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27/10/2022 | FRANCE | N°22/02016

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 27 octobre 2022, 22/02016


N° RG 22/02016 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OF2A









Décision du

TJ chambre civile de BOURG EN BRESSE

Au fond

du 07 mars 2022



RG : 22/00199





S.C.I. BONOMY



C/



LA PROCUREURE GENERALE

S.A. LYONNAISE DE BANQUE





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 27 Octobre 2022







APPELANTE :



S.C.I. BON

OMY représentée par son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Patrice PUJOL, avocat au barreau de LYON, toque : 1435 et ayant pour avocat plaidant Me Sandra VUILLEMIN, avocat au barreau de CHA...

N° RG 22/02016 - N° Portalis DBVX-V-B7G-OF2A

Décision du

TJ chambre civile de BOURG EN BRESSE

Au fond

du 07 mars 2022

RG : 22/00199

S.C.I. BONOMY

C/

LA PROCUREURE GENERALE

S.A. LYONNAISE DE BANQUE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 27 Octobre 2022

APPELANTE :

S.C.I. BONOMY représentée par son représentant légal en exercice domicilié es qualité audit siège

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Patrice PUJOL, avocat au barreau de LYON, toque : 1435 et ayant pour avocat plaidant Me Sandra VUILLEMIN, avocat au barreau de CHAMBERY

INTIMEES :

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Monsieur Romain DUCROCQ, substitut

S.A. LYONNAISE DE BANQUE représentée par ses représentants légaux domiciliés es qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Charlotte VARVIER de la SELARL LEGI 01, avocat au barreau d'AIN

INTERVENANTE :

SELARL MJ SYNERGIE Représentée par Maître [X] [H], Agissant en qualité de mandataire Judiciaire de la SCI BONOMY

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON, toque : 475

******

Date de clôture de l'instruction : 29 Septembre 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 06 Octobre 2022

Date de mise à disposition : 27 Octobre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, président

- Raphaële FAIVRE, conseiller

- Marianne LA-MESTA, conseiller

assistées pendant les débats de Sophie PENEAUD, greffier

A l'audience, [W] [K] a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu prononcé et signé par Madame Patricia GONZALEZ, Présidente, à l'audience publique du 27 Octobre 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, président, et par Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffier placé, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte du 10 mai 2017, la SA Lyonnaise de Banque a assigné devant le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse la SCI Bonomy et son gérant M. [Y] [Z] aux fins de voir prononcer la liquidation judiciaire de cette Sci et obtenir la condamnation de M. [Z] en paiement de différentes sommes au titre notamment de deux prêts qu'elle leur avait consentis.

Par jugement réputé contradictoire du 17 janvier 2019, le tribunal de grande instance de Bourg-en-Bresse a :

- déclaré irrecevable la demande de la société Lyonnaise de Banque d'ouverture de la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire de la SCI Bonomy,

- condamné M. [Z] à payer à la société Lyonnaise de Banque les sommes de 43.518,81 euros au titre du prêt modulable numéro 10096 18039 00045548502 et de 63.805,83 euros au titre du prêt 10096 18039 00045548503,

- dit que les condamnations prononcées ci-dessus emportent intérêts au taux légal à compter du 10 mai 2017,

- débouté la société Lyonnaise de Banque du surplus de sa demande en paiement formée à l'encontre de M. [Z],

- dit qu'il n'y a pas lieu d'ordonner l'exécution provisoire du présent jugement,

- condamné M. [Z] à payer à la société Lyonnaise de Banque la somme globale de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné M. [Z] aux entiers dépens.

La société Lyonnaise de Banque a fait pratiquer deux saisies conservatoires en exécution de ce jugement mais celles-ci se sont avérées infructueuses.

Sur appel de la Sci Bonomy et de M. [Z], la cour d'appel de Lyon par arrêt du 19 janvier 2021 a infirmé le jugement du 17 janvier 2019 et débouté la société Lyonnaise de Banque de ses demandes, rappelant que les créanciers ne peuvent poursuivre le paiement des dettes sociales contre un associé qu'après avoir préalablement et vainement poursuivi la personne morale et relevant que la Sci était propriétaire d'un tènement immobilier et que la banque ne démontrait pas que sa vente ne serait pas de nature à apurer sa dette.

La société Lyonnaise de Banque s'est fait autoriser, par ordonnance du juge de l'exécution du 28 septembre 2021, à inscrire une hypothèque sur l'unique bien immobilier de la SCI Bonomy, situé à Belley. Elle a cependant renoncé à cette inscription au vu de la faible valeur du bien (entre 3.600 et 4.500 euros d'après son évaluation).

Finalement, par acte du 6 janvier 2022, la société Lyonnaise de Banque a fait assigner la Sci Bonomy devant le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse aux fins de voir prononcer la liquidation judiciaire ou, très subsidiairement, le redressement judiciaire de la SCI Bonomy et sa condamnation en paiement.

Par jugement réputé contradictoire du 7 mars 2022, le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse a, après débats en chambre du conseil :

- constaté l'état de cessation des paiements de la SCl Bonomy,

- prononcé l'ouverture du redressement judiciaire de la SCl Bonomy,

- ouvert une période d'observation d'une durée de 6 mois à compter de ce jour,

- fixé la date de cessation des paiements au 7 septembre 2020,

- désigné Mme [V] en qualité de juge-commissaire et la Selarl MJ Synergie représentée par Me [H] comme mandataire judiciaire,

- désigné la SCP Combot, huissier de Justice, aux fins de réaliser l'inventaire et la prisée prévus à l'article L.622-6 du code du commerce et dit que cet inventaire devra être déposé au greffe de ce tribunal dans le délai d'un mois de la présente décision,

- rappelé que les créanciers doivent déclarer leurs créances au liquidateur selon les modalités prévues aux articles L. 622-21, L. 622-22, L. 622-28 et L. 622-30 du code de commerce et R. 622-21, R. 622-22, R. 622-23 et R. 622-24 du code de commerce, soit dans un délai de deux mois à compter de la publication du présent jugement au BODACC,

- fixé conformément aux dispositions de l'artic|e L. 624-1 du code de commerce un délai de dix huit mois à compter de la publication du jugement au BODACC, au mandataire judiciaire désigné, pour déposer la liste des créances déclarées avec ses propositions d'admission, de rejet ou de renvoi devant la juridiction compétente,

- déclaré irrecevables les demandes en paiement présentées par la SA Lyonnaise de Banque,

- ordonné le rappel de l'affaire à l'audience du 2 mai 2022 à 14h étant précisé que la notification du présent jugement vaut convocation pour cette date,

- ordonné les mesures de publicité prévues par la loi,

- employé les dépens en frais privilégiés.

La SCI Bonomy a interjeté appel par acte du 15 mars 2022.

Par assignations en référé délivrées les 25 et 28 mars 2022 à la SELARL MJ Synergie, son mandataire judiciaire, et à la société Lyonnaise de Banque, la SCI Bonomy a saisi le premier président d'une demande d'arrêt de l'exécution provisoire, laquelle a été rejetée par ordonnance du 29 avril 2022.

* * *

Par conclusions du 7 septembre 2022 fondées sur les articles 14 et suivants, 16 et suivants et 562 du code de procédure civile, l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, les articles L.631-1 et suivants du code de commerce, la Sci Bonomy demande à la cour de :

à titre principal,

- déclarer l'argumentation adverse comme étant irrecevable,

- prononcer l'annulation du jugement déféré, avec toutes ses conséquences de droit,

à titre subsidiaire,

- réformer le jugement déféré sauf en ce qu'il a déclaré irrecevables les demandes en paiement présentées par la société Lyonnaise de Banque,

Statuant à nouveau,

- rejeter comme étant infondée et injustifiée la demande de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire à son encontre,

- dire n'y avoir lieu à prononcer l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire,

- rejeter toutes les demandes et prétentions de la société Lyonnaise de Banque comme étant injustifiées,

à titre infiniment subsidiaire, si par extraordinaire le prononcé de l'ouverture du redressement judiciaire était confirmé,

- juger l'indemnité conventionnelle de 7 % appliquée par la société Lyonnaise de Banque sur le capital restant dû sur le prêt CIC Immo modulable n° 18039.00045548502 et le prêt CIC Immo modulable n°18039.00045548503 comme revêtant un caractère manifestement excessif, eu égard au préjudice économique réellement subi par la banque, et déclarer cette indemnité inapplicable au capital restant dû pour chacun desdits prêts,

- condamner la société Lyonnaise de Banque à imputer en priorité sur le capital restant dû sur le prêt modulable n°18039.00045548502, puis sur le capital restant dû sur le prêt n°18039.00045548503 la somme de 50.605,01 euros obtenue par la société Lyonnaise de Banque ensuite de la saisie conservatoire entre les mains de Me [D], le 6 septembre 2019, à l'encontre de l'associé de la Sci Bonomy en vertu du jugement du 17 janvier 2019,

- rejeter comme étant irrecevable la demande de la société Lyonnaise de Banque aux fins de voir condamner la Sci Bonomy à lui payer quelques sommes que ce soit,

en tout état de cause,

- rejeter toutes les prétentions autres ou contraires de la société Lyonnaise de Banque,

- condamner la société Lyonnaise de Banque à payer à la Sci Bonomy au titre de l'article 700 du code de procédure civile la somme de 5.000 euros,

- et aux entiers dépens de l'instance et de l'appel, en vertu de l'article 699 du code de procédure civile, distraits au profit de Me Pujol, avocat sur son affirmation de droit.

* * *

Par conclusions du 13 septembre 2022 fondées sur les articles L.621-2, L.631-1, L.640-1 et suivants du code de commerce, les articles L.312-22 et R.312-3 ancien du code de la consommation, les articles 1353, 1892 et 1902 du code civil, la société Lyonnaise de Banque demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

statuant à nouveau,

- condamner la société Bonomy à payer à la société Lyonnaise de Banque la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, pour la procédure d'appel,

- condamner la société Bonomy aux entiers dépens d'appel.

Par conclusions du 4 avril 2022, la Selarl MJ Synergie représentée par Me [H] ès-qualités de mandataire judiciaire de la Sci Bonomy demande à la cour de :

- lui donner acte de ce qu'elle entend s'en rapporter à justice sur les demandes d'annulation et/ou de réformation de la décision entreprise formée par Ia SCI Bonomy à l'encontre du jugement déféré,

- statuer ce que de droit sur les dépens.

Par observations du 7 juin 2022 communiquées contradictoirement aux parties, le ministère public a conclu à la confirmation du jugement.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 29 septembre 2022, les débats étant fixés au 6 octobre 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la demande d'annulation du jugement

A titre principal, la société Bonomy demande l'annulation du jugement rendu par le tribunal judiciaire de Bourg-en-Bresse le 7 mars 2022 pour violation des principes fondamentaux, notamment du principe du contradictoire, dès lors :

- que la société Lyonnaise de Banque a fait preuve de déloyauté dans la procédure qu'elle a engagée le 6 janvier 2022,

- que la Banque a fait délivrer l'assignation à une adresse erronée alors qu'elle connaissait très bien son adresse pour l'avoir utilisée à de multiples reprises,

- que son gérant était, à la date de la première audience devant le tribunal (7 février 2022), bloqué au Maroc compte tenu de la crise sanitaire liée à l'épidémie de covid 19,

- que le conseil de la société Lyonnaise de Banque n'a ni avisé son conseil de la délivrance d'une assignation, ni demandé le renvoi de l'affaire pour permettre la constitution de son confrère,

- qu'il n'y a donc eu aucun débat contradictoire en première instance,

- que l'appel formé par elle n'est pas un 'appel-nullité' et que l'argumentation de la société Lyonnaise de Banque sur l'irrecevabilité de l'appel-nullité est donc inopérante.

En réponse, la société Lyonnaise de Banque expose :

- que l'appel-nullité est en l'espèce irrecevable,

- qu'en tout état de cause, l'assignation a été délivrée tant à l'adresse du siège social de la société Bonomy qu'à l'adresse personnelle du gérant,

- qu'il ne peut lui être reproché d'avoir fait délivrer l'assignation à une date où le gérant de la Sci Bonomy était absent, et qu'il appartenait à celui-ci de prendre ses dispositions pour faire relever son courrier,

- que la communication entre avocats est confraternelle mais pas officielle.

Le ministère public expose :

- qu'il n'y a aucune irrégularité de l'acte introductif d'instance,

- que les circonstances personnelles et déontologiques évoquées par l'appelante sont inopérantes pour fonder une nullité de l'acte introductif d'instance,

- que le jugement est réputé contradictoire car susceptible d'appel et notifié dans les six mois de sa date,

- que la dévolution s'opère pour le tout et que la cour est donc tenue de statuer sur le fond.

La cour relève en premier lieu que l'appelante demande l'annulation du jugement du fait de l'irrégularité de l'acte introductif d'instance, ce qui ferait obstacle à l'effet dévolutif, et ne se prévaut pas d'un appel-nullité ouvert lorsque l'appel est irrecevable en cas notamment en cas d'excès de pouvoir. Le moyen de la Banque tiré de l'irrecevabilité d'un l'appel-nullité est donc inopérant.

Sur le bien fondé des prétentions de la Sci sur l'annulation du jugement, il résulte en second lieu des productions que l'acte introductif d'instance a été signifié le 6 janvier 2022 d'abord à l'adresse mentionnée sur l'extrait k-Bis de la société puis à l'adresse [Adresse 1] (01) au domicile du gérant, par acte déposé à l'étude d'huissier. Il n'est pas contesté que cette adresse est également celle du siège social actuel de la Sci.

L'assignation a en conséquence été valablement délivrée au domicile du gérant de la Sci, et seule l'absence physique du gérant n'a pas permis la signification à sa personne, peu important qu'au préalable, il ait été tenté une signification à l'ancien domicile.

Il appartenait ensuite au gérant de faire toute diligence pour assurer le retrait de son courrier et se faire représenter à l'audience, M. [Z] ne pouvant se prévaloir de convenances personnelles pour remettre en cause la validité de l'acte.

La Sci ne peut non plus invoquer le fait que son conseil n'aurait pas été averti au préalable par le conseil de son adversaire, aucune disposition ne l'imposant, de sorte que l'évocation de règles déontologiques entre avocats est inopérante.

L'acte introductif d'instance étant régulier, aucune nullité n'est encourue ; cette prétention est rejetée.

Sur l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire

A titre subsidiaire, la société Bonomy demande à la cour de réformer le jugement ayant prononcé à son égard l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire en exposant :

- que les contrats de prêt objet de l'instance ont été signés avant le 1er octobre 2016 et sont donc soumis aux dispositions du code civil dans leur version antérieure à l'ordonnance du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats,

- qu'elle conteste le quantum des sommes réclamées par la société Lyonnaise de Banque (et donc le quantum de son passif exigible),

- que la société Lyonnaise de Banque ne justifie pas du détail des sommes qu'elle réclame au titre de chaque prêt,

- que l'indemnité conventionnelle de 7% est une clause pénale qui doit être réduite car manifestement excessive,

- que contrairement à ce qu'allègue la société Lyonnaise de Banque, l'exécution du jugement rendu le 17 janvier 2019 n'a pas été infructueuse puisque la somme de 50.605,01 euros a été consignée en compte Carpa, comme en a attesté le notaire, et que cette somme doit être déduite des sommes dues,

- qu'elle détient un bien immobilier à [Localité 4] d'une valeur de 20.000 euros (et non 4.500 euros comme le prétend la société Lyonnaise de Banque).

En réponse, la société Lyonnaise de Banque expose :

- que toutes les démarches qu'elle a entreprises pour récupérer les sommes qui lui sont dues par la SCI Bonomy se sont révélées infructueuses,

- que le seul bien immobilier dont dispose encore la SCI Bonomy ne vaut que 4.500 euros environ et non 20.000 comme le prétend la société Bonomy sans en justifier,

- qu'elle produit des décomptes précis des sommes qui lui sont dues et que c'est à l'emprunteur de prouver les remboursements déjà effectués,

- que l'indemnité conventionnelle de 7% a été acceptée par la SCI Bonomy et ne constitue pas une clause pénale dès lors qu'elle reste dans les limites des articles L 312-22 et R 312-3 du code de la consommation et au regard du retard dans le règlement,

- que la somme de 50.605,01 euros a été recouvrée dans le cadre d'une procédure concernant le gérant de la SCI et non la SCI elle-même et que cette somme ne peut donc pas être déduite des sommes dues,

- que la société Bonomy est donc bien en état de cessation des paiements avéré,

- que le jugement doit être confirmé en toutes ses dispositions.

Le ministère public conclut à la confirmation du jugement dès lors :

- que la société Lyonaise de Banque établit la preuve d'un passif exigible,

- que la société Bonomy ne rapporte pas la preuve d'un actif disponible permettant de payer le passif exigible,

- que l'état de cessation des paiements de la SCI Bonomy est donc établi,

- que la preuve de cet état de cessation des paiements au 7 septembre 2020 est établie.

Selon l'article L 631-1 du code de commerce, 'Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. Le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements'.

La procédure de redressement judiciaire est destinée à permettre la poursuite de l'activité de l'entreprise, le maintien de l'emploi et l'apurement du passif. Elle donne lieu à un plan arrêté par jugement à l'issue d'une période d'observation et, le cas échéant, à la constitution de deux comités de créanciers, conformément aux dispositions des articles L. 626-29 et L. 626-30".

Sur l'existence d'un passif exigible, il convient d'examiner les dettes échues au moment où l'appréciation est portée, soit au moment où la cour statue. Les dettes doivent être certaines, liquides et exigibles.

Il est rappelé qu'il n'appartient cependant pas à la cour dans le cadre de la présente procédure de fixer les créances, cette fixation relevant de la procédure de vérification et fixation des créances et il est relevé que la Banque ne présente pas de demande en paiement en cause d'appel dans le dispositif de ses conclusions même si elle s'en prévaut dans les motifs.

Par ailleurs, le fait que le créancier puisse se prévaloir d'une créance supérieure, lors de son assignation, à celle qui sera retenue par la procédure de vérification et d'admission des créances est indifférent, dès lors qu'elle est suffisante, au jour où la cour statue, à caractériser l'état de cessation des paiements.

La Banque justifie de la copie exécutoire de l'acte notarié du 31 juillet 2009 faisant mention des prêts contractés par la Sci pour 71.000 euros et 103.000 euros et des bordereaux d'hypothèques publiés le 14 septembre 2009. Elle justifie également avoir tenté de recouvrer ses créances évaluées à 125.152,96 euros au 24 février 2017 par différentes procédures d'exécution dès 2015 suite à des impayés, procédures qui se sont révélées vaines après la vente de ses biens immobiliers par la Sci et le déblocage des fonds à son profit.

La Banque a adressé des décomptes se rapportant aux deux prêts, sans que la Sci n'émette de contestations, ces décomptes faisant apparaître un principal de plus de 116.000 euros, hors les indemnités contestées dans leur montant et hors intérêts échus.

La Banque a tenté à nouveau des procédures d'exécution en 2021 et déclare une créance de plus de 150.000 euros dont 116.965,38 euros au titre du principal restant dû sur les deux prêts.

Nonobstant le montant des indemnités qui est contesté, le passif exigible est donc très élevé et la Sci n'établit nullement s'en être libérée, tentant de renverser la charge de la preuve à son profit.

Sur l'actif disponible, la Sci et la Banque produisent chacune une estimation chiffrée du bien immobilier appartenant à la Sci.

Cette dernière se prévaut d'une estimation de 20.000 euros, produisant en pièce 38 un avis de valeur d'un agent immobilier décrivant le bien comme un garage en dur avec un toit terrasse, une place de stationnement devant le garage et une fermeture par un portail métallique, et indiquant une demande très forte pour ce type de bien.

La Banque produit en pièces 26 et 27 une expertise immobilière du bien fixant sa valeur à 4.500 euros en vente amiable et 3.600 euros en vente forcée.

La Sci prétend dans ses conclusions ne pas en avoir connaissance alors que cette pièce est régulièrement produite ; elle objecte que cette évaluation serait misérabiliste et non contradictoire. Cependant, l'estimation produite par la Banque n'est pas seulement affirmative comme celle de son adversaire mais elle décrit précisément le marché immobilier local, le bâtiment en cause avec une surface utile de 19 m² au sol et ses éléments positifs et négatifs, la valeur du m² de ce type de bien.

Compte tenu de ces éléments, l'estimation du bien réalisée par la Banque apparaît la plus juste de sorte que l'évaluation à retenir ne dépasse pas la somme de 4.500 euros. Il ne s'agit en outre pas d'un actif de rapport et il n'est pas immédiatement réalisable.

S'agissant de la somme de 50.605 euros séquestrée sur un compte CARPA, le procès-verbal de saisie conservatoire fait état d'une créance à l'encontre de M. [Z]. Les fonds ont été décaissés en exécution d'une décision rendue à l'encontre de M. [Z] (jugement du 2 mai 2019) et non à l'encontre de la Sci de sorte que cette dernière ne peut se prévaloir de cet actif ni demander son imputation sur le capital des prêts.

Force est donc de constater qu'il n'existe en l'état aucun actif disponible de la Sci permettant de faire face au passif exigible tel qu'exposé ci-dessus.

En conséquence, le jugement du tribunal de commerce est confirmé en ce qu'il a constaté la cessation des paiements et l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire et sur la date de cessation des paiements, compte tenu de l'ancienneté des impayés.

La Sci est enfin irrecevable à demander à titre subsidiaire à la présente juridiction de se prononcer sur l'indemnité conventionnelle de 7% calculée par la Banque sur les prêts, ce qui relève de la procédure de fixation des créances.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens d'appel sont à la charge de la procédure collective.

Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette la demande d'annulation du jugement déféré.

Confirme le jugement déféré dans toutes ses dispositions.

Y ajoutant,

Déboute la Sci Bonomy de ses demandes tendant à voir déclarer les indemnités conventionnelles de 7 % inapplicables en raison de leur caractère excessif.

Rejette les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dit que les dépens sont en frais privilégiés de la procédure collective.

LE GREFFIERLE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 22/02016
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;22.02016 ?
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