AFFAIRE DU CONTENTIEUX DE LA PROTECTION SOCIALE
RAPPORTEUR
R.G : N° RG 20/04599 - N° Portalis DBVX-V-B7E-NDQA
[W]
C/
URSSAF RHONE ALPES
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Tribunal de Grande Instance de ROANNE
du 09 Juillet 2020
RG : 18/00330
AU NOM DU PEUPLE FRAN'AIS
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE D
PROTECTION SOCIALE
ARRÊT DU 18 OCTOBRE 2022
APPELANTE :
[O] [W] épouse [E]
née le 12 Janvier 1945 à [Localité 2] (LOIRE)
[Adresse 1]
[Adresse 1] (LOIRE)
représentée par Me Isabelle CHAUMONT, avocat au barreau de LYON
(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 69123/2/2020018437 du 22/10/2020 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)
INTIMEE :
URSSAF RHONE ALPES
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représenté par Me Thomas MERIEN de la SELARL AXIOME AVOCATS, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Juin 2022
Présidée par Bénédicte LECHARNY, Conseiller, magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Malika CHINOUNE, Greffier
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
- Nathalie PALLE, présidente
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
- Thierry GAUTHIER, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 18 Octobre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Présidente, et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [O] [W] épouse [E] (la cotisante) a été affiliée au régime social des indépendants (RSI) pour une activité de restauration exercée en nom personnel du 26 mai 2000 au 28 février 2017.
Par acte d'huissier du 10 novembre 2016, la caisse du RSI Auvergne a fait signifier à la cotisante une contrainte du 28 octobre 2016 pour une somme de 6 619 euros, correspondant à des cotisations et majorations de retard au titre des périodes suivantes : régularisations 2009, 2010 et 2011.
Saisi d'une opposition à la contrainte, le pôle social du tribunal judiciaire de Roanne a, par jugement du 9 juillet 2020 :
- déclaré recevable l'opposition,
- au fond, débouté la cotisante de ses prétentions,
- en conséquence, validé la contrainte pour la somme de 6 619 euros,
- rappelé que la contrainte délivrée a acquis tous les effets d'un jugement et notamment le bénéfice de l'hypothèque judiciaire,
- condamné la cotisante aux dépens,
- débouté les parties de leurs plus amples demandes.
Le jugement lui ayant été notifié le 20 juillet 2020, la cotisante en a relevé appel par lettre recommandée du 14 août 2020.
Par conclusions adressées à la cour le 13 octobre 2021 et maintenues à l'audience du 19 octobre 2021, la cotisante demande à la cour de :
- déclarer son appel recevable et bien fondé,
- réformer le jugement déféré en ce qu'il l'a déboutée de sa demande d'annulation de la contrainte,
- débouter l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Rhône-Alpes (l'URSSAF), venant aux droits de la caisse du RSI Auvergne, de l'intégralité de ses demandes,
- condamner l'URSSAF à lui payer la somme de 8 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice qu'elle a subi consécutivement aux manquements de la caisse à ses obligations,
- ordonner, si la contrainte n'était pas annulée, la compensation entre son montant et la somme allouée à titre de dommages-intérêts,
- condamner l'URSSAF aux dépens de première instance et d'appel.
Par conclusions déposées à l'audience du 19 octobre 2021, l'URSSAF demande à la cour de :
- déclarer recevable mais mal fondé l'appel formé par la cotisante,
- déclarer recevable et bien fondé son appel incident,
- confirmer le jugement en ce qu'il a validé la contrainte pour la somme de 6 619 euros et débouté la cotisante de sa demande de dommages-intérêts,
- le réformant pour le surplus,
- condamner la cotisante au paiement des majorations de retard complémentaires ainsi qu'aux frais de signification et aux frais de tous autres actes de procédure nécessaires à l'exécution de la décision à intervenir,
- condamner la cotisante aux dépens.
L'affaire a été mise en délibéré au 11 janvier 2022. Toutefois, par mention au dossier du 6 janvier 2022, la cour a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 21 juin 2022 et a invité l'URSSAF à produire aux débats et à communiquer à la partie adverse un décompte ou tout autre pièce justifiant de l'imputation de la somme de 15'342 euros accordée à la cotisante le 22 octobre 2015 par la commission d'action sanitaire et sociale.
Par courrier du 14 février 2022, URSSAF précise que l'aide, qui s'est finalement élevée à un montant de 10'505 euros, a été affectée au compte n° 827000002172607039 et non au compte n° 827000002172573553 relatif aux cotisations maladie-maternité-indemnités journalières pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2011, objet du litige.
À l'audience du 21 juin 2022, la cotisante soutient que le décompte produit par l'URSSAF ne satisfait pas à la demande de la cour et verse aux débats un courrier de l'URSSAF du 13 décembre 2021 l'informant de l'octroi d'une aide exceptionnelle par le conseil de la protection sociale des travailleurs indépendants d'un montant de 8 065,97 euros, le courrier précisant que « cette aide vient solder l'ensemble des cotisations et contributions sociales personnelles restant dues auprès de [l']URSSAF ». Elle en déduit qu'aucune condamnation à paiement d'un quelconque arriéré de cotisations ne saurait être prononcée à son encontre.
L'URSSAF a été autorisée à présenter ses observations sur ce courrier par une note en délibéré.
Par courrier du 29 juin 2022, communiqué à la partie adverse, l'URSSAF indique que l'aide exceptionnelle concerne le compte n° 827000002172607039 et a été affectée au premier trimestre 2017 et à la période de régularisation 2017. Elle affirme donc que cette aide n'a aucune incidence sur les cotisations maladie-maternité-indemnités journalières pour la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2011 visées par le compte n° 827000002172573553, objet du litige.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est référé pour le surplus aux écritures déposées par les parties.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la demande d'annulation de la contrainte
La cotisante sollicite l'annulation de la contrainte au motif qu'elle était à jour de ses cotisations compte tenu, notamment, des aides dont elle a bénéficié.
L'URSSAF réplique que le litige porte uniquement sur le compte n° 827000002172573553 et qu'aucun versement n'a été enregistré sur celui-ci.
Sur ce,
La cour observe que la cotisante ne soulève aucun moyen tendant à la nullité de la contrainte et rappelle qu'il incombe à l'opposant à contrainte de rapporter la preuve du caractère infondé de la créance dont le recouvrement est poursuivi par l'organisme social.
En l'espèce, l'URSSAF détaille dans ses conclusions, pour chaque année, le montant des cotisations réclamées à titre définitif, précisant la base retenue pour le calcul et la régularisation opérée.
C'est à tort que la cotisante soutient qu'elle était à jour de ses cotisations ainsi que le démontrerait un courrier du 16 octobre 2012 faisant état d'une régularisation sa faveur, alors que l'URSSAF établi que le compte rappelé en références du courrier, qui concerne uniquement les cotisations de retraite-allocations familiales et CSG/CRDS, n'est pas le même que celui visé par la contrainte, relatif au régime maladie.
C'est encore à tort qu'elle soutient que sa dette a été apurée par les aides accordées en 2015 et 2021, alors que l'URSSAF justifie que ces prises en charge ont été affectées au compte n° 827000002172607039, et non au compte n° 827000002172573553 visé par la contrainte.
Le montant des cotisations appelées étant justifié et la cotisante n'établissant pas s'en être acquitté, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a validé la contrainte pour son montant de 6 619 euros correspondant aux cotisations et majorations de retard au titre des régularisations des années 2009, 2010 et 2011. Ajoutant au jugement, la cotisante est condamnée à payer les majorations de retard complémentaires échues et à échoir jusqu'au paiement.
2. Sur la demande de dommages-intérêts
L'URSSAF reconnaît qu'en raison d'une erreur informatique, la cotisante a été immatriculée, du 1er janvier 2008, date de création de l'interlocuteur social unique, au 31 décembre 2011, sous deux comptes de travailleur indépendant :
- un compte n°TI 420 000003010414670, devenu 827000002172002942 suite à la régionalisation des URSSAF, pour les cotisations d'allocations familiales, de retraites et invalidité décès et les contributions CSG/CRDS,
- et un compte n°TI 420 000003420368304, devenu 827000002172573553 à la suite suite à la régionalisation des URSSAF, pour les cotisations maladie-maternité-indemnités journalières,
Les cotisations et contributions sociales ayant ensuite été regroupées sous un nouveau numéro unique TI 827000002172607039, à compter du 1er janvier 2012.
Pour autant, la cotisante ne démontre pas avoir subi un préjudice résultant de cette double immatriculation, les cotisations appelées au titre de chacun des comptes étant de nature différente et effectivement dues par la cotisante.
Aussi convient-il de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la cotisante de sa demande de dommages-intérêts.
3. Sur les dépens
Il y a lieu enfin de confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la cotisante aux dépens de première instance.
La cotisante, partie perdante, est encore condamnée aux dépens d'appel, ainsi qu'aux frais de signification de la contrainte. Il n'y a pas lieu de statuer spécialement sur la demande de condamnation de la cotisante au paiement des frais de recouvrement nécessaires à la bonne exécution de la présente décision, dès lors que les frais d'exécution forcée du titre exécutoire sont à la charge du débiteur par application de l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
CONDAMNE Mme [O] [W] épouse [E] à payer à l'URSSAF Rhône-Alpes les majorations de retard complémentaires dues jusqu'au paiement,
CONDAMNE Mme [O] [W] épouse [E] aux frais de signification de la contrainte,
CONDAMNE Mme [O] [W] épouse [E] aux dépens d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE