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10/11/2022 | FRANCE | N°19/03347

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 10 novembre 2022, 19/03347


N° RG 19/03347 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MLRF









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 30 avril 2019









SARL VISION INTERIM



C/



SASU COTIS DEVELOPPEMENT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 10 Novembre 2022







APPELANTE :



SARL VISION INTERIM

[Adresse 1]

[Adresse

1]



Représentée par Me Jeannie MONGOUACHON de la QUORUM AVOCATS avocat au barreau de LYON, toque : 1485 et ayant pour avocat plaidant Me Jonathan BELLAICHE de la SELARL GOLDWIN Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS







INTIMEE :



SASU COTIS DEVELOPPEMENT...

N° RG 19/03347 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MLRF

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 30 avril 2019

SARL VISION INTERIM

C/

SASU COTIS DEVELOPPEMENT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 10 Novembre 2022

APPELANTE :

SARL VISION INTERIM

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Jeannie MONGOUACHON de la QUORUM AVOCATS avocat au barreau de LYON, toque : 1485 et ayant pour avocat plaidant Me Jonathan BELLAICHE de la SELARL GOLDWIN Société d'Avocats, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

SASU COTIS DEVELOPPEMENT

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Emmanuelle BAUFUME de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON, toque : 1547 et ayant pour avocat plaidant Me Sandrine RICHARD de la SELARL SIMON Associés, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *

Date de clôture de l'instruction : 19 Février 2021

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 28 Septembre 2022

Date de mise à disposition : 10 Novembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Raphaële FAIVRE, conseillère

- Aurore JULLIEN, conseillère

assistées pendant les débats de William BOUKADIA, greffier.

A l'audience, un membre de la Cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu prononcé et signé par Madame Patricia GONZALEZ, Présidente, à l'audience publique du 10 Novembre 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière placée, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSE DES FAITS

Le 7 juillet 2009, la SARL Cotis Développement devenue la SASU Cotis Développement exerçant une activité d'intérim au moyen d'un réseau de franchise a conclu avec la SARL ACMG Finance un contrat de franchise portant sur l'exploitation d'une agence de travail temporaire située à [Localité 3] dans [Localité 4] sous l'enseigne 'Cotis Intérim'.

Par avenant du 23 décembre 2010, ce contrat a été transféré à la SARL Vision Intérim pour une durée de sept années à compter de cette date.

Début juillet 2013, la société Vision Intérim a fait opposition au prélèvement de la redevance due au titre du mois d'avril 2013 soit la somme de 7.919,53 euros selon facture du 23 mai 2013 puis de celle due au titre du mois de mai 2013 soit la somme de 7.033,38 euros selon facture du 25 juin 2013.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 23 mai 2017, la société Cotis Développement a mis en demeure la SARL Vision Interim de payer les factures non réglées au titre des redevances d'avril et mai 2013 soit la somme de 14.952,91 euros TTC ainsi que l'indemnité de rupture du contrat de franchise, sans préciser le montant de cette dernière.

Suivant exploit d'huissier du 26 septembre 2017, la SASU Cotis Développement a assigné la SARL Vision Interim devant le Tribunal de Commerce de Lyon aux fins de faire constater la résiliation fautive par la société Vision Intérim du contrat de franchise et d'en tirer les conséquences notamment financières.

Par jugement du 30 avril 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- jugé que le contrat de franchise conclu entre les sociétés Cotis Développement et Vision Intérim le 7 juillet 2009 a été résilié aux torts de la société Vision Intérim,

- condamné la SARL Vision Interim à payer à la société Cotis Développement l'indemnité forfaitaire minimum prévue au contrat, soit 50.000 euros HT,

- condamné la société Vision Intérim à cesser l'utilisation de la marque, des signes distinctifs et du savoir-faire Cotis Intérim dans le mois suivant la signification du jugement,

- condamné la SARL Vision Intérim à payer à la société Cotis Développement la somme de 12.502,43 euros HT en règlement des factures de redevance des mois d'avril et mai 2013,

- condamné la SARL Vision Intérim à payer à la société Cotis Développement la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la SARL Vision Intérim aux entiers dépens de l'instance,

- ordonné l'exécution provisoire.

La société Vision Intérim a interjeté appel par acte du 13 mai 2019.

Par conclusions du 12 octobre 2020 fondées sur les articles 1134, 1184, 1147, 1152, 1226 et 1315 anciens du code civil et les articles 515 et 700 du code de procédure civile, la société Vision Intérim a sollicité par voie d'infirmation du jugement :

à titre principal,

- la résiliation judiciaire du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Cotis Développement sur le fondement de l'ancien article 1184 du code civil, avec effet au 30 juillet 2013, date à laquelle le franchiseur a été mis en demeure d'exécuter ses obligations,

- la condamnation la société Cotis Développement à lui verser la somme de 59.800 euros TTC au titre de la clause pénale stipulée au contrat de franchise unissant les parties,

- la condamnation de la société Cotis Développement à lui verser la somme de 5.000 euros en réparation de son préjudice moral du fait d'une atteinte manifeste à la bonne foi contractuelle,

à titre subsidiaire :

- de ramener sa condamnation au titre de la clause pénale à 1 euro symbolique,

en tout état de cause

- le rejet de l'intégralité de ses demandes incidentes de la SASU Cotis Développement

- la condamnation de la société Cotis Développement au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- et aux entiers dépens.

Sur la résiliation du contrat de franchise et l'indemnité de résiliation, la SARL Vision Interim a fait état des moyens suivants :

- la possibilité, sur le fondement de l'article 1184 du code civil, de demander la résolution judiciaire du contrat même en cas de présence d'une clause résolutoire au contrat

- la possibilité pour le franchisé de demander la résiliation judiciaire du contrat en raison des manquements du franchiseur à ses obligations fixées au contrat d'assistance et de publicité en l'espèce avec un manquement aux obligations suivantes :

assistance au franchisé, de gestion de l'hébergement internet, arrêt de la diffusion de la newsletter et de mise en 'uvre des formations, la dernière ayant eu lieu le 31 janvier 2012 et aucune n'ayant été mise en 'uvre au titre de l'année 2013,

arrêt du réseau de franchise puisqu'en 2013, 19 franchisés sur 21 avaient quitté le réseau et la SASU Cotis Développement avait cessé d'animer le réseau,

- l'absence de prise en compte de la mise en demeure adressée le 30 juillet 2013 à la SASU Cotis Développement pour lui demander de respecter ses obligations, aucune exécution des obligations postérieures n'ayant eu lieu.

La SARL Vision Interim a rappelé que la suspension des prélèvements était intervenue début juillet en raison de la situation.

S'agissant des factures de redevances, la SARL Vision Interim a excipé d'une exception d'inexécution en raison du non-respect par la SASU Cotis Développement de ses obligations et a mis en avant les éléments suivants :

- la non-exécution de bonne foi du contrat par la SASU Cotis Développement,

- l'absence de demande de transmission du chiffre d'affaires mensuel par la SASU Cotis Développement,

- le contenu du courrier du 6 août 2013 de la SASU Cotis Développement dans lequel cette dernière reconnaissait l'arrêt de la franchise,

- l'absence de contrepartie au paiement en raison de l'absence d'animation du réseau.

La SARL Vision Interim a justifié le préjudice moral invoqué par le fait que :

- la SASU Cotis Développement a abandonné la franchise, rappelant la diminution drastique du chiffre d'affaires de celle-ci, notamment avec le départ de l'intégralité du personnel et l'absence de lien avec les franchisés,

- la SASU Cotis Développement a engagé l'action en paiement après plusieurs années de silence, pour des montants très élevés et sans fondement.

Concernant la demande de cessation des agissements et de restitution de la document, la SARL Vision Interim a mis en avant les éléments suivants :

- la cessation de l'utilisation des logos de la SASU Cotis Développement depuis que la franchise a été abandonnée, ce que montre le procès-verbal de constat d'huissier réalisé le 15 avril 2014 par la SASU Cotis Développement,

- l'absence de documentation en sa possession, documentation non transmise en outre par le franchiseur,

- le caractère infondé de la demande en raison de la fin du réseau de franchise.

Par conclusions du 20 février 2020 fondées sur l'ancien article 1134 du code civil, la société Cotis Développement a demandé à la cour de':

- la déclarer recevable et bien fondée en l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

- débouter la société Vision Intérim de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- jugé que la résiliation du contrat de franchise est intervenue aux torts exclusifs de la société Vision Intérim,

- rejeté la demande d'indemnisation du préjudice moral sollicité par Vision Intérim,

- condamné la société Vision Intérim à lui payer la somme de 12.502,43 euros HT au titre des factures de redevance des mois d'avril et mai 2013 dues en exécution du contrat de franchise,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il a retenu 50.000 euros comme quantum d'indemnisation, et statuant à nouveau,

- condamner la société Vision Intérim à payer à la société Cotis Développement la somme de 635.210 euros TTC au titre d'indemnisation en raison du préjudice subi du fait de la résiliation anticipée du contrat de franchise aux torts exclusifs de la société Vision Intérim, conformément à l'article 17 du contrat de franchise,

- condamner Vision Intérim à restituer à Cotis Développement la documentation relative à la franchise Cotis Développement,

en tout état de cause,

- condamner la société Vision Intérim à lui payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- et aux entiers dépens.

Concernant la résiliation du contrat, la SASU Cotis Développement a fait valoir que la SARL Vision Interim n'a pas respecté ses obligations en avançant les points suivants :

- la non-transmission du chiffre d'affaires mensuel et le non-paiement des redevances en contravention avec les stipulations contractuelles à compter de mars 2013,

- le caractère infondée de la cessation par la SARL Vision Interim des obligations contractuelles alors même que la franchise n'avait pas été arrêtée, ce qu'elle a rappelé en visant le contenu exact de la lettre recommandée avec accusé de réception du 6 août 2013 dans laquelle elle a rappelé que la franchise continuait,

- le non-respect par la SARL Vision Interim des stipulations de l'article 17 du contrat de franchise concernant les modalités de résiliation, le caractère irrégulier de la résiliation engageant la responsabilité du franchisé,

- l'absence de preuve par la SARL Vision Interim des manquements reprochés au franchiseur,

- le respect par ses soins des obligations relatives à la newsletter, aux formations et à la hotline.

Concernant le paiement des factures de redevance, la SASU Cotis Développement a rappelé que :

- la SARL Vision Interim ne rapporte pas la preuve du non-respect par le franchiseur de ses obligations d'animation du réseau,

- le contrat n'avait pas stipulé d'obligation de résultat à la charge du franchiseur concernant le développement du réseau,

- l'existence des factures datées de mai et juin 2013, sans compter une interruption de la prescription quinquennale par l'envoi d'une mise en demeure le 23 mai 2017,

- le fait qu'il appartenait au franchisé de fournir chaque mois son chiffre d'affaires.

S'agissant du préjudice moral allégué par la SARL Vision Interim, la SASU Cotis Développement a estimé que l'appelante ne démontrait pas la preuve d'une faute de sa part ou d'un préjudice.

À l'appui de sa demande de cessation et de restitution, la SASU Cotis Développement a renvoyé à l'article 15.2 du contrat liant les parties prévoyant la restitution des documents publicitaires, manuels au plus tard huit jours après la fin de l'exécution du contrat.

S'agissant de l'appel incidence sur le montant de la clause pénale, la SASU Cotis Développement a rappelé que :

- l'article 17 du contrat liant les parties prévoit que l'indemnité de résiliation doit être déterminée sur la base du double du montant estimatif des redevances qui auraient été payées au franchiseur jusqu'au terme normal du contrat,

- le terme du contrat était fixé au 23 décembre 2017 au terme de l'avenant du 23 décembre 2010,

- l'article 17 du contrat ne peut être considéré comme une clause pénale et ne peut donc faire l'objet d'une révision,

- en tout état de cause, si la cour considérait qu'il s'agit d'une clause pénale, elle ne pourrait en réduire le montant en l'absence de preuve par la SARL Vision Interim du caractère excessif de celle-ci, la clause pénale n'étant pas subordonnée à la démonstration du préjudice et ayant un but dissuasif à l'égard des franchisés.

Pour un plus ample exposé des moyens et motifs des parties, renvoi sera effectué à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 19 février 2021, les débats étant fixés au 28 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la résiliation du contrat

L'article 1134 du code civil dispose, dans sa version applicable au litige, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites et ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise, et doivent être exécutées de bonne foi.

En la présente espèce, il convient d'envisager les manquements reprochés par la partie appelante à l'encontre du franchiseur dans le cadre de l'exécution du contrat, mais aussi d'envisager la résiliation en tenant compte de la procédure prévue au contrat liant les parties.

La SARL Vision Interim a entendu faire valoir que la SASU Cotis Développement a manqué à son obligation d'animation du réseau, mais également à ses obligations spécifiques en matière d'information, et de formations en matière de sécurité.

En l'état, s'il est avéré que de nombreux franchisés ont quitté la franchise lors des modifications intervenues dans le cadre du capital de la SASU Cotis Développement, la SARL Vision Interim ne rapporte pas la preuve de ce que la SASU Cotis Développement aurait manqué à son obligation d'animation du réseau. Elle ne rapporte pas non plus la preuve de ce que le franchiseur s'était engagé contractuellement à une obligation de résultat concernant le développement et le maintien du réseau, aucune obligation générale n'existant pas ailleurs en ce sens.

Concernant l'exécution des obligations prévues au contrat, la SARL Vision Interim échoue à rapporter la preuve de ce que la SASU Cotis Développement n'aurait pas respecté son obligation d'assistance, aurait mis un terme au contrat d'hébergeur du site internet ou aurait encore arrêté la newsletter ou même fermé la boutique concernant les produits prévus au contrat.

Sur tous ces points, il ressort des stipulations contractuelles que si la SASU Cotis Développement s'engage à mettre à jour les bibles de documents, aucune fréquence n'est fixée, de même que pour la diffusion de la newsletter.

S'agissant du site internet, la SARL Vision Interim échoue à rapporter la preuve de ce que le site n'est plus hébergé, la remise d'une page avec une recherche ou un lien non abouti était insuffisante.

Quant à la boutique, il convient de relever que la SARL Vision Interim ne verse aucun élément suffisant au débat pour appuyer sa position.

Concernant la hotline, la lecture de l'intégralité du contrat ne permet pas de retenir la position de l'appelante concernant la forme de celle-ci, aucune stipulation ne prévoyant une disponibilité téléphonique, l'intimée indiquant pour sa part qu'elle recouvrait une assistance par courriels.

De ces premiers éléments, il doit être retenu que la SASU Cotis Développement n'a pas manqué aux stipulations contractuelles, notamment celles issues de l'article 8 du contrat.

S'agissant de la communication, il sera relevé que la communication nationale sur le réseau était soumise à des conditions particulières notamment en terme de nombre de franchisés et de chiffre d'affaires, conditions qui n'ont pas été remplies au regard des éléments versés au débat par la SASU Cotis Développement, comme précisé à l'article 9 du contrat.

Au titre de la fermeture de la boutique, la SARL Vision Interim prétend ne plus avoir eu la possibilité de passer commande des éléments essentiels à son activité comme les dossiers intérimaires ou les relevés d'heure. Toutefois, le seul courriel adressé du 25 juin 2013, montre une demande de commande, mais ne porte pas sur un refus et n'objective pas la position de l'appelante.

Concernant les déplacements du franchiseur sur le site, les stipulations contractuelles permettent de déterminer qu'au fil de l'exécution, ceux-ci étaient de moins en moins fréquents, ne relevant plus de la présence important prévue au début de la franchise.

En outre, il ressort des courriels versés au débat que la communication entre les parties était effective puisque au mois d'avril 2013, des échanges sont intervenus, avec un projet de protocole d'accord, concernant le bénéfice pour la SARL Vision Interim d'une zone d'exclusivité augmentée pour exercer son activité sous l'enseigne Cotis Intérim.

En outre, les courriels remis par les parties permettent de constater que le gérant de la SARL Vision Interim s'était déplacé le 25 avril 2013 dans les locaux du franchiseur, la pièce versée recouvrant les échanges entre les deux parties et faisant état de ce déplacement.

Enfin, s'agissant des formations, il sera rappelé qu'une formation a bien été organisée par le franchiseur en 2012, comme reconnu par les deux parties, et qu'au titre de l'année 2013, la SARL Vision Interim ne rapporte pas la preuve de ce qu'une formation n'a pas été organisée sur la totalité de l'année, étant rappelé qu'elle a interrompu le paiement des redevances à compter du début du mois juillet 2013, la situation étant la même pour les challenges, ces moyens n'étant pas pertinents et n'emportant pas la conviction.

La SARL Vision Interim entend enfin fonder sa demande de résiliation aux torts de la SASU Cotis Développement au motif de ce que cette dernière aurait répondu à sa mise en demeure du 30 juillet 2013 par une lettre recommandée avec accusé de réception du 6 août 2013 dans laquelle le franchiseur aurait reconnu qu'il était mis fin au réseau de franchise.

Sur ce point, il conviendra de relever dans un premier temps que la SARL Vision Interim ne verse pas la lettre adressée à la SASU Cotis Développement le 30 juillet 2013, ce qui ne permet pas à la juridiction d'en apprécier le contenu. En outre, la lecture intégrale de la lettre de réponse de la SASU Cotis Développement, transmise par lettre recommandée avec accusé de réception qui n'a pas été réceptionnée par l'appelante, puis par courriel permet de constater qu'à aucun moment la SASU Cotis Développement indique avoir mis fin au réseau de franchise, et qu'au contraire, elle indique son souhait de poursuivre le réseau avec des formes différentes en s'appuyant sur des partenaires fiables dont la SARL Vision Interim.

Concernant l'attitude la SARL Vision Interim, il convient de relever que dans le cadre de l'exécution de ses obligations contractuelles, le franchisé devait, en application de l'article 8.2, communiquer à la SASU Cotis Développement chaque mois son chiffre d'affaires afin de permettre l'établissement de la redevance, ce, avant le 15 du mois suivant le mois concerné.

Il ressort des pièces versées par la SARL Vision Interim, que de manière systématique au titre de l'année 2013, la SASU Cotis Développement réclamait à son franchisé la communication du chiffre d'affaires une fois la date de communication prévue au contrat dépassée. Il est donc erroné pour la SARL Vision Interim de prétendre que la SASU Cotis Développement a manqué à ses obligations en ne demandant plus la communication du chiffre d'affaires, le manquement contractuel étant à imputer à la SARL Vision Interim uniquement.

Par ailleurs, il convient de relever que la SARL Vision Interim a entrepris de bloquer le paiement des redevances dues au titre des mois d'avril et mai 2013, ce, au début du mois de juillet, le franchisé reconnaissant avoir interrompu les paiements tant en première instance qu'en appel, sans toutefois rappeler la preuve d'une inexécution des obligations contractuelles de la SASU Cotis Développement avec laquelle il était encore en lien fin avril 2013 concernant le protocole d'extension de l'activité.

En outre, il doit être relevé que la SARL Vision Interim a interrompu les paiements avant même d'envoyer une mise en demeure conformément aux stipulations de l'article 17 du contrat qui précise la procédure à suivre en cas de volonté de résiliation, le courrier du 30 juillet 2013 n'étant pas versé au débat pour permettre à la cour d'en apprécier le contenu.

Ces différents éléments permettent de déterminer que la SARL Vision Interim n'a pas respecté les stipulations de l'article 17 concernant la résolution des différends et a cessé de manière unilatérale de respecter ses obligations, alors même que la preuve de manquements préalables de la SASU Cotis Développement n'est pas rapportée, le départ de franchisés tiers ne pouvant avoir d'effet sur la relation contractuelle entre la SARL Vision Interim et la SASU Cotis Développement.

Au contraire, en transmettant systématiquement depuis le début de l'année 2013 son chiffre d'affaires avec retard et sur sollicitation du franchiseur, et en cessant de payer les redevances pour lesquels les données étaient transmises, ce, sans mise en demeure, la SARL Vision Interim a interrompu sans motif et en dehors des règles contractuelles, l'exécution de ses obligations, et échoue à rapporter la preuve des manquements de son co-contractant.

En conséquence, la SARL Vision Interim échouant à rapporter les preuves nécessaires au succès de ses prétentions, il convient de rejeter les moyens présentés et de confirmer le jugement déféré sur ce point.

Sur le paiement des factures

En la présente espèce, il doit être relevé que la SARL Vision Interim n'a pas payé les factures émises au titre des redevances dues pour les mois de avril et mai 2013, sans aucun motif légitime, aucune inexécution contractuelle n'étant à mettre à la charge de la SASU Cotis Développement pour justifier ce non-paiement.

Dès lors, c'est à raison que le premier juge a condamné à la SARL Vision Interim à payer les sommes dues au titre de ces deux factures. Il convient en conséquence de confirmer la décision querellée sur ce point.

Sur les indemnités de résiliation

La SASU Cotis Développement se fonde sur l'article 17 du contrat liant les parties rédigé en ces termes':

«'Les deux parties devront respecter de manière continue les obligations suivantes :

agir de façon équitable dans leurs relations mutuelles

résoudre leurs griefs et leurs litiges avec loyauté et bonne volonté, par la communication et la négociation directe

Si toutefois la voie amiable n'était pas suivie et en cas d'inexécution par le partenaire et le franchisé d'une part, ou par le franchiseur d'autre part de l'une quelconque des obligations mises à sa charge par le présent contrat, celui-ci sera résilié de plein-droit, un mois après l'envoi d'une mise en demeure contenant indication de l'intention d'user du bénéfice de la présente clause restée, en toute ou partie infructueuse, sous forme de lettre recommandée avec accusé de réception.

La partie aux torts de laquelle la résiliation aura été prononcée devra verser à son co-contractant une indemnité forfaitaire. Celle-ci sera déterminée sur la base du double du montant estimatif des redevances qui auraient été payées au franchiseur jusqu'au terme normal du contrat. Cette indemnité sera en toute hypothèse au moins égale à 50.000 euros HT «(59.800 euros TTC)'».

Par la présente décision, la cour a confirmé la décision de première instance qui a prononcé la résiliation du contrat aux torts exclusifs de la SARL Vision Interim.

Il ressort des stipulations contractuelles que l'article 17 du contrat, en sa partie indemnitaire relève d'une clause pénale en ce qu'il prévoit une sanction financière minimum forfaitaire ainsi qu'un plafond, s'appuyant sur la durée restant à exécuter du contrat et le chiffre d'affaire espéré par le franchiseur au titre de celui-ci.

La SASU Cotis Développement a estimé son préjudice à la somme de 635.210 euros au titre des années restant à courir au contrat, toutefois, elle n'indique pas à l'appui de sa demande d'éléments probants et objectifs à l'appui de ce chiffrage. Il convient de retenir le caractère excessif de la clause en ce qu'elle mène à une extrapolation du chiffre d'affaire, sans lien avec la réalité du marché ou de la concurrence, ce, sur une période longue, puisque portant en la présente affaire sur la période de 54 mois.

Concernant la position de la Société Vision intérim, le montant de la clause pénale ne peut être ramené à 1 euro, cette somme n'ayant aucun lien avec la réalité de l'exécution des contrats et les sommes engagées.

La somme de 50.000 euros hors taxe doit en conséquence être déclarée satisfactoire.

En conséquence, il convient de rejeter les moyens présentés par la SASU Cotis Développement et la SARL Vision Interim et de confirmer la décision querellée sur ce point.

Sur la demande de préjudice moral formée par la SARL Vision Interim

L'article 1147 du code civil, dans sa version applicable au litige, dispose que le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part, et vu les dispositions de l'article 1134 susvisé.

La SARL Vision Interim entend fonder son préjudice moral sur l'attitude de la SASU Cotis Développement, qu'elle estime contraire à la bonne foi contractuelle, en raison de la non-exécution par l'intimée de ses obligations contractuelles mais aussi en raison de la nature de l'action intentée devant les juridictions.

En l'état, il sera rappelé que la résiliation du contrat liant les parties est retenue comme étant aux torts exclusifs de la SARL Vision Interim. L'appelante ne rapporte pas la preuve en l'état d'un manquement particulier de la SASU Cotis Développement, reprenant les moyens déjà examinés au titre de la responsabilité dans la résiliation contractuelle.

Elle ne rapporte pas la preuve d'une faute extérieure ou grave, pas plus qu'elle ne rapporte la preuve d'un préjudice moral particulier, qui se doit d'être distinct de ceux relatifs notamment aux frais de justice.

Eu égard à ces éléments, les moyens présentés par la SARL Vision Interim doivent être rejetés, le jugement déféré étant confirmé sur ce point.

Sur les demandes de cessation et remise de documents

Vu les dispositions de l'article 1134 du code civil

Les stipulations contractuelles liant les parties à l'article 15.2 prévoient qu'au terme du lien contractuel, le franchisé doit remettre dans un délai de 8 jours les documents relatifs à la franchise.

En l'espèce, la SASU Cotis Développement indique ne pas avoir reçu les documents concernant la franchise dans le délai imparti, tandis que la SARL Vision Interim prétend que la preuve n'est pas rapportée de ce que lesdits documents lui ont été transmis.

En l'espèce, il convient de faire application des stipulations contractuelles liant les parties et de condamner la SARL Vision Interim à cesser tout usage des signes et marques de la SASU Cotis Développement, mais aussi à lui remettre les documents transmis au titre du contrat de franchise, dans le délai de 8 jours suivant la signification de la présente décision, la décision déférée étant infirmée sur ce dernier point en ce qu'elle n'a pas respecté le délai contractuel.

Sur les autres demandes

La SARL Vision Interim échouant en ses prétentions, elle sera condamnée à supporter les dépens de la procédure d'appel.

L'équité commande d'accorder à la SASU Cotis Développement une indemnisation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile. La SARL Vision Interim sera condamnée à lui verser la somme de 5.000 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme la décision déférée en toutes ses dispositions sauf en ce qu'elle a rejeté la demande de remise de documents relatifs à la franchise par la SARL Vision Interim à la SASU Cotis Développement,

Statuant à nouveau sur ce point,

Condamne la SARL Vision Interim à remettre à la SASU Cotis Développement la documentation relative à la franchise Cotis Développement dans un délai de huit jours après la signification de la présente décision,

Y ajoutant

Condamne la SARL Vision Interim aux dépens d'appel,

Condamne la SARL Vision Interim à payer à la SASU Cotis Développement la somme de 5.000 euros à titre d'indemnisation sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/03347
Date de la décision : 10/11/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-11-10;19.03347 ?
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