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13/10/2022 | FRANCE | N°19/02802

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 13 octobre 2022, 19/02802


N° RG 19/02802 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MKKY









Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 08 avril 2019



RG : 2018j452

ch n°





SAS OBJECTIF CASH



C/



SARL CCLD RECRUTEMENT





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 13 Octobre 2022







APPELANTE :



SAS OBJECTIF CASH prise en la pe

rsonne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant Me Joëlle SERMAI...

N° RG 19/02802 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MKKY

Décision du

Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 08 avril 2019

RG : 2018j452

ch n°

SAS OBJECTIF CASH

C/

SARL CCLD RECRUTEMENT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 13 Octobre 2022

APPELANTE :

SAS OBJECTIF CASH prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON, toque : 938 et ayant pour avocat plaidant Me Joëlle SERMAIZE CUVELIER, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉE :

SARL CCLD RECRUTEMENT prise en la personne de son représentant légal en exercice

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Ophélie MICHEL de la SELARL VIAJURIS CONTENTIEUX, avocat au barreau de LYON, toque : 2109

******

Date de clôture de l'instruction : 22 Septembre 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Septembre 2022

Date de mise à disposition : 13 Octobre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Aurore JULLIEN, conseillère

- Marianne LA-MESTA, conseillère

assistées pendant les débats de Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière placée

A l'audience, Patricia GONZALEZ, présidente, a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu prononcé et signé par Madame Patricia GONZALEZ, Présidente, à l'audience publique du 13 Octobre 2022, date indiquée à l'issue des débats, par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Patricia GONZALEZ, présidente, et par Anne-Laure TUDELA-LOPEZ, greffière placée, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

EXPOSÉ DU LITIGE

La SAS Objectif Cash est un cabinet indépendant de management de transition, spécialisé en direction financière opérationnelle et la Sarl CCLD Recrutement est un cabinet de recrutement spécialisé dans les fonctions commerciales et de la distribution.

La société Objectif Cash a confié à la société CCLD Recrutement la mission de recruter pour son compte un chargé business development, un responsable business development ainsi qu'un chargé de relation clients.

Au terme de la première mission confiée par la société Objectif Cash à la société CCLD Recrutement, la convention de recrutement CM 1604-0501 du 6 avril 2016 prévoyait une première rémunération de 7.000 euros HT (8.400 euros TTC) pour le recrutement d'un chargé business development et une deuxième rémunération de 9.000 euros HT (10.800 euros TTC) pour le recrutement d'un responsable business development.

Au terme de la seconde mission confiée le 31 août 2016 par la société Objectif Cash à la société CCLD Recrutement, le contrat CM 1604-0501 signé le 1er septembre 2016 prévoyait une nouvelle mission de recrutement d'un Chargé de Relation Clients, aux termes duquel une rémunération de 5.500 euros HT (6.600 euros TTC) était contractualisée. Le contrat prévoyait un acompte de 1.650 euros HT à la signature du contrat, un autre de 1.650 euros à la présentation du premier candidat et le solde à l'embauche.

Ces deux contrats organisaient ces missions sur une durée maximale de 24 semaines.

La société Objectif Cash réglait à la société CCLD Recrutement la somme de 24.360 euros TTC soit, 10.800 euros pour le poste de responsable business development, 9.600 euros TTC pour le poste de chargé business development et 3.960 euros TTC pour le poste de chargé relation clients.

Le poste de responsable business development faisait l'objet d'une embauche.

Par courriel du 22 novembre 2017, M. [H] [W], directeur du développement commercial de la société CCLD Recrutement, déclarant constater la réalisation de l'ensemble de ses prestations malgré l'absence de recrutement par la société Objectif Cash, informait cette dernière du terme de la mission ayant duré plus d'un an pour le recrutement d'un chargé business development et près d'un an et trois mois pour celui d'un chargé de relation clients.

Par mise en demeure restée vaine du 8 décembre 2017, la société Objectif Cash sollicitait pour sa part le règlement d'une somme totale de 48.720 euros TTC au titre, selon elle, des prestations n'ayant pas été effectuées et comprenant celle de 24.360 euros TTC déjà versée.

Par acte d'huissier de justice du 6 mars 2018, la société Objectif Cash a fait assigner la société CCLD Recrutement en paiement. La société CCLD Recrutement a demandé reconventionnellement le paiement d'une somme pour le recrutement d'un salarié outre l'indemnisation de préjudices.

Par jugement du 8 avril 2019, le tribunal de commerce de Lyon a :

- débouté la société Objectif Cash de l'intégralité de ses demandes,

- condamné la société Objectif Cash à payer à la société CCLD Recrutement la somme de 6.600 euros au titre de la prestation de recrutement de M. [I] [A],

- rejeté l'ensemble des autres demandes de la société CCLD Recrutement,

- condamné la société Objectif Cash à payer à la société CCLD Recrutement la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Objectif Cash aux entiers dépens de la présente instance.

La société Objectif Cash a interjeté appel par acte du 23 avril 2019 en ce que le jugement du tribunal de commerce de Lyon en date du 8 avril 2019 :

- l'a déboutée de l'intégralité de ses demandes qui étaient les suivantes :

- dire inapplicable l'article 13 des contrats de recrutement CM 1604-0501 du 6 avril 2016 et du 31 août 2016,

- dire et juger que la société Objectif Cash est recevable en sa demande,

- constater que par courrier recommandé avec avis de réception en date du 8 décembre 2017, la société CCLD Recrutement a été mise en demeure de régler la somme de 48.720 euros,

- constater que les missions confiées n'ont pas été exécutées,

- en conséquence :

- dire que la société CCLD Recrutement n'a pas respecté ses engagements,

- constater que la créance est liquide, certaine et exigible,

- dire que la demande est parfaitement fondée,

- en conséquence,

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 48.720 euros TTC telle que précisé majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 8 décembre 2017,

- débouter la société CCLD Recrutement de toutes ses demandes, fins et conclusions éventuelles à quelques fins qu'elles tendent,

- rejeter purement et simplement toutes les demandes reconventionnelles de la société CCLD Recrutement.

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires pour résistance abusive,

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

- l'a condamnée à payer la somme de 6.600 euros au titre de la prestation de recrutement de M. [I] [A],

- rejeté l'ensemble des autres demandes de la société CCLD Recrutement,

- condamné la société Objectif Cash à payer à la société CCLD Recrutement la somme de 2.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Objectif Cash aux entiers dépens de la présente instance.

* * *

Par conclusions du 13 janvier 2020, fondées sur les articles 1134 et 1147 anciens du code civil, ainsi que sur l'article 1217 du code civil, la société Objectif Cash demande à la cour de :

- recevoir l'appel interjeté,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il rejette ses demandes et la condamne à payer la somme de 6.600 euros TTC, pour la prestation de recrutement de M. [I] [A],

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il la condamne à payer la somme de 2.500 euros sur la base de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,

- condamner la société CCLD Recrutement à rembourser le montant des prestations réglées, en vertu des contrats de mission confiées à la société CCLD, du fait de la carence dans les moyens mis en 'uvre, et de l'absence de respect des engagements pris par la société CCLD,

- en conséquence, statuant à nouveau,

- voir dire inapplicable l'article 13 §2 des contrats de recrutement, CM 1604-0501 du 6 avril 2016, et du 31 août 2016, ce paragraphe étant rayé, par les parties,

- constater le préjudice qu'elle a subi du fait de la société CCLD en sa mauvaise exécution et confirmer qu'elle a dû pallier à la carence de la société CCLD Recrutement,

- condamner la société CCLD Recrutement, en vertu du nouvel article 1217 du code civil, à rembourser le montant des prestations réglées, en vertu des contrats de mission pour la somme de 24 360 euros TTC,

- condamner la société CCLD Recrutement à la réparation du préjudice subi, pour le temps perdu et, les frais générés du fait de l'inertie de la société CCLD,

- condamner la société CCLD Recrutement à réparer le préjudice subi du fait du temps qu'elle lui a consacré et le manque à gagner, soit au total la somme de 48.720 euros TTC,

- juger qu'elle est recevable en sa demande,

- constater que, par courrier recommandé avec avis de réception en date du 8 décembre 2017, la société CCLD Recrutement a été mise en demeure de régler la somme de 48.720 € TTC,

- constater que les missions confiées n'ont pas été exécutées, conformément aux obligations figurant aux deux contrats signés,

- dire que la société CCLD Recrutement n'a pas respecté les engagements qu'elle a pris, ainsi qu'il est démontré,

- dire que la demande de remboursement est bien fondée,

- constater que la créance est liquide, certaine et exigible,

- en conséquence,

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 48.720 euros TTC, telle que précisée, majorée des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure en date du 8 décembre 2017,

- débouter la société CCLD Recrutement de toutes ses demandes incidentes, non fondées, fins et conclusions éventuelles à quelques fins qu'elles tendent,

- rejeter purement et simplement toutes les demandes reconventionnelles de la société CCLD,

constater que M. [A], n'a pas fait l'objet d'un recrutement accompli, par la société CCLD,

- juger la condamnation infondée,

- infirmer sa condamnation à payer à la société CCLD Recrutement la somme de 6.600 euros TTC, au titre de la prestation de recrutement de M. [A],

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts complémentaires pour résistance abusive,

- condamner la société CCLD Recrutement à lui payer la somme de 8.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société CCLD Recrutement aux entiers dépens dont ceux de la procédure introduite au fond en première instance et ceux de la présente procédure d'appel, ces derniers étant distraits au profit de Me Romain Laffly ' Lexavoué Lyon sur son affirmation de droit.

* * *

Par conclusions du 16 octobre 2019, fondées sur les articles 1134 et 1147 du code civil, sur l'article L.1132-1 du code du travail, sur les articles 225-1 et 225-2 du code pénal, ainsi que sur les articles 32-1, 700 et 900 et suivants du code de procédure civile, la société CCLD Recrutement demande à la cour de :

- déclarer la société Objectif Cash non fondée en son appel, l'en débouter,

- la déclarer recevable en son appel incident,

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

- débouté la société Objectif Cash de l'ensemble de ses demandes,

- condamné la société Objectif Cash à lui verser la somme 6 600 euros au titre de la prestation de recrutement de M. [I] [A],

- condamné la société Objectif Cash à lui verser la somme 2 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et aux dépens,

- infirmer le jugement déféré en ce qu'il :

l'a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts correspondant aux préjudices résultant des manquements contractuels de la société Objectif Cash de procédure abusivement engagée par cette dernière, outre une condamnation au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile laissée à l'appréciation de la juridiction,

- statuant à nouveau :

- condamner, la société Objectif Cash à lui verser la somme de 7.361,10  euros, correspondant aux préjudices résultant des manquements de la société Objectif Cash,

- condamner, en conséquence, la société Objectif Cash à lui verser la somme de 10. 000 euros pour procédure abusive, outre une condamnation au titre de l'article 32-1 du code de procédure civile que la juridiction appréciera,

- condamner la société Objectif Cash à lui payer la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens d'instance et d'exécution.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 septembre 2020.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, la cour rappelle que les 'demandes' tendant à voir 'constater' ou tendant à ' voir dire et juger' lorsque celles-ci développent en réalité des moyens ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour.

Sur le cadre contractuel liant les parties

L'article 12 du contrat stipule que 'En cas de départ des candidats recommandés par CCLD Recrutement dans le cadre de leur période d'essai, soit de leur propre fait, soit du fait de l'employeur, la société CCLD Recrutement s'engage à reprendre une nouvelle recherche sans frais, sous réserve du règlement préalable de la totalité du forfait défini dans page 1 (sic) et suivantes de la présente convention et conformément à l'article 8 de la présente convention.

Cette garantie mise en oeuvre doit faire l'objet de la demande expresse et écrite du client dans un délai d'un mois maximum après le départ des candidats H/F objets de ladite garantie, n'est valable une seule fois pour chaque candidat H/F recruté et ne peut jouer en cas de modification majeure du poste ou de l'organisation, ou pour une cause accidentelle non liée à la responsabilité des candidats H/F'.

L'article 13 des conditions générales est rédigé comme suit :

' La mission, réputée se poursuivre jusqu'à signature du contrat de travail entre les candidats H/F, présenté(e)s par le cabinet, et le client, ne pourra toutefois pas excéder vingt-quatre semaines à compter de la signature de la présente convention.

Aussi, si à l'issue de ce délai, le Cabinet était en mesure de justifier avoir mis en oeuvre tous les moyens nécessaires à l'aboutissement de sa mission, sans pour autant y parvenir, la présente convention prendrait fin d'elle-même et la totalité du forfait de recrutement restera définitivement acquise au cabinet, sans préjudice de tous autres droits du cabinet'.

La société appelante soutient que le second alinéa de l'article a été rayé par les parties de sorte qu'il ne peut recevoir application, ce que révèlent les exemplaires de la société de recrutement. La société CCLD Recrutement conteste cette argumentation en faisant valoir que les deux parties n'ont pas signé mais seulement son adversaire.

Toutefois, les exemplaires produits par la société de recrutement elle-même confirment que le second alinéa de l'article 13 a effectivement été rayé de sorte que cette modification apportée aux dispositions pré-imprimées du contrat a nécessairement été acceptée par elle en ce qu'elle résulte de ses propres pièces contractuelles, même si elle n'a pas apposé sa signature.

Il se déduit de cette modification apportée au contrat que la mission du cabinet de recrutement reste limitée bien à 24 semaines, comme précisé à l'alinéa 1, que toutefois, si, à l'issue du délai le cabinet de recrutement n'est pas parvenu à l'aboutissement de sa mission, la totalité du forfait ne lui est pas acquise, ce qui suppose le paiement des seules prestations effectuées.

Sur l'exécution du contrat

En raison de la date des conventions, les articles 1134 et 1147 anciens du code civil sont applicables.

Il résulte de l'article 2 du contrat de recrutement que 'le cabinet ne pourra être tenu responsable de non aboutissement éventuel de sa mission s'il est en mesure de justifier qu'il a apporté à l'exécution de ladite mission toutes les diligences nécessaires'.

L'obligation du cabinet de recrutement est une obligation de moyen, ce qui n'est contesté par aucune des parties.

La société Objectif Cash se prévaut d'une carence de moyens mis en oeuvre et de résultats dans le recrutement ainsi que du temps passé pour pallier à la carence de son adversaire, générant un préjudice certain. Elle fait valoir plus précisément que :

-M. [V] n'était pas basé à [Localité 5] et n'a eu aucun entretien préalable avec les candidats, il a seulement envoyé des CV sans sélection préalable,

- la garantie n'était pas épuisée sur le second poste, la personne envoyée suite à la première démission ne correspondait pas à l'entreprise ; la société de recrutement a prétendu à tort être parvenu au terme du contrat et les sommes versées ne pouvaient lui être acquises dans la mesure où l'alinéa 2 de l'article 13 était rayé ; les recherches devaient être continuées alors qu'aucune présentation de candidat n'avait en lieu durant plus de un an,

- aucune pièce n'est versée sur la troisième mission, et la résiliation n'a pas été actionnée, peu de candidats ont été présentés et il n'y a pas eu de période d'essai,

- il y a eu une carence des moyens mis en oeuvre, M. [V] était à [Localité 4] et n'était pas impliqué sur la prestation, il ne voyait pas les candidats, malgré les clauses du contrat, avant de les présenter, il n'envoyait plus les comptes-rendus ; les pièces adverses sont illisibles et n'apportent aucun élément concret sur les moyens utilisés, les engagements des § 1 à 7 n'ont pas été respectés, alors que les profils de poste étaient similaires sur les deux premiers postes,

- M. [V] s'est excusé de son peu de nouvelles, il a 'repositionné les recherches', s'est justifié sur le temps passé, parlant de 'chat noir', de 'malchance',

- la concluante a dû rechercher par elle-même, elle a perdu du temps et a perdu du potentiel de chiffre d'affaires,

- la rupture du contrat emporte le remboursement des sommes payées et son préjudice égal aux sommes payées.

La société CCLD Recrutement réplique :

- qu'elle n'a commis aucune faute dans ses missions, et n'est tenue que d'une obligation de moyen,

- que concernant les deux premiers postes, elle a traité 320 dossiers de candidature, rencontré 34 candidats et soumis au client 18 dossiers, que la société Objectif Cash a convoqué 11 candidats,

- que la cliente a finalement retenu deux dossiers, que l'un des deux candidats a été remercié au cours de la période d'essai et que le second a donné sa démission mais que deux nouveaux candidats ont été retenus dans le cadre de la clause de garantie,

- que concernant le troisième poste, la société fait également preuve de diligences et que la société Objectif Cash n'a finalement pas retenu le dernier candidat après l'échec de négociations,

- que l'appelante détourne le sens des courriers et déforme ce qui est la courtoisie commerciale, alors que M. [V] s'est montré réactif et a continué ses missions pourtant contractuellement terminées, l'amendement manuscrit qui est opposé n'a pas de valeur puisque le paraphe de la partie à laquelle il est opposé fait défaut,

- que la société adverse n'a pas respecté le formalisme de la clause de garantie,

- concernant M. [T], qu'il a bien été proposé par la concluante même s'il a été en contact avec la société adverse,

- que la société adverse peine en fait à intégrer de nouveaux salariés et interroge sur l'ambiance de travail et le respect de ses obligations,

- que M. [V] se déplaçait à [Localité 5] plusieurs fois par semaine, et que e changement de lieu de porte que sur trois semaines,

- que M. [Y] n'a rien fait pour faciliter les recrutements, entravant la mission de la concluante.

Il résulte des éléments du dossier que :

- s'agissant du premier poste, la société objectif Cash a rencontré 6 candidats, elle a retenu Mme [R] [J] mais le contrat de travail a pris fin au cours de la période d'essai pour le motif suivant 'manque d'engagement' ; M. [V] a mis en oeuvre de nouvelles démarches, ce qui a abouti au recrutement de M. [N] le 24 novembre 2016,

- s'agissant du second poste, que la société Objectif cash a rencontré 5 candidats et sélectionné M. [I] [S], lequel a ensuite démissionné, M. [T] a été engagé, la période d'essai commençant le 9 octobre 2017, et il a quitté la société en novembre 2017 ; la société de recrutement a considéré avoir épuisé la deuxième garantie prévue au contrat alors que la société Objectif Cash lui demandait de reprendre les recherches,

- s'agissant du poste de chargé relation clients, la société Objectif Cash a rencontré 8 candidats et retenu Mme [P] [B], mais les négociations ont ensuite échoué.

Il convient de distinguer chacun des recrutements en cause.

S'agissant du premier poste, ainsi que vu supra, la mission a été remplie dans son intégralité par l'embauche de M. [N], après que la garantie de l'article 12 ait été mise en oeuvre ; la société Objectif Cash, qui estime malgré tout ne rien devoir à son adversaire, n'invoque aucun argument sérieux lui permettant d'échapper à son obligation à paiement du prix de cette prestation parfaitement réalisée de sorte que le prix de la prestation est dû dans son intégralité.

S'agissant du second poste, 'responsable business development' un premier candidat a été retenu, puis, suite à sa démission, M. [T] a été retenu. Bien que ce dernier ait fait le choix de quitter volontairement la société, il résulte des échanges entre les parties que M. [T] a bien été recruté via la société de recrutement mais qu'il a par ailleurs contacté directement la société Objectif Cash et la société appelante se contredit puisque tout en contestant la qualité de ce recrutement qu'elle impute à son adversaire, elle prétend avoir elle-même recruté le salarié.

La cour retient, au vu des productions, que M. [T] a bien été recruté par l'intermédiaire de la société de recrutement de sorte que la clause de garantie telle que définie par l'article 12 était épuisée et n'imposait pas à la société de recrutement d'entreprendre de nouvelles recherches comme le lui demandait la société Objectif Cash.

S'agissant du dernier contrat, force est de constater que la société de recrutement a utilement présenté Mme [B] à Objectif Cash, ce qui a débouché sur une promesse d'embauche, mais que le recrutement final a échoué en raison de l'échec des négociations salariales, ce qui est étranger à la mission de l'intimée.

Aucune embauche n'a eu lieu en application de la clause de garantie mais la durée des prestations de la société de recrutement avait dépassé les 24 semaines. La totalité du forfait n'a pas été facturée, ce qui correspond à ce qui était prévu par le contrat comme vu ci-dessus et la société de recrutement ne réclame aucun honoraire supplémentaire au titre du forfait.

La société Objectif Cash, pour être libérée de son obligation à paiement de la prestation, comme elle le demande, doit établir les manquements contractuels adverses qu'elle invoque.

Si le premier contrat précise de manière manuscrite que l'interlocuteur pour la société de recrutement est [G] [V] basé à [Localité 5], il ne peut être déduit de cette précision qu'il s'agit d'une condition substantielle de contrat. Par ailleurs, M. [V] était basé effectivement à [Localité 5] et n'a rejoint [Localité 4] que tardivement en janvier 2017, mais il était amené à se déplacer régulièrement à [Localité 5] de sorte qu'il ne peut être déduit de cette circonstance aucune inexécution fautive du contrat par l'intimée liée au déplacement de M. [V] et les pièces produites n'établissent pas des difficultés qui seraient nées de ce changement d'affectation, la pièce 19 de l'intimée démontrant que M. [V] continuait ses recherches.

Par ailleurs, en dehors de ses courriers de relance, la société Objectif Cash produit des courriels échangés avec M. [V]. Ce dernier a certes écrit 'je viens de chasser le chat noir qui me poursuit sur cette mission et reviens vers vous très vite', 'c'est moi qui n'arrive pas à trouver la bonne personne et cela me frustre, je vais bien finir par y arriver', 'je ne vous ai pas oublié mais obligation de solder les congés payés avant fin mai'. Toutefois, ces propos sont isolés de leur contexte (l'allusion à un chat noir fait suite à une démission du salarié qui n'est pas imputable au recruteur ; la remarque sur l'identification de la bonne personne ne contrevient pas à l'obligation de moyen et il ne peut être reproché à M. [V] de prendre ses congés légaux) et sont totalement insuffisants à établir l'inexécution contractuelle alléguée et les négligences du correspondant.

Les productions révèlent plus généralement que la société CCLD Recrutement par l'intermédiaire de son salarié a dressé des fiches de poste, sélectionné un nombre conséquent de candidats, les a rencontrés et en a présenté plusieurs à la société Objectif Cash qui a procédé utilement à des embauches (pièces 16, 19, 22 à 25) ; les ruptures de contrat de travail ayant suivi n'étant pas imputables à la société de recrutement.

La cour relève que la société Objectif Cash n'a pas non plus facilité la tâche de recrutement en prospectant de son côté des candidats, en repoussant des candidatures pour des motifs autres que professionnels et inapropriés et qu'elle n'a pas plus respecté le formalisme du contrat, notamment dans la mise en jeu de la garantie de l'article 12.

Aucun élément n'établit par ailleurs que M. [T] n'avait pas les qualités professionnelles requises pour être embauché par la société Objectif Cash, cette dernière ne procédant que par affirmations. Il ne peut donc être déduit de la démission, étrangère à la société de recrutement, que celle-ci a pour origine l'inadéquation du salarié à son poste, la démission pouvant avoir tout une autre origine (familiale, autre emploi, conditions de travail dans l'entreprise recruteuse...).

Enfin, la clause de garantie a été appliquée lorsqu'elle devait l'être et la société de recrutement est allée au delà du délai contractuel sans réclamer d'honoraires supplémentaires.

En conséquence, la prestation est également due dans son intégralité concernant ce second poste pour lequel la société CCLD Recrutement a rempli sa mission.

Il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des prestations qui ont été facturées et payées étaient dues par la société Objectif Cash, laquelle échoue à établir l'inexécution contractuelle dont elle se prévaut et le remboursement des prestations outre des dommages intérêts.

Le jugement est en conséquence confirmé sur ce point.

Sur les demandes en paiement de la société CCLD Recrutement

* le recrutement de M. [A]

L'article 9 des conditions générales du contrat liant les parties stipule que :

' si les candidats H/F présentés par le Cabinet ne sont pas retenus par le client ou s'ils rejettent l'offre d'emploi (ou de collaboration) faite par le client et qu'ils sont ultérieurement employés par (ou collaborent avec) le Client pour ce poste ou pour tout autre poste dans un délai de 12 mois suivant la date du premier entretien, le Client s'oblige à payer au Cabinet les honoraires prévus par le présent contrat'.

La société CCLD recrutement soutient que M. [I] [A] a été présenté à la société Objectif Cash par elle-même le 9 mai 2016 et qu'il a été recruté le 28 juin 2016 pour une mission de 12 jours via une société de portage salarial.

La société Objectif cash réplique que la demande a été présentée devant le tribunal et aucune facture n'a jamais été émise, le candidat avait été présenté puis s'était retiré après avoir trouvé un emploi mais le processus de recrutement sur une autre société ayant pris du retard, M. [V] a suggéré qu'il soit engagé en portage salarial pour deux mois dans l'attente, il ne s'est agi que d'une mission 'spot'', il n'a pas rempli de poste ni signé de contrat avec une période d'essai.

Il n'est pas contesté que M. [A] a été présenté par la société CCLD Recrutement à la société Cash Development par courriel du 9 mai 2016 de M. [V] ; qu'il a été ensuite embauché par cette société pour une mission de 12 jours (p16 et 17 intimée).

Quels que soient le caractère limité par cette embauche et les circonstances alléguées, à les supposer établies, force est cependant de constater qu'elle contrevient aux dispositions de l'article 9 susvisé, lequel n'opère pas de distinctions quant au poste occupé en ce qu'il vise 'tout autre poste'. Le terme, 'collaborent avec' englobe par ailleurs le contrat de portage salarial via une société tiers invoqué par l'appelante.

Par ailleurs, le fait que la prestation n'ait pas été facturée avant le début de l'instance ne prive pas la société intimée du droit d'obtenir ce qui lui est dû en vertu du contrat.

En conséquence, au vu de ce qui précède, l'obligation de la société Objectif Cash n'est pas contestable et le jugement est confirmé en ce qu'il a fait droit à la demande de la société de recrutement.

* les demandes de dommages intérêts

La société CCLD fait valoir la mauvaise foi de son cocontractant dans l'exécution de la convention, notamment une violation de son obligation de coopération en refusant des candidats correspondant au profil requis pour des raisons autres que professionnelles, et pour des motifs discriminatoires, et un préjudice d'image.

Il résulte de l'article 3 du contrat (conditions générales) que la décision de rejet d'un candidat doit être justifiée par la société qui recrute, que les critères de sélection ne doivent pas être discriminatoires. Cette disposition rejoint celles du droit du travail relatives à l'embauche.

La somme de 2.361,10 euros réclamée par l'intimée représenterait 70 heures de travail de M. [V] en plus du volume initialement convenu. Toutefois, la pièce 31 de l'intimée ne revêt aucun caractère probant pour établir un volume d'heures supérieur à celui contractuellement prévu et découlant du comportement fautif du cocontractant, s'agissant d'une attestation établie par M. [V] lui-même et pour les besoins de la cause. Nonobstant le caractère régulier du témoignage, il émane d'un collaborateur de la société de recrutement directement impliqué par la présente procédure et ne revêt pas l'impartialité nécessaire, outre son caractère particulièrement elliptique. Le jugement est confirmé par substitution de motifs en ce qu'il a rejeté cette demande.

D'autre part, le tribunal de commerce a relevé que les messages échangés par les parties montraient que des candidats avaient été rejetés pour des motifs physiques, ethniques ou liés à l'âge du candidat, ce que révèlent effectivement des échanges versés aux débats.

La somme de 5.000 euros qui est sollicitée représente selon l'intimée le préjudice très important découlant des multiples refus de candidature notamment pour des raisons discriminatoires, alors qu'elle est reconnue pour la qualité de ses recrutements et est certifiée NF et AFNOR, l'attitude adverse remettant gravement, selon elle, son travail. Toutefois, la société intimée ne rapporte la preuve concrète d'aucun préjudice qui découlerait du comportement fautif de son adversaire et notamment d'une remise en cause de son travail nuisant à sa réputation et ayant généré préjudice d'image et préjudice financier. En conséquence, le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention.

L'intimée demande enfin 10.000 euros pour procédure abusive ainsi qu'une amende civile.

Même s'il n'a pas été fait droit à l'argumentation de la société Objectif Cash, cette dernière restait fondée à faire valoir ses droits en justice et à contester l'argumentation adverse et son adversaire n'établit aucune faute ayant fait dégénérer en abus le droit d'agir en justice ; le jugement est en conséquence confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de dommages intérêts pour procédure abusive.

Il n'appartient pas à une partie de conclure à la condamnation de son adversaire au paiement d'une amende civile en application de l'article 32-1 du code de procédure civile et le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté cette prétention.

Sur la demande de dommages intérêts de la société Objectif Cash

La société Objectif Cash qui succombe sur ses prétentions n'est pas fondée à se prévaloir d'un préjudice né de la résistance abusive de son adversaire et le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté sa demande à ce titre.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

La société Objectif Cash qui succombe sur ses prétentions supportera les dépens d'appel, les condamnations au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens prononcées en première instance étant pour leur part confirmées.

L'équité commande de condamner la société Objectif Cash à payer à la société CCLD Devlopment la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré dans son intégralité.

Y ajoutant,

Condamne la société Objectif Cash aux dépens d'appel et à payer à la société CCLD Development la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

LA GREFFIERELA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/02802
Date de la décision : 13/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-13;19.02802 ?
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