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15/12/2022 | FRANCE | N°19/06728

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 15 décembre 2022, 19/06728


N° RG 19/06728

N° Portalis DBVX-V-B7D-MTUB









Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 26 juillet 2019



RG : 2016j00109





SELAS PHARMACIE DEREGNAUCOURT



C/



S.A.S. LOCAM





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022





APPELANTE :



SELAS PHARMACIE DEREGNAUCOURT

venant aux droits de LA PHARMACIE GRES et exerçant sous l'enseigne PHARMACIE SAINT JACQUES

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Floriane PONSARD, avocat au barreau de LYON, toque : 2292

Assistée de Me Stéphane MORER de la SELARL BAYET & ASSOCIÉS,...

N° RG 19/06728

N° Portalis DBVX-V-B7D-MTUB

Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 26 juillet 2019

RG : 2016j00109

SELAS PHARMACIE DEREGNAUCOURT

C/

S.A.S. LOCAM

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 15 DÉCEMBRE 2022

APPELANTE :

SELAS PHARMACIE DEREGNAUCOURT venant aux droits de LA PHARMACIE GRES et exerçant sous l'enseigne PHARMACIE SAINT JACQUES

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Floriane PONSARD, avocat au barreau de LYON, toque : 2292

Assistée de Me Stéphane MORER de la SELARL BAYET & ASSOCIÉS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

S.A.S. LOCAM

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 09 Juillet 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 03 Novembre 2022

Date de mise à disposition : 15 Décembre 2022

Audience tenue par Marianne LA-MESTA, président, et Raphaële FAIVRE, vice-président placé, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffier

A l'audience, un membre de la Cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, président

- Raphaële FAIVRE, vice-président placé

- Marianne LA-MESTA, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, président, et par Clémence RUILLAT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 21 septembre 2007, la Pharmacie Gres aux droits de laquelle vient la Selas Pharmacie Deregnaucourt exerçant sous l'enseigne 'Pharmacie Saint Jacques' a conclu avec la Sarl Dycom Pharma un contrat de fourniture et de maintenance portant sur un 'ensemble multimédia Dycom' et un contrat de location portant sur ce même ensemble avec la société Location Automobiles Matériels (Locam), moyennant le règlement de 48 loyers mensuels de 325 euros HT (388,70 euros TTC) comprenant le coût de la prestation de maintenance, reversée ensuite par la société Locam à la société Dycom Pharma.

Le 8 octobre 2007, la société Pharmacie Gres a signé l'avis de livraison du matériel.

Par jugement du tribunal de commerce d'Antibes du 20 juin 2008, la société Dycom Pharma a été mise en redressement judiciaire, procédure qui a été convertie en liquidation judiciaire par jugement du 24 septembre 2008.

Par courrier du 19 mars 2010, la société Pharmacie Gres a sollicité de la société Locam l'indication de la valeur de la prestation de maintenance incluse dans le prélèvement mensuel et ce suite à la cessation d'activité de la société Dycom. Elle a également demandé une révision du loyer en tenant compte du fait qu'elle n'était pas tenue de payer une maintenance qui n'était pas assurée.

Par courrier du 29 mars 2010, la société Locam s'est opposée à cette demande indiquant que les prestations étaient toujours reversées à la société Dycom Pharma, en redressement judiciaire mais encore en activité.

Par acte du 27 septembre 2011, la société Pharmacie Deregnaucourt a racheté la pharmacie Gres.

Par courriers du 2 novembre 2015, la société Pharmacie Deregnaucourt, se prévalant de ce qu'elle réglait des mensualités pour deux contrats similaires, l'un conclu avec la société Dycom Pharma et l'autre contrat conclu avec une société NT Pharma, a demandé à la société Locam le remboursement de la somme de 23.740 euros au titre de la quote-part des échéances afférentes à la maintenance du contrat régularisé avec la société Dycom Pharma. Selon courrier du 18 novembre 2015, la société Pharmacie Deregnaucourt a mis en demeure la société Locam de s'exécuter.

En réponse, selon courrier du 7 janvier 2015, la société Locam a proposé un remboursement à hauteur de 2.966,08 euros correspondant à la prestation du 10 novembre 2010 au 10 décembre 2015.

Par courrier recommandé du 11 janvier 2016, la société Pharmacie Deregnaucourt a demandé à la société Locam le règlement de la somme de 33.930 euros au titre de son préjudice financier.

Cette demande étant demeurée infructueuse, par acte du 21 janvier 2016 la société Pharmacie Deregnaucourt a assigné la société Locam devant le tribunal de commerce de Saint-Étienne en paiement de la somme de 33.930 euros en principal outre indemnité de procédure et charge des dépens.

Par jugement du 26 juillet 2019, ce tribunal a :

débouté la société Pharmacie Deregnaucourt de toutes ses demandes principales et subsidiaires,

condamné la société Pharmacie Deregnaucourt à payer à la société Locam la somme de 250 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

imputé les dépens à la société Pharmacie Deregnaucourt,

dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire,

débouté la société Locam du surplus de ses demandes.

La pharmacie Deregnaucourt a interjeté appel par acte du 2 octobre 2019.

Par conclusions du 15 mai 2020, la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres et exerçant sous l'enseigne Pharmacie Saint Jacques demande à la cour de :

la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

en conséquence,

infirmer le jugement déféré dans toutes ses dispositions,

à titre principal, vu les articles 1302 à 1302-3 et 1223 du code civil,

condamner la société Locam à lui verser la somme de 33.930 euros en remboursement des échéances payées indûment,

à titre subsidiaire, vu l'article 1104 du code civil,

constater que la société Locam a violé son obligation de loyauté à son égard,

condamner la société Locam à lui verser la somme de 33.930 euros à titre de dommages et intérêts,

en tout état de cause,

condamner la société Locam à lui payer la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux entiers dépens.

Par conclusions du 2 avril 2020 fondées sur les articles 1134, 1149 et 1184 anciens du code civil et L.641-11-1 du code de commerce, la société Locam demande à la cour de :

dire non fondé l'appel de la société Pharmacie Deregnaucourt (enseigne Saint Jacques),

confirmer le jugement déféré,

débouter la société Pharmacie Deregnaucourt de toutes ses demandes,

condamner la société Pharmacie Deregnaucourt à lui régler en deniers ou quittances les loyers dus en vertu de la dernière reconduction,

condamner la société Pharmacie Deregnaucourt à lui régler une nouvelle indemnité de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et aux entiers dépens.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 9 juillet 2020, les débats étant fixés au 3 novembre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il y a lieu de rappeler qu'aux termes de l'article 954, alinéa 2 du code de procédure civile, les prétentions sont récapitulées sous forme de dispositif et que la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif, de sorte que la demande de la société Locam tendant à voir déclarée irrecevable la demande en paiement de l'appelante qui n'est pas reprise dans son dispositif, ne saisie pas la cour qui n'est pas tenue d'y répondre.

Par ailleurs, le contrat ayant été régularisé entre les parties avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, complété par la loi du 20 avril 2018 ratifiant cette ordonnance, il demeure soumis à la loi ancienne, y compris pour ses effets légaux et pour les dispositions d'ordre public, conformément à l'article 9 de cette ordonnance.

Sur la demande en remboursement des échéances du contrat

Au soutien de sa demande en remboursement de la somme de 33.930 euros au titre de loyers, l'appelante fait valoir que la société Locam a perçu indûment les redevances au titre du contrat de maintenance régularisé avec la société Dycom Pharma et incluses dans le montant du loyer versé à l'intimée au titre du contrat de location de l'ensemble multimédia puisque la société Dycom Pharma ayant fait l'objet d'un plan de cession puis d'une procédure de liquidation judiciaire en 2008, les prestations de maintenance n'étaient plus assurées. Elle estime que les paiements de redevance entre les mains de la société Locam étaient sans cause, puisque cette dernière ne démontre pas les avoir reversées à la société Dycom et les a donc perçues indûment.

En réponse à la société Locam, elle fait valoir qu'elle n'était pas tenue de solliciter la résiliation du contrat de maintenance dès lors qu'il était dépourvu d'objet et que seule cette dernière pouvait attraire en la cause les organes de la procédure alors qu'elle seule à contracté avec la société Dycom Pharma. Elle affirme en effet ne disposer d'aucun contrat écrit de maintenance avec la société Dycom, et n'être donc lié contractuellement qu'avec la société Locam à ce titre.

La société Locam expose quant à elle que l'appelante ne démontre pas que la procédure collective dont a fait l'objet la société Dycom Pharma a eu une influence sur leur propre relation contractuelle. Elle soutient par ailleurs que la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres, n'a engagé aucune procédure tendant à l'anéantissement du contrat régularisé avec la société Dycom Pharma, de sorte qu'elle ne produit aucun titre de nature à entraîner par voie de conséquence la caducité du contrat de location interdépendant du contrat de maintenance. Elle estime irrecevables les demandes de l'appelante qui n'a pas attrait les organes de la procédure collective de la société Dycom dans la cause.

Conformément à l'article 1376 ancien du code civil, celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment reçu.

Par ailleurs, un contrat en cours n'est pas résolu de plein droit du seul fait de l'ouverture de la liquidation judiciaire, en application de l'article L. 641-11-1, I, alinéa 1er, du code de commerce, de sorte que la mise en liquidation judiciaire du prestataire de services n'est pas de nature à provoquer, par elle-même, l'anéantissement du contrat de maintenance auquel ce prestataire est partie.

En l'espèce, si l'appelante soutient n'avoir régularisé aucun contrat de maintenance avec la société Dycom et n'avoir contracté qu'avec la société Locam à ce titre, il résulte pourtant de ses propres déclarations, de celles de la société Locam et de l'examen des pièces contractuelles, que selon contrat n°592364 du 21 septembre 2007 et facture unique du 10 octobre 2007, elle a régularisé un contrat de fourniture et de maintenance «'d'un ensemble multimédia Dycom'» fourni par la société Dycom Pharma, livré le 8 octobre 2017 et financé par un contrat de location longue-durée régularisé avec la société Locam moyennant une redevance de 388 euros TTC par mois, dont il est admis par les parties qu'elle incluait le coût de la maintenance, sans toutefois que ce montant soit déterminé de manière distincte du reste du loyer.

Or, le seul fait que la société Dycom Pharma, prestataire de la maintenance, a été placé en liquidation judiciaire selon jugement du 24 septembre 2008, n'est pas de nature à caractériser l'existence d'un paiement indû de redevance entre les mains de la société Locam au titre de cette prestation, alors qu'en application des dispositions précitées, cette mise en liquidation judiciaire de ce prestataire de services n'a pas provoqué par elle-même, l'anéantissement du contrat de maintenance auquel celui-ci est partie. En conséquence, faute pour la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres de justifier d'un anéantissement du contrat de fourniture et de maintenance régularisé avec la société Dycom Pharma et de l'absence de reversement par la société Locam à cette dernière de la part du montant du loyer correspondante à cette prestation, elle échoue à démontrer l'existence d'un indû à la charge de l'intimée. Elle n'est en conséquence pas fondée à réclamer à la société Locam paiement d'une somme de 33.930 euros, laquelle n'est au surplus pas justifiée dans son montant.

Sur le manquement de la société Locam à son obligation de loyauté et d'information

En l'espèce, l'appelante fait grief à la société Locam de lui avoir indiqué par courrier du 29 mars 2010 que la société Dycom Pharma faisait l'objet d'un redressement judiciaire tout en étant informée qu'elle était en réalité placée en liquidation judiciaire, manquant ainsi à son obligation de loyauté et d'information. Elle soutient ainsi que cette dernière n'a pas hésité à lui mentir afin de continuer à prélever les échéances, alors qu'elle ne reversait rien à la société liquidée et lui a laissé souscrire un nouveau contrat avec une société tierce dont elle assure également le financement, de sorte qu'elle perçoit deux fois les redevances.

La société Locam soutient qu'elle n'était tenue à aucune obligation d'informer l'appelante des difficultés du fournisseur et que l'appelante ne démontre pas qu'elle connaît des difficultés financières à cause de la location financière qui lui a été consentie.

En application de l'article 1134 ancien du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites. Elles doivent être exécutées de bonne foi.

En l'espèce, s'il est constant que selon courrier du 29 mars 2010, la société Locam a indiqué à l'appelante que la société Dycom Pharma faisait l'objet d'un redressement judiciaire alors qu'elle était en liquidation judiciaire depuis le 24 septembre 2008, la cour observe, comme l'ont exactement relevé les premiers juges, que l'appelante, qui indiquait à la société Locam dans un courrier en date du 19 mars 2010 que la maintenance de l'installation n'était plus assurée suite à la cessation d'activité de la société Dycom Pharma était donc parfaitement informée de la situation de son fournisseur.

L'appelante ne démontre pas davantage que la société Locam s'est abstenue de reverser à la société Dycom Pharma la part de loyer correspondante au coût de la maintenance, dès lors que cette affirmation, contestée par la société Locam dans sa correspondance du 29 mars 2010, n'est assortie d'aucune offre de preuve et qu'il n'est ni allégué, ni à fortiori démontré que le liquidateur judiciaire, qui peut exiger l'exécutions des contrats en cours en fournissant la prestation promise à l'autre partie, aurait opté pour la résiliation du contrat de maintenance en cours. Il convient donc de débouter la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres de sa demande de dommages et intérêts et de confirmer le jugement déféré sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Succombant dans ses prétentions, la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres est condamné aux dépens d'appel et conserve la charge de ses frais irrépétibles. Les condamnations aux dépens et au titre de l'indemnité de procédure prononcées par les premiers juges sont confirmées. Il convient en outre de condamner la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres à payer à la société Locam une indemnité de procédure à hauteur d'appel de 1.000 euros au titre de l'appel. Enfin, l'appelante doit être déboutée de sa demande d'indemnité de procédure en appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré,

Ajoutant,

Condamne la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres à verser à la société Locam une indemnité de procédure de 1.000 euros pour la cause d'appel,

Condamne la société Pharmacie Deregnaucourt venant aux droits de la Pharmacie Gres aux dépens d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/06728
Date de la décision : 15/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-15;19.06728 ?
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