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17/11/2022 | FRANCE | N°19/04499

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 17 novembre 2022, 19/04499


N° RG 19/04499 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MOKN









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 27 mai 2019



RG : 2017j01537





[K]

[T]

[B]



C/



Société NACC





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 17 Novembre 2022







APPELANTS :



M. [R] [K]

né le [Date naissance 4] 1

971 à [Localité 14]

[Adresse 8]

[Localité 11]

Représenté par Me Muriel LINARES de la SELARL TILSITT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1635





M. [M] [V]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 13] (PORTUGAL)

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Muriel ...

N° RG 19/04499 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MOKN

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 27 mai 2019

RG : 2017j01537

[K]

[T]

[B]

C/

Société NACC

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 17 Novembre 2022

APPELANTS :

M. [R] [K]

né le [Date naissance 4] 1971 à [Localité 14]

[Adresse 8]

[Localité 11]

Représenté par Me Muriel LINARES de la SELARL TILSITT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1635

M. [M] [V]

né le [Date naissance 2] 1970 à [Localité 13] (PORTUGAL)

[Adresse 1]

[Localité 7]

Représenté par Me Muriel LINARES de la SELARL TILSITT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1635

M. [O] [B]

né le [Date naissance 3] 1969 à [Localité 12]

[Adresse 6]

[Localité 15]

Représenté par Me Muriel LINARES de la SELARL TILSITT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 1635

INTIMEE :

SAS NACC venant aux droits de la BANQUE POPULAIRE AUVERGNE RHONE ALPES, laquelle vient aux droits de la BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS prise en la personne de son dirigeant social en exercice, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 5]

[Localité 9]

Représentée par Me Florence CHARVOLIN de la SELARL ADK, avocat au barreau de LYON, toque : 1086

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 29 Octobre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 17 Novembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Marianne LA-MESTA, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de Julien MIGNOT, greffier.

A l'audience, Marianne LA MESTA a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu prononcé et signé par Madame Patricia GONZALEZ, Présidente, à l'audience publique du 17 Novembre 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Clémence RUILLAT, greffère, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL Adequat-Auto (ci-après la société Adequat-Auto), ayant pour associés et cogérants MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B], avait pour activité le négoce automobile, la vente de véhicule neufs et d'occasion, l'import-export et la location de véhicules de courte ou longue durée à [Localité 15].

Par acte du 25 mai 2004, la société Adequat-Auto a ouvert un compte courant n°[XXXXXXXXXX010] auprès de la Banque Populaire Loire et Lyonnais (ci-après la Banque).

Par actes sous seing privé des 1er juillet 2003 et 6 avril 2005, M. [V] s'est porté caution solidaire et indivisible de la société Adequat-Auto pour toutes sommes dont celle-ci serait redevable à la Banque, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, au titre du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], pour une durée de 10 ans, dans la limite de la somme de 7.000 euros pour chacun des actes.

Par actes sous seing privé des 7 juillet 2004 et 31 mars 2005, M. [B] s'est porté caution solidaire et indivisible de la société Adequat-Auto pour toutes sommes dont celle-ci serait redevable à la Banque, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, au titre du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], pour une durée de 10 ans, dans la limite de la somme de 7.000 euros pour chacun des actes.

Par acte sous seing privé du 9 avril 2005, M. [K] s'est porté caution solidaire et indivisible de la société Adequat-Auto pour toutes sommes dont celle-ci serait redevable à la Banque, couvrant le paiement du principal, des intérêts et, le cas échéant, des pénalités ou intérêts de retard, au titre du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], pour une durée de 10 ans, dans la limite de la somme de 7.000 euros.

Par jugement du 8 octobre 2009, le tribunal de commerce de Villefranche-Tarare a prononcé l'ouverture d'une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Adequat-Auto, convertie en liquidation judiciaire par jugement en date du 30 septembre 2010, Me [L] ayant alors été nommé en qualité de liquidateur judiciaire.

Le 29 juillet 2010, la créance déclarée par la Banque à titre chirographaire entre les mains du liquidateur judiciaire pour le solde débiteur du compte n°[XXXXXXXXXX010], a été admise au passif de la liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto pour un montant de 45.334,51 euros.

Par courriers recommandés du 19 octobre 2010, la Banque a mis en demeure :

- M. [V] de procéder au règlement de la somme de 14.000 euros au titre de ses engagements de caution,

- M. [B] de procéder au règlement de la somme de 14.000 euros au titre de ses engagements de caution,

- M. [K], de procèder au règlement de la somme de 7.000 euros au titre de son engagement de caution.

Par jugement du 27 septembre 2012, le tribunal de commerce de Villefranche-Tarare a prononcé la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto pour insuffisance d'actifs.

Le 16 juin 2017, la SAS Nacc (ci-après la société Nacc) a adressé un courrier à MM. [K], [V] et [B] les informant de la cession, intervenue en sa faveur le 31 mars 2017, de la créance que la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes, venant aux droits de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, détenait à leur égard en leur qualité de cautions solidaires de la société Adequat-Auto. Elle les mettait tous trois en demeure de lui régler les sommes dues, tout en leur indiquant être disposée à étudier leur proposition de règlement amiable.

Par acte d'huissier de justice du 15 septembre 2017, la société Nacc a fait assigner MM. [K], [V] et [B] en paiement des sommes de 7.000 euros pour le premier et de 14.000 euros pour les deux autres.

Par jugement du 27 mai 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- rejeté la demande de fin de non-recevoir formée par MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] pour défaut de droit à agir de la société Nacc venant aux droits de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes,

- dit recevable l'action en paiement formée par la société Nacc venant aux droits de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes à l'encontre de MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B],

- rejeté la demande de pièces complémentaires sous astreinte formée par MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B],

- condamné M. [R] [K], en sa qualité de caution solidaire de la société Adequat-Auto SARL, à lui payer la somme de 7.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017 date de l'assignation, au titre du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], et ce, conformément à la limite de son engagement de caution du 09 avril 2005,

- condamné M. [M] [V], en sa qualité de caution solidaire de la société Adequat-Auto SARL, à lui payer la somme de 14.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017 date de l'assignation, au titre du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], et ce, conformément à la limite de ses engagements de caution,

- condamné M. [O] [B], en sa qualité de caution solidaire de la société Adequat-Auto SARL, à lui payer la somme de 14.000 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017 date de l'assignation, au titre du solde débiteur du compte courant n°[XXXXXXXXXX010], et ce, conformément à la limite de ses engagements de caution,

- ordonné la capitalisation des intérêts, dans les termes et conditions de l'article 1154 du code civil,

- débouté la société Nacc venant aux droits de Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes de sa demande d'indemnisation au titre de la résistance abusive et injustifiée,

- débouté les parties de l'ensemble de leurs autres demandes,

- condamné MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] à payer la somme de 500 euros chacun à la société Nacc au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné in solidum MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] aux entiers dépens.

MM. [K], [V] et [B] ont interjeté appel du jugement par acte du 27 juin 2019.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 juin 2020, fondées sur les articles 9, 15 et 31 du code de procédure civile, ainsi que sur les articles 1322 et suivants du code civil, MM. [K], [V] et [B] demandent à la cour :

- de réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a débouté la société Nacc de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive, et statuant à nouveau,

A titre principal :

- de constater qu'en l'état la société Nacc ne rapporte pas la preuve de son intérêt et de sa qualité à agir à leur encontre faute de communiquer le contrat de cession de créance,

- de déclarer irrecevables les demandes de la société Nacc formulées à leur encontre,

A titre subsidiaire :

- de prononcer la nullité de la cession de créances alléguée par la société Nacc,

- en conséquence, de débouter la société Nacc de l'ensemble de ses demandes formulées à leur encontre,

A titre très subsidiaire :

- de juger que la société Nacc ne justifie pas de l'existence de sa créance ni du bien-fondé de ses réclamations à leur encontre,

- en conséquence, de débouter la société Nacc de l'intégralité de ses demandes formulées à leur encontre,

En tout état de cause :

- de débouter la société Nacc de sa demande de dommages et intérêts pour résistance abusive,

- de condamner la société Nacc à leur payer à chacun la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la société Nacc aux entiers dépens de l'instance.

Au soutien de leurs demandes, MM. [K], [V] et [B] font valoir:

- qu'en sa qualité de demanderesse, il appartient à la société Nacc de verser aux débats l'acte de cession de créances dont elle se prévaut, seul ce document permettant de vérifier son intérêt et son droit à agir et par conséquent la recevabilité de son action, conformément aux articles 31 et 32 du code civil,

- qu'en vertu des articles 1322 et 1324 du code civil, la cession de créances doit en effet être constatée par écrit, à peine de nullité, et n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte,

- que la société Nacc a pourtant refusé de communiquer cette pièce lors de la tentative de conciliation en janvier 2018,

- que contrairement à ce qu'allègue la société Nacc, l'acte de cession de créances ne leur a jamais été communiqué, aucune des pièces produites ne prouvant qu'ils en ont bien été destinataires,

- qu'ainsi, aucune pièce n'a été jointe aux courriers que la société Nacc leur a adressé le 16 juin 2017,

- que si la société Nacc avait bien communiqué l'acte de cession à cette occasion, elle devrait logiquement pouvoir le produire à nouveau dans le cadre de la présente procédure, ce qu'elle ne fait pas, sans aucune raison légitime,

- que l'attestation du Notaire, Maître [A] [F], faisant état d'un contrat de cession de créance entre la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes et la société Nacc est insuffisante pour justifier tant du principe que du montant de la créance que cette dernière détiendrait à leur encontre,

- qu'à la lecture de cette attestation, il est impossible de savoir si la créance visée est bien celle relative au compte courant de la société Adequat-Auto, ce d'autant que le montant n'est même pas précisé,

- que la preuve de la cession de créances ne peut se faire que par la remise de l'acte lui-même, dont l'écrit est prescrit à peine de nullité,

- qu'au demeurant, la société Nacc ne fournit aucune information pertinente sur le calcul des sommes effectivement dues au titre du solde débiteur du compte courant de la société Adequat-Auto,

- que la circonstance selon laquelle la créance de la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes au titre dudit compte courant a été admise au passif de la liquidation judiciaire pour un montant de 45.334,51 euros ne saurait conduire à considérer qu'ils ne peuvent plus en contester le principe ou le montant, puisque les cautions peuvent toujours opposer des moyens qui leur sont propres,

- qu'il ne saurait leur être reproché une quelconque résistance abusive, dès lors qu'aucune mise en demeure ne leur a été envoyée entre octobre 2010 et juin 2017 et qu'ils sont légitimes à s'interroger sur la qualité de créancière de la société Nacc qui s'obstine à ne pas transmettre l'acte de cession de créance dont l'écrit est une condition de validité.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 17 décembre 2019, fondées sur les articles 1103, 1104, 1193, 1217, 1231-1 et 1343-2 du code civil, ainsi que sur l'article 42 alinéa 2 du code de procédure civile, la société Nacc, déclarant venir aux droits de la Banque Populaire Auvergne Rhône-Alpes, qui vient elle-même aux droits de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a rejeté sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive :

Y ajoutant :

- condamner MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] à lui payer chacun les sommes suivantes:

- 450 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive et injustifiée,

- 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner in solidum MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] aux entiers dépens de l'instance sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

A l'appui de ses prétentions, la société Nacc expose:

- qu'en application des articles 1321 et 1692 du code civil, la cession de créance a pour effet d'emporter de plein droit transfert de tous les accessoires de ladite créance, et notamment les actions en justice qui y sont attachées,

- que conformément à l'article 1324 du code civil, elle a informé MM. [V], [B] et [K], par courrier du 16 juin 2017, de la cession en sa faveur de la créance que la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes venant aux droits de la Banque Populaire Loire et Lyonnais détenait à leur égard en leur qualité de caution solidaire de la société Adequat-Auto,

- que ce courrier mentionne expressément qu'une copie de l'acte de cession est jointe, ce qui signifie que MM. [V], [B] et [K] en ont été destinataires,

- qu'en réponse à ce courrier, M.[V] a d'ailleurs, aux termes d'une missive du 6 juillet 2017 rédigée par son conseil, uniquement sollicité la communication des actes de cautionnement, ainsi que la déclaration de créance et son certificat d'admission au passif de la liquidation judiciaire, mais n'a pas demandé la copie de l'acte de cession de créance et ne s'est pas plus interrogé sur le droit et l'intérêt à agir de la société Nacc,

- que la fin de non-recevoir soulevée par ce dernier, ainsi que par MM. [B] et [K], apparaît donc purement dilatoire,

- qu'elle produit quoiqu'il en soit une attestation de Me [A] [F] en date du 15 mai 2017 précisant que 'la société Nacc est devenue titulaire des droits que la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes ayant pour sigle BP Aura détenait contre le client débiteur cédé ainsi que les sûretés tant réelles que personnelles, garanties et acessoires',

- qu'au vu de ce document, la créance cédée est parfaitement identifiable puisque la référence [XXXXXXXXXX010] est précisément le numéro de compte bancaire de la société Adequat-Auto,

- que ses droit et intérêt à agir sont donc établis,

- que les dispositions de l'article 1324 alinéa 1er du code civil sur l'opposabilité ne concernent au demeurant que le débiteur principal, soit en l'occurrence la société Adequat-Auto, et non les tiers que sont notamment les cautions,MM. [V], [K] et [B], auxquels la créance est devenue opposable dès l'acte de cession en vertu de l'article 1323 du civil,

- qu'en tout état de cause, il y a lieu de considérer que la cession de créance a régulièrement été notifiée aux cautions par les premières conclusions déposées par la société Nacc devant le tribunal de commerce,

- que pour justifier du principe et du montant de la créance cédée, elle verse aux débats la convention de compte professionnel régularisée par la société Adequat-Auto le 25 mai 2004, la déclaration de créance du 19 octobre 2010 et ses annexes et l'avis d'admission de créance du 29 juillet 2010,

- que MM. [V], [K] et [B] n'ont jamais contesté la créance déclarée par la Banque Populaire Loire et Lyonnais, que ce soit en leur qualité de co-gérants ou de caution solidaire,

- que suite à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto, la créance de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, aux droits de laquelle elle vient, est devenue intégralement et immédiatement exigible à l'égard de chacune des cautions, dans la limite de leurs engagements respectifs,

- que la résistance de mauvaise foi de MM. [K], [V] et [B], caractérisée par l'absence totale de paiement de leur part depuis l'appel en garantie de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, puis d'elle-même, et leur refus de prendre contact en vue de trouver une solution amiable malgré sa proposition en ce sens, lui fait incontestablement subir un préjudice financier devant être réparé par l'octroi de dommages et intérêts.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 29 octobre 2020, les débats étant fixés au 5 octobre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Il convient à titre liminaire de rappeler que les demandes de constat et dire et juger ne constituent pas des prétentions mais uniquement un rappel des moyens et qu'il n'y a donc pas de lieu de statuer sur ce point, la cour n'en étant pas saisie.

Sur le défaut d'intérêt à agir de la société Nacc

L'article 31 du code de procédure civile ouvre l'action à tous ceux qui ont un intérêt légitime au succès ou au rejet d'une prétention.

L'article 32 du même code dispose qu'est irrecevable toute prétention émise par ou contre une personne dépourvue du droit d'agir.

Par ailleurs, en vertu de l'article 1322 du code civil, applicable au présent litige compte tenu de la date à laquelle la cession de créance est intervenue (31 mars 2017), la cession de créance doit être constatée par écrit, à peine de nullité.

L'article 1323 du même code prévoit quant à lui qu'entre les parties, le transfert de la créance, présente ou future, s'opère à la date de l'acte. Il est opposable aux tiers dès ce moment. En cas de contestation, la preuve de la date de la cession incombe au cessionnaire, qui peut la rapporter par tout moyen.

Enfin, selon l'article 1324 alinéa 1er, la cession n'est opposable au débiteur, s'il n'y a déjà consenti, que si elle lui a été notifiée ou s'il en a pris acte.

Cette notification ne requiert aucun formalisme particulier et n'impose notamment pas au créancier de joindre à la notification du transfert de la créance qu'il adresse au débiteur la copie intégrale de l'acte de cession ou même sa reproduction par extrait. Il suffit en la matière que l'acte comporte les éléments nécessaires à une exacte information du débiteur quant à la cession intervenue.

En revanche, la caution doit se voir appliquer les règles de l'article 1324 alinéa 1er, n'étant pas un un tiers au sens de l'article 1323.

En l'espèce, pour justifier de sa qualité de créancier, la société Nacc produit une attestation notariée, établie le 15 mai 2017 par Me [A] [F] (pièce n°27), laquelle relate qu'aux termes d'un acte reçu par ses soins le 24 avril 2017 a été déposé au rang de ses minutes l'original d'un contrat de cession de créances suivant acte établi sous seing privé le 31 mars 2017 intervenu entre la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes,venant aux droits de la Banque Populaire Loire et Lyonnais, et la société Nacc concernant 1.152 créances, dont celle détenue par la Banque à l'encontre de la SARL Adequat Auto qui est identifiée par son nom, une référence dossier (n°9402) et une référence créance (n°[XXXXXXXXXX010]).

Il ressort d'abord de cette attestation que la cession de créance a bien fait l'objet d'un écrit conformément à l'article 1322 précité.

Ensuite, s'il est indéniable que le montant de la créance n'apparaît pas dans cette attestation, il n'en reste pas moins que la référence créance rappelée ci-dessus correspond précisément au numéro du compte courant professionnel qui avait été ouvert par la société Adequat-Auto auprès de la Banque, dont la créance au titre de ce compte a été admise pour un montant de 45.334,51 euros au passif de la liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto par décision du juge commissaire, ainsi que la société Nacc en rapporte la preuve (pièces n° 5 et 6 de l'intimée).

Les mentions figurant dans l'attestation notariée permettent donc sans difficulté d'identifier la banque cédante, le débiteur cédé, ainsi que la créance cédée elle-même par l'indication du numéro du compte concerné, ce quand bien même l'intégralité de l'acte de cession n'est pas versée aux débats.

La société Nacc démontre par ailleurs qu'elle a notifié à MM.[V], [B] et [K] la cession de créance opérée à son profit au moyen d'un courrier adressé à chacun d'entre eux le 16 juin 2017 (pièces n°14, 18 et 21 de l'intimée), que les intéressés ne contestent pas avoir reçu, puisqu'ils allèguent uniquement ne pas avoir été destinataires de la pièce jointe à cette missive, à savoir l'acte de cession de créance lui-même.

Outre le fait que l'article 1324 du code civil n'emporte pas l'obligation formelle pour le créancier de communiquer l'acte de cession, il convient de relever que la missive envoyée aux cautions les informe clairement de l'existence de la cession de créance, de la déclaration de créance intervenue entre les mains du mandataire, du montant total restant dû fixé à 45.334,51 euros et de l'étendue de leurs engagements de caution respectifs.

La notification peut en tout état de cause résulter des poursuites engagées contre le débiteur ou la caution. Or, M.M [V], [K] et [B] ne prétendent évidemment pas qu'ils n'auraient pas eu connaissance de l'assignation délivrée à leur encontre le 15 septembre 2017 par la société Nacc devant le tribunal de commerce, ayant tous trois constitué avocat en première instance.

Il résulte des observations qui précèdent que M.M [V], [K] et [B] ont régulièrement été avisés du changement de créancier et que l'attestation notariée du 15 mai 2017 comporte les éléments essentiels permettant l'individualisation de la créance cédée, de sorte que la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la société Nacc doit être écartée et son action déclarée recevable, comme l'a exactement décidé le tribunal de commerce.

Sur la nullité de l'acte de cession de créance aux cautions

Pour les mêmes motifs que ceux déjà retenus ci-dessus, MM. [V], [K] et [B] seront déboutés de leur demande tendant à l'annulation de la cession de créance, dès lors qu'il résulte de l'attestation notariée du 15 mai 2017 que l'acte de cession de créances entre la Banque Populaire Auvergne Rhône Alpes et la société Nacc a été régularisé par acte sous seing privé le 31 mars 2017 conformément aux dispositions de l'article 1323 du code civil déjà cité supra.

Sur les demandes de la société Nacc

Selon l'article 1321 du code civil, la cession de créance est un contrat par lequel le créancier cédant transmet, à titre onéreux ou gratuit, tout ou partie de sa créance contre le débiteur cédé à un tiers appelé le cessionnaire. Elle peut porter sur une ou plusieurs créances présentes ou futures, déterminées ou déterminables. Elle s'étend aux accessoires de la créance. Le consentement du débiteur n'est pas requis, à moins que la créance ait été stipulée incessible.

L'article 1324 alinéa 2 du même code dispose que le débiteur peut opposer au cessionnaire les exceptions inhérentes à la dette, telles que la nullité, l'exception d'inexécution, la résolution ou la compensation des dettes connexes. Il peut également opposer les exceptions nées de ses rapports avec le cédant avant que la cession lui soit devenue opposable, telles que l'octroi d'un terme, la remise de dette ou la compensation de dettes non connexes.

En vertu de l'article 2021 ancien du code civil, applicable au présent litige eu égard à la date de signature des actes de cautionnement, la caution n'est obligée envers le créancier à le payer qu'à défaut du débiteur, qui doit être préalablement discuté dans ses biens, à moins que la caution n'ait renoncé au bénéfice de discussion, ou à moins qu'elle ne se soit obligée solidairement avec le débiteur ; auquel cas l'effet de son engagement se règle par les principes qui ont été établis pour les dettes solidaires.

L'article 2036 ancien du code civil prévoit quant à lui que la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions qui appartiennent au débiteur principal, et qui sont inhérentes à la dette; mais elle ne peut opposer les exceptions qui sont purement personnelles au débiteur.

En l'occurrence, contrairement à ce que soutiennent que MM. [V], [K] et [B], la société Nacc justifie du principe et du montant de la créance principale cédée à son profit et devenue exigible vis-à-vis des cautions solidaires suite à l'ouverture de la liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto, puisqu'en sus de l'attestation notariée du 15 mai 2017 et de l'avis d'admission par le juge commissaire, pour un montant de 45.334,51 euros de la créance déclarée par la Banque au titre ce compte courant n°[XXXXXXXXXX010], émis le 29 juillet 2010 par le greffe du tribunal de commerce de Villefranche-Tarare, déjà évoqués dans le premier paragraphe de la motivation de la présente décision, elle produit également la convention de compte courant professionnel régularisée le 25 mai 2004 par la société Adequat-Auto, (pièce n°25), et l'extrait BODACC faisant état de la clôture de la liquidation judiciaire de la société Adequat-Auto pour insuffisance d'actif suivant jugement du 27 septembre 2012.

Il ne peut qu'être constaté que bien qu'ils excipent à juste titre de la possibilité de contester le montant et le principe de cette créance principale, MM.[V], [K] et [B] ne font valoir aucun moyen en ce sens.

La société Nacc verse par ailleurs aux débats la copie des actes de caution solidaire respectivement signés par MM. [V], [K] et [B] dont la teneur a été rappelée dans l'exposé du litige (pièces n°8 à 12). Il sera noté que ceux-ci ne formulent aucun grief à l'encontre de la validité des ces engagements dont la société Nacc se prévaut à leur endroit. Cette dernière communique également les lettres de mise en demeure initialement adressées par la Banque le 19 octobre 2010 ainsi que les courriers du 16 juin 2017 par lesquels elle leur a notifié la cession de créance par

Au vu de ces différents éléments, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a condamné:

- M.[K] à verser à la société Nacc la somme de 7.000 euros avec intérêts aux taux légal à compter du 15 septembre 2017, date de l'assignation valant mise en demeure, conformément à l'article 1231-6 alinéa 1 du code civil,

- M.[V] à verser à la société Nacc la somme de 14.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017,

- M.[B] à verser à la société Nacc la somme de 14.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017.

Il le sera aussi en ce qu'il a ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions prévues à l'article 1343-2 du code civil.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

Selon l'article 1231-6 alinéa 3 code civil, dans les obligations qui se bornent au paiement d'une certaine somme, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un préjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance.

Sur le fondement de ce texte, le créancier peut se voir attribuer des dommages et intérêts pour résistance abusive dès lors qu'est démontrée la mauvaise foi du débiteur et l'existence d'un préjudice, distinct du retard de paiement, en découlant.

En l'occurrence, la seule circonstance selon laquelle la société Nacc a été contrainte d'engager une action judiciaire pour obtenir le recouvrement d'une créance ne suffit pas à caractériser la mauvaise foi de MM.[K], [V] et [B], étant au demeurant observé que la société Nacc les a assignés en justice tout juste trois mois après les avoir avisés de l'existence de la cession de créance intervenue à son profit et 10 jours après leur avoir adressé une mise en demeure, alors même que la précédente missive en ce sens leur avait été envoyée 7 ans auparavant en octobre 2010. En tout état de cause, la société Nacc ne justifie pas non plus de l'existence d'un préjudice distinct du retard de paiement, déjà réparé par l'octroi des intérêts moratoires.

Il convient par suite de rejeter sa demande de dommage et intérêts pour résistance abusive et donc de confirmer le jugement déféré également sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Succombant en leurs prétentions, MM.[K], [V] et [B] supporteront in solidum les dépens d'appel comme ceux de première instance qui sont confirmés et garderont la charge de leurs frais irrépétibles.

Il apparaît équitable de confirmer les dispositions du jugement de première instance relatives à l'article 700 du code de procédure civile et de condamner in solidum MM.[K], [V] et [B] à payer une somme de 2.000 euros sur ce fondement à la société Nacc en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions, et y ajoutant,

Condamne in solidum MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] aux dépens d'appel,

Condamne in solidum MM. [R] [K], [M] [V] et [O] [B] à verser à la SAS Nacc une somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/04499
Date de la décision : 17/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-17;19.04499 ?
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