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13/12/2022 | FRANCE | N°22/03274

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 13 décembre 2022, 22/03274


N° RG 22/03274 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OI4U









décision du Tribunal de Commerce de BOURG EN BRESSE au fond 2021/08082 du 06 avril 2022





[E]

Société GESCOMM



C/



SELARL MJ ALPES









COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ORDONNANCE PRESIDENT

DU 13 Décembre 2022











APPELANTS :



M. [P] [E]

[Adresse 2]

[Localité 5]



Société GESCOMM

[A

dresse 1]

[Localité 4]



Représentés par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant Me BERTIN de la SCP BERTIN & PETITJEAN-DOMEC Associés, avocat au barreau de LYON, toque : 53



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N° RG 22/03274 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OI4U

décision du Tribunal de Commerce de BOURG EN BRESSE au fond 2021/08082 du 06 avril 2022

[E]

Société GESCOMM

C/

SELARL MJ ALPES

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ORDONNANCE PRESIDENT

DU 13 Décembre 2022

APPELANTS :

M. [P] [E]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Société GESCOMM

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentés par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant Me BERTIN de la SCP BERTIN & PETITJEAN-DOMEC Associés, avocat au barreau de LYON, toque : 53

INTIMEE :

SELARL MJ ALPES représentée par [V] [T] es qualité de liquidateur de la société BUSTOURS

[Adresse 6]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant Me Jérémy ASTA-LOVA de la S.E.L.A.R.L MORELL ALART & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 766

Audience tenue par Patricia GONZALEZ, Présidente de la 3ème chambre A de la cour d'appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, greffière,

Les conseils des parties entendus ou appelés à notre audience du 15 Novembre 2022, ceux-ci ayant eu connaissance de la date du délibéré au 13 Décembre 2022 ;

Signée par Patricia GONZALEZ, Présidente de la 3ème chambre A de la cour d'appel de Lyon, assistée de Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE : contradictoire

* * * * *

EXPOSE DU LITIGE

La société Gescomm dont M. [P] [E] est le représentant a été le commissaire aux comptes de la société Bustours, laquelle a fait l'objet d'un jugement de redressement judiciaire le 29 mai 2019, la société AJ Partenaires étant désignée en qualité d'administrateur judiciaire et la Selarl MJ Alpes en qualité de mandataire judiciaire, puis d'un jugement de liquidation judiciaire le 27 novembre 2019, la Selarl MJ Alpes étant désignée liquidateur judiciaire.

Par requête du 19 mai 2020, cette dernière a saisi le juge commissaire d'une requête en désignation d'un technicien sur le fondement de l'article L 621-9 du code de commerce en faisant valoir des relations financières anormales entre les sociétés Bustours, EFA (holding) et la Sci des Entressets, un état de cessation des paiements qui pourrait être bien antérieur à la date du 29 avril 2019 retenue provisoirement par le tribunal de commerce et des fautes pouvant être reprochées aux dirigeants.

Une ordonnance du 25 juin 2020 a désigné M. [N] en qualité de technicien en lui demandant notamment de :

- Entendre le dirigeant de la société Bustours, le commissaire aux comptes de la société Bustours et plus généralement toute personne dont l'audition serait utile à la mission ;

- Se faire remettre tout document nécessaire à la réalisation de sa mission, et notamment le dossier de travail du commissaire aux comptes ;

- Déterminer l'existence et le cas échéant examiner les éventuelles relations financières anormales sur les 5 derniers exercices entre la société Bustours et les sociétés EFA, Sci des Entressets en indiquant notamment :

' L'ampleur des mouvements financiers

' La cohérence des sommes facturées ou avoirs établis par rapport aux prestations réalisées

- Donner plus généralement un avis sur les relations avec les différentes autres sociétés du groupe et toute société dans laquelle les actionnaires seraient intéressés ;

- Donner son avis sur la sincérité des comptes sociaux de la société Bustours ;

- Analyser et confronter les éléments recueillis au cours de la mission avec les rapports du commissaire aux comptes ;

- Déterminer la date à laquelle la société Bustours était en état de cessation des paiements ;

- Déterminer et donner son avis sur l'aggravation de l'insuffisance d'actif subie par la société Bustours entre :

' De première part, la date de l'état de cessation des paiements + 45 jours et l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

' De deuxième part, la date de certification des comptes clos le 31 décembre 2014 et l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

' De troisième part, la date de certification des comptes clos le 31 décembre 2016 et l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

- Rédaction et diffusion d'un rapport relatant les investigations et conclusions.

Parallèlement, et par assignation du 4 juin 2021 devant le tribunal judiciaire de Roanne, la Selarl MJ Alpes, es-qualités, a diligenté une action à l'encontre de M. [E], commissaire aux comptes de la société Bustours et de la société Gescomm, venant aux droits de la société Argos Conseil, estimant que ceux-ci avaient commis des fautes engageant leur responsabilité civile et dissimulées pendant plusieurs années.

M. [E] et la société Gescomm ont formé un recours à l'encontre de la décision du juge commissaire du 25 juin 2020 par acte reçu au greffe du tribunal de commerce le 28 octobre 2021.

La Selarl MJ Alpes a conclu à son irrecevabilité et subsidiairement à son rejet.

Par jugement du 6 avril 2022, le tribunal de commerce de Bourg-en-Bresse, a jugé irrecevable le recours de M. [E] et la société Gescomm contre l'ordonnance du 26 juin 2020, dis n'y avoir lieu à statuer sur le fonds et condamné in solidum M. [E] et la société Gescomm aux entiers dépens du recours formé par leurs soins. Il a jugé que le rapport du technicien n'est pas une expertise et est établi à titre de simple renseignement, que l'expertise ne comporte aucun caractère coercitif à l'encontre du commissaire aux comptes, que les requérants ne sont pas parties à l'ordonnance ni directement affectés par la mission, que leur action est irrecevable.

Par déclaration d'appel du 5 mai 2022, M. [E] et la société Gescomm ont interjeté appel de cette décision.

La Selarl MJ Alpes ès-qualités, a saisi la présidente de la chambre commerciale d'une demande d'irrecevabilité de l'appel.

Par conclusions devant le conseiller de la mise en état déposées le 10 novembre 2022, la Selarl MJ Alpes ès-qualités de liquidateur de la société BUSTOURS demande à la présidente de chambre, au visa des articles 905 et suivants du code de procédure civile, L 661-6 et R 661-6 du code de commerce :

- de déclarer irrecevable l'appel initié par la société Gescomm et M. [E] à l'encontre du jugement querellé,

- de rejeter toutes prétentions contraires,

- de condamner in solidum M. [E] et la société Gescomm à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

Elle soutient principalement que :

- le président de chambre tire de l'article 905-2 dernier alinéa le pouvoir de se prononcer sur les fins de non recevoir tirées de l'irrecevabilité de l'appel,

- le dépôt de conclusions au fond est inopérant, la fin de non recevoir peut être invoquée en tout état de cause,

- le droit d'appel appartient au seul ministère public, l'expert visé par l'article L 661-6 du code de commerce vise également le technicien dans l'esprit de la loi,

- le principe du droit d'appel n'est pas absolu, et les exceptions sont nombreuses en matière de procédures collectives, la jurisprudence confirme que l'article 661-6 s'applique au techicien,

- les appelants n'ont pas formé d'appel nullité et ne peuvent plus le faire.

Par conclusions en réponse déposées 9 septembre 2022, la société Gescomm et M. [E] demandent à la présidente de la chambre :

- de se déclarer incompétent au profit de la cour pour statuer sur la fin de non recevoir de la société MJ Alpes,

- à défaut, de juger l'appel recevable,

- de condamner la société MJ Alpes à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de l'incident.

Ils font valoir que :

- la question de la recevabilité ne saurait être tranchée par le président de chambre sauf à méconnaître les pouvoirs propres de la cour et l'effet dévolutif de l'appel, il revient à la cour d'infirmer ou d'attaquer la décision critiquée et elle ne peut être privée de son recours juridictionnel,

- le président de chambre ne peut connaître des fins de non recevoir affectant le jugement,

- l'article L 661-6 ne peut recevoir application, le technicien n'est pas un expert, le mandataire se prévaut à tort d'un esprit de la loi et d'une décision isolée, et il existe un principe général du droit d'appel, l'article L 621-4 du code de commerce est totalement dissociable de l'article L 621-9, le souci de célérité est assuré par le caractère non suspensif des voies de recours,

- la Cour de cassation a ouvert à nouveau les recours notamment lorsque le juge commissaire outrepasse ses attributions, la voie de l'appel est ouverte lorsqu'il est discuté des formes et délais de recours contre l'ordonnance du juge commissaire, ce qui est le cas en l'espèce.

MOTIFS DE LA DECISION

S'agissant du pouvoir du président de chambre pour trancher l'incident, selon l'article 905-2 du code de procédure civile, les ordonnances du président ou du magistrat désigné par le premier président de la chambre saisie statuant sur la fin de non-recevoir tirée de l'irrecevabilité de l'appel, sur la caducité de celui-ci ou sur l'irrecevabilité des conclusions et des actes de procédure en application du présent article et de l'article 930-1 ont autorité de la chose jugée au principal.

Il découle de ces dispositions, que le président de chambre a en principe compétence pour statuer sur une fin de non recevoir tendant à mettre fin à l'instance, ce qui est le cas de la fin de non recevoir tendant à l'absence de droit de faire appel pour les parties.

Par ailleurs, la fin de non recevoir soulevée par l'intimée n'est pas de celles qui sont susceptibles de modifier la décision de première instance, étant spécifique à la procédure d'appel, de sorte que l'avis de la Cour de cassation visé par les appelants n'est pas applicable à l'espèce.

Toutefois, il est rappelé que la voie de l'appel nullité, qui relève de l'appréciation de la seule cour, reste ouverte à une partie démunie par ailleurs du droit d'appel, si elle rapporte la preuve d'un excès de pouvoir. Or, force est de constater en l'espèce, comme relevé justement par l'intimée, que les appelants n'ont pas formé d'appel nullité de la décision querellée, demandant seulement la réformation du jugement. Si le dispositif des conclusions évoque un excès de pouvoir du juge commissaire, seule la décision du tribunal fait l'objet de l'appel à l'exclusion de la décision du juge commissaire à l'encontre duquel ne peut porter directement le recours devant la cour.

Il découle de tout ce qui précède que le président de chambre est compétent pour trancher la question de l'irrecevabilité de l'appel.

Les appelants ne peuvent en premier lieu soutenir que l'appel de droit commun reste dans tous les cas possible, l'article 543 du code de procédure civile précisant "s'il n'en est autrement disposé".

En second lieu, selon l'article L 661-6 du code de commerce, "ne sont susceptibles que d'un appel de la part du ministère public :

1° Les jugements ou ordonnances relatifs à la nomination ou au remplacement de l'administrateur, du mandataire judiciaire, du commissaire à l'exécution du plan, du liquidateur, des contrôleurs, du ou des experts".

Si le technicien n'est pas expressément visé, au contraire de "l'expert", les appelants se prévalant des règles de désignation et de missions différentes de ces deux praticiens et donc de ce que le texte susvisé ne s'applique qu'à l'expert stricto sensu, c'est cependant à juste titre que l'intimée fait valoir que le terme expert susvisé comprend le technicien, s'agissant d'un sens générique renvoyant au tiers désigné dans le cadre d'une procédure collective en considération de compétences techniques spécifiques.

Ceci s'explique par le but poursuivi par l'article L 661-6 qui répond à un souci de célérité exigé par la procédure collective notamment pour tout ce qui concerne les désignations, les organes de la procédure comme les tiers chargés de missions techniques spécifiques, peu important le caractère non suspensif des voies de recours.

Il est enfin rappelé que l'ordonnance du juge commissaire est soumise à un recours devant le tribunal de commerce.

En conséquence de ce qui précède, l'article L 661-6 s'applique au présent litige.

Il ne découle que l'appel de M. [E] et de la société Gescomm est irrecevable devant la cour.

Les dépens d'appel sont à la charge des appelants.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Par ordonnance susceptible de déféré,

Disons que l'appel de M. [P] [E] et de la société Gescomm est irrecevable.

Condamnons M. [E] et la société Gescomm aux dépens d'appel.

Disons n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/03274
Date de la décision : 13/12/2022
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-13;22.03274 ?
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