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27/10/2022 | FRANCE | N°19/01197

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale d (ps), 27 octobre 2022, 19/01197


AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE





COLLÉGIALE



RG : N° RG 19/01197 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGMK





[C]



C/

CPAM DE L'AIN

SARL [8]







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AIN

du 30 Mai 2016

RG : 384.13





AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE D



PROTECTION SOCIALE



ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2022



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APPELANT :



[L] [C]

né le 30 Avril 1981 à [Localité 6] ([Localité 6])

[Adresse 5]

[Localité 3]



comparant en personne, assisté de Me Sybille CELLIM, avocate, substituant Me Thomas NOVALIC de la SELARL TN AVOCATS, avocat au barreau de...

AFFAIRE : CONTENTIEUX PROTECTION SOCIALE

COLLÉGIALE

RG : N° RG 19/01197 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MGMK

[C]

C/

CPAM DE L'AIN

SARL [8]

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale d'AIN

du 30 Mai 2016

RG : 384.13

AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE D

PROTECTION SOCIALE

ARRÊT DU 27 OCTOBRE 2022

APPELANT :

[L] [C]

né le 30 Avril 1981 à [Localité 6] ([Localité 6])

[Adresse 5]

[Localité 3]

comparant en personne, assisté de Me Sybille CELLIM, avocate, substituant Me Thomas NOVALIC de la SELARL TN AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

CPAM DE L'AIN

Pôle des affaires juridiques

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par madame [N] [U], audiencière, munie d'un pouvoir

SARL [8]

[Adresse 9]

[Adresse 7]

[Localité 1]

représentée par Me Marie-christine MANTE-SAROLI de la SELARL MANTE SAROLI & COULOMBEAU, avocat au barreau de LYON substituée par Me Anaëlle LARACINE, avocat au barreau de LYON

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 22 Mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Nathalie PALLE, Présidente

Bénédicte LECHARNY, Conseiller

Thierry GAUTHIER, Conseiller

Assistés pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 27 Octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Nathalie PALLE, Présidente et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Salarié en qualité d'aide projeteur de la société [8] (l'employeur), M. [C] (la victime) a été victime d'un accident le 16 juin 2010 déclaré par son employeur le 9 décembre 2010 dans les termes suivants : «accident survenu à 8 heures du matin en prenant un paquet de Nergalto, a ressenti un craquement douloureux dans le dos ' témoin le collègue de travail (nom à préciser)», le certificat médical initial établi le 9 juillet 2010, faisant état d'une «sciatique S2 droite par hernie discale L5-S1».

Par arrêt du 27 novembre 2012, la cour d'appel de Lyon a jugé que cet accident devait être pris en charge au titre de la législation professionnelle.

Le 29 mars 2013, M. [C] a été licencié pour inaptitude.

Par décision du 2 juillet 2013, la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ain (la caisse) lui a attribué, à compter du 2 mars 2013, une rente sur la base d'un taux d'incapacité permanente partielle de 46%, dont 6% de taux socio professionnel, pour des séquelles très importantes avec raideur majeure du rachis et sciatalgie S1 droite et troubles majeurs.

Le 19 juillet 2013, M. [C] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bourg-en-Bresse d'une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Par jugement du 30 mai 2016, le tribunal a :

- écarté des débats les trois attestations de M. [K],

- débouté M. [C] de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur dans la survenance de l'accident dont il a été victime le 16 juin 2010,

- déclaré le jugement commun et opposable la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ain,

- condamné M. [C] à payer à la société [8] la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le 21 juin 2016, M. [C] a relevé appel de ce jugement.

L'affaire a été radiée le 19 décembre 2017, en l'absence de diligences de l'appelant.

L'affaire a été réinscrite le 15 février 2019 sur le dépôt par l'appelant de ses conclusions et d'un bordereau de pièces.

A l'audience du 25 février 2020 à laquelle elle a été appelée, l'affaire a fait l'objet d'un renvoi contradictoire à l'audience du 26 janvier 2021, en raison de la grève des avocats, puis, à cette dernière date, d'un renvoi contradictoire au 22 mars 2022, à la demande du conseil de l'appelant.

Par ses conclusions déposées au greffe le 15 février 2019, datées et signées du 14 février 2019, oralement soutenues à l'audience des débats et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens et prétentions, M. [C] demande à la cour de:

' réformer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

Statuant à nouveau :

' juger recevable et fondée son action,

' dire que l'accident du travail dont il a été victime le 16 juin 2010 est du à la faute inexcusable de la société,

' dire que la rente accident du travail perçu sera majorée au maximum dans les conditions prévues par la loi,

' lui allouer la somme de 12 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de ses préjudices personnels,

' ordonner une expertise médicale,

' dire que la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ain lui versera la somme de 12 000 euros à titre d'indemnité provisionnelle à valoir sur ses préjudices personnels et qu'elle fera l'avance des frais d'expertise,

' condamner l'employeur à lui payer la somme de 2500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et le condamner aux dépens.

**

Par des conclusions déposées au greffe le 21 février 2020, oralement soutenues à l'audience des débats et auxquelles il convient de se reporter pour un plus ample exposé de ses moyens, l'employeur conclut à la confirmation du jugement et demande à la cour de :

' juger que l'accident survenu le 16 juin 2010 n'est pas dû à la faute inexcusable de l'employeur,

' débouter M. [C] de ses demandes,

' le condamner à lui payer la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, en sus de la somme allouée à ce titre en première instance,

Subsidiairement, si la faute inexcusable de l'employeur devait être retenue :

' juger que l'expertise médicale sollicitée sera ordonnée suivant les dispositions de l'article L. 452-3 du code de sécurité sociale,

' débouter M. [C] de sa demande de provision injustifiée, à tout le moins la ramener à de plus justes proportions, la somme allouée ne pouvant être supérieure à 3000 euros,

' ramener à de plus justes proportions la demande présentée sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouter M. [C] de toutes autres demandes,

' dire et juger que la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ain devra faire l'avance de toutes sommes allouées à M. [C], en récupérera le montant auprès de l'employeur,

' déclarer l'arrêt à intervenir commun et opposable à la caisse primaire d'assurance-maladie de l'Ain.

Par des écritures déposées au greffe le 5 janvier 2021, oralement soutenues à l'audience des débats et auxquelles il convient de se reporter, la caisse indique que, dans l'hypothèse de la reconnaissance une faute inexcusable de l'employeur elle fera l'avance des sommes allouées la victime au titre de la majoration de la rente et de l'indemnisation des préjudices et procédera au recouvrement de l'intégralité des sommes dont elle serait amenée à faire l'avance, auprès de l'employeur, y compris des frais d'expertise.

MOTIFS DE LA DÉCISION

- Sur la faute inexcusable

En vertu des dispositions des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail, l'employeur est tenu d'une obligation légale de sécurité et de protection de la santé envers le travailleur.

Le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident du travail ou de la maladie professionnelle. Il suffit qu'elle soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes auraient concouru à la survenance du dommage. De même, la faute de la victime n'a pas pour effet d'exonérer l'employeur de la responsabilité qu'il encourt en raison de sa faute inexcusable.

Sauf cas limitativement énumérés, la faute inexcusable ne se présume pas et il incombe au salarié ou à ses ayants droit d'en rapporter la preuve.

En l'espèce, il résulte des déclarations de la victime, telles qu'elles ressortent des termes de la lettre qu'elle adressait à son employeur le 12 novembre 2010, de la déclaration d'accident du travail comme de son audition lors de l'enquête administrative par l'agent enquêteur de la caisse, confortées par les déclarations faites au même agent enquêteur par M. [K], son collègue, que le matin des faits M. [C] a chargé le camion seul et que c'est lors du déchargement des plaques de Nergalto du camion sur le lieu du chantier que M. [C] s'est blessé au dos.

De ces éléments, il ressort que les circonstances de l'accident ne sont donc pas indéterminées, ainsi que l'ont retenu les premiers juges.

M. [C] reproche à son employeur d'avoir eu conscience du danger auquel il l'exposait en le laissant charger le camion et manipuler seul ces charges lourdes et de n'avoir pris aucune mesure pour préserver sa santé et sa sécurité à l'occasion de cette opération.

L'accident du travail met en cause les conditions dans lesquelles M. [C] a manipulé les plaques de Nergalto puisqu'il s'avère que c'est à l'occasion du déchargement de celles-ci qu'il s'est blessé, les parties s'opposant sur le fait que M. [C] était alors seul ou non à les manipuler.

Sur ce point aucune valeur probatoire ne peut être conférée aux trois attestations de témoignage de M. [K], collègue de travail de la victime (pièces n°16, 17 et 23 de l'appelant), la première présentant une écriture manuscrite différente de la deuxième et la troisième, qui n'est accompagnée d'aucune copie de pièce d'identité, comporte de surcroît une écriture manuscrite différente entre sa première et sa seconde page.

Il demeure que, lors de son audition par l'agent enquêteur de la caisse, M. [K] avait précisé que si M. [C] avait chargé le camion tout seul, ils étaient arrivés en même temps sur le chantier, et il poursuivait en relatant : «on a déchargé le camion. Vers 10h-11h, [M. [C]] s'est plaint d'avoir mal au dos du fait des efforts faits pour décharger les plaques de Nergalto [...]», ce qui tend à établir que les deux salariés avaient déchargés ensemble ce matériaux du camion.

La fiche technique descriptive des plaques de Nergalto, matériaux constitué par des plaques de treillis métalliques, en mentionne le poids soit 1,30 kg par m² et la longueur qui est de 2 mètres.

M. [C] évalue lui-même à 39 kilogrammes le poids que représentait chacune de ces plaques.

Il n'est pas soutenu que des aides mécaniques pouvaient être mises en oeuvre sur ce chantier afin d'éviter une manipulation manuelle, laquelle est autorisée pour un travailleur en deçà de 55 kilogrammes ainsi que cela résulte des dispositions de l'article R. 231-72, devenu R. 4541-9 du code du travail, ce dernier dans sa rédaction applicable issue du décret n°2008-244 du 7 mars 2008.

L'accident du travail étant survenu alors qu'il déchargeait avec l'aide de son collègue les plaques de Nergalto dont les paquets ne dépassaient pas 55 kilogrammes, et les circonstances de l'accident devant être mises en rapport de causalité avec les éventuels manquements par l'employeur à son obligation de prévention et de sécurité, M. [C] ne démontre pas le manquement de son employeur à la législation relative au port de charges lourdes et n'indique pas quelle mesure celui-ci aurait du prendre pour l'en préserver, de sorte que la cour confirme le jugement en ce qu'il a conclu à l'absence de preuve d'une faute inexcusable de la part de l'employeur et au rejet des demandes de M. [C].

- Sur les frais irrépétibles et les dépens

Compte tenu de l'issue du litige, le jugement est confirmé en ce qu'il a condamné M. [C] aux dépens et mis à sa charge une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

M. [C] supporte les dépens d'appel et sa demande au titre de l'article 700 est rejetée.

L'équité ne commande pas de faire droit en cause d'appel à la demande de l'employeur au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Statuant par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe et en dernier ressort,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

REJETTE les demandes des parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE M. [L] [C] aux dépens d'appel.

La greffière, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale d (ps)
Numéro d'arrêt : 19/01197
Date de la décision : 27/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-27;19.01197 ?
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