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15/12/2022 | FRANCE | N°19/08470

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 15 décembre 2022, 19/08470


N° RG 19/08470

N° Portalis DBVX-V-B7D-MXUT









Décision du

Tribunal de Commerce de Saint-Etienne

Au fond

du 13 novembre 2019



RG : 2018j00858





[O]



C/



Société BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022







APPELANT :



M. [C] [O]r>
[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représenté par Me Sylvain NIORD de la SELAS D.F.P & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 125







INTIMÉE :



Société Coopérative Anonyme BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES, venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE LO...

N° RG 19/08470

N° Portalis DBVX-V-B7D-MXUT

Décision du

Tribunal de Commerce de Saint-Etienne

Au fond

du 13 novembre 2019

RG : 2018j00858

[O]

C/

Société BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

APPELANT :

M. [C] [O]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représenté par Me Sylvain NIORD de la SELAS D.F.P & ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE, toque : 125

INTIMÉE :

Société Coopérative Anonyme BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES, venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547

Assistée de Me Prisca WUIBOUT de la SELARL UNITÉ DE DROIT DES AFFAIRES, avocat au barreau de Saint-Etienne

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Juillet 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 02 Novembre 2022

Date de mise à disposition : 15 Décembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, président

- Raphaële FAIVRE, vice-président placé

- Marianne LA-MESTA, conseiller

assistés pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffier

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 14 octobre 2009, la SA Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes (ci-après la société Banque Populaire Rhône) a consenti à la SARL Saint-Etienne Australia (ci-après la société Saint-Etienne Australia) un prêt professionnel n°07028439 d'un montant initial de 80.000 euros au taux annuel de 4,90 %.

Par acte sous seing privé du 30 septembre 2009, M. [C] [O], gérant de la société, s'est porté caution solidaire à hauteur de 36 % de l'encours restant dû, dans la limite de la somme de 28.800 euros.

Par courrier du 22 octobre 2013, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a prononcé la déchéance du terme du prêt n°07028439, exigeant de la société Saint-Etienne Australia le remboursement de la somme de 44.379,37 euros.

Suivant lettre recommandée datée du même jour, elle a mis en demeure M. [O] de lui régler la somme de 13.313,81 euros représentant 36 % des sommes dues par le débiteur au titre du prêt n°07028439.

Par acte d'huissier du 3 août 2018, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a fait assigner la société Saint-Etienne Australia et M. [O], en sa qualité de caution, devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne en remboursement des sommes dues au titre du prêt n°07028439.

Par jugement du 19 décembre 2018, la société Saint-Etienne Australia a été placée en redressement judiciaire.

Par courrier recommandé du 8 janvier 2019, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a régularisé une déclaration de créances au passif du redressement judiciaire de la société Saint-Etienne Australia.

Par jugement du 15 mai 2019, le redressement judiciaire de la société Saint-Etienne Australia a été converti en liquidation judiciaire.

Par acte du 17 juillet 2019, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes a assigné en intervention forcée la SELARL Berthelot, ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société Saint-Etienne Australia.

Par jugement réputé contradictoire du 13 novembre 2019, le tribunal de commerce de Saint-Etienne a :

fixé la créance de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia, aux sommes suivantes :

Compte entreprise n° [XXXXXXXXXX02]

principal : 7.980,29 euros

intérêts de retard au taux légal du 11 août 2010 au 26 décembre 2018 : 403,36 euros

encaissement : - 1 euro

Prêt professionnel de 100.000 euros n° 01818308, à titre privilégié

échéances impayées : 1.902,30 euros

intérêts s/échéances impayées au taux de 4,50 % du 26 juillet 2010 au 26 décembre 2018 : 8,61 euros

capital restant dû : 42.712,45 euros

intérêts s/capital restant dû au taux de 4,50 % du 26 juillet 2010 au 26 décembre 2018 : 12.923,52 euros

indemnité contractuelle de 5 % : 2.135,62 euros

encaissement : - 15.547,05 euros

Prêt Express Socama Européen d'un montant de 11.000 euros n° 00647843

échéances impayées : 328,45 euros

intérêts s/échéances impayées au taux de 3,90 % du 20 juillet 2010 au 26 décembre 2018 : 1,32 euros

capital restant dû : 9.547,99 euros

intérêts s/capital restant dû au taux de 3,90 % du 20 juillet 2010 au 26 décembre 2018 : 2.363,06 euros

indemnité contractuelle 5 % : 477,39 euros

encaissement : - 3.612,75 euros

Prêt professionnel n° 01828439 d'un montant de 80.000 euros à titre privilégié

échéances impayées : 4.629,44 euros

intérêts s/échéances impayées au taux de 4,90 % du 1er février 2013 au 26 décembre 2018 : 1.278,09 euros

capital restant dû : 37.658,01 euros

intérêts s/capital restant dû au taux de 4,90 % du 1er octobre 2013 au 26 décembre 2018 : 9.666,04 euros

indemnité contractuelle : 1.882,90 euros

soit :

à titre privilégié : (prêts de 80.000 euros et 100.000 euros) = 99.249,93 euros

à titre chirographaire : (compte et prêt de 11.000 euros) = 17.488,11 euros

soit un total de : 116.738,04 euros

condamné M. [O], en sa qualité de caution solidaire de la société Saint-Etienne Australia, à régler à la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du cautionnement du prêt n°07028439 la somme de 19.467,17 euros (ce qui correspond à 36 % de 54.069,92 euros dans la limite de 28.800 euros), outre intérêts au taux légal du 25 juin 2018 (date du dernier décompte) et ce jusqu'à parfait paiement,

ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

dit qu'il n'y a pas lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,

dit que les dépens seront payés en frais privilégiés de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia,

ordonné l'exécution provisoire du jugement nonobstant toutes voies de recours et sans caution.

M. [O] a interjeté appel par acte du 10 décembre 2019, intimant uniquement la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 6 mars 2020, fondées sur les articles L. 313-22 du code monétaire et financier et 2224 du code civil, M. [O] demande à la cour de :

déclarer recevable son appel et le dire bien fondé,

réformer le jugement déféré en ce qu'il :

a fixé la créance de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia aux sommes suivantes :

Prêt professionnel n°07028439 d'un montant de 80 000 euros à titre privilégié

échéances impayées : 4 629,44 euros

intérêts s/ échéances impayées au taux de 4,90 % du 1er février 2013 au 26 décembre 2018 : 1.278,09 euros

capital restant dû : 37.658,01 euros

intérêts sur capital restant dû au taux de 4,90 % du 1er octobre 2013 au 26 décembre 2018 : 9.666,04 euros

indemnité contractuelle : 1.882,90 euros

l'a condamné en sa qualité de caution solidaire de la société Saint-Etienne Australia à régler à la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du cautionnement du prêt n°07028439 la somme de 19.467,17 euros (ce qui correspond à 36 % de 54.069,92 euros dans la limite de 28.800 euros) outre intérêts au taux légal du 25 juin 2018 (date du dernier décompte) et ce jusqu'à parfait paiement,

a ordonné la capitalisation annuelle des intérêts,

a ordonné l'exécution provisoire,

et statuant de nouveau,

juger que les échéances échues correspondant au mois d'août, de juillet et juin 2013 seront prescrites, soit un total de 3.472,08 euros à déduire des sommes réclamées au débiteur principal, la société Saint-Etienne Australia,

juger que la société Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes qui vient aux droits de la société Banque Populaire Loire et Lyonnais n'a pas exécuté son obligation d'information envers les cautions, et doit être déchue des intérêts de l'ensemble des sommes payées par Saint-Etienne Australia durant la période où un défaut d'information peut lui être reprochée, les sommes acquittées par l'emprunteur s'imputant sur le capital,

en conséquence,

juger qu'il ne sera tenu, au titre de son engagement de caution, qu'à la somme de 25.763,02 (après imputation de la somme de 11.894,99 euros sur le capital restant dû de 37.658,01 euros) x 36 % = 9.274,69 euros,

condamner la société Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes à la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

A l'appui de ses prétentions, M. [O] fait valoir pour l'essentiel :

que les échéances impayées des mois de septembre, août, juillet et juin 2013, soit 4.629,44 euros au total (1.157,36 x 4), doivent être retranchées du montant réclamé par la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes pour cause de prescription,

qu'en effet, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes l'a assigné en paiement le 8 août 2018, soit plus de 5 ans après le 1er août 2013, étant rappelé que le point de départ du délai de prescription d'une dette payable à échéances successives court à compter de chacune des échéances,

que la seule information lui ayant été délivrée en sa qualité de caution remonte au 18 février 2010, soit au tout début de la souscription de l'engagement,

qu'en l'absence de toute information ultérieure, il est bien fondé à solliciter, en application de l'article L313-22 du code monétaire et financier, la déchéance des intérêts au titre des années 2010, 2011, 2012, de la période de janvier à mai 2013 et de l'échéance du mois de septembre 2013, ce qui correspond à la somme totale de 11.894,99 euros au regard du tableau d'amortissement,

que les intérêts produits entre le 1er octobre 2013 et le 25 juin 2018 ne peuvent pas non plus lui être imputés, dans la mesure où l'obligation d'information se poursuit après la déchéance du terme jusqu'à complet paiement de la caution,

qu'il en résulte qu'il n'est tenu que de la somme résiduelle de 9.274,69 euros au titre de son engagement de caution, à savoir 25.763,02 euros (capital restant dû de 37.658,01 euros dont à déduire 11.894,99 euros) x 36%.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 25 mai 2020, fondées sur les articles 1103 et 2288 du code civil, la société Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes venant aux droits de la société Banque Populaire Loire et Lyonnais demande à la cour :

à titre principal,

de déclarer irrecevables les demandes formées par M. [O] relatives à la contestation de la fixation au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia des sommes suivantes :

Prêt professionnel n° 07028439 d'un montant de 80.000 euros, à titre privilégié

échéances impayées : 4.629,44 euros

intérêts s/échéances impayées au taux de 4,90 % du 1er février 2013 au 26 décembre 2018 : 1.278,09 euros

capital restant dû : 37.658,01 euros

intérêts s/capital restant dû au taux de 4,90 % du 1er octobre 2013 au 26 décembre 2018 : 9.666,04 euros

indemnité contractuelle : 1.882,90 euros

à titre subsidiaire,

de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a fixé sa créance sur la société Saint-Etienne Australia aux sommes suivantes :

Prêt professionnel n°07028439 d'un montant de 80 000 euros, à titre privilégié

échéances impayées : 4.629,44 euros

intérêts s/échéances impayées au taux de 4,90 % du 1er février 2013 au 26 décembre 2018 : 1.278,09 euros

capital restant dû : 37.658,01 euros

intérêts s/capital restant dû au taux de 4,90 % du 1er octobre 2013 au 26 décembre 2018 : 9.666,04 euros

indemnité contractuelle : 1.882,90 euros

en tout état de cause,

de condamner M. [O] en sa qualité de caution, solidairement avec la société Saint-Etienne Australia, à lui régler au titre du cautionnement du prêt n° 07028439 la somme de 19.465,17 euros (ce qui correspond à 36 % de 54.069,92 euros dans la limite de 28.800 euros), outre intérêts au taux légal continuant à courir à compter du 25 juin 2018 (date du dernier décompte) et ce jusqu'à parfait paiement et à titre subsidiaire à une somme égale à 30% du montant des condamnations prononcées contre le débiteur principal,

d'ordonner la capitalisation des intérêts,

de débouter M. [O] de toutes ses prétentions,

de condamner M. [O] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, distraits au profit de la SCP Baufume Sourbe.

La Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes expose d'abord qu'en application de l'article 553 du code de procédure civile, la demande de M. [O] aux fins d'infirmation du jugement en ce qu'il a fixé sa créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia doit être déclarée irrecevable, faute pour ce dernier d'avoir intimé le liquidateur judiciaire de la société en charge de la vérification du passif, alors qu'il existe un lien d'indivisibilité entre le débiteur, le créancier et les organes de la procédure collective dans le cadre d'une procédure d'admission de créance.

Sur le fond, elle soutient :

que l'ensemble des créances qu'elle détenait à l'encontre de la société Saint-Etienne Australia sont devenues exigibles du fait de la dénonciation des concours octroyés, et notamment la créance due au titre du prêt professionnel n°07028439,

que par courrier du 22 octobre 2013, elle a mis M. [C] [O], en sa qualité de caution solidaire, en demeure de lui régler les sommes dont il était redevable en vertu du cautionnement, lesquelles s'élèvent à ce jour à 19.465,17 euros, ce qui correspond à 36% de l'encourt restant dû de 54.069,92 euros dans la limite de 28.800 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 25 juin 2018, date du dernier décompte, et ce jusqu'à parfait paiement,

que cette mise en demeure étant restée vaine, le jugement du tribunal de commerce de Saint-Etienne du 13 novembre 2019 doit être confirmé, en ce qu'il a condamné M. [O] au paiement de cette somme et ordonné la capitalisation des intérêts,

que contrairement à ce que prétend M. [O], les échéances impayées de juin à août 2013 ne sont pas prescrites, car en matière de recouvrement des prêts professionnels, il y a lieu d'appliquer la prescription quinquennale prévue par l'article L.110-4 du code de commerce, le délai commençant à courir à la date de déchéance du terme,

qu'elle a produit les fiches d'information adressées à M. [O] en sa qualité de caution de la société Saint-Etienne Australia, ce qui doit conduire au rejet de la demande de déchéance des intérêts qu'il a formée.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 juillet 2020, les débats étant fixés au 2 novembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient à titre liminaire de rappeler que les demandes de constat et dire et juger ne constituent pas des prétentions mais uniquement un rappel des moyens et qu'il n'y a donc pas de lieu de statuer sur ce point, la cour n'en étant pas saisie.

Il est également précisé qu'en vertu des dispositions de l'article 9 de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l'action se poursuit et doit être jugée conformément à la loi ancienne, y compris en appel, le contrat ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de cette ordonnance.

Sur la recevabilité de l'appel de M. [O] concernant la fixation de la créance de la Banque au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne Australia

En application de l'article 553 du code de procédure civile, en cas d'indivisibilité à l'égard de plusieurs parties, l'appel formé contre l'une n'est recevable que si toutes sont appelées à l'instance.

En matière d'admission de créances, l'instance introduite devant la juridiction compétente est indivisible entre le créancier, le débiteur et le mandataire judiciaire ou le liquidateur. Il en résulte que la partie qui saisit le juge compétent doit mettre en cause devant ce juge les deux autres parties.

En l'espèce, il est constant que M. [O], qui sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il a fixé la créance de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au passif de la liquidation judiciaire aux sommes rappelées dans l'exposé du litige, n'a intimé ni le débiteur, la société Saint-Etienne Australia, ni la SELARL Berthelot, ès qualités de liquidateur judiciaire, étant observé qu'il n'agit pas en tant que dirigeant de la société Saint-Etienne Australia, mais seulement à titre personnel en qualité de caution.

Il convient dès lors d'accueillir le moyen de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes tendant à voir déclarer irrecevable l'appel formé par M. [O] relativement aux dispositions du jugement ayant fixé les créances au passif de la liquidation judiciaire de la société Saint-Etienne.

Sur la prescription des échéances impayées

L'article 2253 du code civil dispose que les créanciers, ou toute autre personne ayant intérêt à ce que la prescription soit acquise, peuvent l'opposer ou l'invoquer lors même que le débiteur y renonce.

L'article 2313 du code civil, dans sa rédaction applicable à la cause, prévoit quant à lui que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette.

Selon l'article L110-4 du code de commerce, les obligations nées à l'occasion de leur commerce entre commerçants ou entre commerçants et non-commerçants se prescrivent par cinq ans si elles ne sont pas soumises à des prescriptions spéciales plus courtes.

Par ailleurs, en vertu de l'article 2224 du code civil, la prescription court à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'article 2233 du code civil relate de son côté que la prescription ne court pas à l'égard d'une créance à terme, jusqu'à ce que ce terme soit arrivé.

Il découle de l'application combinée de ces dernières dispositions qu'à l'égard d'une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l'égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que si l'action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d'échéance successives, celle en paiement du capital restant dû ne se prescrit qu'à compter de la déchéance du terme, qui emporte son exigibilité.

En l'occurrence, il ressort des éléments de la procédure et des pièces versées aux débats par la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes que celle-ci a prononcé la déchéance du terme au titre du prêt n°07028439 cautionné par M. [O] par courrier recommandé du 22 octobre 2013 (pièce n°5 de l'intimée) et qu'elle a assigné le débiteur et la caution devant le tribunal de commerce de Saint-Etienne par acte du 3 août 2018, de sorte que son action en paiement est recevable pour le capital restant dû, devenu exigible le 22 octobre 2013, ainsi que pour les échéances impayées postérieures au 3 août 2013.

Or, la lecture du décompte dont se prévaut la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes dans ses écritures, conjuguée à celle du tableau d'amortissement du prêt (pièce n°2 de l'intimée) fait apparaître qu'en sus du capital restant dû à hauteur de 37.658,01 euros, ce qui correspond au solde résiduel après règlement de l'échéance du 1er octobre 2013, elle réclame le versement de 4 échéances impayées à la date de déchéance du terme pour un montant total de 4.629,44 euros, soit les mensualités exigibles les 1er juillet 2013, 1er août 2013, 1er septembre 2013 et 1er octobre 2013.

Il convient en conséquence de retenir que la demande en paiement des échéances des mois de juillet et août 2013 (2 x 1.157,36 euros = 2.314,72 euros) est prescrite. Par suite, cette somme globale de 2.314,72 euros doit être déduite du montant total réclamé par la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du prêt n°07028439, la fin de non recevoir soulevée par M. [O] étant ainsi accueillie dans son principe, mais pas dans le quantum sollicité.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

L'article L313-22 du code monétaire et financier, dans sa version applicable au présent litige, énonce que les établissements de crédit ayant accordé un concours financier à une entreprise, sous la condition du cautionnement par une personne physique ou une personne morale, sont tenus au plus tard avant le 31 mars de chaque année de faire connaître à la caution le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l'année précédente au titre de l'obligation bénéficiant de la caution, ainsi que le terme de cet engagement. Si l'engagement est à durée indéterminée, ils rappellent la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée.

Le défaut d'accomplissement de la formalité prévue à l'alinéa précédent emporte, dans les rapports entre la caution et l'établissement tenu à cette formalité, déchéance des intérêts échus depuis la précédente information jusqu'à la date de communication de la nouvelle information. Les paiements effectués par le débiteur principal sont réputés, dans les rapports entre la caution et l'établissement, affectés prioritairement au règlement du principal de la dette.

En l'espèce, M. [O] déclare avoir été destinataire d'un seul courrier d'information envoyé le 18 février 2010 par la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes (pièce n°5 de l'appelant) et affirme n'avoir reçu aucune autre lettre de la part du créancier.

Or, il doit être noté que tout en soutenant avoir régulièrement adressé les fiches d'information à M. [O] en sa qualité de caution, la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes se borne à produire le même courrier que celui dont fait état M. [O] (pièce n°4 de l'intimée), mais ne fournit aucun document ultérieur.

Il ne peut dès lors qu'être constaté que l'intimée ne rapporte absolument pas la preuve de ce qu'elle a satisfait à son obligation annuelle d'information vis-à-vis de la caution après le 18 février 2010, de sorte qu'elle doit être déchue du droit aux intérêts à compter de cette date.

L'analyse du tableau d'amortissement déjà évoqué supra révèle que le capital restant dû avant l'échéance du 1er mars 2010 était de 76.779,17 euros, tandis que le débiteur principal a réglé 40 mensualités d'un montant de 1.126,96 euros (1.157,36 euros - 30,40 euros d'assurance) entre le 1er mars 2010 et la dernière échéance acquittée le 1er juin 2013, soit une somme totale de 40 x 1.126,96 = 45.078,40 euros.

Il s'ensuit qu'après imputation des paiements effectués sur le principal de la dette en application de la sanction prévue par l'article L313-22 précité, le solde restant dû au titre du prêt est de 76.779,17 - 45.078,40 = 31.700,77 euros, hors échéances impayées.

Au total, la créance de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du prêt n°07028439 peut donc être fixée à la somme de 35.716,26 euros, se décomposant comme suit :

échéances impayées : 4.629,44 - 2.314,72 = 2.314,72 euros, après déduction des deux mensualités prescrites

capital restant dû : 31.700,77 euros

indemnité contractuelle (5% des sommes dues selon l'article 9 des conditions générales du prêt) : (31.700,77 + 2.314,72) x 5% = 1.700,77 euros.

En vertu de son engagement de caution solidaire, M. [O] est tenu au paiement de 36 % de cette somme, dans la limite de 28.800 euros, soit 12.857,85 euros.

Il sera en conséquence condamné à verser cette somme de 12.857,85 euros à la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 octobre 2013, conformément aux dispositions de l'article 1153 ancien du code civil, ce qui conduit à l'infirmation du jugement déféré sur ce point.

La décision sera en revanche confirmée, en ce qu'elle a ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues par l'article 1154 ancien du code civil.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Chacune des parties succombant partiellement en ses prétentions, elles conserveront à leur charge les dépens d'appel, ainsi que les frais irrépétibles qu'elles ont exposés en première instance et en appel, ce qui conduit la confirmation du jugement déféré sur l'article 700 du code de procédure civile. Il apparaît également opportun de confirmer la décision de première instance sur les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Déclare irrecevable l'appel formé par M. [C] [O] à l'encontre des dispositions du jugement ayant fixé la créance de la Banque Populaire Rhône Alpes au passif de la SARL Saint-Etienne Australia,

Confirme le jugement déféré pour le surplus, sauf en ce qu'il a condamné M. [C] [O], en sa qualité de caution solidaire de la société Saint-Etienne Australia, à régler à la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du cautionnement du prêt n°07028439 la somme de 19.467,17 euros (ce qui correspond à 36 % de 54.069,92 euros dans la limite de 28.800 euros), outre intéréts au taux légal du 25 juin 2018 (date du dernier décompte) et ce jusqu'à parfait paiement,

Satuant à nouveau sur ce chef et y ajoutant,

Condamne M.[C] [O], en sa qualité de caution solidaire de la SARL Saint-Etienne Australia, à régler à la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre du cautionnement du prêt n°07028439 la somme de 12.857,85 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 22 octobre 2013,

Dit que chaque partie conserve la charge des dépens par elle exposés en appel,

Déboute les parties de leurs demandes en paiement d'une indemnité en application de l'article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles exposés en appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/08470
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;19.08470 ?
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