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08/12/2022 | FRANCE | N°19/05024

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 08 décembre 2022, 19/05024


N° RG 19/05024 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MPT3









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 08 juillet 2019



RG : 2019j00743

ch n°





SAS CELTIQUE



C/



[J]

[J]

Société SDF FARS MEUBLES





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 08 Décembre 2022







APPELANTE :



SAS C

ELTIQUE représentée par son représentant légal en exercice

[Adresse 7]

[Localité 2]



Représentée par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON, toque : 215 et ayant pour avocat plaidant Me Pascal ULINE, avocat au barreau de LYON





INTIMES :



M....

N° RG 19/05024 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MPT3

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 08 juillet 2019

RG : 2019j00743

ch n°

SAS CELTIQUE

C/

[J]

[J]

Société SDF FARS MEUBLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 08 Décembre 2022

APPELANTE :

SAS CELTIQUE représentée par son représentant légal en exercice

[Adresse 7]

[Localité 2]

Représentée par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON, toque : 215 et ayant pour avocat plaidant Me Pascal ULINE, avocat au barreau de LYON

INTIMES :

M. [C] [J]

né le 12 Décembre 1963 à [Localité 9] (69)

[Adresse 5]

[Localité 4]

M. [E] [J]

né le 02 Juin 1962 à [Localité 10]

[Adresse 6]

[Localité 4]

Représentés par Me Samuel BECQUET de l'AARPI JAKUBOWICZ ET ASSOCIÉS, avocat au barreau de LYON, toque : 350

Société SDF FARS MEUBLES

[Adresse 6]

[Localité 4]

non représentée

INTERVENANTE FORCEE :

S.E.L.A.R.L. ALLIANCE MJ prise en la personne de Me [P] [T], ès qualités de liquidateur judiciaire de la société CELTIQUE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Alban POUSSET-BOUGERE de la SELARL CVS, avocat au barreau de LYON, toque : 215 et ayant pour avocat plaidant Me Pascal ULINE, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 05 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 26 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 08 Décembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistés pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière

A l'audience, un membre de la cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt réputé contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

MM. [E] et [C] [J] exercent en commun une activité de menuiserie, agencement et ébénisterie au sein de la société créée de fait "[J] [E] et [C] Fars Meuble".

Etant intervenus pour le réaménagement d'un bar situé dans le centre de [Localité 8] appartenant à la Sas Celtique, les consorts [J] ont demandé à celle-ci le règlement de leur facture du 14 avril 2016 d'un montant de 15.401,39 euros, demande réitérée notamment par courriers des 9 juin, 20 juin, 18 juillet et 16 septembre 2016.

Par requête en injonction de payer du 7 janvier 2019 déposée par "SDF Fars Meubles - Mrs [J] [E] et [C]", il a été demandé à la société Celtique de régler la somme de 15.401,39 euros en principal outre 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et du préjudice moral.

Par ordonnance du 15 janvier 2019, le président du tribunal de commerce de Lyon a enjoint à la société Celtique de régler à "[J] [E] et [C] Fars Meubles" la somme de 15.401,39 euros en principal, outre intérêts annuels au taux légal à compter du 17 septembre 2016, et la somme de 150 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par courrier recommandé du 4 avril 2019 (réceptionné par le greffe le 8 avril suivant), la société Celtique a fait opposition à l'ordonnance d'injonction de payer.

Par jugement réputé contradictoire du 8 juillet 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- déclaré l'opposition recevable mais mal fondée,

- condamné la société Celtique au profit de la société SDF Fars Meubles ' MM. [E] et [C] [J]

' à payer la somme de 15.401,39 euros, en principal, avec intérêts au taux légal à compter du 9 juin 2016,

' à payer, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la somme de 750 euros,

- condamné la société Celtique aux dépens.

La société Celtique a interjeté trois appels comme suit :

- un appel par acte du 16 juillet 2019 à l'encontre de la société SDF Fars Meubles (la présente procédure, RG n° 19/05024),

- un appel également par acte du 16 juillet 2019 à l'encontre de "M. [E] [J] Nom commercial : Fars Meubles et [J] [C]" (RG n° 19/05052) ; cette procédure a été jointe à la précédente par ordonnance du 3 septembre 2019,

- un appel par acte du 12 août 2019 à l'encontre de "M. [C] [J] exerçant sous le nom commercial Fars Meubles" (RG n° 19/05902) ; cette procédure a été jointe à la présente (RG n°19/05024) par ordonnance du 25 février 2020.

Par jugement du 18 mars 2020 du tribunal de commerce de Lyon, la société Celtique a été mise en liquidation judiciaire, la Selarl Alliance MJ représentée par Me [T] étant désignée en qualité de liquidateur judiciaire.

Par acte du 22 septembre 2020, MM. [E] et [C] [J] "exerçant ensemble au sein de la société créée de fait Fars Meuble" ont appelé dans la cause la Selarl Alliance MJ.

* * *

Par conclusions du 26 janvier 2021, la Selarl Alliance MJ représentée par Me [T] agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Celtique demande à la cour de :

- accueillir comme recevable et bien fondé l'appel,

- y faisant droit l'accueillir en tous ses chefs,

- constater que la société Fars étant sans qualité pour requérir l'ordonnance d'injonction de payer, en constater la nullité et débouter les intimés de l'ensemble de leurs prétentions,

- constater encore qu'aucun solde n'est dû aux intimés par l'effet des règles "tout paiement suppose une cause" et celles aussi tirées de la compensation,

- infirmer en tous ses chefs le jugement frappé d'appel et débouter les intimés de toutes leurs prétentions,

- condamner MM. [E] et [C] [J] à payer à la société Celtique 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'instance et d'appel ces derniers étant distraits de Me Pousset-Bougère.

* * *

Par conclusions du 15 janvier 2020 fondées sur l'article 1353 du code civil, MM. [E] et [C] [J] exerçant ensemble au sein de la société créée de fait Fars Meubles demandent à la cour de :

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a refusé de faire application du taux d'intérêt conventionnel de trois fois Ie taux d'intérêt légal à compter du 9 juin 2016, date de la première mise en demeure,

y ajoutant,

- rejeter toutes fins, moyens et prétentions contraires,

- condamner la société Celtique à payer à MM. [C] et [E] [J] la somme de 3.000 euros chacun au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 5 février 2021, les débats étant fixés au 26 octobre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

En vertu des dispositions de l'article 9 de l'ordonnance 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations, l'action se poursuit et doit être jugée selon la loi ancienne, y compris en appel, le contrat ayant été conclu avant le 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de cette ordonnance.

De manière liminaire, la cour relève que dans les motifs de leurs conclusions, les consorts [J] se prévalent d'un "appel non soutenu", au motif de ce que la société Celtique n'aurait pas communiqué ses pièces avant le délai de trois mois de l'article 909 du code de procédure civile, et qu'ils n'avaient pu apprécier les contestations adverses et y répondre ; ils estiment que les pièces doivent être écartées des débats et que l'appel n'est pas valablement soutenu.

Cependant, cette prétention, présentée à titre principal, n'est pas reprise dans le dispositif de sorte que la cour n'a pas à y répondre. Il est de manière superfétatoire relevé que les intimés ont disposé de tout le temps nécessaire pour examiner et répondre sur les pièces adverses.

Sur la nullité de l'ordonnance d'injonction de payer

La Selarl Alliance MJ ès-qualités de liquidateur de la société Celtique demande à la cour de constater que "Fars" était sans qualité pour requérir l'ordonnance d'injonction de payer et que celle-ci est par conséquent nulle, dès lors :

- que le demandeur principal à la requête en injonction de payer est la "SDF Fars" puisqu'elle est la première citée, alors qu'une société créée de fait n'a pas la personnalité morale et ne peut donc pas agir en justice,

- qu'il importe peu que l'intitulé "SDF Fars" soit suivi des désignations de MM. [J] [E] et [C],

- que la requête est revêtue d'un tampon sur lequel ne figure que "Fars" ce qui démontre qu'elle était seule requérante,

- qu'elle ne comporte qu'une seule signature alors qu'il y a deux associés au sein de la société créée de fait Fars,

- que l'avocat qui représente les intimés devant la cour s'est constitué pour "MM. [E] et [C] [J] exerçant ensemble dans le cadre de la société créée de fait",

- que les actes d'exécution forcée ont été menés au nom de la société créée de fait Fars Meubles.

En réponse, les consorts [J] exerçant ensemble au sein de la société créée de fait Fars Meubles exposent :

- que si les sociétés créées de fait sont dépourvues de personnalité morale, tel n'est pas le cas de leurs associés personnes physiques,

- que la société Fars Meubles est immatriculée au répertoire Sirene en qualité d'employeur,

- que les documents commerciaux à en-tête de Fars Meubles font mention de ce numéro d'identification Sirene,

- que la requête en injonction de payer a été déposée par MM. [J] [E] et [C] et non par la société Fars Meubles, la mention "SDF Fars Meubles" n'étant donnée qu'à titre informatif,

- que la signature d'un seul des associés d'une société de fait engage l'autre solidairement (article 1872-1 du code civil) de sorte qu'un seul associé signataire était suffisant,

- que l'ordonnance d'injonction de payer du 15 janvier 2019 a été rendue au bénéfice de "[J] [E] et [C] Fars Meubles", la mention Fars Meubles correspondant au nom commercial de l'activité,

- qu'en tout état de cause MM. [J] [E] et [C] sont intervenus à l'instance introduite au fond devant le tribunal de commerce, ce qui régularise si besoin était la situation.

L'ordonnance désignait [J] [E] et [C] Fars Meubles en qualité" de créanciers, le jugement se substituant à l'ordonnance mentionnant pour sa part "la Société SDF Fars Meubles Messieurs [E] et [C] [J]'.

L'extrait du répertoire Sirene confirme que l'entreprise est inscrite depuis le 30 octobre 1984, qu'elle est désignée sous le nom de [J] [E] et [C] Fars Meubles, société de fait entre personnes physiques.

Il n'est pas contesté que "SDF Fars meubles" n'est pas une société dotée de la personnalité morale mais simplement une société de fait constituant manifestement le nom commercial de l'entreprise ; qu'elle ne peut ester en justice pour obtenir condamnation à son profit.

Toutefois, même si l'intitulé désignant la partie requérante à l'ordonnance d'injonction de payer est particulièrement maladroit en ce qu'il désigne entre autres créanciers la société de fait, il est néanmoins constant que la procédure a été également diligentée par MM [J], entrepreneurs à titre individuel et immatriculés au registre du commerce de Lyon, qui ont qualité pour agir en tant que personnes physiques pour poursuivre le recouvrement de sommes dues en raison de leur activité commune, peu important que la société Fars meubles soit indiquée en premier. Le fait qu'un seul d'entre eux ait signé la requête ne produit aucun effet, l'autre ratifiant dans le cadre de la présente procédure cette demande.

La mention "SDF Fars meubles" constitue le nom commercial de l'activité est, elle, est sans incidence sur la recevabilité des demandes des consorts [J] qui sont bien parties au litige.

Par ailleurs, l'affirmation selon laquelle des actes de poursuite auraient à tort été exercés par la société ne produit pas non plus d'effets sur le présent litige, les contestations sur ce point relevant du juge de l'exécution.

En conséquence, il n'existe aucun vice affectant la procédure nonobstant le mention de la société de fait en tout état de cause, il est rappelé que le jugement se substitue à l'ordonnance qui est mise à néant par l'opposition et la nullité du jugement n'a pas été demandée.

Sur l'absence de cause du paiement réclamé et l'exception d'inexécution

Il est relevé de manière liminaire que la société Celtique, dans les motifs de ses conclusions, se prévaut d'une créance de 16.000 euros à titre de dommages intérêts, affirmant que cette demande est maintenue, mais que le dispositif de ces mêmes conclusions n'en fait pas mention de sorte qu'il ne s'agit pas d'une prétention à laquelle la cour doit répondre en application de l'article 954 du code de procédure civile.

La Selarl Alliance MJ ès-qualités de liquidateur de la société Celtique demande à la cour de constater qu'aucun solde n'est dû aux intimés dès lors :

- que les intimés se contentent d'affirmer que leur retard est lié aux attentats survenus à [Localité 11] en novembre 2015, alors que le chantier est à [Localité 8] et que le devis a été accepté bien antérieurement,

- que les intimés ne justifient pas du bien fondé de leurs prétentions financières alors que la charge de la preuve leur incombe.

En réponse, les consorts [J] demandent à la cour de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Celtique à régler la facture litigieuse, et de l'infirmer en ce qui concerne le taux d'intérêt appliqué, dès lors :

- que la société Celtique a accepté le 18 septembre 2015 le devis du 24 août 2015,

- qu'ils sont intervenus début décembre 2015, mais que la société Celtique a ensuite mis un terme au chantier, alors que les travaux n'étaient pas terminés, sans les réceptionner,

- que la société Celtique ne leur a rien reproché jusqu'à son courrier du 4 juillet 2016, dans lequel elle allègue un préjudice de 35.000 euros sans en justifier, qu'en cause d'appel, elle forfaitise désormais son préjudice à 16.000 euros,

- que le retard dans l'exécution des travaux n'est que de 4 ou 5 jours, et qu'en tout état de cause les autres lots du chantier n'étaient terminés qu'au 30 novembre 2015, ce qui empêchait leur intervention avant cette date,

- qu'ils ont travaillé dès le 3 décembre sur le chantier de la société Celtique et ont même travaillé de nuit entre le 4 et le 5 décembre, ce qui a permis à la société Celtique d'ouvrir le 5 décembre, que la réalisation des différents mobiliers a démarré bien avant début décembre, immédiatement après la signature du devis,

- qu'aucune date impérative n'avait en tout état de cause été prévue entre les parties,

- que l'établissement de la société Celtique n'est resté fermé que cinq jours au-delà de la date d'ouverture prévue, dans un contexte défavorable à la restauration compte tenu des attentats survenus à [Localité 11] le 13 novembre 2015,

- que la société Celtique est mal venue à invoquer des désordres et malfaçons alors que la facture d'avril 2016 ne porte que sur des travaux qui ont été effectivement réalisés et que la société Celtique est seule responsable que les travaux n'aient pas été menés à leur terme,

- que s'agissant des griefs figurant au constat d'huissier réalisé pour la société Celtique, ni les corniches ni le vernis, ni la desserte n'ont été facturés dans la facture du 14 avril 2016, et les plinthes et portes sont à la disposition de la société Celtique qui en avait refusé la livraison,

- que le taux d'intérêt conventionnel expressément reporté au sein de la facture litigieuse doit être appliqué (trois fois le taux d'intérêt légal).

Il résulte des pièces dossier que les consorts [J] se sont engagés à exécuter des travaux pour le compte de la société Celtique selon devis du 24 août 2015 d'un montant de 45.843,82 euros accepté le 15 septembre 2015, le devis précisant "nous vous confirmons notre meilleur délai : semaine 44/45 à confirmer lors du démarrage du chantier". Aucun délai impératif n'était donc fixé pour l'exécution des travaux ni aucunes pénalités de retard.

Par mail du 17 septembre 2015, la société Celtique indiquait que l'intervention de [C] [J] était prévue le mercredi 20 octobre 2015 à 10 heures pour le démontage du bar et de la desserte et des meubles annexes.

Les consorts [J] précisaient le 8 octobre 2015 intervenir sur le chantier du 5 au 20 novembre 2015 aux motifs que "les affaires en cours ne nous permettent malheureusement pas de commencer avant" et la société Celtique, par mail du 28 novembre 2015 demandait à M. [J] de finir le chantier pour éviter d'avoir des soucis avec les différents corps de métier devant intervenir après lui. Les travaux commençaient avec un léger retard en fin de semaine 45.

Il n'est pas contestable que des prestations ont néanmoins été réalisées nonobstant l'absence de procès-verbal de réception. Une facture d'acompte d'un montant de 14.583,33 euros HT a été acquittée et les consorts [J] ont dressé leur facture définitive de 15.401,39 euros en déduisant la facture d'acompte, tous les travaux mentionnés au devis n'étant en outre pas facturés. Par courrier du 4 juillet 2016 répondant aux mises en demeure adverses, la société Celtique n'a pas contesté l'exécution de travaux pour son compte mais seulement les conditions d'exécution et l'absence de finition.

La société Celtique affirme que le temps imparti n'a pas été respecté alors que l'établissement était fermé initialement du 20 octobre au 5 novembre, estimant une perte de chiffre d'affaires de 35.000 euros. Elle produit une attestation d'une société SK Agencement affirmant avoir subi des retards dus en grande partie à Fars meubles et avoir dû effectuer des travaux devant être exécutés par cette société outre un constat d'huissier non contradictoire aux fins d'établir les carences des intimés.

Force est cependant de constater qu'aucun document contractuel n'a déterminé que les travaux devaient être effectués entre le 20 octobre et le 5 novembre 2015 et aucun planning d'intervention des différentes sociétés n'a été dressé. Ainsi, si les intimés reconnaissent un léger retard d'intervention qu'ils imputent aux attentats terroristes de [Localité 11], il n'est pas possible de déterminer exactement ce qui était initialement prévu et à quelle date pour chaque entreprise sur le chantier et les seules affirmations de la société SK Agencement ne pallient pas cette carence et ne permet pas d'imputer la responsabilité de retards aux seuls intimés.

Le constat d'huissier, tardif puisqu'établi 5 mois après les travaux litigieux, a été dressé sur la seule demande de la société Celtique et il est par ailleurs totalement illisible et ne peut justifier une exception d'inexécution et aucun procès-verbal de réception listant des réserves sur les travaux effectués n'a été établi alors que la société Celtique avait repris la possession des lieux, manifestant son acceptation tacite des travaux

Enfin, l'appelante se contente de faire état d'une perte de chiffre d'affaire conséquente sans en rapporter la moindre preuve.

Il découle de tout ce qui précède que les intimés ont droit au paiement des prestations effectivement réalisées et acceptées et que la société appelante ne rapporte la preuve d'aucune exception d'inexécution qui la libérerait de ses obligations.

En conséquence de ce qui précède, le jugement ne peut qu'être confirmé sur le montant en principal de la créance des consorts [J] sauf à fixer désormais la créance en raison de la procédure collective.

Sur le taux d'intérêt applicable

Selon l'article L 441-6 du code de commerce, dans sa version applicable au litige, les conditions de règlement doivent obligatoirement préciser les conditions d'application et le taux d'intérêt des pénalités de retard exigibles le jour suivant la date de règlement figurant sur la facture ainsi que le montant de l'indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement due au créancier dans le cas où les sommes dues sont réglées après cette date. Sauf disposition contraire qui ne peut toutefois fixer un taux inférieur à trois fois le taux d'intérêt légal, ce taux est égal au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage. Dans ce cas, le taux applicable pendant le premier semestre de l'année concernée est le taux en vigueur au 1er janvier de l'année en question. Pour le second semestre de l'année concernée, il est le taux en vigueur au 1er juillet de l'année en question. Les pénalités de retard sont exigibles sans qu'un rappel soit nécessaire. Tout professionnel en situation de retard de paiement est de plein droit débiteur, à l'égard du créancier, d'une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement, dont le montant est fixé par décret. Lorsque les frais de recouvrement exposés sont supérieurs au montant de cette indemnité forfaitaire, le créancier peut demander une indemnisation complémentaire, sur justification. Toutefois, le créancier ne peut invoquer le bénéfice de ces indemnités lorsque l'ouverture d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire interdit le paiement à son échéance de la créance qui lui est due.

La facture litigieuse précisait que "en cas de retard de paiement, une pénalité égale à trois fois le taux d'intérêt légal sera exigible (décret 2009-138 du 9 février 2009)'.

Cette mention suffit à faire courir l'intérêt conventionnel susvisé jusqu'à l'arrêt du cours des intérêts découlant de la procédure collective.

Le jugement est infirmé en ce qu'il a seulement prévu un intérêt légal.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La procédure collective de la société Celtique a la charge des dépens de première instance et d'appel.

La somme octroyée en première instance au titre de l'article 700 du code de procédure civile est confirmée mais il est équitable de ne pas faire droit à la demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande de nullité de l'ordonnance d'injonction de payer.

Confirme le jugement déféré, sauf en ce qu'il a prononcé des condamnations à paiement au bénéfice de la société Celtique et sauf en ce qu'il a retenu l'intérêt légal sur le principal.

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe la créance de MM [E] et [C] [J] à la procédure collective de la société Celtique comme suit :

- la somme en principal de 15.401,39 euros avec intérêts conventionnels de trois fois le taux d'intérêt légal à compter du 9 juin 2016, date de la première mise en demeure, jusqu'à l'arrêt du cours des intérêts, en raison de la procédure collective,

- la somme de 750 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la Selarl Alliance MJ représentée par Me [T] agissant ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société Celtique aux dépens de première instance et d'appel.

Dit n'y avoir lieu à indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/05024
Date de la décision : 08/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-08;19.05024 ?
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