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06/12/2022 | FRANCE | N°20/06479

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale d (ps), 06 décembre 2022, 20/06479


AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE





RAPPORTEUR





R.G : N° RG 20/06479 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NH3X





S.A.S. [4]



C/

CPAM DE L'AIN







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Pole social du TJ de BOURG EN BRESSE

du 19 Octobre 2020

RG : 15/00407















































AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS




COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE



ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2022











APPELANTE :



S.A.S. [4]

[Adresse 5]

[Localité 2]



Accident [G] [O]



représentée par Me Gabriel RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON substituée par Me Laurianne MESSAGE, avocat au ba...

AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE

RAPPORTEUR

R.G : N° RG 20/06479 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NH3X

S.A.S. [4]

C/

CPAM DE L'AIN

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Pole social du TJ de BOURG EN BRESSE

du 19 Octobre 2020

RG : 15/00407

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 06 DECEMBRE 2022

APPELANTE :

S.A.S. [4]

[Adresse 5]

[Localité 2]

Accident [G] [O]

représentée par Me Gabriel RIGAL de la SELARL ONELAW, avocat au barreau de LYON substituée par Me Laurianne MESSAGE, avocat au barreau de LYON

INTIMEE :

CPAM DE L'AIN

Pôle des affaires juridiques

[Adresse 3]

[Localité 1]

représentée par madame Isabelle LEBRUN , audiencière, munie d'un pouvoir

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 06 Septembre 2022

Présidée par Thierry GAUTHIER, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

- Nathalie PALLE, présidente

- Thierry GAUTHIER, conseiller

- Vincent CASTELLI, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 06 Décembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société [4] (l'employeur) a déclaré le 22 février 2011 un accident de travail dont l'un de ses salariés, M. [O] (le salarié), engagé en qualité de conducteur, a indiqué avoir été victime le 18 février 2011. Un certificat médical initial a été établi le 22 février 2011, pour un traumatisme du genou gauche.

La caisse primaire d'assurance maladie de l'Ain a pris en charge cet accident et, a considéré que l'état de santé du salarié était consolidé au 26 janvier 2012.

L'employeur a saisi le 30 avril 2015 la commission de recours amiable de la caisse d'un recours concernant la durée et l'imputabilité au fait accidentel des arrêts de travail.

Par décision du 9 juin 2015, cette contestation était rejetée.

L'employeur a formé le 1er juillet 2015 un recours devant le tribunal des affaires de sécurité sociale, devenu le pôle social du tribunal de grande instance, puis du tribunal judiciaire, de Bourg-en-Bresse.

Par jugement du 19 octobre 2020 (n° RG 15/00407), ce tribunal a :

- débouté l'employeur de sa demande d'inopposabilité ;

- débouté l'employeur de sa demande d'expertise ;

- débouté les parties du surplus de leurs demandes ;

- condamné l'employeur à supporter les dépens de l'instance.

Par lettre recommandée envoyée le 18 novembre 2021, l'employeur a relevé appel de cette décision.

Dans ses conclusions déposées le 13 août 2021, l'employeur demande à la cour de :

- déclarer son appel recevable et d'infirmer la décision entreprise ;

- à titre principal : déclarer inopposable l'ensemble des lésions, soins, prestations, arrêts de travail de prolongation présentés par le salarié postérieurement au 23 février 2011 ainsi que toutes les conséquences financières afférentes ;

- à titre subsidiaire : ordonner une expertise, dont il précise les termes ;

- en tout état de cause, condamner la caisse aux dépens.

L'employeur fait valoir que :

- la caisse ne démontre pas que les arrêts de travail de prolongation seraient justifiés par une continuité de soins et de symptômes avec les lésions résultant de l'accident du 18 février 2011 déclaré par le salarié, de sorte que ces arrêts ne peuvent bénéficier de la présomption d'imputabilité ;

- la caisse a pris en charge 160 jours d'arrêts de travail, alors que le salarié s'est plaint d'une entorse au genou et à la cheville gauche, à la suite duquel le médecin traitant a tout d'abord prescrit un arrêt de travail initial de 2 jours ;

- il y a une disproportion manifeste entre la seule lésion initiale, bénigne, et la longueur des arrêts de travail dont a bénéficié le salarié, qui a consulté un médecin quatre jours après l'accident, un seul jour d'arrêt de travail lui ayant été prescrit ;

- selon l'avis de son médecin conseil, qui relève l'absence de documents pour la période du 23 février au 30 juin 2011, la longueur des arrêts de travail prescrits n'est pas motivée au regard des mentions des certificats médicaux, et une consolidation au 23 octobre 2011 lui paraît en adéquation ;

- concernant la mesure d'expertise, elle se justifie par la disproportion entre l'arrêt de travail initial et les arrêts de prolongation compte-tenu du barème de la caisse, qui prévoit 21 jours d'arrêts maximum en cas d'entorse grave du ligament collatéral médial du genou ;

- la nécessité de l'expertise est confortée par l'analyse de son médecin conseil, qui souligne l'incohérence entre la longueur des arrêts et la symptomatologie initiale

Dans ses conclusions déposées le 17 mai 2022, la caisse demande à la cour de :

- rejeter la demande d'expertise ;

- confirmer la décision de prise en charge de l'accident du travail déclaré par le salarié le 18 février 2011 et de ses conséquences pécuniaires jusqu'au 26 janvier 2012, date de consolidation.

La caisse fait valoir que :

- les arrêts et soins consécutifs à l'accident du travail bénéficient d'une présomption d'imputabilité, sans qu'il soit besoin de démontrer la continuité des symptômes et soins ;

- elle justifie du versement d'indemnités journalières de manière continue durant toute la période d'arrêt de travail, du 22 février 2011 au 31 juillet 2011, date de reprise du travail, qui a été suivie de soins jusqu'au 26 janvier 2012 ;

- les lésions initialement constatées sont cohérentes avec celles relevées lors de l'attribution de la rente, la notification faisant état de séquelles d'un traumatisme du genou gauche ;

- concernant la mesure d'expertise, l'employeur n'apporte aucun élément de nature à combattre la présomption ;

- l'employeur n'a pas usé de ses moyens de contrôle des arrêts de travail, prévus notamment par l'article L. 315-1 du code de la sécurité sociale et n'a saisi la commission de recours amiable que le 30 avril 2015, alors que l'accident date du 18 février 2011 et que la consolidation a été reconnue le 26 janvier 2012 ;

- en considération de l'ancienneté de l'accident du travail, elle ne dispose plus d'éléments médicaux, de sorte que le prononcé d'une expertise serait inutile ;

- le barème AMELI relatif à la longueur des arrêts de travail n'est qu'indicatif et ne constitue pas un commencement de preuve de ce que les arrêts de travail puisse avoir une cause totalement étrangère à l'accident du travail.

*

Conformément aux dispositions de l'article 446-1 du code de procédure civile, les parties ont oralement soutenu à l'audience les écritures qu'elles ont déposées au greffe ou fait viser par le greffier lors de l'audience de plaidoirie et qu'elles indiquent maintenir, sans rien y ajouter ou retrancher.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer, pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, aux écritures ci-dessus visées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En application des dispositions de l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée, ou travaillant à quelque titre que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise.

Il découle de ce texte que la présomption d'imputabilité au travail s'attachant aux lésions survenues au temps et sur le lieu du travail , dès lors qu'un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d'accident du travail est assorti d'un arrêt de travail, s'étend pendant toute la durée d'incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l'état de la victime, et il appartient à l'employeur qui conteste cette présomption d'apporter la preuve contraire.

Elle ne fait pas obstacle à ce que l'employeur conteste l'imputabilité à l'accident du travail initialement reconnu de tout ou partie des soins et arrêts de travail pris en charge ultérieurement par la caisse primaire d'assurance maladie, mais lui impose alors de rapporter, par tous moyens, la preuve de l'absence de lien de causalité, c'est-à-dire d'établir que les arrêts de travail et les soins prescrits en conséquence de l'accident résultent d'une cause totalement étrangère au travail.

Il doit être en outre rappelé que le lien de causalité qui résulte de la présomption subsiste quand bien même l'accident aurait seulement précipité l'évolution ou l'aggravation d'un état pathologique antérieur qui n'entraînait jusqu'alors aucune incapacité.

Une mesure d'expertise n'a donc lieu d'être ordonnée que si l'employeur apporte des éléments de nature à laisser présumer l'existence d'une cause étrangère qui serait à l'origine exclusive des arrêts de travail contestés et, en tout état de cause, elle n'a pas vocation à pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Enfin, la référence au caractère disproportionné entre la longueur des arrêts de travail et la lésion constatée n'est pas de nature à établir de manière suffisante l'existence d'un litige d'ordre médical, eu égard aux éléments qui précèdent.

En l'espèce, il sera tout d'abord relevé que l'employeur conteste, non la prise en charge par la caisse de l'accident du travail du 18 février 2011, mais celle des arrêts de travail prescrits au-delà du 23 février 2011.

La caisse produit le certificat médical initial du 22 février 2011, qui indique un « mécanisme de traumatisme sur pivot du genou gauche, douleurs sur le tendon quadricipital, testing ligamentaire normal », ainsi que plusieurs certificats de prolongation qui mentionnent notamment « suivi gonalgie » pour le genou gauche, désignée comme « chronique », le certificat final du 26 janvier 2012 indiquant « suivi gonalgie [gauche] fissuration cartilage rotule. Persistance d'une gêne mécanique. Syndrôme rotulien jusqu'à la douleur... », ces certificats ayant prescrit des arrêts de travail jusqu'au 31 juillet 2011 et des soins ayant été prescrits par la suite.

Elle justifie par ailleurs, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté, par une capture d'écran de son logiciel de gestion indiquant le nom du salarié, et différentes mentions permettant d'identifier la cause du versement, de ce que le salarié a perçu du 22 février 2011 au 31 juillet 2011 des indemnités journalières.

Il sera relevé qu'en dépit de la préconisation du médecin conseil de l'employeur, la date de la consolidation ne saurait être remise en cause dans le cadre de la présente instance.

Dès lors, la présomption d'imputabilité prévue par l'article L. 411-1 du code de la sécurité sociale, susvisé, s'étend à toute la période de durant laquelle des arrêts de travail et des soins ont été prescrits au salarié, jusqu'à la date de consolidation retenue par la caisse.

Pour renverser cette présomption, l'employeur demande qu'une expertise soit ordonnée. Il sera rappelé qu'une telle mesure n'a pas vocation à pallier la carence d'une partie dans l'administration de la preuve.

Cependant, il y a lieu de relever, comme l'indique la caisse, la cohérence entre l'indication de la lésion initiale, soit un traumatisme au genou gauche, et celle figurant sur les certificats médicaux successifs produits ainsi que sur le certificat médical final, qui concernent également une lésion au genou gauche.

Il sera relevé à cet égard que les certificats médicaux de prolongation font état, dès le 30 juin 2011, de l'échec relatif des moyens thérapeutiques prescrits pour soulager le salarié, ce qui ne tend pas à accréditer l'avis du médecin conseil de l'employeur, en ce qu'il considère le traumatisme initial comme bénin, et constitue une cause raisonnable de prolongation des arrêts et soins.

Or, l'employeur invoque seulement le caractère disproportionné de la longueur des arrêts de travail prescrits, au regard du barème de la caisse. Cependant, un tel barème n'a qu'une valeur indicative et la longueur des arrêts prescrits n'est pas de nature à établir que les arrêts de travail et soins puissent avoir une cause étrangère au travail.

Il n'est dès lors pas produit d'éléments suffisants permettant d'envisager que les arrêts de travail et soins prescrits auraient, à compter du 23 février 2011, une cause totalement étrangère au travail.

La demande d'expertise n'est dès lors pas fondée.

Le jugement sera confirmé en toutes ses dispositions.

L'employeur, succombant en son appel, devra en supporter les dépens.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

CONDAMNE la société [4] aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale d (ps)
Numéro d'arrêt : 20/06479
Date de la décision : 06/12/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-12-06;20.06479 ?
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