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07/12/2022 | FRANCE | N°22/01391

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 07 décembre 2022, 22/01391


N° RG 22/01391 -N°Portalis DBVX-V-B7G-OEHT









Décision du Président du TJ de LYON en Référé du 10 janvier 2022



RG : 21/00688





S.A.R.L. LIU



C/



S.C.I. SAINT JOSEPH 7





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



8ème chambre



ARRÊT DU 07 Décembre 2022







APPELANTE :



SARL LIU, société à responsabilité limitée au capital de 7 622,45Â

 euros, inscrite au registre du commerce et des sociétés de LYON (Rhône) sous le numéro 389 566 365, dont le siège social est [Adresse 1] représentée par son gérant en exercice domicilié de droit audit siège



Représentée par Me Christelle BEULAIGNE de...

N° RG 22/01391 -N°Portalis DBVX-V-B7G-OEHT

Décision du Président du TJ de LYON en Référé du 10 janvier 2022

RG : 21/00688

S.A.R.L. LIU

C/

S.C.I. SAINT JOSEPH 7

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 07 Décembre 2022

APPELANTE :

SARL LIU, société à responsabilité limitée au capital de 7 622,45 euros, inscrite au registre du commerce et des sociétés de LYON (Rhône) sous le numéro 389 566 365, dont le siège social est [Adresse 1] représentée par son gérant en exercice domicilié de droit audit siège

Représentée par Me Christelle BEULAIGNE de l'AARPI B&C AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 796

INTIMÉE :

SCI SAINT JOSEPH 7, au capital social de 1 530 000 euros, immatriculée au RCS sous le numéro 423 953 058, dont le siège est [Adresse 3], représentée par son mandataire la SAS GESTION ET PATRIMOINE LESCUYER, au capital de 200 000 euros, immatriculée au RCS de LYON sous le numéro 484 706 270, dont le siège est situé [Adresse 2], elle-même représentée par son Président en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

Représentée par Me Damien MONTIBELLER, avocat au barreau de LYON, toque : 2632

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 25 Octobre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 25 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 07 Décembre 2022

Audience tenue par Bénédicte BOISSELET, président, et Karen STELLA, conseiller, qui ont siégé en rapporteurs sans opposition des avocats dûment avisés et ont rendu compte à la Cour dans leur délibéré,

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l'audience, un membre de la Cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Bénédicte BOISSELET, président

- Karen STELLA, conseiller

- Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

Arrêt Contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Bénédicte BOISSELET, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Par acte du 2 mai 1992, la SCI Saint-Joseph 7 a donné à bail à M. [T] [M] [S] et à M. [H] [B] des locaux commerciaux situés [Adresse 1], moyennant un loyer annuel hors taxes et hors charges de 54'000 Fr (8 232,25 euros)

Par acte du 17 novembre 1992, la Sarl Liu a été subrogée dans les droits et obligations des deux locataires.

Par acte du 20 juin 2011, la SCI Saint-Joseph a fait signifier d'un congé avec offre de renouvellement moyennant un loyer renouvelé annuel de 13 65,48 euros hors charges est hors-taxes.

Le bail a été renouvelé pour une durée de neuf années à compter du 1er janvier 2012.

Par acte du 15 juin 2020, le bailleur a fait délivrer un nouveau congé pour le 31 décembre 2020 avec offre de renouvellement à compter du 1er janvier 2021 moyennant un loyer renouvelé annuel de 19'000 euros hors taxes et hors charges. La Sarl Liu a répondu accepter le renouvellement du bail mais en proposant un loyer annuel de 15'500 euros.

Des échanges ont suivi entre les parties.

Par acte du 1er février 2021, la Sci Saint-Joseph 7 a fait délivrer à la Sarl Liu un commandement de payer visant la clause résolutoire et réclamant la somme principale de 8 457,36 euros.

Soutenant que la locataire n'avait pas satisfait aux causes du commandement dans le délai d'un mois, par exploit du 9 avril 2021, la SCI Saint-Joseph 7 a fait assigner la Sarl Liu devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir, notamment constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail et statuer sur ses conséquences, sollicitant par ailleurs une provision à valoir sur sa créance au titre de l'arriéré locatif.

Par ordonnance du 10 janvier 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon a :

au principal, renvoyé les parties à se pouvoir ainsi qu'elles aviseront mais des à présent,

débouté la Sarl Liu de ses contestations,

constaté l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le bail,

condamné la Sarl Liu à verser à la Sci Saint-Joseph 7 la somme provisionnelle de 821,96 euros au titre des loyers et charges impayés au 25 octobre 2021, outre intérêts,

dit que la Sarl Liu pourra s'acquitter de cette somme au moyen d'un seul versement intervenant le cinq du mois suivant la signification de la présente décision, en plus du loyer en cours,

dit que pendant le délai, le jeu de la clause résolutoire est suspendu et qu'à défaut de respect d'une seule échéance et des échéances courantes, y compris les loyers échus depuis l'audience, l'intégralité de la dette deviendra exigible, ce, après une mise en demeure restée sans effet durant 15 jours, la clause résolutoire prendra effet, l'expulsion de la Sarl Liu et de tous occupants de son chef pourra être poursuivie avec le concours de la force publique, et qu'elle sera redevable, d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer et des charges jusqu'au départ effectif des lieux,

dit que la clause résolutoire ne jouera pas si la Sarl Liu se libère dans les conditions prévues,

condamné la Sarl Liu à payer à la Sci Saint-Joseph 7 la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la Sarl Liu aux dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer.

La Sarl Liu a interjeté appel de cette décision par déclaration enregistrée par voie électronique au greffe de la cour le 17 février 2022, dans son intégralité.

Aux termes de ses dernières écritures, conclusions d'appelante numéro 2, régularisées par voie électronique le 11 mai 2022, la Sarl Liu demande à la cour, de :

vu le bail, et le commandement de payer visant la clause résolutoire délivré le 1er février 2021,

vu les articles 696 et 700 du Code de procédure civile, article L 145-41 du Code de commerce, article 1104 alinéa premier du Code civil, issu de l'ordonnance du 10 février 2016, article 1343-5 du Code civil, articles L 145-15 et L 145-41 du Code de commerce, article 14 de la loi n°2020-1766 du 30 décembre 2020.

Il est demandé à la cour, de :

déclarer recevable et bien fondée la Sarl Liu en sa déclaration d'appel,

débouter la Sci Saint-Joseph de son appel incident et de l'ensemble de ses demandes,

réformer l'ordonnance de référé rendu par le président du tribunal judiciaire de Lyon le 10 janvier 2022 en ce qu'elle a :

au principal, renvoyé les parties à se pouvoir ainsi qu'elles aviseront mais des à présent,

débouté la Sarl Liu de ses contestations,

constaté l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le bail,

condamné la Sarl Liu à verser à la Sci Saint-Joseph 7 la somme provisionnelle de 821,96 euros au titre des loyers et charges impayés au 25 octobre 2021, outre intérêts,

dit que la Sarl Liu pourra s'acquitter de cette somme au moyen d'un seul versement intervenant le cinq du mois suivant la signification de la présente décision, en plus du loyer en cours,

dit que pendant le délai, le jeu de la clause résolutoire est suspendu et qu'à défaut de respect d'une seule échéance et des échéances courantes, y compris les loyers échus depuis l'audience, l'intégralité de la dette deviendra exigible, ceux après une mise en demeure restée sans effet durant 15 jours, la clause résolutoire prendra effet, l'expulsion de la Sarl Liu et de tous occupants de son chef pourra être poursuivie avec le concours de la force publique, et qu'elle sera redevable, d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer et des charges jusqu'au départ effectif des lieux,

dit que la clause résolutoire ne jouera pas si la Sarl Liu se libère dans les conditions prévues,

condamné la Sarl Liu à payer à la Sci Saint-Joseph 7 la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné la Sarl Liu aux dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer.

Et statuant à nouveau,

déclarer recevable et bien fondée la Sarl Liu en sa déclaration d'appel,

débouter la Sci Saint-Joseph 7 de l'ensemble de ses demandes,

déclarer nul et de nul effet le commandement de payer visant la clause résolutoire délivrée par la Sci Saint-Joseph 7 à la Sarl Liu le février 2021,

Subsidiairement,

débouter la Sci Saint-Joseph 7 de l'ensemble de ses demandes,

déclarer bien fondée la Sarl Liu en ses demandes, fins et contestations,

dire que les demandes de la Sci Saint-Joseph 7 se heurtent à des contestations sérieuses,

dire que la Sci Saint-Joseph 7 invoque de mauvaise foi la clause résolutoire insérée au bail.

Tres subsidiairement,

accorder à la Sarl Liu les plus larges délais de paiement,

suspendre les effets de la clause résolutoire.

En tout état de cause,

condamner la Sci Saint-Joseph 7 à payer à la Sarl Liu :

une indemnité de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

les dépens de première instance et d'appel, avec pour ces derniers droits pour Me Christelle Beulaigne de les recouvrer directement dans les conditions prévues par l'article 699 du code de procédure civile.

À l'appui de ses demandes, la Sarl Liu fait valoir :

que le commandement de payer et le décompte ne permettent pas au preneur de vérifier les montants réclamés et leur cause actuelle légale, des échéances mentionnées étant notamment composées de frais et le décompte ne ventilant pas les loyers et charges réclamées,

subsidiairement, qu'il existait des contestations sérieuses, la bailleresse réclamant des charges en violation du contrat de bail qui stipulait une quote-part de 40/1000ème alors que les décomptes lui imputent 70/1067 ème et que peu importait une erreur de tantième lors de la prise à bail,

que la bailleresse réclame le remboursement de dépenses qui ne pouvaient pas être mises à la charge du locataire alors qu'elle est tenue de justifier les charges réclamées,

que le décompte ventilé finalement produit mentionne des frais impayés de gestion de clause pénale mais également un impôt foncier qui n'est pas dû par la locataire,

que le décompte réclame des loyers couvrant la période de fermeture du commerce, notamment avril 2020, alors que la locataire avait obtenu du bailleur un échéancier de paiement, que la bailleresse avait insisté pour que la Sarl accepte le déplafonnement du loyer renouvelé, et qu'elle a assigné en résiliation en violation des dispositions de l'article 14 de la loi du 14 novembre 2020 autorisant la prorogation de l'état d'urgence et empêchant toute acquisition de la clause résolutoire,

que le bailleur est de mauvaise foi, le commandement de payer constituant exclusivement un moyen de pression pour accepter le déplafonnement imposé par le bailleur,

très subsidiairement, qu'elle justifiait de ses difficultés de paiement et effectuait des paiements réguliers, que depuis l'audience du 22 novembre ,elle s'est acquittée de l'intégralité de sa dette locative.

Aux termes de ses dernières écritures, conclusions d'intimé numéro 1, régularisées par voie électronique le 16 avril 2022, la SCI Saint-Joseph 7 sollicite voir :

Vu les articles L145-15 et L 145-41 du code de commerce, l'article 1104 alinéa premier du Code civil, issu de l'ordonnance du 10 février 2016, l'article 1343-5 du Code civil, 696 et 700 du code de procédure civile, 14 de la loi n°2020-1379 du 14 novembre 2020, le décret n°2020-1766 du 30 décembre 2020, les articles 109 et suivants du Code de procédure civile, les pièces produites,

Confirmer l'ordonnance rendue le 10 janvier 2022 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Lyon en ce qu'elle a :

débouté la Sarl Liu de ses contestations,

constaté l'acquisition de la clause résolutoire stipulée dans le bail,

condamné la Sarl Liu à verser à la Sci Saint-Joseph 7 la somme provisionnelle de 821,96 euros au titre des loyers et charges impayés au 25 octobre 2021, outre intérêts,

condamné la Sarl Liu au paiement de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Réformer la décision en ce qu'elle a :

dit que la Sarl Liu pourra s'acquitter de la somme de 821,96 euros au moyen d'un seul le versement intervenants le cinq du mois suivant la signification de la présente décision, en plus du loyer en cours,

dit que pendant le délai, le jeu de la clause résolutoire est suspendu et qu'à défaut de respect d'une seule échéance et des échéances courantes, y compris les loyers échus depuis l'audience, l'intégralité de la dette deviendra exigible, ceux après une mise en demeure restée sans effet durant 15 jours, la clause résolutoire prendra effet, l'expulsion de la Sarl Liu et de tous occupants de son chef pourra être poursuivie avec le concours de la force publique, et qu'elle sera redevable, d'une indemnité d'occupation égale au montant du loyer et des charges jusqu'au départ effectif des lieux.

Statuant à nouveau :

prononcer l'acquisition de la clause résolutoire du bail à compter du 1er mars 2021,

rejeter la demande de délais de paiement formée par la sarl Liu et d'une manière générale rejeter l'ensemble de ses demandes,

fixer une indemnité d'occupation équivalente au loyer et charges payable mensuellement d'avance au domicile du bailleur ou de son représentant le premier jour ouvrable du mois à compter du 2 mars 2021,

ordonner l'expulsion de la Sarl Liu et de tout occupant de son chef, des lieux occupés sans droit ni titre, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier,

autoriser la Sci Saint-Joseph 7 à séquestrer les meubles laissés dans les lieux lors de l'expulsion aux frais de la Sarl Liu, et dire que le sort desdits meublent sera réglé conformément aux dispositions des articles R 433-1 du Code des procédures civiles d'exécution,

condamner la Sarl Liu au paiement d'une provision de 821,96 euros TTC (à parfaire) correspondant aux loyers, charges et indemnité d'occupation dus à ce jour et à parfaire jusqu'à la libération effective des lieux loués et la remise des clefs,

Condamner la sarl Liu au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de ses prétentions la Sci Saint-Joseph 7 fait valoir :

que le juge des référés n'a pas compétence pour constater la nullité d'un commandement de payer, que le commandement était précis et la locataire qui recevait les avis d'échéance les avait toujours réglés sans contester,

qu'il ne reste dû que 67,91 euros au titre des charges pour 2015/2020 et les charges n'expliquent donc pas les impayés, que la répartition a changé depuis le bail évoluant en même temps que l'immeuble dont la SCI est seule propriétaire et est de 66/1000 èmes soit 70/1067 èmes comme résultant des décomptes produits, que selon métrage réalisé en 1999, les locaux se composent également d'un entresol de 54,65 m²,

que les charges locatives sont conformes au bail et prévues par le décret n°87-713 du 28 août 1987 sauf la réparation sérrurerie (126,50 euros), la désourisation (408,10 euros), soit à déduire pour 66/1000 èmes : 35,3 euros TTC,

que les factures des charges de copropriété peuvent être vérifiées par le preneur,

que les frais d'impayés et de gestion de la clause pénale sont justifiés et prévus au bail,

que la prescription est acquise pour la période anterieure au 3 novembre 2016, et donc pour la taxe foncière, que la contestation ne pouvait porter que sur 146,80 euros,

que l'échéancier proposé pour avril et mai 2020 a été refusé par le preneur,

que l'article 14 de la loi du 14 novembre 2020 ne pouvait s'appliquer et que de plus, il ne peut plus faire obstacle au recouvrement de loyers antérieurs à son entrée en vigueur,

que la mauvaise foi du bailleur n'est pas démontrée,

que le preneur ne justfie pas de difficultés financières et ne produit pas d'éléments comptables.

Pour plus ample exposé des moyens développés par les parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile il sera fait référence à leurs écritures déposées et/ou débattues par observations à l'audience du 25 octobre 2022 à 9 heures.

Puis l'affaire a été mise en délibéré au 7 décembre 2022.

MOTIFS

Sur la demande visant au constat de l'acquisition de la clause résolutoire :

Aux termes de l'article 834 du Code de procédure civile : ' Dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différent.'

La juridiction des référés n'est toutefois pas tenue de caractériser l'urgence, au sens de l'article 834 du Code civil, pour constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d'un bail.

L'article L 145-41 du Code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Au sens des dispositions précitées, le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d'une clause contenue à l'acte à cet effet des lors que :

le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire est fautif,

le bailleur est, de toute évidence en situation d'invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,

la clause résolutoire est dénuée d'ambiguïté et ne nécessite pas interprétation, la clause résolutoire d'un bail devant s'interpréter strictement.

Par ailleurs, en vertu de l'article L 145-41 al 2 du Code de commerce, le juge saisi d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du Code civil peut, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

L'octroi des délais de paiement autorisé par l'article 1343-5 du Code civil, n'est nullement conditionné à la seule existence d'une situation économique obérée de celui qui les demande, mais relève du pouvoir discrétionnaire du juge.

En l'espèce, le bail comporte une clause résolutoire qui n'est pas discutée.

Le commandement visant la clause résolutoire délivré le 1er février 2021 réclamait la somme de 8 457,36 euros au titre de l'arriéré locatif au 1er janvier 2021.

L'appelante conteste la régularité de cet acte soutenant que le montant des échéances mensuelles ne correspondait pas au seul loyer sans que le document ne distingue les charges et/ou frais ajoutés.

Cependant, le commandement a précisemment distingué chaque échéance mensuelle et les règlements effectués. Le montant du loyer étant connu, la sarl Liu était en mesure de savoir ce qui était réclamé au titre de celui-ci et ce qui était réclamé en sus.

Le juge des référés n'a pas compétence pour prononcer la nullité d'un commandement de payer et en l'espèce, la cour considère qu'en sa forme, ce commandement n'est pas serieusement contestable.

La sarl Liu invoque cependant l'existence d'une contestation sérieuse en raison des charges imputées et des loyers couvrant la période de fermeture du commerce liée à la crise sanitaire.

Il doit être rappelé que bail signé entre les parties prévoit que ' le preneur remboursera au bailleur les charges relevant les lieux loués, tel que celles-ci sont déterminées par le règlement de copropriété et énumérées par le décret n°87-713 du 28 août 1987 ' et également ' le montant de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères'. Une provision mensuelle était prévue.

Le contrat impute à la locataire une quote-part de 40/1000 ème des charges communes de l'immeuble.

Ni l'avenant signé le 3 juin 1996, ni le renouvellement du bail à compter du 1er janvier 2012 n'apportent de nouvel élément sur la question des charges.

Un décompte détaillé arrêté au 1er juillet 2021 permet de relever l'imputation à la locataire d'une clause pénale outre une provision mensuelle pour charges de 175 ou 180 euros selon les échéances, provision que la locataire a payée en sus des loyers.

La SCI Saint-Joseph invoque le paiement de charges de copropriété tout en indiquant être propriétaire de l'immeuble et justifie appeler les charges sur la base de 70/1067 ème, la répartition ayant évolué en même temps que l'immeuble, se basant sur un métrage réalisé en 1999. Les tantièmes imputés aux locaux loués par la société Liu étaient de 66/1000. (soit 70/1067) et que de plus le preneur s'était approprié un local désigné comme commun (entresol de 54,65 m²).

Le bailleur ne justifie cependant d'aucun avenant contractuel prenant en compte la nouvelle répartition des tantièmes tout en faisant valoir que la dette locative correspondait quasi exclusivement à des loyers, que seules les provisions figurant sur l'échéance du deuxième trimestre 2020 étaient impayées tout comme le loyer.

Par ailleurs, la locataire conteste certaines des charges qui ont été imputées car non récupérables en application du décret du 28 août 1987.

Le bailleur indique que l'article 12 des conditions générales du bail met à la charge du preneur toutes les réparations à l'exception des grosses réparations définies par l'article 606 du Code civil tandis que les conditions particulières se réfèrent aux réparations locatives visées par le décret du 28 août 1996 en reconnaissant que tout au plus, seules pourraient être discutées les charges de serrurerie pour un montant de 126,50 euros TTC et la désourisation pour un montant de 408,10 euros TTC, total de 534,6 euros TTC, soit à déduire compte tenu de ses tantièmes 35,28 euros TTC au profit de la locataire.

Si la taxe foncière 2009 et 2010 et certaines des charges imputées par la bailleur au locataire ne peuvent plus être discutées du fait de la prescription, la cour considère qu'il existe une contestation serieuse sur les charges.

La Sarl Liu fait également valoir que le commandement de payer a réclamé des loyers couvrant la période de fermeture du commerce pour lesquels elle avait obtenu du bailleur un échéancier de paiement, et que celui-ci l'avait assigné en violation des dispositions de l'article 14 de la loi du 14 novembre 2020. Cependant, la locataire dont le commerce porte sur des articles de maroquinerie et autres, avait pu rouvrir son commerce le 28 novembre 2020 nonobstant le respect d'un protocole.

Enfin, la locataire invoque une déloyauté du bailleur qui aurait fait délivrer le commandement de payer comme moyen de pression pour que la locataire accepte le déplafonnement.

Pour autant, l'existence des conditions de mise en 'uvre de la clause résolutoire est établie, l'arriéré locatif réclamé par le commandement comportant des loyers non contestés. Or ce commandement n'a pas été suivi d'effet dans le mois.

De ce fait, l'acquisition des effets de la clause résolutoire doit être constatée à la date du 1er mars 2021.

En considération des efforts faits par la Sarl Liu qui s'est acquittée des sommes réclamées et ne doit plus d'arriéré, puisque si la SCI Saint Joseph 7 sollicite la confirmation de la condamnation au paiement de la somme de 821,96 euros, elle reconnait dans le corps de ses conclusions que le paiement est intervenu, il convient de suspendre rétroactivement les effets de la clause résolutoire et de constater que la clause résolutoire n'a pas joué.

En conséquence, il convient de rejeter les demandes du bailleur tendant à faire ordonner l'expulsion de la Sarl Liu, le transport et la séquestration des meubles, et obtenir sa condamnation à lui verser un arriéré locatif.

Sur les demandes accessoires :

L'article 700 du Code de procédure civile prévoit que le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut même d'office pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation.

La cour confirmera la décision attaquée ayant condamné la sarl Liu aux dépens de l'instance, en ce compris le coût du commandement de payer et condamnera la Sci Saint-Joseph 7 aux dépens d'appel.

L'équité ne commande pas de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et au profit de la Sci Saint Joseph en première instance et au profit de la Sarl Liu en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme la décision déférée sauf sur les dépens.

Statuant à nouveau,

Suspend la réalisation des effets de la clause résolutoire du bail commercial,

Constate que la Sarl Liu s'est acquittée aupres de la Sci Saint Joseph 7 de l'arriéré dû au 25 octobre 2021 et qu'en conséquence, la clause résolutoire doit être réputée n'avoir pas joué,

Rejette toute autre demande,

Condamne la SCI Saint-Joseph 7 aux dépens à hauteur d'appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 22/01391
Date de la décision : 07/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-07;22.01391 ?
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