccord, le notaire désigné transmettra un procès-verbal qui servira de base à la rédaction du juge chargé du contrôle des opérations de partage et qui sera soumis à la juridiction de céans pour statuer sur les difficultés existantes ;
- commettre un juge afin de surveiller les opérations de partage,
- surseoir à statuer sur l'ensemble des demandes formées par Mme [O] ;
En tout état de cause :
- condamner Mme [O] à lui verser la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [O] aux entiers dépens d'appel et de première instance.
Au terme de conclusions notifiées le 18 mars 2022, Mme [Y] [O] demande à la cour de :
- débouter M. [K] de son appel et de l'ensemble de ses demandes,
- confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- mettre en conséquence à son profit la somme de 2 000 euros à la charge de M. [K], sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en contrepartie des frais irrépétibles qu'elle a eu à supporter en première instance,
- condamner encore M. [K] aux entiers dépens de l'instance d'appel et mettre à sa charge, au profit de Mme [O] et en contrepartie des frais irrépétibles qu'elle a eu à supporter en cause d'appel, la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouter M. [K] de toutes fins ou prétentions contraires comme injustifiées et non fondées.
EXPOSE DES MOTIFS
Sur l'étendue de la saisine de la cour :
L'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que la cour n'est tenue de statuer que sur les demandes figurant dans le dispositif des conclusions des parties.
Ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir 'constater' ou 'donner acte'.
Par l'effet dévolutif de l'appel la cour connaît des faits survenus au cours de l'instance d'appel, postérieurement à la décision déférée, et statue au vu de tous les éléments justifiés même s'ils n'ont été portés à la connaissance de l'adversaire qu'au cours de l'instance d'appel.
Les parties sont d'accord sur le montant de l'actif de l'indivision de 111 376,89 euros, correspondant au prix de vente du bien immobilier après déduction du remboursement anticipé du prêt afférent, de la provision sur frais de mainlevée et de la commission de l'agence immobilière.
Sont soumis à la cour, en lecture de l'acte d'appel et des dernières conclusions des parties les points suivants :
- le partage de la masse active,
- la procédure de partage complète demandée à titre subsidiaire,
- l'article 700 et les dépens.
Sur le partage de la masse active :
M. [K] sollicite la réformation du jugement en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à le voir reconnaître créancier de l'indivision à hauteur de la somme de 111 376,89 euros et en ce que le jugement a dit que ses droits dans la présente liquidation s'élèvent à la somme de 55 688,44 euros, soit la moitié du boni de la vente de la maison indivise.
Pour sa part, Mme [O] sollicite la confirmation du jugement en ce qu'il a dit que les droits de chacune des parties dans la présente liquidation correspondent à la somme de 55 688,44 euros.
Il résulte de l'acte de vente du 28 mai 2002 que l'immeuble a été acquis en indivision par les parties, chacune étant réputée propriétaire pour moitié à défaut d'une autre répartition mentionnée dans l'acte, ce qui est corroboré par le procès-verbal de difficultés du 21 mai 2019. Cette acquisition a été réalisée par le biais d'un prêt immobilier n°018389 consenti à M. [K] et à Mme [O] par l'établissement bancaire d'alors, la Banque populaire du Massif Central, à hauteur de 101 000 euros selon contrat et tableau d'amortissement annexés à l'acte notarié.
Mme [O] soutient être propriétaire indivise pour moitié du bien immobilier cédé dont le boni constitue l'actif indivis et considère donc que c'est à juste titre qu'elle en sollicite le partage par moitié.
M. [K] expose bénéficier d'une créance évaluée à la somme de 111 376,89 euros qui constitue le passif indivis, de sorte que l'actif à partager serait nul. Il s'estime ainsi fondé à solliciter l'attribution de la somme séquestrée chez le notaire correspondant à sa créance sur l'indivision.
Mme [O] fait valoir que M. [K] n'a jamais justifié du montant de la créance qu'il réclame, qu'il a évaluée de manière unilatérale et forfaitaire à une somme correspondant au montant de l'actif. M.[K] indique au contraire que le montant de sa créance a été déterminé par les parties comme cela est mentionné dans le procès-verbal de difficultés du 21 mai 2019.
Mme [O] soutient en tout état de cause qu'elle n'a jamais accepté le principe de la créance de son ex-concubin et a toujours invoqué sa contribution aux charges de la vie courante, et elle justifie du contexte difficile de la séparation dans lequel elle a été amenée à limiter ses demandes à la somme de 30 000 euros devant le notaire. Ce même contexte est corroboré par le courriel du 24 juin 2019 produit par M. [K], dans lequel Mme [O] exprime notamment ne pas avoir envie de se battre ni en avoir la possibilité financière.
M. [K] estime que la créance qu'il revendique est fondée, notamment par les travaux qu'il a réalisés et financés, travaux dont la réalité est démontrée par la production du contrat de prêt d'un montant de 20 000 euros signé auprès de la Banque populaire du Massif Central le 11 juillet 2012, au terme duquel il est seul emprunteur, et par les nombreuses factures à son nom portant sur des matériaux et travaux.
M. [K] démontre également s'être acquitté seul des échéances du prêt immobilier commun, notamment au moyen d'une attestation datée du 5 mai 2017 émanant de la Banque populaire Auvergne Rhône- Alpes et de ses relevés de compte bancaire pour les années 2013 à 2015, ce remboursement étant selon lui à une dépense de conservation constitutive d'une créance à son profit à l'égard de l'indivision.
Mme [O] ne conteste pas le paiement exclusif des échéances du prêt immobilier commun par M. [K], mais souligne que les parties s'étaient entendues pour que M. [K] prenne à sa charge les frais liés au logement de la famille tandis qu'elle assumait les besoins alimentaires du foyer. Elle ajoute que lors de l'achat du bien en 2002, après 26 ans de vie commune, M. [K] avait en toute connaissance de cause accepté à la fois que le prêt immobilier soit établi à leur deux noms et que les échéances soient prélevées sur son compte personnel, sans remettre en cause cette situation de fait pendant 14 années, et que la durée de leur vie commune pendant 41 ans démontre l'accord ayant existé entre les concubins sur la répartition des charges.
Elle indique également que les règlements d'échéance ne peuvent donner lieu à créance dès lors qu'ils sont intervenus dans le cadre d'une société créée de fait conformément à l'article 1832 du code civil, dont elle estime tous les éléments réunis en l'espèce.
Aucune disposition légale ne réglant la contribution des concubins aux charges communes, chacun d'eux doit supporter les dépenses de la vie courante qu'il a exposées, sans qu'il y ait lieu à l'établissement d'un compte entre eux, en l'absence de volonté exprimée à cet égard.
Il convient de tenir compte de la différence de niveaux de revenus entre les parties, le relevé de carrière au 26 décembre 2019 de Mme [O] établissant un salaire mensuel de 1 488,25 euros par mois pour les années 2013 à 2015, période pendant laquelle les salaires de M. [K] correspondaient en moyenne à 2 600 euros par mois. Le jugement relevait déjà que Mme [O] n'a pas cotisé en 1984 ni en 1988 et qu'elle perçoit une pension mensuelle nette CARSAT de 641,14 euros depuis le 1er septembre 2020 selon notification de retraite du 23 avril 2020 également produite en appel.
M. [K] soutient au contraire que la différence de revenus entre les concubins et son paiement de la dette ne suffisent pas à établir un accord des parties pour que le remboursement des emprunts reste définitivement à sa charge, d'autant plus qu'il avait un intérêt certain à s'en acquitter afin d'éviter des frais de poursuite ou une saisie immobilière.
Il ajoute que la jurisprudence écartant la créance de l'indivisaire ayant payé seul l'emprunt ne s'applique pas en l'espèce, faute pour Mme [O] de démontrer avoir assumé seule l'essentiel des dépenses de la vie courante alors que la charge de la preuve lui incombe. Il estime avoir assumé une large part des dépenses du foyer en plus de la prise en charge du prêt immobilier et de dépenses bénéficiant exclusivement à Mme [O]. Pour celle-ci, il est constant en jurisprudence qu'il n'existe pas de créance entre les concubins même si un seul d'entre eux rembourse les échéances du prêt commun dès lors que l'autre assume l'essentiel des charges de la vie courante. Elle fait valoir à ce titre qu'elle réglait de nombreuses charges et dépenses du foyer malgré des revenus nettement inférieurs à ceux de M. [K].
Si M. [K] a bien réglé seul les échéances de prêt, les taxes foncières de 2015 à 2018 et les dépenses en matière d'énergies, et régulièrement contribué aux dépenses de la vie courante ainsi que le démontrent ses relevés bancaires, Mme [O] verse néanmoins aux débats ses propres relevés bancaires pour la période du 11 septembre 2013 au 7 septembre 2015, sur lesquels apparaissent certes des dépenses de soins de beauté, d'habillement et de restauration, mais aussi des dépenses très régulières d'alimentation, parfois plusieurs fois par semaine, auprès de diverses enseignes de la grande distribution : Super U, Lidl, Petit Casino, Carrefour Market, Leclerc, les boucheries Despi et Ducrot, Espace Fraicheur et Picard.
M. [K] soutient que les dépenses en grande distribution renvoient essentiellement à des achats personnels de carburant, mais il n'en rapporte cependant pas la preuve, notamment eu égard aux relevés produits par Mme [O] qui établissent expressément cette distinction, à l'instar de Super U et Super U Essence.
Figurent également sur les relevés bancaires de Mme [O] des dépenses d'habillement pour enfants auprès des enseignes Zannier et Petit Bateau à [Localité 7], de jouets auprès de diverses enseignes telles que Joué Club, Maxi Toys ou King Jouet, et des dépenses au titre d'articles divers pour nourrissons et jeunes enfants auprès de l'enseigne Aubert France, étant précisé que les parties ont plusieurs petits-enfants.
L'examen des dépenses de Mme [O] démontre ainsi qu'une grande partie des fonds était destinée au financement de dépenses courantes du ménage.
Il y a donc lieu de confirmer l'analyse du premier juge qui a considéré que le remboursement des échéances de l'emprunt contracté pour acquérir le bien immobilier correspondant au logement des concubins et de leurs deux enfants constitue une dépense de la vie courante au même titre que les taxes foncières et autres dépenses évoquées plus haut.
L'ensemble des éléments évoqués conduit en effet à considérer que le remboursement exclusif par M. [K] des échéances du prêt immobilier et du prêt travaux, le paiement des taxes foncières de 2015 à 2018, ainsi que les dépenses de réseau et d'énergie pendant la vie commune ont représenté sa contribution aux dépenses de la vie courante, tout comme Mme [O] a contribué aux charges du ménage par des achats almentaires et des dépenses pour les besoins de la vie quotidienne, une telle répartition des charges mettant en exergue l'accord tacite des concubins sur une longue période, de sorte qu'il n'y a pas lieu à établir un compte entre les parties.
Il convient ainsi de confirmer le jugement qui a d'abord rejeté la demande de M. [K] tendant à le reconnaître créancier de l'indivision d'une somme égale au montant de l'actif indivis de 111 376,89 euros avant de partager ledit actif par moitié entre les parties, soit la somme de 55 688,44 euros pour chacune d'entre elles, conformément à leurs droits respectifs dans le cadre de la liquidation de l'indivision.
Sur la procédure de partage complète demandée à titre subsidiaire :
M. [K] soutient à titre principal qu'il n'y a pas lieu de recourir à la procédure de partage complète prévue à l'article 1364 du code de procédure civile puisque les opérations de partage sont particulièrement simples, le procès-verbal de difficultés, le jugement et les parties limitant l'actif à partager à la somme de 111 376,89 euros.
Néanmoins, dans l'hypothèse où sa demande tendant à la fixation de sa créance à la somme convenue par les parties dans le cadre du procès-verbal de difficultés ne serait pas retenue, il sollicite à titre subsidiaire la mise en 'uvre d'une telle procédure afin que des comptes puissent être dressés par le notaire pour que sa créance soit déterminée au vu des dépenses effectivement engagées. Il rappelle à ce titre avoir réglé seul les taxes foncières et d'habitation du couple depuis l'acquisition de l'immeuble indivis, soit a minima 34 000 euros, les frais d'acquisition de l'immeuble pour 4 954 euros, le prêt contracté pour son acquisition soit 129 149,26 euros et le prêt travaux de 20 000 euros qui arrivait à son terme lors de la vente de l'immeuble.
M. [K] signale qu'il conviendrait alors de surseoir à statuer sur les demandes de Mme [O].
Pour sa part, Mme [O] indique que la cour peut recourir à la procédure de partage simple prévue à l'article 1361 du code de procédure civile, le partage ne portant que sur le boni de la vente du bien immobilier. Elle fait ainsi valoir que les contestations soulevées par les parties quant à l'existence éventuelle d'une créance ne justifient pas qu'un notaire soit désigné, et qu'il appartient à M. [K] de démontrer dès à présent des dépenses qui doivent être prises en compte en l'état de la créance qu'il revendique, puisque la procédure de l'article 1364 du code de procédure civile n'a pas vocation à suppléer la carence probatoire des parties. Elle ajoute enfin que la procédure de partage complète ne trouve pas à s'appliquer compte tenu de la position de M. [K] qui persiste à solliciter la reconnaissance d'une créance déterminée de manière forfaitaire.
Au regard de l'ensemble des éléments exposés et de la simplicité du partage soumis à la cour, l'actif indivis se composant exclusivement d'une somme d'argent, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande subsidiaire formée par M. [K] en vue de mettre en 'uvre la procédure de partage complète prévue aux articles 1364 et suivants du code de procédure civile.
Sur l'article 700 du code de procédure civile et les dépens :
M. [K] indique que Mme [O] sollicitait une somme de forfaitaire de 30 000 euros dans le cadre du partage alors même qu'elle avait accepté devant le notaire de fixer forfaitairement la créance qu'il détient sur l'indivision à la somme de 111 376,89 euros. Il verse aux débats un courriel du 24 juin 2019 dans lequel Mme [O] lui a indiqué renoncer aux prétentions qu'elle avait pu faire valoir dans le cadre du procès-verbal de difficultés, tout en indiquant qu'elle n'a ensuite plus répondu aux sollicitations en vue de la régularisation du partage, à l'instar du courrier recommandé envoyé le 20 janvier 2020 par son avocat Me [R], resté sans réponse.
Il fait ainsi valoir qu'il serait inéquitable de laisser à sa charge les frais qu'il expose dans le cadre d'une procédure qui résulte uniquement de l'inertie de Mme [O], dont il demande la condamnation à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'appel.
Pour sa part, Mme [O] expose qu'elle a été contrainte de refuser le projet d'état liquidatif établi par Me [W] sur la base des éléments transmis par M. [K], ce projet ne respectant pas ses droits, et qu'elle a tenté, faute des moyens financiers pour supporter le coût d'une procédure judiciaire, de trouver un accord que M. [K] a formellement refusé.
Elle estime ainsi être fondée à solliciter les sommes de 2 000 euros en première instance et de 3 000 euros en appel au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de condamner M. [K] aux entiers dépens de l'instance d'appel.
L'équité ne commande cependant pas de faire droit aux demandes d'indemnité qui ont été présentées en appel sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Confirme le jugement rendu le 16 septembre 2021 par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Roanne en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Dit n'y avoir lieu à la mise en 'uvre de la procédure de partage résultant des articles 1364 et suivants du code de procédure civile demandée à titre subsidiaire par M. [K],
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de partage.
Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
Signé par Anne Claire ALMUNEAU, président, et par Priscillia CANU, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier Le Président