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17/11/2022 | FRANCE | N°19/04592

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 17 novembre 2022, 19/04592


N° RG 19/04592 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MORM









Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 29 avril 2019



RG : 2018j00902





[J]



C/



SA SOCIETE COOPERATIVE TAXI-RADIO DE LYON





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 17 Novembre 2022







APPELANT :



M. [L] [J]

né le [Date naissance 1] 197

4 à [Localité 7] ([Localité 4])

[Adresse 6]

[Localité 5]



Représenté par Me Florent DELPOUX, avocat au barreau de LYON, toque : 1900









INTIMEE :



SA SOCIETE COOPERATIVE TAXI-RADIO DE LYON

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Julien MI...

N° RG 19/04592 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MORM

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 29 avril 2019

RG : 2018j00902

[J]

C/

SA SOCIETE COOPERATIVE TAXI-RADIO DE LYON

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 17 Novembre 2022

APPELANT :

M. [L] [J]

né le [Date naissance 1] 1974 à [Localité 7] ([Localité 4])

[Adresse 6]

[Localité 5]

Représenté par Me Florent DELPOUX, avocat au barreau de LYON, toque : 1900

INTIMEE :

SA SOCIETE COOPERATIVE TAXI-RADIO DE LYON

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Julien MICHAL de la SELARL CABINET D'AVOCATS MICHAL ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 170

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 29 Octobre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 17 Novembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Julien MIGNOT, greffier.

A l'audience, Aurore JULLIEN a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu prononcé et signé par Madame Patricia GONZALEZ, Présidente, à l'audience publique du 17 Novembre 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffière, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SA Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon (ci-après Société Taxi de Lyon) exploite un central de réservation de taxi auquel sont adhérents des chauffeurs de taxi indépendants.

Le 20 août 2016, un mandat a été conclu entre la société Coopérative Taxi-Radio de Lyon et M. [L] [J], aux termes duquel ce dernier est devenu coopérateur-stagiaire pendant une période de trois ans. M. [J] a procédé au règlement d'une somme de 3.826,47 euros afin de financer le fond coopératif.

Par lettre recommandée du 20 février 2018, la société Coopérative Taxi-Radio de Lyon a convoqué M. [J] à un entretien fixé au 26 février 2018, qui s'est soldé par la décision du Conseil d'Administration de mettre fin à la période de stage de M. [J] avec effet au 4 mars 2018, conformément aux dispositions de l'article 14 bis des statuts.

Par courrier en date du 21 mars 2018, M. [J], par l'intermédiaire de son assureur protection juridique, a contesté la décision du Conseil d'Administration de la société Coopérative Taxi-Radio de Lyon. Cette dernière, par courrier en réponse du 28 février 2018, a confirmé son choix.

Par acte d'huissier de justice du 30 mai 2018, M. [J] a fait assigner la société Coopérative Taxi-Radio de Lyon en responsabilité aux fins de prononcer la nullité de la décision d'exclusion, d'ordonner sa réintégration et de condamner la société Coopérative Taxi-Radio de Lyon à l'indemniser de la somme de 3.349,37 euros par mois à compter du mois de mars 2018.

Par jugement du 29 mai 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté M. [J] de sa demande de réintégration,

- dit que la procédure d'exclusion dont M. [J] a fait l'objet est intervenue en conformité avec les dispositions statuaires de l'article 14 bis,

- condamné la société Coopérative Taxi Radio de Lyon à payer à M. [J] la somme de 3.826,47 euros correspondant au financement du fond coopératif,

- ordonné à M. [J] d'avoir à restituer à la société Coopérative Taxi Radio de Lyon, au plus tard 10 jours ouvrés, à compter de la signification du présent jugement et sous astreinte de 300 euros par jour de retard,

- rejeté comme inutiles et non fondées toutes les autres demandes, moyens, fins et conclusions contraires des deux parties,

- prononcé l'exécution provisoire de la présente décision nonobstant appel ou opposition et sans caution,

- condamné M. [J] à payer à la société Coopérative Taxi Radio de Lyon à payer la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [J] aux entiers.

M. [J] a interjeté appel par acte du 1er juillet 2019.

Suivant conclusions notifiées le 18 mai 2020, M. [J] a demandé à la cour de :

- juger recevable et bien fondé l'appel qu'il a interjeté,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Statuant à nouveau :

- juger que la procédure disciplinaire diligentée par la Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon et la sanction prononcée à cet égard sont irrégulières,

- juger que l'article 14 bis des statuts de la Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon est irrégulier au visa des dispositions de la loi n°83-657 du 20 juillet 1983,

En conséquence,

- prononcer la nullité de la décision d'exclusion du 28 février 2018,

- ordonner sa réintégration à compter du 4 mars 2018,

En toute hypothèse :

- condamner la Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon à lui payer la somme de 3.349,37 euros par mois à compter du 4 mars 2018 et jusqu'à sa réintégration, ou à tout le moins jusqu'au prononcé de l'arrêt à intervenir,

- condamner la Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon à lui payer la somme de 5.000 euros au titre des frais irrépétibles exposés tant en première instance qu'en cause d'appel, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la même aux entiers dépens de première instance et d'appel, dont distraction de ces derniers au profit de Me Florent Delpoux, avocat, sur son affirmation de droit.

Concernant l'irrégularité de la décision d'exclusion, M. [J] a mis en avant les éléments suivants':

- l'irrégularité de sa convocation devant le conseil d'administration statuant en matière disciplinaire alors que l'article 20 du règlement intérieur prévoit la réunion d'un conseil de discipline distinct

- le prononcé d'une sanction non prévue au règlement intérieur s'agissant d'une exclusion, non prévue devant le conseil de discipline

- le caractère irrégulier du conseil d'administration statuant en la forme disciplinaire d'autant plus que l'article 12 alinéa 3 du règlement intérieure stipule que l'assemblée générale seule peut statuer sur les exclusions, les autres sanctions étant prises par le conseil de discipline ou le conseil d'administration

- le caractère disciplinaire de sa convocation devant le conseil d'administration eu égard aux mentions portées sur sa convocation qui visent le conseil d'administration statuant en la forme disciplinaire, la convocation du 20 février 2018 portant mention des griefs reprochés concernant les trajets empruntés

- l'absence de mention de l'article 14 bis des statuts dans sa convocation mais aussi dans le procès-verbal de réunion, l'absence de manquements établis.

S'agissant de l'irrégularité des statuts de la Société Taxi de Lyon, M. [J] a avancé les moyens suivants':

- la non-conformité des statuts de la Société Taxi de Lyon aux dispositions de la loi 83-657 du 20 juillet 1983 relative au développement de certaines activités, dont le Titre 1er porte sur le statut des coopératives artisanales et de leurs unions, dont l'article 9 prohibe le statut de coopérateur stagiaire pendant plus d'un an

- le fait que même si la Société Taxi de Lyon accueille des artisans exerçant sous la forme de sociétés commerciales, celles-ci demeurent inscrites au répertoire des métiers comme artisans taxis

- le fait que la loi de 1983 a imposé une mise en conformité des statuts des sociétés coopératives concerné dans un délai de deux ans, ce qui n'a pas été respecté par l'intimée, les clauses invoquées ne lui étant alors pas opposables.

Concernant son préjudice, M. [J] a fait valoir qu'il percevait en raison de son activité la somme mensuelle moyenne de 3.349,07 euros, somme qui doit lui être attribuée pour chaque mois à compter de son exclusion jusqu'à la décision.

* *

*

Par conclusions du 26 octobre 2020, la Société Coopérative Taxi-Radio de Lyon a conclu dans le sens suivant :

- juger mal fondé l'appel interjeté par M. [J] à l'encontre du jugement déféré,

- confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [J] des demandes formées à son encontre ; qu'il a ordonné la restitution immédiate du matériel avec une astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement et en ce qu'il a condamné M. [J] à lui payer la somme de 400 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- réformer le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

- condamner M. [J] à lui payer la somme de 3.000 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

La Société Taxi de Lyon a indiqué les éléments suivants à l'appui de la confirmation de la décision rendue':

- l'organisation de la procédure d'exclusion sur l'article 14 bis des statuts de la société qui ne prévoit pas de motif disciplinaire pour prononcer une exclusion, et l'absence de faute ainsi mentionnée dans la lettre du 28 février 2018 mettant fin à la période de stage de M. [J], le texte en question ne prévoyant aucune motivation quant à l'exclusion d'un sociétaire stagiaire

- la compétence du conseil d'administration pour traiter toute question intéressant le bon fonctionnement de la société, hors pouvoirs attribués expressément aux assemblées d'actionnaires

- la qualité de stagiaire de M. [J], pour une durée de 3 ans en application des statuts et règlement intérieur, la période prenant fin le 12 septembre 2016, la décision prise le 28 février 2018 intervenant dans cette période

- l'existence d'un délai entre la convocation et le jour de la réunion au profit de M. [J]

- le fait que la Société Taxi de Lyon n'est pas soumise à la loi du 20 juillet 1983 puisqu'elle accueille, en dehors des artisans, des loueurs et locataires-gérants qui ne sont pas artisans, sans compter l'absence de référence à cette loi dans les statuts.

S'agissant des demandes de M. [J], la Société Taxi de Lyon a rappelé que celui-ci a vendu sa licence de taxi et ne dispose plus d'autorisations de stationnement.

Concernant l'appel incident, la Société Taxi de Lyon a indiqué avoir adressé à M. [J], après la fin de son contrat, la somme de 2.206,47 euros en remboursement du fond coopératif suivant décompte suivant':

- Action': 15,24 euros

- Fonds coopératif': 3.811,23 euros

- déduction non restitution du matériel: 1.620 euros.

La Société Taxi de Lyon a précisé avoir versé la somme de 1.620 euros sur le compte CARPA dans l'attente de la restitution du matériel qui a été réalisée le 6 mai 2019, la somme étant ensuite transférée à M. [J], d'où la nécessaire infirmation de la décision rendue sur ce point.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de réformation pour le surplus présentée par la Société Taxi de Lyon

Vu les dispositions de l'article 954 du Code de procédure civile

Il convient de relever que dans ses dernières écritures, la Société Taxi de Lyon a demandé la confirmation de la décision rendue par le Tribunal de Commerce uniquement concernant le rejet des demandes de M. [J], sollicitant ensuite la «'réformation pour le surplus'», sans toutefois former de prétentions à la suite.

Dès lors, il convient de constater que la cour n'est pas valablement saisie et n'a pas à statuer sur l'appel incident de la Société Taxi de Lyon.

Sur la demande de nullité de la décision d'exclusion du 28 février 2018

Vu les disposions de la loi du 83-657 du 20 juillet 1983

Il ressort de l'article 9 de la loi suscitée que «'Les statuts peuvent prévoir que les nouveaux associés sont admis à titre provisoire pendant une période probatoire qui ne peut excéder une année'» .

Il ressort de l'article 32 que «'Les sociétés coopératives d'artisans et leurs unions, existant à la date de publication de la présente loi, disposent d'un délai de deux ans à partir de cette date pour mettre leurs statuts en conformité avec ses dispositions. A l'expiration de ce délai, les clauses statutaires contraires aux dispositions du présent titre sont réputées non écrites. Les assemblées générales ordinaires ou les assemblées d'associés délibèrent valablement pour la modification à cet effet des statuts.'»

En la présente espèce, la Société Taxi de Lyon prétend à tort que ses statuts ne devraient pas être soumis aux dispositions des textes susvisés au motif qu'elle accueille en son sein des sociétés commerciales mais aussi des loueurs ou des locataires-gérants. Cependant, les pièces versées au débat par l'intimée permettent de relever que toutes les sociétés accueillies au sein de la société coopérative sont inscrites au registre des métiers comme artisans taxi, cette qualité étant déléguée en cas de location-gérance.

Dès lors, il convient de déclarer non écrit l'article 14 bis du statut en ce qu'il prévoit une période probatoire de 3 ans pour tout nouveau coopérateur.

De la sorte, la décision prise par le conseil d'administration, sur le fondement de l'article 14 bis des statuts est intervenue alors que M. [J] ne disposait plus du statut de coopérateur stagiaire, son exclusion ne pouvant relever que d'une décision de l'assemblée générale.

En conséquence, il convient d'infirmer le jugement rendu par le Tribunal de Commerce sur ce point et de prononcer la nullité de la décision d'exclusion rendue le 28 février 2018 à l'encontre de M. [J].

Sur la demande de réintégration

Il doit être relevé que M. [J] ne dispose plus de la qualité d'artisan taxi, ayant cédé sa licence.

En conséquence, sa réintégration au sein de la Société Taxi de Lyon ne peut être ordonnée en raison de l'absence de cette qualité qui est essentielle pour cette réintégration.

Cette demande est en conséquence sans objet.

Sur la demande d'indemnisation

M. [J] a sollicité l'indemnisation de son exclusion, affirmant percevoir la somme de 3.349,37 euros par mois pendant sa période d'exercice au sein de la Société Taxi de Lyon.

Toutefois, il doit être relevé que M. [J] ne fournit à l'appui de sa demande en indemnisation aucun élément financier, ne fournissant ni la comptabilité relative à son activité au cours de sa présence au sein de la Société Taxi de Lyon, ni sa déclaration de revenus sur la période concernée.

De même, il n'a fourni aucun élément actualisé quant à sa situation financière avant la clôture des débats, procédant par allégations uniquement.

Dès lors, il convient de rejeter la demande présentée.

Sur les autres demandes

Chaque partie succombant partiellement en ses demandes, il convient d'indiquer que chacune conservera à sa charge les dépens exposés au titre de l'instance en première instance et en appel.

L'équité ne commande pas d'accorder à l'une ou l'autre des parties une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile, les demandes étant rejetées.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement rendu par le Tribunal du Commerce de Lyon le 29 mai 2019 sauf en ce qu'il a condamné la Société Coopérative Taxi Radio de Lyon à payer à M. [J] la somme de 3.826,47 euros au titre du financement du fond coopératif,

Statuant à nouveau,

Dit que la cour n'est pas valablement saisi d'un appel incident de la Société Taxi de Lyon,

Prononce la nullité la décision d'exclusion du 28 février 2018,

Déclare sans objet la demande de réintégration,

Déboute M. [L] [J] de sa demande d'indemnisation,

Dit que chaque partie conservera à sa charge les dépens qu'elles ont exposés en première instance et en appel,

Déboute M. [L] [J] et la SA Société Coopérative Taxi Radio de Lyon de leurs demandes d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/04592
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;19.04592 ?
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