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05/10/2022 | FRANCE | N°19/03541

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 05 octobre 2022, 19/03541


AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE



N° RG 19/03541 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MMBP



[V]

Syndicat DE LA PLATEFORME CHIMIQUE DEBALAN

C/

Société KEM ONE

Société ARKEMA FRANCE



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 30 Avril 2019

RG : 17/01569

COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 05 OCTOBRE 2022



APPELANTS :



[U] [V]

né le 25 Janvier 1960 à CASTILLONES

[Adresse 3]
>[Localité 6]



représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

et ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSO...

AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE

N° RG 19/03541 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MMBP

[V]

Syndicat DE LA PLATEFORME CHIMIQUE DEBALAN

C/

Société KEM ONE

Société ARKEMA FRANCE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 30 Avril 2019

RG : 17/01569

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 05 OCTOBRE 2022

APPELANTS :

[U] [V]

né le 25 Janvier 1960 à CASTILLONES

[Adresse 3]

[Localité 6]

représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

et ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Alexandra MANRY, avocat au barreau de LYON

Syndicat DE LA PLATEFORME CHIMIQUE DEBALAN

[Adresse 2]

[Localité 8]

représenté par Me Jacques AGUIRAUD de la SCP JACQUES AGUIRAUD ET PHILIPPE NOUVELLET, avocat au barreau de LYON

et ayant pour avocat plaidant Me Pascale REVEL de la SCP REVEL MAHUSSIER & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON substituée par Me Alexandra MANRY, avocat au barreau de LYON

INTIMÉES :

Société KEM ONE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Caroline MO de la SARL SOCOS, avocat au barreau de LYON

Société ARKEMA FRANCE

[Adresse 4]

[Localité 7]

représentée par Me Gérald PETIT, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Elisa BARDAVID de la SCP Société civile professionnelle Bardavid Tourneur, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 21 Juin 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Joëlle DOAT, Présidente

Nathalie ROCCI, Conseiller

Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller

Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 05 Octobre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

[U] [V] a été embauché à compter du 22 octobre 1979 par la SA ATOCHIMIE en qualité de tourneur, section « mécanique » des services généraux, groupe II, filière E, coefficient 150, suivant contrat de travail écrit à durée déterminée régularisé le 27 octobre suivant s'étant poursuivi sous la forme d'un contrat de travail à durée indéterminée, soumis à la convention collective nationale des industries chimiques et connexes (IDCC 44).

Au cours de la relation de travail, [U] [V] a été nommé aux fonctions d'opérateur 3x8 au sein du service exploitation (coefficient 175) en 1986, d'opérateur 2x8 discontinu au sein du service exploitation en 1999, d'opérateur préparations matières premières rythme 2x8 (coefficient 190) en 2002, puis d'opérateur de jour service exploitation, statut de pool, rythme journée (coefficient 190) en 2010.

L'exécution du contrat de travail d'[U] [V] a été poursuivie par les sociétés ELF ATOCHEM, ATOFINA puis, d'octobre 2004 à septembre 2012, par la SA ARKEMA. Le contrat de travail d'[U] [V] a été poursuivi par la SASU KEM ONE à compter d'octobre 2012.

Au cours de l'exécution du contrat de travail, [U] [V] a notamment exercé les mandats de délégué du personnel suppléant de 2004 à 2008 et exerçait depuis 2017 les mandats de membre du comité d'établissement suppléant et de délégué du personnel suppléant.

Le tribunal de commerce de Lyon, par jugement du 27 mars 2013, a prononcé l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire au profit de la SASU KEM ONE, et désigné la SELARL AJ PARTENAIRES en qualité d'administrateur, et Me [X] [S] en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement du 20 décembre 2013, le tribunal de commerce de Lyon a arrêté le plan de redressement de la SASU KEM ONE et désigné la SELARL AJ PARTENAIRES en qualité de commissaire à l'exécution du plan.

Le 18 mai 2017, [U] [V] et le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] ont saisi le conseil de prud'hommes de demandes indemnitaires et salariales à l'encontre de la SASU KEM ONE au titre de la discrimination syndicale dont le salarié exposait faire l'objet et de l'exécution déloyale par son employeur du contrat de travail, et de l'atteinte corrélativement portée à l'intérêt collectif de la profession.

Et, le 7 décembre suivant, [U] [V] et le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] ont saisi le conseil de prud'hommes de demandes similaires, formées à l'encontre de la SA ARKEMA.

Par jugement du 20 mars 2018, le tribunal de commerce a constaté l'achèvement de l'exécution du plan de redressement de la SASU KEM ONE, et la fin des missions confiées à la SELARL AJ PARTENAIRES et à Me [X] [S] en qualité de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire judiciaire.

Par jugement en date du 30 avril 2019, le conseil de prud'hommes de Lyon ' section industrie ' a :

ORDONNÉ la jonction des procédures inscrites sous les numéros RG : 17/1569 et 17/4395 conformément à l'article 367 du code de procédure civile et dit que la procédure serait désormais suivie sous le n° RG n°17/1569 ;

JUGÉ que les demandes vis-à-vis de la société ARKEMA étaient prescrites et donc irrecevables ;

DÉBOUTÉ [U] [V] de l'ensemble de ses demandes ;

DÉBOUTÉ le syndicat KEM ONE de sa demande reconventionnelle ;

ORDONNÉ la mise hors de cause de l'UNEDIC, délégation de l'AGS-CGEA de [Localité 9] ;

ORDONNÉ que les éventuels dépens restent à la charge de chacune des parties.

[U] [V] et le syndicat de la plateforme chimique de [Localité 8] ont respectivement interjeté appel de cette décision le 21 mai 2019 à l'encontre de la SA ARKEMA et de la SASU KEM ONE.

[U] [V] a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 31 janvier 2020.

Par leurs dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 24 janvier 2022 auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, [U] [V] et le syndicat de la plateforme chimique de [Localité 8] sollicitent de la cour de :

CONFIRMER le jugement rendu le 30 avril 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a débouté la société KEM ONE de sa demande reconventionnelle ;

CONFIRMER le jugement rendu le 30 avril 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a mis hors de cause l'AGS-CGEA ;

INFIRMER le jugement rendu le 30 avril 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a jugé les demandes de Monsieur [V] vis-à-vis de la société ARKEMA prescrites et donc irrecevables ;

INFIRMER le jugement rendu le 30 avril 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a débouté Monsieur [V] de toutes ses demandes ;

INFIRMER le jugement rendu le 30 avril 2019 par le conseil de prud'hommes de Lyon en ce qu'il a débouté le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 8] de toutes ses demandes ;

En conséquence, et statuant à nouveau,

JUGER recevables les demandes de Monsieur [V] ;

JUGER bien fondées les demandes de Monsieur [V] ;

En conséquence,

METTRE hors de cause la SELARL ALLIANCE MJ es qualités de mandataire liquidateur et l'AGS-CGEA ;

RÉFORMER intégralement le jugement entrepris ;

Dès lors, à titre principal, s'agissant d'[U] [V],

JUGER que celui-ci a été victime d'une discrimination syndicale ou, à tout le moins, d'une exécution déloyale du contrat de travail ;

REPOSITIONNER Monsieur [V] de la manière suivante, depuis le mois d'avril 2014 :

- à titre principal, au coefficient 225

- à titre subsidiaire, au coefficient 205 ;

CONDAMNER la société KEM ONE à verser les sommes suivantes :

- à titre principal, 21 816,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 2 181,65 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- à titre subsidiaire, 9 670,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 967,06 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- 40 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNER, pour l'avenir, l'application du coefficient attribué et du salaire de base moyen dudit coefficient ;

ORDONNER la remise des bulletins de salaire afférents et des justificatifs de paiements auprès des organismes des cotisations dues sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte ;

ORDONNER l'affichage de la décision à intervenir à l'entrée de l'établissement de [Localité 10], dans le mois suivant la notification du jugement, et pendant une durée de 2 mois, et ce sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte.

S'agissant du syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10],

JUGER recevable, la demande d'intervention formulée par le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10] ;

JUGER bien fondées, les demandes formulées par le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10] ;

En conséquence,

CONDAMNER la société KEM ONE au paiement des sommes suivantes :

- 10 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre subsidiaire, s'agissant de Monsieur [V],

JUGER que Monsieur [V] a été victime d'une discrimination syndicale ou, à tout le moins, d'une exécution déloyale du contrat de travail ;

Société ARKEMA,

CONDAMNER la société ARKEMA à verser à Monsieur [V] les sommes suivantes :

- 20 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination syndicale,

- 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

Société KEM ONE,

REPOSITIONNER Monsieur [V] de la manière suivante, depuis le mois d'avril 2014 :

- à titre principal, au coefficient 225

- à titre subsidiaire, au coefficient 205 ;

CONDAMNER la société KEM ONE à verser les sommes suivantes :

- à titre principal, 21 816,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 2 181,65 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- à titre subsidiaire, 9 670,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 967,06 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- 20 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la discrimination syndicale,

- 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNER, pour l'avenir, l'application du coefficient attribué et du salaire de base moyen dudit coefficient ;

ORDONNER la remise des bulletins de salaire afférents et des justificatifs de paiements auprès des organismes des cotisations dues sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte ;

ORDONNER l'affichage de la décision à intervenir à l'entrée de l'établissement de [Localité 10], dans le mois suivant la notification du jugement, et pendant une durée de 2 mois, et ce sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte ;

S'agissant du syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10],

JUGER recevable, la demande d'intervention formulée par le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10] ;

JUGER bien fondées, les demandes formulées par le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10] ;

En conséquence,

CONDAMNER la société KEM ONE et la société ARKEMA au paiement, chacune, des sommes suivantes :

- 5 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

A titre infiniment subsidiaire,

CONDAMNER in solidum les sociétés KEM ONE et ARKEMA aux éléments suivants :

- S'agissant de Monsieur [V],

JUGER que Monsieur [V] a été victime d'une discrimination syndicale ou, à tout le moins, d'une exécution déloyale du contrat de travail ;

REPOSITIONNER Monsieur [V] de la manière suivante, depuis le mois d'avril 2014 :

- à titre principal, au coefficient 225

- à titre subsidiaire, au coefficient 205 ;

CONDAMNER la société KEM ONE à verser les sommes suivantes :

- à titre principal, 21 816,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 2 181,65 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- à titre subsidiaire, 9 670,56 euros à titre de rappel du salaire de base, outre 967,06 euros de congés payés afférents (sauf à parfaire),

- 40 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

ORDONNER, pour l'avenir, l'application du coefficient attribué et du salaire de base moyen dudit coefficient ;

ORDONNER la remise des bulletins de salaire afférents et des justificatifs de paiements auprès des organismes des cotisations dues sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte ;

ORDONNER l'affichage de la décision à intervenir à l'entrée de l'établissement de [Localité 10], dans le mois suivant la notification du jugement, et pendant une durée de 2 mois, et ce sous une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du prononcé du jugement, la cour se réservant la faculté de liquider ladite astreinte ;

S'agissant du syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10],

JUGER recevable, la demande d'intervention formulée par le syndicat CGT KEM ONE [Localité 10] ;

JUGER bien fondées, les demandes formulées par le syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10] ;

En conséquence,

CONDAMNER la société KEM ONE au paiement des sommes suivantes :

- 10 000 euros nets à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi,

- 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

En toutes hypothèses, s'agissant tant de Monsieur [V] que du syndicat CGT KEM-ONE [Localité 10],

STATUER ce que droit sur les dépens.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 9 mai 2022 auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA ARKEMA sollicite de la cour de :

A titre principal,

CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes de Lyon en date du 30 avril 2019 ;

DÉCLARER les demandes d'[U] [V] et du syndicat CGT à son égard irrecevables ;

DÉBOUTER [U] [V] et le syndicat CGT de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;

CONDAMNER Monsieur [V] et le syndicat CGT aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire, si la cour devait juger que les demandes de Monsieur [V] et du syndicat CGT Kem One sont recevables à son égard,

DÉBOUTER [U] [V] et le syndicat CGT de l'intégralité de leurs demandes, fins et prétentions ;

CONDAMNER Monsieur [V] et le syndicat CGT aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 9 mai 2022 auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SASU KEM ONE sollicite de la cour de :

CONFIRMER le jugement du Conseil de Prud'hommes de Lyon du 30 avril 2019 ;

En conséquence,

DIRE ET JUGER qu'[U] [V] n'a pas été victime d'une discrimination syndicale ou d'une exécution déloyale du contrat de travail ;

REJETER l'intégralité des demandes d'[U] [V] ;

REJETER l'intégralité des demandes du syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] ;

A titre reconventionnel,

CONDAMNER [U] [V] à lui payer 3 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 12 mai 2022, et l'affaire fixée pour être plaidée à l'audience du 21 juin suivant.

SUR CE :

- Sur la discrimination syndicale :

[U] [V] soutient en substance qu'il peut prétendre, de manière rétroactive à compter d'avril 2014, à un reclassement à hauteur du coefficient conventionnel de classification qu'il aurait dû pouvoir atteindre, à un rappel de salaire afférent, ainsi qu'à la réparation de l'entier préjudice tant matériel que moral qu'il a eu à subir du fait de la discrimination dont il a fait l'objet au cours de la relation de travail à raison de ses mandats et engagements syndicaux, caractérisés en substance par :

- Le non-respect des dispositions législatives, des stipulations conventionnelles et des accords d'entreprise sur le suivi de la carrière des salariés disposant de mandats syndicaux en ce que :

* la SA ARKEMA n'a pas respecté les termes de son « engagement unilatéral » par accord cadre sur l'exercice du droit syndical du 12 juillet 2006, de procéder à un suivi annuel de la carrière de ses salariés mandatés, pour la comparer à celle des salariés non mandatés de la même catégorie professionnelle, ces entretiens individuels n'étant intervenus que ponctuellement et n'ayant pas permis la valorisation des connaissances générales acquises dans l'exercice des mandats syndicaux ;

* la SA ARKEMA n'a pas plus respecté les termes de l'accord-cadre sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les sociétés du groupe ARKEMA du 23 juillet 2007 qui prévoient l'organisation d'un entretien d'orientation de carrière pour les salariés âgés de plus de 35 ans et/ou ayant au moins 5 ans d'ancienneté, d'un entretien de bilan de 2ème partie de carrière pour les salariés atteignant 45 ans et disposant d'au moins cinq ans d'ancienneté, et l'organisation d'entretiens individuels à une périodicité annuelle ;

* de même, son employeur n'a pas respecté les stipulations de l'accord relatif au dialogue social, au droit syndical et à la représentation du personnel au sein de la société KEM ONE SAS du 25 juin 2014, qui prévoyait un suivi de carrière par la direction de l'établissement pour les titulaires de mandats syndicaux, et, compte-tenu de l'absence de loyauté de l'employeur dans la conduite des entretiens annuels dont il a ponctuellement pu bénéficier, il a refusé de participer aux entretiens auxquels il avait été convoqué en 2017 et 2018 ;

* la SA ARKEMA n'a pas plus respecté ses obligations légales (article L. 6315-1 du code du travail) et conventionnelles (article 7 de la convention collective des industries chimiques), d'organiser un entretien annuel de suivi de carrière, d'information du salarié quant à la possibilité de solliciter un bilan d'étape professionnel, de procéder à un entretien de seconde partie de carrière ou d'organiser tous les deux ans un entretien professionnel, les formulaires annexés aux compte-rendus d'entretiens individuels étant très insuffisamment remplis ;

* la circonstance, évoquée par la SAS KEM ONE, que d'autres salariés sans engagement syndical n'auraient pas bénéficié de suivis de carrière complets n'est pas de nature à exonérer l'employeur de sa responsabilité à raison des manquements lui étant imputables à son égard ;

* c'est précisément l'absence de suivi de carrière qui explique que le salarié ait pu être maintenu dans des niveaux de coefficient discriminatoires, n'ait pas bénéficié de la moindre formation professionnelle, et n'ait pas vu sa rémunération mensuelle moyenne réajustée ;

- La stagnation de carrière à compter de l'exercice des mandats syndicaux puisque, alors qu'il avait bénéficié, antérieurement à ses premiers mandats en 2004, d'une évolution de carrière rapide, il n'a plus bénéficié d'aucune évolution de positionnement à compter de cette date ;

- L'évolution de carrière moins favorable qu'il a connue par rapport à des salariés placés dans une situation identique, en ce que :

* les données relatives au coefficient 190 dont il bénéficie, et aux délais moyens pour atteindre le coefficient supérieur mettent également en évidence un avancement anormal de carrière ;

* d'ailleurs, les salariés actuels de l'équipe technique à laquelle il appartenait au jour de son départ en retraite, sont tous positionnés au coefficient 205 en dépit d'une ancienneté moindre, ce qui caractérise une atteinte au principe « à travail égal salaire égal » ;

- L'absence de formation, en ce qu'il a été privé, pendant sa période d'emploi du bénéfice de formations, en dépit des stipulations conventionnelles en rappelant l'importance pour permettre une évolution de carrière adaptée comme l'épanouissement du salarié, d'une part, et de son classement dans la catégorie du « public prioritaire » visée par les stipulations de l'accord d'entreprise du 26 novembre 2014.

La SA ARKEMA soutient en substance, que :

- Depuis le 2 juillet 2012, Monsieur [V] est employé par la société KEM ONE, seule responsable en tant que nouvel employeur de l'exécution du contrat de travail depuis cette date et seule redevable des dettes et obligations afférentes à cette période ;

- aucune discrimination syndicale ne peut être invoquée ni pour la période antérieure à 2002 ni sur la période 2008 à 2012 à défaut de preuve d'activités syndicales connues de l'employeur ;

- en tout état de cause, des éléments objectifs étrangers à toute discrimination syndicale expliquent son maintien au coefficient 175 pendant 18 années puis au coefficient 190 entre 2002 et 2012 au regard des fonctions occupées et son évolution de salaire : il n'existait au cours de la période d'emploi s'étendant de 1979 à 2012 ni disposition légale ni dispositions conventionnelle, ni usage ni pratique contraignante en vigueur dans l'entreprise prohibant qu'un salarié reste au même coefficient pendant plusieurs années ou imposant de faire progresser le coefficient d'un salarié ou imposant de le faire bénéficier d'augmentations individuelles ;

- le salarié ne démontre aucune atteinte au principe d'égalité de traitement par rapport aux salariés dans une situation comparable à la sienne tant en termes de coefficient que de salaire et de formations ;

- Monsieur [V] a bénéficié de plusieurs augmentations individuelles ;

- Monsieur [V] a bénéficié de mesures de formation assurant le maintien de ses compétences ;

- les accords collectifs ont été appliqués à son égard de la même manière qu'à l'égard des salariés non mandatés ;

- Aucun manquement de nature à causer un préjudice effectif à Monsieur [V] ne peut lui être reproché, les griefs invoqués par le salarié étant purement formalistes et celui-ci ne démontrant pas avoir été lésé en terme de rémunération, de formation et de coefficient de sorte qu'il ne peut demander la réparation d'un préjudice inexistant.

La SASU KEM ONE fait principalement valoir en réponse que :

- les mandats syndicaux exercés par l'intéressé ont été discontinus, et celui-ci n'établit pas que son employeur avait connaissance de son engagement syndical par ailleurs ;

- l'examen de l'évolution de la classification d'[U] [V] ne révèle aucune discrimination syndicale, pas plus que la comparaison de son évolution avec d'autres salariés dont la situation est comparable à la sienne ;

- [U] [V] n'a jamais émis le souhait de changer de service afin de pouvoir évoluer sur un autre coefficient ;

- l'évolution de Monsieur [V] au coefficient 205 ou au coefficient 225 impliquerait d'imposer à la société une redéfinition de l'ensemble des coefficients du service puisque les Opérateurs Matières Premières ne peuvent être classés au-delà du coefficient 190, les seuls salariés bénéficiant d'un coefficient supérieur étant des salariés ayant été classés au coefficient 205 du fait de leur précédent poste ;

- au contraire, Monsieur [V] sollicite son repositionnement sur le coefficient 225 (poste de tableau 2B au sein du service posté) ou sur le coefficient 205 (poste de tableau 2A au sein du service posté) alors qu'il ne s'agit pas de son sous-service, qu'il n'a pas sollicité de changement de sous-service, et qu'il n'a aucunement suivi l'évolution et les formations nécessaires pour évoluer sur les postes correspondant aux coefficients sollicités ;

- Contrairement à ce qu'il soutient, [U] [V] n'a aucunement bénéficié d'un traitement défavorable en matière de formations mais a, au contraire, pu bénéficier des formations pouvant lui permettre d'évoluer sur son poste de travail et de maintenir ses compétences ;

- [U] [V] a pu bénéficier de nombreux entretiens individuels annuels, et n'a eu à souffrir d'aucun traitement défavorable par rapport aux autres salariés de la société.

* * * * *

Il résulte des dispositions de l'article L. 1132-1 du code du travail qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle ou de mutation, en raison de ses activités syndicales.

Aux termes de l'article L.1134-1 du même code, il appartient en cas de litige au salarié de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008. Et il incombe alors à l'employeur, au vu des éléments ainsi produits, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme alors sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

En l'espèce, il apparaît que si l'appelant ne justifie avant cette première date d'aucun engagement ni militantisme syndical connu de son employeur, [U] [V] a, sur les listes du syndicat CGT, été candidat aux élections du 7 février 2002 des membres du comité d'établissement de la société ATOFINA, a été élu aux fonctions de délégué du personnel suppléant du 5 février 2004 au 4 juin 2008 et exerce depuis 2017 les fonctions de membre du comité d'établissement suppléant et de délégué du personnel suppléant.

Et il apparaît d'une première part, s'agissant du grief tiré par le salarié d'une discrimination en termes de suivi de carrière, que l'accord cadre sur l'exercice du droit syndical dans les sociétés du groupe ARKEMA, signé le 12 juillet 2006 entre la SA ARKEMA et les organisations syndicales représentatives, stipule notamment :

« Article 7 : Carrière et évolution professionnelle des mandatés.

Article 7.1 : Appréciation globale :

L'évolution salariale et professionnelle des représentants du personnel est déterminée selon les règles et principes appliqués dans leur établissement ou société d'appartenance, sur la base de leurs compétences et de leurs qualifications professionnelles.

Cette appréciation doit toutefois prendre en compte les connaissances générales acquises dans l'exercice du mandat. La moindre disponibilité professionnelle liée à l'exercice du mandat ne doit pas être pénalisante.

(')

Article 7.2 : Garanties de non-discrimination :

Prenant en compte les éléments mentionnés à l'article 7.1 du présent accord, la Direction de la société ou de l'établissement déterminera la liste des titulaires de mandat nécessitant un suivi particulier.

Elle s'assurera à la fin de chaque année, que l'évolution du coefficient hiérarchique et de la rémunération individuelle de ces titulaires de mandat ne présente pas, à compétence égale, d'anomalie avec celle des salariés de même catégorie professionnelle dans la société d'appartenance. (...)

Pour être significative, l'évolution comparée devra s'apprécier sur une période suffisamment longue, de l'ordre de 3 ans.

(')

Cet examen individuel prendra en compte les connaissances acquises dans l'exercice du mandat, ainsi que les formations économiques et sociales reçues. La moindre disponibilité professionnelle ne doit pas être pénalisante ».

Mais, tandis que l'article 8.1 avait expressément prévu que les stipulations de l'accord seraient immédiatement applicables à la date de sa signature, la SA ARKEMA ne justifie pas que, ainsi qu'elle y était tenue aux termes des stipulations de l'accord collectif précédemment rappelées, elle aurait procédé, entre le 12 juillet 2006 et la fin de l'année 2008 au cours de laquelle le mandat de délégué du personnel suppléant d'[U] [V] était arrivé à terme, à l'examen de l'évolution du coefficient hiérarchique et de la rémunération individuelle de l'intéressé que prévoyaient ces stipulations.

Tout au plus doit-il être relevé à cet égard que le compte-rendu de l'entretien individuel pour l'année 2009, tenu le 1er avril 2009, porte mention par le salarié de ce qu'il « pense être le maillon faible de l'unité PVC (augmentation individuelle) et 5ème roue de la charrette » puis la mention par son supérieur hiérarchique « N+2 » que « M. [V] n'a pas été oublié (AI en janvier 2007, positionnement, rémunération dans la moyenne) », sans pour autant mettre en évidence que la situation individuelle du salarié aurait été effectivement examinée par l'employeur afin de prendre en compte les connaissances acquises dans l'exercice du mandat, ainsi que les formations économiques et sociales reçues, notamment.

Il convient de relever d'une seconde part, s'agissant du grief tiré par le salarié d'une discrimination en termes d'entretiens obligatoires en application des dispositions légales et conventionnelles que, contrairement à ce que soutient le salarié, son employeur n'était tenu

par aucune disposition légale ou conventionnelle de procéder à une information individuelle ou collective de ses salariés déjà embauchés de ce que, aux termes de l'article L. 6315-1 du code du travail créé par la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009, ils pouvaient bénéficier à leur demande d'un bilan d'étape professionnelle dès lors qu'ils comptaient deux années d'ancienneté dans l'entreprise.

[U] [V] ne paraît pas plus valablement fondé à faire grief à son employeur de ne pas l'avoir fait bénéficier d'un entretien d'orientation de carrière destiné à « accompagner les salariés dans leur évolution professionnelle, en particulier au moment où ils rentrent dans la phase de maturité professionnelle, ce qui peut correspondre aux salariés âgés d'environ 35 ans et/ou ayant au moins 5 années d'ancienneté dans le Groupe », dont l'organisation n'a été prévue qu'en application de l'article 4.3.2 de l'accord cadre sur la gestion prévisionnelle des emplois et des compétences dans les sociétés du groupe ARKEMA conclu le 23 juillet 2007, à une date à laquelle il était âgé de plus de 47 ans.

Mais, si le législateur n'a entendu mettre à la charge de l'employeur l'obligation de faire bénéficier ses salariés d'un entretien de seconde partie de carrière au cours de l'année suivant leur quarante-cinquième anniversaire qu'à compter de l'entrée en vigueur de l'article 13 de la loi n° 2009-1437 du 24 novembre 2009, il convient de relever que l'article 4.3.3 - « L'entretien de bilan de 2ème partie de carrière » de l'accord cadre du 23 juillet 2007 stipule que :

« Au moment où le salarié s'apprête à entrer dans la seconde partie de sa carrière professionnelle, l'entretien de 2ème partie de carrière doit permettre de préciser ses aspirations professionnelles et de définir un projet professionnel pour les années à venir. Cet entretien de deuxième partie de carrière sera proposé à tout salarié ayant au moins 5 ans d'ancienneté dans le Groupe, à compter de son 45ème anniversaire, puis tous les 5 ans.

Cet entretien, distinct de l'Entretien Individuel Annuel, sera réalisé par le gestionnaire de carrière.

Lorsque cet entretien de 2ème partie de carrière met en évidence un risque de décalage entre les compétences acquises par le salarié et les perspectives d'évolution de son poste ou de son métier, l'entreprise veillera à ce que le salarié bénéficie d'une priorité en matière de formation professionnelle ».

Il ressort pourtant des explications dont la SA ARKEMA saisit la cour qu'aucun entretien de carrière, distinct des entretiens individuels annuels, n'a été réalisé par les gestionnaires de carrière de la société au profit d'[U] [V], au cours de la période s'étendant de la date d'entrée en vigueur de l'accord collectif précité et le transfert du contrat de travail de l'intéressé à la SASU KEM ONE à compter du 1er octobre 2012.

En revanche, alors qu'il reconnaît parallèlement avoir bénéficié d'entretiens individuels annuels pour chacune des trois années pleines s'étant écoulées entre l'entrée en vigueur au sein des entreprises du groupe ARKEMA de l'accord cadre du 23 juillet 2007 et le transfert de son contrat de travail à la SASU KEM ONE, le grief formé par [U] [V] à l'encontre de la SA ARKEMA du non-respect des stipulations de son article « 4.3.4 ' L'entretien individuel annuel » n'apparaît (toutefois) pas fondé.

Mais l'article L. 6315-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable à l'issue de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, est par la suite venu prévoir que le salarié devait bénéficier tous les deux ans d'un entretien professionnel avec son employeur ne portant pas sur l'évolution de son travail mais consacré à ses perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualifications et d'emploi. Et, aux termes de ces dispositions, cet entretien, qui doit en outre intervenir à l'issue d'un mandat syndical, doit donner lieu à la rédaction d'un document dont une copie est remise au salarié.

Et l'article 7 « entretien professionnel » de l'accord du 26 novembre 2014 relatif à la formation professionnelle, étendu par arrêté du 21 juillet 2015 publié au journal officiel du 28 juillet 2015 à toutes les entreprises de la branche des industries chimiques, prévoit ainsi que, « Conformément à l'article L. 6315-1 du code du travail, dans toutes les entreprises, quelle que soit leur taille, les salariés bénéficient, a minima, tous les 2 ans, d'un entretien professionnel avec leur employeur consacré à leurs perspectives d'évolution professionnelle, notamment en termes de qualification et d'emploi. Cet entretien professionnel donne lieu à la rédaction d'un document dont une copie est remise au salarié. Cet entretien doit s'intégrer dans les dispositifs RH mis en place par les entreprises sans pour autant se confondre avec les entretiens annuels d'évaluation » ;

Or, le compte-rendu de l'entretien individuel annuel tenu le 26 octobre 2016 pour l'année 2016, dont se prévaut la SAS KEM ONE, s'il porte formellement mention d'un « entretien professionnel » tenu avec l'intéressé de façon distincte de celui consacré à l'évaluation de son activité au cours de l'année écoulée, ne comporte en réalité aucune mention relative à d'éventuels échanges concernant les perspectives d'évolution professionnelle de l'intéressé, notamment en termes de qualification et d'emploi.

Il apparaît en outre que, nonobstant les mandats de délégué du personnel et de membre du comité d'établissement qu'il a exercés à compter de 2017, [U] [V] n'a bénéficié d'aucun suivi de son évolution professionnelle par la direction de l'établissement de [Localité 8] auquel il était rattaché, en méconnaissance des stipulations du « chapitre 2 ' La carrière et l'évolution professionnelle des mandatés » de l'avenant à l'accord relatif au dialogue social, au droit syndical et à la représentation du personnel au sein de la société KEM ONE SAS conclu le 25 juin 2014.

Il apparaît enfin que, suite au transfert de son contrat de travail à la SASU KEM ONE à compter du 1er octobre 2012, [U] [V] a bénéficié d'entretiens individuels annuels les 20 décembre 2012, 22 décembre 2014 et 26 octobre 2016, mais n'a bénéficié d'aucun entretien annuel pour l'année 2013, étant relevé que l'intéressé a, par la suite, refusé de participer aux entretiens individuels organisés par son employeur les 25 septembre 2017 et 13 décembre 2018 pour les années 2017 et 2018.

Il apparaît d'une troisième part, s'agissant du grief tiré par le salarié d'une entrave à son évolution professionnelle, que :

- suite à son embauche à compter du 22 octobre 1979 en qualité de tourneur à la section « mécanique » des services généraux au coefficient 150, groupe II, de la convention collective, [U] [V] a successivement été promu par son employeur en 1980 et 1984 aux coefficients 160 puis 175, au groupe III, en cette même qualité ;

- [U] [V] a par la suite été nommé aux fonctions d'opérateur 3x8 puis d'opérateur 2x8 discontinu au sein du service exploitation en 1986 puis 1999, au même niveau de classification ;

- l'intéressé a été promu en mars 2002 aux fonctions d'opérateur de préparation matières premières, au coefficient 190, groupe III, de la convention collective ;

- enfin, [U] [V] a été nommé en septembre 2010 aux fonctions d'opérateur de jour au service exploitation, au même niveau de classification.

L'examen des données sociales compilées pour les besoins de la négociation collective annuelle met parallèlement en évidence que, alors qu'[U] [V] était âgé de 55 ans et disposait d'une ancienneté dans l'entreprise de 28 ans en 2015, les salariés de la SASU KEM ONE classés comme lui au coefficient 190 en 2015 et 2016 étaient alors âgés de 37 ans en moyenne, et disposaient d'une ancienneté de 9 et 8 années en moyenne.

Les rapports de situation comparée pour l'égalité professionnelle homme/femme révèlent de même que, pour les années 2015 et 2016 :

- l'ancienneté moyenne des salariés positionnés - comme [U] [V] depuis mars 2002 - au coefficient 190 se situait à 8,4 ans en 2015 et 5,7 années pour les hommes (4,8 années pour les femmes) en 2016 ;

- la durée moyenne passée par les salariés au coefficient 190 avant de pouvoir être promus au coefficient supérieur se situait à 6,3 années en moyenne en 2015, et entre 2,8 (pour les femmes) et 4,5 années (pour les hommes) en moyenne 2016.

Il apparaît de même que, pour l'année 2017, l'âge moyen des salariés classés au niveau 190 de la convention collective se situait à 37 années en moyenne, et leur ancienneté moyenne à 8 années.

Il ressort enfin des explications convergentes d'[U] [V] et de la SASU KEM ONE que Messieurs [N] [T], né en 1981, et [D] [G], né en 1974, étaient, comme l'appelant, affectés dans la même équipe du service « Exploitation » en qualité d'opérateurs fabrication au cours des années 2018 et 2019. Si le quatrième salarié composant la même équipe de travail à cette période, [P] [O], est resté positionné au coefficient 190 durant quinze années avant son départ en retraite, [N] [T] et [D] [G] ont toutefois été promus au coefficient 205, groupe III de la convention collective dès le 29 mai 2009, s'agissant du premier, et le 15 septembre 2003, s'agissant du second.

Il convient de relever d'une quatrième part, s'agissant du grief tiré par le salarié d'une entrave à son évolution salariale, qu'[U] [V] avait été embauché à compter du 22 octobre 1979 par la SA ATO CHIMIE en qualité de tourneur, en contrepartie d'appointements de base de 3 000 francs (soit 457,35 euros environ) par mois, outre prime de productivité au taux minimum garanti de 3 % par mois et prime de fin d'année.

En juillet 2002, à la période de sa première candidature à des fonctions de représentant du personnel, les appointements de base d'[U] [V] avaient été portés à la somme de 1 490,87 euros bruts par mois.

La rémunération mensuelle de base d'[U] [V] a par la suite été portée à :

- 1 524,46 euros en 2003,

- 1 558,09 euros en 2004, année de son élection aux fonctions de délégué du personnel suppléant,

- 1 591,69 euros puis 1 621,69 euros en 2005,

- 1 660,19 euros en 2006,

- 1 720,05 euros en 2007,

- 1 768,19 euros en 2008,

- 1 794,71 euros en 2009,

- 1 812,66 euros puis 1 882,66 euros en 2010,

- 1 921,10 euros en 2011,

- 1 959,52 euros en 2012 et 2013,

- 1 977,16 euros puis 1 983,09 euros en 2014,

- 1 998,95 euros en 2015,

- 2 018,29 euros en 2016,

- 2 043,29 euros puis 2 078,29 euros en 2017,

- 2 108,29 euros en 2018,

- 2 156,58 euros en 2019.

Or, pour leurs parts :

- [N] [T], embauché à compter du 1er février 2003 pour une rémunération brute de base de 1 331,65 euros, a perçu à compter du 29 mai 2009 des appointements de base portés à la somme de 1 805,92 euros par mois ;

- [D] [G], qui percevait au 20 octobre 1998 des appointements mensuels de base à hauteur de 8 107,98 francs (soit 1 236,05 euros environ) par mois, a vu le montant de ses appointements mensuels de base portés à 1 614,11 euros à compter du 1er septembre 2003.

Et, tandis qu'ils occupaient, comme [U] [V], l'emploi d'opérateurs de fabrication au service « exploitation », [N] [T] et [D] [G], ce dernier bénéficiant d'un congé parental à temps partiel à compter du 24 décembre 2004 à hauteur de 21,89 heures de travail par mois, percevaient des appointements de base à hauteur de 2 164,52 euros et 1 773,89 euros en 2018 et de 2 267,81 euros et 1 861,89 euros en 2019.

Il convient de relever d'une cinquième part, s'agissant du grief tiré par le salarié d'une absence de formation que :

- les compte-rendus des entretiens professionnels relatifs à sa période d'emploi au sein de la SA ARKEMA ne permettent pas d'établir la réalité comme la nature des actions de formation dont [U] [V] est susceptible d'avoir bénéficié au cours des périodes considérées, ensuite notamment des souhaits exprimés par l'intéressé auprès de son employeur en ces occasions ;

- et, alors même qu'il appartenait aux « publics prioritaires » recensés par les stipulations de l'article 2.1 de l'accord du 26 novembre 2014 relatif à la formation professionnelle, étendu par arrêté du 21 juillet 2015 publié au journal officiel du 28 juillet suivant, les entretiens d'évaluation annuelle des 22 décembre 2014 et 26 octobre 2016 versés aux débats mettent en évidence qu'[U] [V] n'a pu bénéficier d'aucune action de formation professionnelle au cours des années concernées, en dépit de ses demandes.

Il ressort néanmoins de l'« historique formation » versé aux débats par l'employeur qu'[U] [V] a bénéficié au sein de la SA ARKEMA de 271 heures de formation entre janvier 2002 et juillet 2012 puis, au sein de la SASU KEM ONE, de 24 heures de formation entre novembre 2012 et mars 2017.

Il apparaît ainsi, au terme de ces constatations, qu'[U] [V] présente un certain nombre de faits qui, appréciés dans leur ensemble, et compte-tenu notamment de leur nature, de leur persistance dans le temps au cours de la relation de travail et de leur convergence, laissent supposer l'existence d'une discrimination à raison de son engagement et de ses mandats syndicaux.

*****

Or, il convient de constater en premier lieu, s'agissant de la discrimination dans le suivi de carrière dénoncé par [U] [V], que la SA ARKEMA ne justifie par aucun motif objectif des raisons de l'absence d'examen, entre la date d'entrée en vigueur - en juillet 2006 - de l'accord cadre sur l'exercice du droit syndical dans les sociétés du groupe ARKEMA et la fin de l'année 2008 au cours de laquelle le mandat de délégué du personnel suppléant d'[U] [V] était arrivé à terme, de l'évolution du coefficient hiérarchique et de la rémunération individuelle de l'intéressé que prévoyaient les stipulations de cet accord collectif.

Mais, s'il ressort de l'article L. 6111-1 du code du travail que toute personne engagée dans la vie active est en droit de faire valider les acquis de son expérience, notamment professionnelle ou liée à l'exercice de ses responsabilités syndicales, il doit être relevé qu'[U] [V] ne s'est jamais prévalu auprès de son employeur, et ne se prévaut et ne justifie pas plus à l'occasion de la présente instance, d'acquis spécifiques de son expérience professionnelle ou des responsabilités syndicales exercées qui, à tort, n'auraient pas été pris en compte par son employeur.

Et il apparaît en second lieu, s'agissant de la discrimination en termes d'entretiens obligatoires dénoncée par [U] [V], que la SA ARKEMA ne justifie pas des raisons de l'absence de tenue avec son salarié de l'« entretien de bilan de 2ème partie de carrière » prévu par les stipulations de l'accord cadre du 23 juillet 2007 au cours de la période s'étendant de la date d'entrée en vigueur de l'accord et le transfert du contrat de travail de l'intéressé à la SASU KEM ONE à compter du 1er octobre 2012.

Or, le compte-rendu de l'entretien individuel annuel du 1er avril 2009 dont se prévaut la SA ARKEMA porte précisément référence des souhaits d'évolution exprimés par [U] [V] à l'occasion du « Point de synthèse sur l'échange concernant une éventuelle évolution de carrière en fonction des souhaits du collaborateur et de l'avis de la hiérarchie », sans que son employeur ne justifie y avoir apporté aucune attention ni, a fortiori, aucune suite ou réponse.

La SA ARKEMA ne peut valablement se prévaloir, à cet égard, de la circonstance que les collègues de travail d'[U] [V] au sein de l'établissement de [Localité 8] n'auraient pas bénéficié d'un traitement plus favorable en terme de suivi de carrière, alors, précisément, que les mandats de représentant du personnel exercés par le salarié imposaient un examen et un suivi spécifiques, permettant de le prémunir de toute atteinte anormale, directe ou indirecte, à l'évolution de sa carrière et de sa rémunération en raison de son engagement.

La SASU KEM ONE s'abstient de même de justifier des raisons pour lesquelles elle s'est abstenue d'organiser avec [U] [V] l'entretien professionnel biennal prévu par les dispositions de la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014 ainsi que par les stipulations de l'article 7 de l'accord du 26 novembre 2014 relatif à la formation professionnelle rattaché à la convention collective et applicable à toutes les entreprises de la branche des industries chimiques.

Et la SASU KEM ONE ne justifie pas plus des raisons de l'absence de suivi de la carrière et de l'évolution professionnelle de son salarié, pourtant titulaire à compter de 2017 de mandats de délégué du personnel en méconnaissance des stipulations de l'avenant à l'accord relatif au dialogue social, au droit syndical et à la représentation du personnel au sein de la société KEM ONE SAS conclu le 25 juin 2014.

Il peut être relevé enfin que, comme plusieurs de ses collègues de travail, [U] [V] n'a pas bénéficié d'un entretien individuel annuel pour l'année 2013. Mais, alors que l'intéressé n'exerçait aucun mandat syndical et ne se prévaut et ne justifie d'aucune activité militante au cours de l'année considérée, les compte-rendus des entretiens tenus par l'employeur les 20 décembre 2012 et 22 décembre 2014 se révèlent sans particularité.

Il apparaît en troisième lieu, s'agissant de la relative stagnation connue par [U] [V] dans son évolution professionnelle, mise en évidence dans les circonstances qui précèdent, que :

- [P] [O], auquel la SA ARKEMA et la SASU KEM ONE comparent utilement l'appelant, a été embauché à compter du 10 février 1983 en qualité d'opérateur à la journée à l'unité de fabrication PVC au coefficient 160 de la convention collective, avant d'être promu en 1987 au coefficient 175 ' atteint par [U] [V] trois ans plus tôt ' puis en 2003 au coefficient 190 ' atteint par [U] [V] en mars 2002, niveau de classification qu'il a conservé jusqu'à sa départ à la retraite en avril 2019 ;

- [M] [T] et [D] [G], salariés auxquels se compare l'appelant en ce que les intéressés bénéficiaient dans leurs fonctions - identiques à celles qu'il exerçait à la même période - d'un coefficient de classification plus élevé, avaient en réalité été promus au coefficient 205 à compter de leurs nominations dans des fonctions postées en 5x8 avant leur mutation, à ce même niveau de classification, dans le service dans lequel avait été affecté [U] [V] à compter de septembre 2010, en rythme de travail de jour ;

- les entretiens annuels d'évaluation d'[U] [V] mettent en évidence à plusieurs reprises l'existence de manquements reprochés au salarié dans le port des équipements de protection individuelle, et la communication et les échanges avec ses collègues de travail principalement ;

- l'examen des pièces versées aux débats, s'agissant notamment des « fiches d'exigences dans le poste » produites par la SA ARKEMA et la SASU KEM ONE, d'une part, et des conditions de maîtrise technique requises par les stipulations de la convention collective définissant les différents niveau de classification, d'autre part, et des mentions portées à cet égard dans les compte-rendus des entretiens individuels d'évaluation de l'intéressé, enfin, ne permettent pas de considérer que les fonctions exercées par [U] [V] auraient en réalité relevé d'un niveau de classification supérieur ;

- il ne ressort pas des pièces produites par les parties qu'[U] [V] aurait, à un quelconque moment de la relation de travail, postulé sans succès à un poste relevant d'un niveau de classification supérieur, s'agissant notamment d'un poste d'opérateur au sein d'un service posté tels que précédemment occupés par [M] [T] ou [D] [G], auxquels il se compare.

Il résulte ainsi de l'ensemble des énonciations qui précèdent que l'évolution de carrière d'[U] [V] au sein de la SA ARKEMA puis de la SASU KEM ONE, à compter de l'exercice de ses premiers mandats de représentant du personnel tout particulièrement, repose sur la prise en compte d'éléments objectifs et ne relève d'aucun traitement discriminatoire de la part de son employeur.

Il apparaît en quatrième lieu, s'agissant de la faiblesse de la progression salariale dont a bénéficié [U] [V] au cours de la relation de travail, mise en évidence dans les circonstances qui précèdent, que :

- l'appelant a connu une évolution de sa rémunération mensuelle fixe globalement équivalente à celle dont a bénéficié [P] [O], y compris au cours de la période postérieure au premier mandat de représentant du personnel qu'il a exercé ;

- la rémunération mensuelle de base d'[U] [V] tenant compte de « l'harmonisation Atofina » s'est établie à 2 193,80 euros bruts en août 2018, quand celle de [P] [O], qui occupait des fonctions identiques et de même niveau de classification au sein du même service, s'établissait à la même période à 2 211,31 euros ;

- et, alors que celui-ci exerçait également des fonctions identiques au sein du même service mais à un niveau de classification supérieure, la rémunération mensuelle de base perçue par [N] [T] au cours de la même période s'élevait à 2 164,52 euros, outre complément individuel à hauteur de 46,75 euros et complément technicité à hauteur de 85,35 euros ;

- [U] [V] a bénéficié à compter du 1er septembre 2019 d'une augmentation à 2 216,58 euros du montant de ses appointements mensuels de base, alors que les appointements de base de [N] [T] s'élevaient à la même période à la somme de 2 267,81 euros, outre complément individuel à hauteur de 47,69 euros et complément technicité à hauteur de 87,06 euros bruts.

Il ne peut ainsi être considéré, au terme de l'ensemble des énonciations qui précèdent, que l'évolution de la rémunération d'[U] [V] au sein de la SA ARKEMA puis de la SASU KEM ONE, à compter de l'exercice de ses premiers mandats de représentant du personnel tout particulièrement, procéderait d'un traitement discriminatoire de la part de son employeur.

Il ressort en cinquième et dernier lieu des énonciations qui précèdent, s'agissant de l'absence de formation dénoncée par l'appelant, qu'[U] [V] a bénéficié de 271 heures de formation au sein de la SA ARKEMA entre janvier 2002 et juillet 2012, puis de 24 heures de formation entre novembre 2012 et mars 2017 suite au transfert de son contrat de travail à la SASU KEM ONE.

La SASU KEM ONE justifie par ailleurs d'actions de formation professionnelle dont a pu bénéficier [U] [V], d'une durée cumulée de plus de six heures, au cours du second semestre 2018.

Et les relevés des formations respectivement dispensées à [P] [O], [N] [T] ou [D] [G], affectés en dernier lieu dans le même service que l'appelant, ne mettent en évidence aucune différence de traitement au détriment d'[U] [V] dans l'accès à la formation professionnelle au sein de l'entreprise.

Il peut être constaté, à cet égard, que les formations dispensées à [U] [V] au cours de la période de travail se rapportaient à l'adaptation aux postes de travail successifs qu'il a occupés mais également à des champs techniques plus périphériques et complémentaires à son activité ainsi, notamment, qu'à la santé et à la sécurité au travail.

Il doit être relevé, parallèlement, que les entretiens annuels d'évaluation versés aux débats ne mettent en évidence aucune insuffisance dans les connaissances théoriques et techniques d'[U] [V] au regard des différents postes qu'il a été amené à occuper au sein de la SA ARKEMA puis de la SASU KEM ONE.

Les énonciations qui précèdent permettent ainsi de considérer que, contrairement à ce qu'il soutient, [U] [V] n'a fait l'objet d'aucune discrimination ' objective ou relative ' dans l'accès à la formation professionnelle au cours de sa période d'emploi.

*****

Il apparaît par conséquent, au terme de l'ensemble de ces énonciations, qu'[U] [V] a été victime, au cours de sa période d'emploi au sein de la SA ARKEMA puis de la SASU KEM ONE, de manquements de son employeur dans le respect de ses obligations liées à l'organisation des entretiens de carrière périodiques obligatoires et, plus généralement au suivi de sa carrière, alors qu'il avait été amené à exercer des mandats de représentant du personnel.

Ainsi, [U] [V] a été victime, au cours de sa période d'emploi, d'une discrimination de la part de son employeur, la SA ARKEMA puis la SASU KEM ONE, caractérisée par le non-respect par ces sociétés des dispositions légales et des accords collectifs qu'elles avaient elles-mêmes conclus avec les organisations syndicales représentatives, relatives aux entretiens périodiques de suivi des évolutions de carrière et de rémunération des salariés titulaires de mandats syndicaux ou de représentants du personnel.

Cependant, si les éléments ci-dessus exposés ne permettent pas de déterminer que le salarié a effectivement été privé d'une possibilité de promotion par suite de la discrimination ainsi mise en évidence, de sorte que c'est à bon droit que les premiers juges ont débouté l'intéressé de la demande de repositionnement et de rappel de rémunération dont il les avait saisis, le non-respect par la SA ARKEMA puis la SASU KEM ONE des dispositions légales, conventionnelles et collectives élaborant un régime protecteur dans le suivi effectif du déroulement et de l'évolution de la carrière et de la rémunération des salariés exerçant des mandats de représentants du personnel, a généré pour [U] [V] un préjudice que les énonciations qui précèdent permettent d'évaluer, compte-tenu de sa persistance dans le temps et de l'atteinte ainsi portée aux opportunités professionnelles de l'intéressé, à la somme de 3 000 euros.

La SASU KEM ONE contre laquelle la demande est dirigée à titre principal lui en devra réparation, par infirmation du jugement déféré.

- Sur l'intervention du syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] :

Le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] fait valoir en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que, en pratiquant une politique discriminatoire à l'encontre de Monsieur [V], la société KEM ONE a directement porté atteinte aux intérêts collectifs dont elle assure la défense.

La SA ARKEMA fait principalement valoir, en réponse, que les demandes du syndicat CGT, visant à obtenir sa condamnation à l'indemniser de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession sont irrecevables en ce que :

- le syndicat CGT n'est pas partie à la procédure judiciaire engagée à son encontre par [U] [V] le 7 décembre 2017, et le pouvoir du syndicat pour agir en justice au titre de cette procédure ne vise que la société KEM ONE ;

- les demandes de la CGT à son encontre sont prescrites, ces demandes relevant de la prescription quinquennale de droit commun régissant la mise en cause de la responsabilité civile délictuelle de l'article 2224 code civil, Monsieur [V] n'étant plus employé depuis juillet 2012 au sein de la société et l'action à son encontre ayant été engagée en décembre 2017.

La SASU KEM ONE soutient notamment, pour sa part, que le syndicat CGT PLATEFORME CHIMIQUE DE [Localité 8] ne justifie d'aucun préjudice propre qui permettrait de fonder l'indemnisation sollicitée.

* * * *

Il ressort des dispositions de l'article L. 2132-3 du code du travail que les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l'intérêt collectif de la profession qu'ils représentent.

Or, la violation, invoquée par le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8], des dispositions relatives à toute discrimination syndicale est précisément de nature à porter un préjudice à l'intérêt collectif de la profession dont il assure la défense.

Et la discrimination syndicale dont a été victime [U] [V] au cours de sa période d'emploi au sein de la SA ARKEMA et de la SASU KEM ONE, dans les circonstances ci-dessus mises en évidence, a effectivement porté une atteinte à l'intérêt collectif de la profession défendu par le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] qui peut être évalué, compte-tenu de ses effets dissuasifs sur l'engagement et l'adhésion syndicale des salariés notamment, à la somme de 1 200 euros.

Conformément à la demande principale du syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] tournée à l'encontre de la seule SASU KEM ONE, il convient de condamner cette société à réparation de ce chef.

- Sur les demandes accessoires :

La SASU KEM ONE, partie perdante au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être condamnée à supporter les dépens de l'instance.

Et il serait inéquitable, compte-tenu des circonstances de l'espèce tels qu'elles ressortent de l'ensemble des constatations qui précèdent notamment, de laisser à la charge d'[U] [V] et du syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] l'intégralité des sommes qu'ils ont été contraints d'exposer pour la défense en justice de leurs intérêts, en première instance puis en cause d'appel, de sorte qu'il convient de condamner la SASU KEM ONE à leur verser respectivement les sommes de 2 500 euros et 1 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté [U] [V] et le syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] de leurs demandes de dommages et intérêts, de participation aux frais irrépétibles ainsi qu'aux dépens ;

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

CONDAMNE la SASU KEM ONE à verser à [U] [V] la somme de trois mille euros (3 000 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de la discrimination syndicale dont il a fait l'objet au cours de sa période d'emploi ;

CONDAMNE la SASU KEM ONE à verser à [U] [V] la somme de deux mille cinq cents euros (2 500 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SASU KEM ONE à verser au syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] la somme de mille cinq cents euros (1 500 euros) en réparation de l'atteinte portée à l'intérêt collectif de la profession dont il assure la défense ;

CONDAMNE la SASU KEM ONE à verser au syndicat CGT de la plateforme chimique de [Localité 8] la somme de mille euros (1 000 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTE la SASU KEM ONE de la demande qu'elle formait sur le fondement de ces mêmes dispositions ;

CONDAMNE la SASU KEM ONE au paiement des dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 19/03541
Date de la décision : 05/10/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-10-05;19.03541 ?
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