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12/01/2023 | FRANCE | N°19/02266

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 12 janvier 2023, 19/02266


N° RG 19/02266 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MI7S















Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 05 mars 2019



RG : 17/00014













RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 12 Janvier 2023







APPELANTE :



SCI BARBARA

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par la S

ELARL DREZET - PELET, avocat au barreau de LYON, toque : 485









INTIMEE :



SARL LE PETIT BRIVADOIS

[Adresse 3]

[Localité 5]



Représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1106

Et ayant pour avocat plaidant Me Christelle...

N° RG 19/02266 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MI7S

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 05 mars 2019

RG : 17/00014

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 12 Janvier 2023

APPELANTE :

SCI BARBARA

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par la SELARL DREZET - PELET, avocat au barreau de LYON, toque : 485

INTIMEE :

SARL LE PETIT BRIVADOIS

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentée par Me Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON, avocat postulant, toque : 1106

Et ayant pour avocat plaidant Me Christelle BEULAIGNE, avocat au barreau de LYON, toque : 796

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 16 Juin 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Décembre 2021

Date de mise à disposition : 17 Février 2022 prorogée au 5 mai 2022, puis 30 juin 2022, 29 septembre 2022, 15 décembre 2022, 16 mars 2023 avancée au 12 janvier 2023 les avocats dûment avisés conformément à l'article 450 dernier alinéa du code de procédure civile

Audience présidée par Anne WYON, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Séverine POLANO, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Selon acte notarié des 25 et 27 janvier 2006, la société Barbara a donné à bail commercial à la société Le petit Brivadois un local commercial situé [Adresse 3] à [Localité 7], composé de 2 lots réunis par une ouverture de 1,50 mètre, affectés pour le premier à usage de magasin de boulangerie d'une superficie d'environ 80 m² et pour le second à usage d'un fournil/laboratoire d'une superficie d'environ 152 m².

Le bail a été conclu pour une durée de 9 ans à compter du 1er janvier 2006 pour un loyer annuel de 21 680, 44 euros hors taxes et hors charges et s'est renouvelé par tacite reconduction le 1er janvier 2015 en l'absence de demande de renouvellement et de délivrance de congé.

Par acte d'huissier de justice du 5 septembre 2016, le preneur a fait signifier sa demande de renouvellement, sous réserve de non renouvellement de certaines clauses.

Par acte d'huissier de justice du 25 novembre suivant le bailleur a indiqué ne pas s'opposer au renouvellement du bail à effet du 1er octobre 2016, tout en proposant une modification du montant du loyer.

Par acte d'huissier de justice du 30 mars 2017, la société Barbara a fait assigner devant le juge des loyers commerciaux, la société Le petit Brivadois aux fins de voir fixer à la somme de 33 000 euros HT par an le loyer du bail renouvelé.

Par jugement du 30 janvier 2018, le juge des loyers du tribunal de grande instance de Lyon a ordonné une expertise confiée à M. [Y] à l'effet notamment de donner son avis sur la valeur locative.

L'expert a déposé son rapport le 25 juin 2018.

Dans son mémoire, la société Barbara a demandé la fixation du loyer renouvelé à hauteur de 34 528 euros HT et la société Le petit Brivadois a demandé une fixation du loyer à 12 414 euros HT.

Par jugement du 5 mars 2019, le juge des loyers commerciaux a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire :

- fixé à la somme de 14 237 euros HT à compter du 1er octobre 2016, le montant du loyer du bail renouvelé, toute autre clause et condition du bail non contraires à la loi Pinel demeurant inchangées,

- dit que les compléments de loyer porteront intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2017 avec capitalisation annuelle dans les conditions de l'article 1154 du code civil à compter de la même date,

- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la société Barbara aux dépens.

Selon déclaration du 29 mars 2019, la société Barbara a interjeté appel de cette décision.

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 16 mars 2020 par la société Barbara qui conclut à la réformation du jugement susvisé et demande à la cour la fixation du loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2016 à la somme de 32 800 euros par an hors taxe et hors charge, avec capitalisation des intérêts échus et à échoir, ou à titre subsidiaire à la somme de 27 880 euros par an hors taxe et hors charges, réclamant en tout état de cause la condamnation de la société Le petit brivadois aux dépens et au paiement d'une somme de 5 000 au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions déposées et notifiées le 14 avril 2020 par la société Le petit Brivadois qui conclut à la réformation du jugement critiqué en ce qu'il a fixé le montant du loyer renouvelé à la somme de 14 237 euros HT à compter du 1er octobre 2016, à sa confirmation pour le surplus et demande à la cour de fixer le montant du loyer renouvelé à la somme de 12 414 euros hors charges et hors taxes à titre principal ou 14 237 euros hors taxes et hors charges à titre subsidiaire, sollicitant la condamnation de la société Barbara à lui rembourser le trop versé au titre des loyers depuis le 1er octobre 2016, avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance, la capitalisation des intérêts échus et à échoir et l'octroi d'une somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile avec condamnation de l'appelante aux entiers dépens,

L'ordonnance de clôture a été rendue le 16 juin 2020.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

I Sur le périmètre de l'appel :

La société Le petit Brivadois soutient que la SCI Barbara a limité son appel au montant de la valeur locative à 145 euros/m² et à la fixation du loyer à la somme de 14 237 euros HT, à l'exclusion de toute critique faite sur la surface pondérée dans la mesure où l'énoncé des chefs de jugements critiqués aux termes de la déclaration d'appel était ainsi présenté : « Il est relevé appel en ce qu'il a fixé la valeur locative à 145 euros/m², déduit le montant de la taxe foncière supportée par le locataire à hauteur de 3 586 euros du montant annuel, fixé le loyer à la somme de 14 237 euros HT, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la SCI Barbara aux dépens de l'instance ».

La SCI Barbara conteste cette limitation de la contestation en indiquant que la surface pondérée retenue ne figure pas au dispositif du jugement et elle considère que son appel porte sur le prix retenu dans sa globalité par le premier juge.

Sur ce :

Seuls les chefs de jugement figurant au dispositif de la décision frappée d'appel sont susceptibles d'être critiqués et dès lors la cour considère que seules les dispositions du jugement ayant «  fixé à la somme de 14 237 euros HT à compter du 1er octobre 2016, le montant du loyer du bail renouvelé, dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné la SCI Barbara aux dépens de l'instance» ont été critiqués par l'appelante.

En critiquant la fixation du loyer du bail renouvelé à la somme globale de 14 237 euros HT, celle-ci a nécessairement remis en cause devant la cour l'ensemble des éléments devant être pris en compte dans la fixation du loyer, dont la détermination préalable de la surface pondérée.

II Sur la fixation du prix du bail renouvelé :

Le premier juge a très justement rappelé que les parties s'étant accordées sur la fixation du bail renouvelé à la valeur locative, le juge des loyers commerciaux a ordonné une expertise avec mission donnée à l'expert de fournir tous éléments permettant de fixer cette valeur locative au 1er octobre 2016.

L'expert judiciaire [Y], à qui a été remis un avis sur la valeur locative du local au 1er octobre 2016, établi le 26 septembre 2017 à la demande de la société Le petit Brivadois par M. [L], expert près la cour d'appel de Lyon, a visité l'ensemble des locaux donnés à bail et procédé à une vérification des surfaces.

Il a rappelé les différentes caractéristiques du bail, la situation géographique des locaux qu'il a décrits pièce par pièce.

À partir des mesures réalisées sur place, il a fixé à 230,54 m² la surface brute utile, distribuée selon les différentes zones du local et retenu une surface pondérée de 122,92 m², (conforme à celle retenue par l'avis de l'expert [L]), en indiquant se référer aux préconisations de la charte de l'expertise immobilière dans son édition de mars 2017.

Seule la SCI Barbara a contesté la surface pondérée ainsi retenue devant le premier juge et réitère sa contestation en cause d'appel.

La cour constate que l'expert [Y] a pris en compte l'activité du local et l'activité exercée et qu'il a fixé à 1,10 le coefficient de pondération de façon à tenir compte du fait que la surface de vente profite d'une très bonne visibilité d'ensemble.

S'agissant des zones techniques, il a retenu, à juste titre, la valeur du coefficient de pondération allant de 0,10 à 0,40 pour retenir précisément cette dernière valeur, le laboratoire fournil, qui ne peut être comparé à une surface de vente, étant pleinement adapté à son usage et les activités de boulangerie, de sandwicherie et de pâtisserie ayant chacune trouvé leur propre espace.

Ni le simple mail adressé le 25 juillet 2018 à la bailleresse par Monsieur [R], inscrit sur la liste des experts judiciaires, qui n'indique pas avoir visité les lieux et s'est contenté d'analyser le rapport d'expertise déposé par l'expert judiciaire, ni de la même manière, le mail du cabinet [M] [V], conseil, ne sont de nature à remettre en cause les conclusions du rapport d'expertise déposé par Monsieur [Y] à qui ces éléments de discussion n'ont d'ailleurs jamais été communiqués ni partant, vérifiés.

Il importe peu par ailleurs que le local puisse être adapté pour accueillir la clientèle sur une surface plus grande puisque les travaux réalisés par le preneur, dont aucun élément ne permet de constater qu'ils auraient modifié la « structure du bâtiment » ou la façade ou les vitrines, en contravention avec les dispositions du bail, ont été autorisés expressément le 3 juillet 2018 par la bailleresse qui ne conteste pas avoir visité ensuite les lieux sans élever la moindre contestation avant la présente instance d'appel, de sorte qu'il n'y a pas lieu de tenir compte d'une surface plus grande.

La surface pondérée de 122,92 m² telle que fixée par l'expert et retenue par le premier juge sera en conséquence également retenue par la cour.

Aux termes de l'article L 145-33 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative des locaux commerciaux. Cette valeur locative doit être fixée à partir de cinq paramètres consistant dans : les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage.

Il est ainsi inopérant pour la bailleresse de soutenir que la valeur locative ne devrait pas évoluer à la baisse au motif qu'une diminution du prix du loyer de près de la moitié se révélerait injuste au regard de l'équilibre contractuel.

L'expert judiciaire a retenu une valeur moyenne de 145 euros le mètre carré s'agissant de la valeur locative.

Il a relevé que la clientèle était majoritairement locale et que les quelques constructions récentes n'étaient pas de nature à modifier profondément la commercialité du secteur (tours Oxygène et Incity à 2 km à pied de la boulangerie) ; qu'il y avait très peu de commerces à proximité de la boulangerie et que seul le collège [6] était susceptible d'amener quelques clients lycéens à midi.

Il a aussi constaté qu'aucune place de stationnement n'était réservée à la clientèle de la boulangerie et retenu, outre les valeurs fixées judiciairement, 7 éléments de comparaison permettant de déterminer une moyenne de 151,25 euros.

Le premier juge a alors écarté à juste titre la référence fournie par la SCI Barbara relative à la rue du Dauphiné pour 208,64 euros le m², considérée comme sans commune mesure avec les autres références et tenant dans une commercialité distincte.

L'expert [Y] a constaté que pour le commerce le plus proche de la boulangerie, situé [Adresse 2], le prix du bail au mètre carré était fixé à 145 euros et il a justement considéré que le fait que sa surface soit moindre n'est pas de nature en soi, à entraîner une diminution de prix, dans la mesure où la société Le petit Brivadois est la seule boulangerie présente dans un périmètre assez large.

L'expert a encore justement retenu que la configuration des lieux répond pleinement à l'activité exercée, la mise en vente de salades, quiches et sandwiches, produits dérivés de petite restauration, étant inhérente à l'activité moderne de boulangerie pâtisserie eu égard aux usages de la profession ; la cour rappelle d'ailleurs à ce titre que les parties s'étant accordées sur la situation du bail renouvelé à la valeur locative, il n'y a pas lieu de démontrer une quelconque modification des facteurs locaux de commercialité, le moyen développé par la bailleresse au titre du déplafonnement étant sans objet.

Le premier juge a encore justement considéré que malgré les dispositions de l'article R.145-35 issus du décret du 3 novembre 2014 permettant au bailleur de mettre à la charge du preneur, pour les baux renouvelés à compter du 5 novembre 2014, les taxes foncières, il convient de considérer que le transfert de cette charge incombant de droit au propriétaire, constitue toujours, en l'absence de contrepartie avérée comme c'est le cas en l'espèce, une obligation imposée au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi (article L.145-8 du code de commerce), clause exorbitante de droit commun entraînant une diminution de la valeur locative devant se répercuter sur le montant du loyer.

C'est ainsi que le montant de la taxe foncière qui s'est élevée à 3 586 euros en 2016

doit venir en déduction du prix du bail.

Il convient en conséquence, prenant en considération l'ensemble des élément susvisés, de fixer à la somme de 14'237 euros hors taxes et hors charges, le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2016.

La SCI Barbara devra en conséquence rembourser au preneur le trop versé au titre des loyers depuis le 1er octobre 2016.

Le premier juge a indiqué que les compléments de loyer porteront intérêts au taux légal à compter du 30 mars 2017 avec capitalisation annuelle dans les conditions de l'article 1154 du code civil, et ce chef de jugement n'a fait l'objet d'aucun appel, ni principal ni incident.

III Sur les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile:

Le premier juge a à juste titre, débouté les parties de leurs demandes en paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande l'octroi à la société Le petit Brivadois, en cause d'appel, d'une indemnité de procédure de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, à la charge de la SCI Barbara qui succombe dans ses prétentions et doit en conséquence être déboutée de sa demande de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Lyon le 5 mars 2019,

Y ajoutant,

Dit que la SCI Barbara devra rembourser à la société Le petit Brivadois le trop versé au titre des loyers depuis le 1er octobre 2016,

Condamne la SCI Barbara aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de Maître Rose, dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile,

Déboute la SCI Barbara de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à la société Le petit Brivadois une indemnité de 3 000 euros de ce chef.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 19/02266
Date de la décision : 12/01/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-01-12;19.02266 ?
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