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21/09/2022 | FRANCE | N°19/01677

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale a, 21 septembre 2022, 19/01677


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR



N° RG 19/01677 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHRO



[E]

C/

Société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE (ICI)



APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 07 Février 2019

RG : 16/02244





COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE A



ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2022







APPELANT :



[P] [E]

né le 09 Mai 1949 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Local

ité 3]



représenté par Me Christine ETIEMBRE de la SELAS CABINET JURIDIQUE SAONE RHONE, avocat au barreau de LYON







INTIMÉE :



Société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE

[Adresse 1]

[Localité 4]



représentée par Me Romain L...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/01677 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MHRO

[E]

C/

Société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE (ICI)

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de LYON

du 07 Février 2019

RG : 16/02244

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE A

ARRÊT DU 21 SEPTEMBRE 2022

APPELANT :

[P] [E]

né le 09 Mai 1949 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 3]

représenté par Me Christine ETIEMBRE de la SELAS CABINET JURIDIQUE SAONE RHONE, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

Société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Martine MONTAGNON de la SELEURL MONTAGNON Martine Selarl, avocat au barreau de PARIS

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Mai 2022

Présidée par Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Joëlle DOAT, présidente

- Nathalie ROCCI, conseiller

- Antoine MOLINAR-MIN, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 21 Septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Joëlle DOAT, Présidente et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

[P] [E] a été embauché à compter du 19 août 1993 par la société BUREAU D'ETUDES & INSTALLATIONS GENERALES en qualité d'ingénieur - position 2, indice 114 - suivant contrat de travail à durée indéterminée du 30 septembre 1994 soumis à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (IDCC 1486).

[P] [E] a été promu aux fonctions d'ingénieur chef de service, position 3.2, coefficient 210 puis d'ingénieur en chef, position 3.3, coefficient 270 au sein de la société INGÉROP INTERNATIONAL les 27 juin 2007 et 1er janvier 2008, après avoir été nommé aux fonctions de responsable du contrôle externe des études du groupement chinois CITIC-CRCC en Algérie à compter du 13 février 2007.

Par correspondance du 13 mai 2011, INGÉROP INTERNATIONAL a informé [P] [E] de la fin de sa mission d'expatriation en Algérie à compter du 30 juin 2011, et de son affectation à compter du 1er juillet 2011 suivant au siège de la société à Courbevoie.

Par nouvel avenant daté du 28 septembre 2011, [P] [E] a été nommé aux fonctions d'ingénieur en chef, position 3.3, coefficient 270 à compter du 1er octobre 2011 à l'agence de [Localité 7] de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE.

Le 16 juin 2016, [P] [E] a saisi le conseil de prud'hommes de demandes de rappels de frais et de frais d'installation, d'une demande de rappel de prime de fin d'année, d'une demande d'indemnité de détachement, d'une demande de rappel de salaires au titre du minimum conventionnel applicable, d'une demande indemnitaire au titre de la rétrogradation dont il a fait l'objet, d'une demande de rappel sur primes de nuit, d'une demande d'indemnité compensatrice de congés payés, et de demandes indemnitaires au titre de la discrimination salariale et de l'exécution déloyale du contrat de travail, principalement.

[P] [E] a dû bénéficier d'un arrêt de travail du 9 septembre au 30 novembre 2016, que la caisse primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels suivant décision en date du 8 mars 2017.

Par correspondance en date du 23 janvier 2019, la SAS INGÉROP CONSEIL ET INGENIERIE a informé [P] [E] de sa mise à la retraite d'office à compter du 31 mai 2019.

Par jugement en date du 7 février 2019, le conseil de prud'hommes de Lyon ' section encadrement ' a :

DIT ET JUGÉ que l'ensemble des demandes, objets du litige, ne portait pas sur un litige né à la date de signature du protocole d'accord en date du 15 décembre 2011, excepté sur la demande de rapatriement d'effets personnels d'Algérie pour laquelle [P] [E] serait débouté ;

DIT qu'à la signature du protocole en septembre 2011, le salaire d'[P] [E] était supérieur au minimum conventionnel pour une position coef 270 niveau 3.3 ;

DIT que le seul avenant signé le 28 septembre 2011 entre les 2 parties régissait les relations contractuelles entre celles-ci ;

En conséquence,

DÉBOUTÉ [P] [E] de ses demandes salariales suivantes :

- 6 000 euros en complément du salaire mensuel à titre de défraiement (majoration mensuelle de 300 euros de février 2012 à septembre 2013) et 600 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 000 euros nets à titre de participation aux frais d'installation,

- 5 217,70 euros bruts au titre de la prime de fin d'année (80 % d'un mois de salaire, en plus du 13ème) et 521,77 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 000 euros au titre d'indemnité de détachement, et 500 euros au titre des congés payés afférents ;

DIT ET JUGÉ que les minimum conventionnels n'avaient pas été respectés par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ;

CONDAMNÉ la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à payer à [P] [E] à ce titre les sommes de 34 617,35 euros et 3 461,74 euros de congés payés afférents ;

DIT ET JUGÉ qu'étaient inopposables et inapplicables les dispositions relatives au salaire inférieures au plafond de la sécurité sociale, prévues à l'article 3 du 22 juin 1999 et l'article 4.2 de l'accord collectif de la réduction du temps de travail de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ;

FIXÉ le salaire mensuel brut à 6 619,20 euros ;

CONDAMNÉ la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à payer à [P] [E] les sommes suivantes :

- 5 200 euros au titre de dommages et intérêts pour manque à gagner du fait de la rétrogradation ;

- 416 euros à titre de rappel de prime de nuit plus 41,60 euros de congés payés afférents ;

DÉBOUTÉ [P] [E] de sa demande de paiement de congés pour fractionnement ;

DÉBOUTÉ [P] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la part de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ;

DÉBOUTÉ la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE sur sa demande d'irrecevabilité de rappel de salaire qui se heurte à l'autorité de la chose jugée ;

JUGÉ recevable mais mal fondée la sommation de communication par [P] [E] à la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ;

DIT qu'il n'y avait pas lieu à prononcer l'exécution provisoire du jugement autre que celle de droit ;

CONDAMNÉ la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à payer à [P] [E] la somme de 1 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTÉ les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNÉ la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE aux entiers dépens.

[P] [E] a interjeté appel de cette décision le 6 mars 2019.

Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 1er avril 2022 et auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, [P] [E] sollicite de la cour de :

RÉFORMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes le 7 février 2018 en ce qu'il a :

- Débouté Monsieur [E] de sa demande de rapatriement d'effets personnels d'Algérie,

- Dit que le seul avenant signé le 28 septembre 2011 entre les deux parties régit les relations contractuelles entre celles-ci,

- Débouté [P] [E] de ses demandes salariales suivantes : 6 000 euros en complément du salaire mensuel à titre de défraiement (majoration mensuelle de 300 euros de février 2012 à septembre 2013) et 600 euros au titre des congés payés afférents, 5 000 euros net à titre de participation aux frais d'installation, 5 217,70 euros brut au titre de la prime de 'n d'année (80% d'un mois de salaire, en plus du 13e) et 521,77 euros au titre des congés payés afférents, 5 000 euros au titre d'indemnité de détachement, et 500 euros au titre des congés payés afférents ;

- La condamne à lui payer les sommes de 34 617,35 euros et 3 461,74 euros à titre de congés payes afférents, et non 58 919,51 euros selon décompte au 31 octobre 2018 ;

- Débouté [P] [E] de sa demande de paiement de congés pour fractionnement,

- Débouté [P] [E] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale de la part de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE,

- Débouté Monsieur [E] du surplus de ses demandes ;

Statuant à nouveau,

DÉCLARER recevable et bien fondé l'ensemble des demandes ;

CONFIRMER le jugement rendu par le conseil des prud'hommes le 7 février 2018 en ce qu'il a considéré que les demandes objet du présent litige sont nées postérieurement à la date de signature du protocole d'accord en date du 15 décembre 2011 ;

RÉFORMER en ce qu'il a considéré que la demande de rapatriement des effets personnels encore en ALGERIE était irrecevable car se heurtait à l'autorité de la chose jugée ;

LES DÉCLARER recevables et bien fondées ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à restituer à ses frais, ses effets personnels et ceux de sa famille, restés en Algérie au sein de la 'liale du Groupe, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter d'un mois suivant la noti'cation du jugement ;

En tout état de cause,

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui payer, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine :

- 6 000 euros en complément du salaire mensuel à titre de défraiement (majoration mensuelle de 300 euros de février 2012 à septembre 2013),

- 600 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 000 euros net à titre de participation aux frais d'installation,

- 5 217,70 euros brut au titre de la prime de 'n d'année (80% d'un mois de salaire, en plus du 13e),

- 521,77 euros au titre des congés payés afférents,

- 5 000 euros au titre d'indemnité de détachement,

- 500 euros au titre des congés payés afférents ;

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a considéré qu'il devait béné'cier de la position 3.3 coefficient 270 accordée contractuellement à compter du 1er janvier 2008 puis confirmée dans l'avenant de novembre 2011 ainsi que de l'application d'un forfait-jours ;

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a constaté qu'il percevait une rémunération en dessous du minimum conventionnel et des primes de nuit inférieures à sa classi'cation ;

RÉFORMER sur les montants alloués au titre de rappel de salaire ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui payer, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine :

- 55 326,16 euros au titre de rappel de salaires, modalité 3, selon décompte arrêté au 31 janvier 2019,

- 5 532,61 euros au titre des congés payés afférents selon décompte arrêté au 31 décembre 2019 au titre de la modalité 3 ;

A titre subsidiaire,

- 31 320,76 euros au titre de rappel de salaires, modalité 2, outre 3 132,07 euros au titre des congés payés afférents, selon décompte arrêté au 31 janvier 2019 ;

En tout état de cause,

CONFIRMER le jugement du 7 février 2018 en ce qu'il a :

- 'xé le montant de la rémunération à la somme de 6 619,20 euros mensuels pour toute la période postérieure,

- 416 eurosau titre du rappel sur primes de nuit,

- 41,60 euros au titre des congés payés afférents aux primes de nuit ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à payer les cotisations sociales sur rappel de salaire selon les taux et plafonds en vigueur lors des périodes de travail donnant lieu à ces rappels ;

CONFIRMER le jugement de première instance en ce qu'il a ordonné de lui remettre les bulletins de salaire recti'és à compter du mois d'octobre 2011, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la noti'cation de la décision, portant les montants dus pour chaque année avec les cotisations sociales afférentes ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui payer la somme de 354 350 euros au titre du manque à gagner du fait de l'absence de déclarations sociales selon les taux et plafond en vigueur lors des périodes de travail donnant lieu à rappel, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine ;

CONFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Lyon le 7 février 2018 en ce qu'il a condamné la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui verser la somme de 5 200 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la rétrogradation en modalité 2 ;

DÉCLARER que sa mise à la retraite est nulle car discriminatoire du fait de l'âge et à titre subsidiaire abusive ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui payer, outre intérêts au taux légal à compter de la saisine :

- 4 396,14 euros au titre des congés payés, équivalents à 18 jours de congés supplémentaires de fractionnement,

- 16 000 euros à titre de dommages et intérêts du fait de la discrimination salariale et non-respect des l'égalité de rémunération ;

- 354 350 euros à titre de dommages et intérêts au titre de la discrimination du fait de l'âge et salariale,

- 354 350 euros à titre de dommage et intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,

- 207 564 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture nulle et abusive ;

A titre subsidiaire,

[G] de communiquer l'ensemble des bulletins de salaire des salariés classés niveau 3.3 (ingénieurs en chef) notamment de Messieurs [N] et [Z] de janvier 2010 à décembre 2018, sous astreinte de 500 Euros par jour de retard, à compter de la noti'cation du jugement ;

ROUVRIR les débats pour soumettre au contradictoire ces pièces ;

DÉBOUTER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE de ses demandes présentées au titre de l'appel incident ;

CONDAMNER la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à lui payer la somme de 6 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens dont distraction faite au pro't du Cabinet Juridique Saône-Rhone.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 29 juillet 2019, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SA INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE sollicite de la cour de :

CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a déclaré irrecevable la demande de remise des effets personnels se heurtant à l'autorité de la chose jugée ;

CONFIRMER le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a débouté [P] [E] ;

LA RECEVOIR en son appel incident ;

RÉFORMER le jugement du conseil de prud'hommes qui l'a condamnée à :

- 34 617,35 euros pour non-respect des minima conventionnels et 3 461,74 euros de congés payés incidents,

- fournir à [P] [E] des fiches de salaire rectifiées depuis octobre 2011 dans les trois mois au plus tard de la notification du jugement,

- 5 200 euros de dommages et intérêts pour manque à gagner du fait de la rétrogradation,

- 416 euros de rappel de prime de nuit et 41,60 euros de congés payés afférents,

- 1 600 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

DÉBOUTER [P] [E] de l'ensemble de ses demandes.

La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 7 avril 2022, et l'affaire fixée pour être plaidée à l'audience du 18 mai suivant.

SUR CE :

- Sur les conditions financières de l'affectation à [Localité 6] :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de ses demande de rappels de primes et indemnités, que :

- alors qu'il avait été convenu avec son employeur que son affectation à [Localité 6] procéderait d'une mission temporaire emportant sa mutation, pour cette seule période, au sein d'une autre filiale du groupe, l'avenant qui lui a finalement été proposé le 22 novembre 2012 portait mutation définitive au sein de la branche Rhône-Alpes de la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, en méconnaissance des termes de la transaction intervenue entre les parties en 2011 ;

- le courriel du 18 décembre 2012, par lequel son employeur lui a proposé, au titre de son déplacement, des modalités de défraiement conformes à la proposition dont il l'avait précédemment saisi, ont permis une rencontre des volontés des parties, et le contrat en étant résulté a d'ailleurs été exécuté en partie ;

- les modifications apportées par la suite par l'employeur, dans l'ordre de mission finalement transmis, ne peuvent conduire à retenir son refus complet de l'ensemble des modalités puisque la matérialisation ne peut faire échec à l'accord formé par l'échange des consentements dans le cadre de l'acceptation de l'offre ; la clause couperet conditionnant la fin de la mission à la prise de la retraite est une clause nulle, qui n'emporte pas pour autant le retrait des autres éléments contractuels ; la modification des modalités de règlement est considérée comme étant secondaire et ne permet pas de revenir sur l'engagement initial ;

- la prime de fin d'année prévue par l'accord du 18 décembre 2012 est sans aucun rapport avec les modalités de l'intéressement définies par accord collectif au sein de l'unité INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE COURBEVOIE auxquelles il aurait ainsi dû pouvoir prétendre ;

- la société INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ne pouvait revenir unilatéralement sur leur accord relatif au règlement en une seule échéance par l'employeur de la totalité de l'indemnité de détachement, correspondant à des frais d'installation déjà exposés ;

- son employeur ne lui a pas réglé la majoration mensuelle de 300 euros qu'il s'était engagé à lui régler, en contrepartie à l'absence de perception de l'indemnité mensuelle de grand déplacement en méconnaissance des stipulations de l'article 50 de la convention collective dont il ressort que le déplacement ne doit pas être l'occasion de charges supplémentaires ou de diminution de salaire pour le salarié.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- [P] [E] a été défrayé selon les modalités conventionnelles applicables au titre de son affectation temporaire à la mission de maîtrise d'oeuvre et d'assistance maîtrise d'ouvrage pour le chantier de l'autoroute A9 à [Localité 6] ;

- les deux majorations du régime de base proposées au salarié ont été expressément refusées par l'intéressé qui ne peut aujourd'hui se prévaloir de leur application ;

- la mission en cause n'a pas généré de charges supplémentaires pour le salarié.

* * * * *

Il ressort des dispositions de l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du même code aux termes de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Or, il convient de relever en premier lieu, s'agissant du rappel de prime de fin d'année sollicité par le salarié, que le contrat de travail conclu le 30 septembre 1994 avec la SNC BUREAU D'ETUDES D'INSTALLATIONS GENERALES, l'avenant du 27 juin 2007 portant mutation au sein de la SAS INGEROP INTERNATIONAL, la correspondance de cette société du 13 mai 2011 portant fin de mission en expatriation et réintégration au 1er juillet 2011 au sein de la SAS INGEROP INTERNATIONAL, l'avenant du 28 septembre 2011 au contrat de travail portant mutation au sein de l'établissement de Vienne de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, ou le protocole transactionnel conclu le 15 décembre 2011 avec cette société ne prévoient à aucun moment le versement au salarié d'une prime de fin d'année.

[P] [E] a refusé le 17 décembre 2012 le nouvel avenant au contrat de travail qui lui avait été proposé par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, portant notamment mutation au sein de l'établissement de Courbevoie de la société.

Et, par courriel du 18 décembre 2012 à l'objet « Conditions de ton intégration », le représentant de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a formulé à l'intention d'[P] [E] une nouvelle proposition d'intégration au sein de la direction « infrastructures et grands ouvrages » de l'établissement de Courbevoie de la société, dans la perspective de son affectation sur le chantier de l'autoroute A9 à [Localité 6], prévoyant notamment :

- un défraiement à hauteur de 1 200 euros nets versés en complément du salaire mensuel,

- une participation financière aux frais de déménagement à hauteur de 5 000 euros,

- le versement « d'une prime de fin d'année de l'ordre de 80 % d'un mois de salaire en sus de (s)on 13ème mois, soit environ 4 200 euros ».

Or, la proposition ainsi formulée était expressément conditionnée par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à la signature par [P] [E] de la proposition d'avenant au contrat de travail qui lui avait été transmise, et que le salarié a expressément refusé de régulariser, ainsi qu'il en a notamment informé son employeur par courriel du 12 février 2013 et le lui a expressément rappelé par correspondances des 14 mars et 15 avril 2013 (par exemple et notamment).

C'est ainsi à bon droit que les premiers juges ont constaté que la demande de rappel de prime de fin d'année formée par [P] [E] était infondée.

De même, [P] [E] ne peut valablement se prévaloir d'une partie des termes de la proposition d'avenant à son contrat de travail du 18 décembre 2012 qu'il a expressément refusée, pour solliciter le versement d'une somme de 5 000 euros à titre de participation financière à ses frais de déménagement.

Et, si la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a proposé le 5 mars 2013 à [P] [E] la régularisation d'un ordre de mission « relatif à (s)on intervention sur le projet DDA9 » prévoyant notamment le versement mensuel d'une indemnité de grand déplacement comprenant une « prime de « rideau » » de 200 euros nets par mois durant 25 mois au cours de la période d'avril 2012 à mai 2014, soit la somme totale de 5 000 euros, le salarié a expressément refusé, par correspondance électronique du 14 mars 2014, les conditions financières ainsi proposées.

Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu'il a débouté [P] [E] de la demande qu'il formait de ce chef.

Enfin, et là-encore, si la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE avait proposé à [P] [E] de porter l'indemnité de grand déplacement susceptible de lui être versée à l'occasion de son affectation sur le chantier de l'autoroute A9 à [Localité 6] à la somme de 1 700 euros par mois au total, le salarié a expressément refusé le 14 mars 2014 la régularisation de l'« ordre de mission » qui lui avait été soumis en ce sens le 5 mars précédent par son employeur.

Et [P] [E], qui soutient que son affectation par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE sur le chantier de l'autoroute A9 à [Localité 6] aurait occasionné pour lui des charges supplémentaires ainsi qu'une diminution de sa rémunération ou, de façon très incidente, qu'il n'aurait pas été soumis au même régime de défraiement que ses collègues de travail, ne verse aux débats aucune pièce probante susceptible d'objectiver ses allégations.

Il convient par conséquent de débouter [P] [E], par confirmation du jugement dont appel, de sa demande de rappel d'indemnités de grand déplacement.

- Sur les minima conventionnels :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de ses demande de rappel de salaires, que :

- les demandes formées de ce chef, fondées sur des faits survenus postérieurement à l'accord transactionnel du 15 décembre 2011, sont recevables ;

- ses demandes de rappel de salaires, formées avant le 16 juin 2016, restaient soumises à une prescription quinquennale au bénéfice des dispositions transitoires de la loi de 2013 ayant modifié la prescription prévue à l'article L. 3245-1 du code du travail ;

- l'accord du 22 juin 1999 prévoit trois types de modalités de gestion des horaires : la modalité standard communément nominée modalité 1, la modalité de réalisation des missions (modalité 2) et la modalité de réalisation des missions avec autonomie complète (modalité 3) ;

- l'article 4.1 de la convention collective précise que le personnel exerçant des missions commerciales, ou accomplissant des taches de conception ou de création, de conduite et de supervision de travaux disposant d'une large autonomie de liberté et d'indépendance dans l'organisation et la gestion de leur temps de travail relevant au minimum de la position III de la grille de classification ou bénéficiant d'une rémunération annuelle supérieure à deux fois le plafond de la sécurité sociale, se voient attribuer la modalité 3 et, de ce fait, un forfait-jours ;

- un employeur ne peut échapper à l'application des modalités 2 et 3, en fixant volontairement un salaire en-dessous du plafond de la sécurité sociale ;

- l'accord d'entreprise prévoit d'ailleurs que les cadres en position III.2 et III.3 doivent être classés en modalité 3 ;

- aux termes de l'accord national du 22 juin 1999, « Le personnel ainsi concerné doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 120 % du minimum conventionnel de sa catégorie » ;

- il bénéficiait déjà, au moment de la mise en 'uvre de l'accord d'entreprise sur la réduction du temps de travail, d'un classement en position III, la convention de forfait individuel en jours et son placement en modalités 3 lui ayant été confirmées contractuellement par l'employeur lors de sa promotion aux fonctions d'ingénieur en chef à compter du 1er janvier 2008, ce que tendent d'ailleurs à mettre en évidence l'importance des missions qui lui ont alors été confiées ;

- contrairement à ce qu'a retenu le conseil de prud'hommes, la prime de vacances perçue chaque année, qui constitue un élément obligatoire de salaire se rajoutant au minimum conventionnel aux termes de la convention collective, ne peut être réintégrée dans la rémunération versée afin d'apprécier si le minimum conventionnel était respecté ;

- en tout état de cause, et même à considérer que l'employeur aurait pu le soumettre valablement aux modalités 2, l'employeur n'a pas respecté les modalités du forfait qu'il prétend avoir appliqué, en ce que le nombre de jours travaillés excédait le nombre maximum de jours prévus, de sorte qu'il serait dans cette hypothèse fondé à solliciter à titre de dommages et intérêts pour non-rémunération de ce temps complémentaire l'équivalent de la rémunération qu'il aurait dû percevoir au titre de la modalité 3, outre le rappel de salaire ;

- l'application des modalités 3 doit être pris en compte dans les majorations de nuit auxquelles il peut prétendre, telles que déterminées par référence aux heures de nuit recensées dans les bulletins de salaire qui lui ont été délivrés.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- la rémunération versée à [P] [E] a toujours dépassé largement les minimas conventionnels et toutes les composantes contractuelles de sa rémunération lui ont été versées ;

- c'est la modalité qui est conditionnée par le salaire et non l'inverse et, si [P] [E] remplissait bien les conditions de rémunération concernant la modalité 3 pour l'année 2011, compte tenu de la rémunération supplémentaire d'expatriation dont il bénéficiait et qui aboutissait à atteindre ou dépasser 120 % du minimum conventionnel de la position 3.3, la disparition de la prime d'expatriation ne permettait plus le respect des conditions de rémunération nécessaires pour bénéficier de la modalité 3, de sorte qu'[P] [E] a été informé que son niveau de rémunération induirait pour l'avenir le bénéfice de la modalité 2 par application de l'article 4-2 de l'accord d'entreprise ;

- [P] [E] n'établit aucun dépassement du temps de travail convenu ;

- en tout état de cause, le motif de cessation anticipée de sa mission à [Localité 6] montre qu'il ne disposait pas de responsabilités de management élargies ni d'une complète autonomie, exigées pour l'application de la modalité 3 ;

- les rappels de rémunération sollicités ne tiennent pas compte de la rémunération brute annuelle effectivement perçue par l'intéressé, compte tenu notamment des primes d'assiduité et d'intéressement, des primes et gratifications exceptionnelles, des remboursements de frais et des indemnités de déplacement ou détachement ou de la prime de vacance qu'il a perçus.

* * * * *

Ainsi qu'il ressort des éléments ci-dessus exposés, [P] [E] occupait au sein de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE les fonctions d'ingénieur en chef, position 3.3, coefficient 270, depuis 1er octobre 2011.

Et l'avenant du 28 septembre 2011 au contrat de travail fixait à la somme de 5 150 euros le montant de ses appointements bruts mensuels, outre versement d'un 13ème mois, et d'« une prime de vacances égale à environ 0,3 mois de salaire ».

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a par la suite porté à la somme de 5 230 euros bruts, à compter du 1er janvier 2013, puis à la somme de 5 290 euros, à compter du 1er janvier 2014, le montant de la rémunération mensuelle de base versée à [P] [E].

Il apparaît ainsi qu'[P] [E] bénéficiait d'une rémunération supérieure au minima conventionnel, fixé à :

- 5 327,10 euros bruts par mois par l'avenant n°41 du 21 octobre 2011 relatif aux salaires minimaux conventionnels, étendu par arrêté du 29 décembre 2011, publié au journal officiel du 5 janvier 2012,

- 5 435,10 euros bruts par mois par l'avenant n°43 du 21 mai 2013 relatifs aux salaires minimaux, étendu par arrêté du 2 août 2013, publié au journal officiel du 4 septembre suivant,

- et à 5 516,10 euros bruts par mois par l'avenant n°44 du 30 mars 2017 portant révision des avenants n°42 et n°43 relatifs aux minima conventionnels, étendu par arrêté du 3 août 2017 publié au journal officiel du 11 août suivant.

Il convient de relever par ailleurs que l'article 1 du chapitre II de l'accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, annexé à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987 que trois types de modalités de gestion des horaires sont a priori distingués à l'initiative de l'entreprise : modalités standard, modalités de réalisation de missions, modalités de réalisation de missions avec autonomie complète.

L'article 3 instaure ainsi une convention de forfait en heures sur une base hebdomadaire pour les salariés relevant des modalités de réalisation de missions, lesdites modalités trouvant à s'appliquer aux salariés non concernés par les modalités standard ou les réalisations de missions avec autonomie complète, s'agissant « a priori » de tous les ingénieurs et cadres, à condition que leur rémunération soit au moins égale au plafond de la sécurité sociale. Les appointements de ces salariés englobent alors les variations horaires éventuellement accomplies dans une limite dont la valeur est au maximum de 10 % pour un horaire hebdomadaire de 35 heures. Ces salariés ne peuvent alors travailler plus de 219 jours pour l'entreprise, compte non tenu des éventuels jours d'ancienneté conventionnels. Et le personnel ainsi autorisé à dépasser l'horaire habituel dans la limite de 10 % doit bénéficier d'une rémunération annuelle au moins égale à 115 % du minimum conventionnel de sa catégorie.

Il résulte des dispositions conventionnelles ci-dessus rappelées que seuls relèvent des modalités de réalisation de missions les ingénieurs et cadres dont la rémunération est au moins égale au plafond de la sécurité sociale et qui sont soumis à une convention individuelle de forfait en heures prévoyant, d'une part, une convention horaire sur la base hebdomadaire de trente-huit heures trente avec une rémunération forfaitaire au moins égale à 115 % du salaire minimum conventionnel, d'autre part, un nombre maximum de jours travaillés dans l'année.

Et l'accord collectif de réduction du temps de travail conclu le 14 juin 2002 par la société INGEROP avec les organisations syndicales représentatives prévoit notamment (« article 4-2 : réduction du temps de travail (RTT) ») l'aménagement et la réduction du temps de travail des salariés selon trois régimes distincts, selon les modalités suivantes :

« a. Modalité n°1

(')

b. Modalité n°2

La réduction du temps de travail est de 13 jours minimum, conduisant à un plafond annuel de 214 jours travaillés. Le temps de travail est décompté en heures.

Si la rémunération de ces salariés est au moins égale au plafond de la sécurité sociale et à 115 % du minimum conventionnel de leur catégorie (selon le coefficient), un contrat de travail ou un avenant à celui-ci sera établi intégrant un forfait hebdomadaire de 39 heures.

La modalité n°2 concerne les IAC en position I, II et II.1.

c. Modalité n°3

La réduction du temps de travail est de 10 jours minimum, conduisant à un plafond de 217 jours travaillés. Le temps de travail est décompté en jours.

Cette modalité concerne les cadres en position III.2 et III.3 avec une rémunération supérieure à 120 % du minimum conventionnel de leur catégorie (selon le coefficient) ou ceux dont la rémunération est au moins égale à 2 fois le plafond de la sécurité sociale.

Le contrat de travail, ou un avenant à celui-ci, devra préciser ce forfait annuel en jours.

(...) ».

Dès lors, si aux termes des stipulations ainsi rappelés de l'accord d'entreprise, les salariés qui ne bénéficient pas d'une rémunération forfaitaire au moins égale à 120 % du salaire minimum conventionnel ne peuvent être valablement soumis à une convention de forfait en jours, les dispositions conventionnelles ne font pas obligation à l'employeur d'assurer à ces salariés un tel niveau de rémunération.

[P] [E] doit par conséquent être débouté, par infirmation du jugement déféré, de sa demande de rappel de salaire formée sur le fondement des minima conventionnels.

Il convient toutefois de relever que, par avenant du 28 septembre 2011 au contrat de travail, la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE avait expressément convenu avec [P] [E] de ce que la durée du travail serait décomptée, « compte-tenu de (sa) qualification et de (sa) rémunération », conformément à « la modalité n°3 d'aménagement et de réduction du temps de travail (cf. accord d'entreprise du 14 juin 2002 relatif à l'ARTT) », à hauteur de « 217 jours travaillés hors disposition particulière liée à la journée de solidarité ».

Or, ainsi que justement relevé par les premiers juges, l'« accord d'entreprise travail de nuit INGEROP FRANCE » du 6 juin 2014 prévoit notamment (article 6) le versement de « contreparties au travail de nuit », s'agissant plus particulièrement d'une prime brute pour les cadres amenés à effectuer un travail de nuit exceptionnel pour une « nuit courte », soit une durée de travail de nuit inférieure ou égale à 4 heures.

Et, dès lors qu'[P] [E] était soumis, depuis le 28 septembre 2011 au moins, à un décompte de son temps de travail selon les modalités d'une convention de forfait annuel en jours, le montant de la prime forfaitaire à laquelle il pouvait prétendre lors des heures de travail de nuit effectuées, au sens des stipulations précitées de l'accord collectif, s'établissait à 66 euros bruts.

Il convient par conséquent, compte-tenu des primes pour travail de nuit déjà versées par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE au cours des dernières années de la relation de travail, à hauteur de la somme forfaitaire de 40 euros applicable aux « cadres modalités 1 et 2 », de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'employeur à un rappel de majoration de nuit à hauteur de la somme de 416 euros, outre congés payés afférents.

- Sur les jours de fractionnement :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de sa demande de rappels d'indemnité compensatrice de congés payés au titre du fractionnement, qu'il a toujours pris plus de 5 jours ouvrés en dehors de la période comprise entre le 1er mai et le 31 octobre, en dehors de sa 5ème semaine, de sorte qu'il aurait dû pouvoir bénéficier de jours supplémentaires de congés payés au titre des dispositions légales et conventionnelles relatives au fractionnement.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse qu'[P] [E] formule une demande globale au titre de 20 jours de congés supplémentaires, sans préciser à quel exercice ces jours se rattachent ni le fondement qui lui permettrait de prétendre au paiement de jours de congés payés non pris au-delà de la période de prise de congés.

* * * * *

Il ressort des dispositions des articles L. 3141-17 et suivants du code du travail que, sauf accord collectif dérogatoire, le salarié peut bénéficier de deux jours ouvrables supplémentaires de congé lorsqu'il prend six jours de congés en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre.

L'article 23 de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987, étendue, prévoit par ailleurs que, « lorsque l'employeur exige qu'une partie des congés à l'exclusion de la cinquième semaine soit prise en dehors de la période du 1er mai au 31 octobre, il sera attribué :

- 2 jours ouvrés de congés supplémentaires lorsque le nombre de jours ouvrés de congé pris en dehors de cette période est au moins égal à 5 ;

- 1 jour ouvré de congé supplémentaire lorsque le nombre de jours ouvrés de congé pris en dehors de cette période est égal à 3 ou 4 ».

Il convient toutefois de rappeler, d'une part, que le droit légal à des jours de congés supplémentaires naît du seul fait du fractionnement et, d'autre part, que les pièces versées par [P] [E], s'agissant des échanges de courriels avec son supérieur hiérarchique ou du compte-rendu de son entretien d'évaluation pour l'année 2015 par exemple, mettent en évidence que son employeur a systématiquement entendu soumettre son accord à la prise de congés au respect du plan de charge qui lui avait été assigné.

Pour autant, les explications et pièces dont [P] [E] saisit la cour, même complétées par l'examen des pièces produites par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, ne permettent pas d'établir que, ainsi qu'il le soutient, il aurait « toujours pris plus de 5 jours en-dehors de la période entre le 1er mai et le 31 octobre, en-dehors de sa cinquième semaine ».

Au surplus, [P] [E] ne se prévaut et ne justifie d'aucun accord ' même implicite ' de son employeur pour le report sur des exercices ultérieurs des jours de congés non pris au cours des exercices au cours desquels ils avaient été acquis et cumulés.

Le jugement déféré, qui a débouté [P] [E] de sa demande de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés, doit par conséquent être confirmé.

- Sur la discrimination :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que :

- sa rémunération, qui avait régulièrement augmenté, a cessé d'évoluer à compter de l'âge de 65 ans tandis que celle de ses collègues exerçant des fonctions similaires ont continué à croître ;

- son niveau de rémunération n'était plus conforme à la convention collective ;

- il ne lui était pas accordé les mêmes avantages tels que les véhicules ou le mode de transport en avion ;

- le contrat de travail a été rompu du fait de son âge, avant l'âge de 70 ans, sans que l'employeur ne le convoque à un entretien préalable, l'ait informé préalablement de sa démarche, ou ait sollicité son accord.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- la demande indemnitaire au titre de la discrimination salariale a été formée pour la première fois 2 ans après la saisine du conseil de prud'hommes ;

- le salarié évoque au soutien de sa demande, de façon confuse, une inégalité de traitement et une discrimination et formule plusieurs demandes indemnitaires au titre des mêmes préjudices ;

- en tout état de cause, une inégalité de traitement salariale, à la supposer fondée, ne saurait se résoudre qu'en rappels de salaires et non en dommages et intérêts ;

- [P] [E], qui invoque une discrimination salariale, s'abstient d'énoncer le critère de discrimination qu'il dénonce ;

- le salarié ne démontre pas qu'il se trouvait dans une situation identique ou similaire à ceux auxquels il se compare.

* * * * *

L'article L. 1132-1 du code du travail rappelle qu'aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, en matière notamment de rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de formation ou de mutation, en raison de son âge.

L'article L.1134-1 du même code prévoit à cet égard qu'en cas de litige, il appartient au salarié concerné de présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence d'une discrimination directe ou indirecte telle que définie par l'article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008, et il incombe alors à l'employeur, au vu des éléments ainsi produits, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme alors sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

L'examen des bulletins de paie délivrés à [P] [E] par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE révèle en l'espèce que, à compter de son intégration dans la société au 1er octobre 2011, la rémunération forfaitaire mensuelle de l'intéressé, a été fixée à la somme de 5 150 euros bruts par mois, outre versement d'un 13ème mois et d'« une prime de vacances égale à environ 0,3 mois de salaire », avant d'être portée à la somme de 5 230 euros bruts, à compter du 1er janvier 2013, puis à la somme de 5 290 euros, à compter du 1er janvier 2014.

S'il apparaît ainsi que la rémunération mensuelle fixe versée à [P] [E] n'a connu aucune évolution entre le 1er janvier 2014 et la rupture de la relation de travail le 31 mai 2019, les allégations de l'appelant selon lesquelles « ses collègues de travail qui assurent des fonctions similaires ont vu leur salaire augmenter » ou selon lesquels il n'aurait plus été traité « comme les autres salariés » en matière de mise à disposition de véhicule ou de prise en charge des frais de déplacement en avion, ne sont objectivées par aucune pièce probante.

Il convient de relever parallèlement que, par correspondance du 23 janvier 2019, la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a notifié à [P] [E], né le 9 mai 1949, sa mise à la retraite d'office, « à l'issue d'un préavis de 4 mois, fin de mois civil, soit le 31 mai 2019 ».

Et, dès lors que le salarié avait, à la date de notification de sa mise à la retraite d'office, dépassé l'âge de 69 ans, la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE n'était pas tenue, contrairement à ce que soutient l'intéressé, de faire application de la procédure préalable énoncée aux alinéas 7 à 9 de l'article L. 1237-5 du code du travail.

Ainsi, dès lors que la mise à la retraite d'[P] [E] est intervenue dans les conditions prévues par le code du travail, le salarié n'est pas valablement fondé à soutenir qu'il aurait fait l'objet, de la part de son employeur, d'une rupture illicite de son contrat de travail.

Et il apparaît enfin que, l'article 3 du pacte d'actionnaires conclu le 31 juillet 2012 entre la SAS GROUPE INGEROP, la SAS INGEROP INVESTISSEMENT et les actionnaires personnes physiques de ces deux sociétés, prévoyait expressément que :

« Chaque Société concernée pourra ainsi racheter l'intégralité des actions de chacun de ses Associés Personnes Physiques lors de la survenance d'un des « Cas de Départ » suivants :

i) cessation par l'associé de toute fonction salariée et/ou de mandataire social au sein du Groupe INGEROP pour l'une des raisons suivantes : (') mise à la retraite, départ à la retraite, révocation, licenciement ou démission,

(')

En tant que de besoin, chaque Associé Personne Physique déclare donner son consentement à la vente de ses actions de manière définitive aux termes du pacte et que ce consentement n'est pas susceptible de révocation.

En conséquence, la vente sera parfaite dès l'expression de la volonté d'acquérir de la part de la Société concernée (')

3.4 Le rachat sera valablement effectué par voie de notification adressée par la Société concernée à l'Associé Personne Physique cédant dans un délai de douze mois (12) à compter de la survenance d'un Cas de Départ, délai porté à vingt-quatre (24) mois, en cas d'accord de l'associé intéressé ».

Ainsi, même à la supposer établie, la circonstance évoquée par [P] [E] que la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE lui aurait fait part le 30 juillet 2019, soit quelques semaines après sa mise à la retraite et en tout cas dans le délai prévu par l'article 3.4 du pacte d'actionnaires auquel il se réfère, de sa volonté de procéder à l'acquisition des actions de la société dont il aurait été propriétaire et sollicité la régularisation par ses soins de l'ordre de mouvement afférent, ne peut, isolément ou appréciée dans son ensemble avec les seuls éléments de fait dont l'appelant établit la matérialité, laisser supposer l'existence de la discrimination qu'il dénonce.

Le jugement déféré doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a débouté [P] [E] de sa demande indemnitaire au titre de la discrimination comme de ses demandes indemnitaires tant principale que subsidiaire au titre de la rupture du contrat de travail.

- Sur le principe d'égalité de rémunération :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que :

- l'employeur a refusé de communiquer les bulletins de salaire des ingénieurs en chef de l'entreprise classés 3.3, coefficient 270, qu'il avait sollicité alors que d'autres salariés de ce niveau de classification ont vu leur salaire augmenter et ont un salaire supérieur au sien ;

- alors qu'il n'a jamais été augmenté depuis décembre 2012, sa rémunération a même été diminuée ;

- la société n'a pas réactualisé sa rémunération suite à la revalorisation des minimas conventionnels, à la différence des autres salariés.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- la demande indemnitaire au titre de la discrimination salariale a été formée pour la première fois 2 ans après la saisine du conseil de prud'hommes ;

- le salarié évoque au soutien de sa demande, de façon confuse, une inégalité de traitement et une discrimination et formule plusieurs demandes indemnitaires au titre des mêmes préjudices ;

- en tout état de cause, une inégalité de traitement salariale, à la supposer fondée, ne saurait se résoudre qu'en rappels de salaires et non en dommages et intérêts ;

- [P] [E], qui invoque une discrimination salariale, s'abstient d'énoncer le critère de discrimination qu'il dénonce ;

- le salarié ne démontre pas qu'il se trouvait dans une situation identique ou similaire à ceux auxquels il se compare.

* * * * *

Il résulte du principe 'à travail égal, salaire égal' sur lequel sont fondés les articles L.1242-14, L.1242-15, L.2261-22, L.2271-1 et L.3221-2 du code du travail, que l'employeur est tenu d'assurer, pour un même travail ou pour un travail de valeur égale, l'égalité de rémunération entre tous ses salariés placés dans une situation identique et effectuant un même travail ou un travail de valeur égale.

Doivent être considérés comme ayant une valeur égale par l'article L. 3221-4 du code du travail les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l'expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

Il appartient en cas de litige au salarié qui invoque une inégalité de traitement, de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération. Et il incombe alors à l'employeur de rapporter la preuve d'éléments objectifs, pertinents et matériellement vérifiables justifiant la différence ainsi mise en évidence.

Pourtant, alors que les circonstances de l'espèce, compte-tenu notamment de l'ancienneté du litige, commandent d'écarter à ce stade de la procédure la demande de communication de pièces formée par le salarié, [P] [E] s'abstient de verser aux débats la moindre pièce susceptible d'objectiver que, ainsi qu'il le soutient, il aurait été placé par son employeur dans une situation d'inégalité par rapport à d'autres salariés de l'entreprise effectuant un travail identique ou d'égale valeur.

Le jugement déféré doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a débouté [P] [E] des demandes indemnitaires qu'il formait de ce chef.

- Sur l'exécution du contrat de travail :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que :

- l'employeur a modifié unilatéralement son contrat de travail en le réaffectant de la modalité 3 ' forfait en jours ' à la modalité 2 ' forfait en heures ' de décompte du temps de travail, et a procédé à des décomptes d'heures de travail ne tenant pas compte des heures de travail réellement effectuées ;

- la société a procédé en un seul versement, en 2019, au rappel des salaires lui étant dus, sans réaffectation aux années durant lesquelles ces revenus trouvaient leur source, entraînant un manque à gagner dans le calcul de la pension de retraite à laquelle il pouvait prétendre ;

- il a subi des pressions multiples, réitérées, de son supérieur pour l'inciter à prendre sa retraite de façon anticipée, sans que son employeur ne réagisse à ses alertes.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- les allégations du salarié sur les pressions qu'il aurait subies afin qu'il parte plus tôt en retraite ne sont pas objectivées par les pièces qu'il produit ;

- l'intéressé a pu bénéficier de l'ensemble des revenus de substitution auxquels il pouvait prétendre pendant l'arrêt de travail dont il a pu bénéficier ;

- l'origine professionnelle de l'arrêt de travail dont a dû bénéficier [P] [E], qui avait donné lieu à déclaration d'accident professionnel à la demande du salarié, a été écartée à l'issue de l'enquête réalisée par la caisse primaire d'assurance maladie.

* * * * *

Il ressort des dispositions de l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du même code aux termes de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

L'article L. 1222-1 du code du travail rappelle à cet égard que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.

Et il convient en l'espèce de rappeler en premier lieu, s'agissant du grief tiré par l'appelant de la modification unilatérale par l'employeur des modalités de décompte du temps de travail, que, ainsi que relevé précédemment, la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE avait expressément convenu avec [P] [E], par avenant du 28 septembre 2011 au contrat de travail, de ce que la durée du travail serait décomptée, « compte-tenu de (sa) qualification et de (sa) rémunération », conformément à « la modalité n°3 d'aménagement et de réduction du temps de travail (cf. accord d'entreprise du 14 juin 2002 relatif à l'ARTT) », prévoyant un décompte du temps de travail en jours, à hauteur de « 217 jours travaillés hors disposition particulière liée à la journée de solidarité ».

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE ne pouvait par conséquent se prévaloir des stipulations de l'article 4-2 (e) de l'accord d'entreprise du 14 juin 2002 prévoyant que « Le personnel relevant d'une modalité « n » mais ne réunissant pas les conditions de rémunération nécessaires, bénéficiera alors de la modalité « n-1 » » pour procéder unilatéralement, et hors de tout nouvel avenant au contrat de travail, à « une régularisation immédiate de (s)a modalité de 3 à 2 » compte-tenu du niveau de la rémunération de son salarié, ainsi qu'elle en a informé [P] [E] par correspondance électronique du 14 avril 2013, alors qu'une telle modification impliquait le passage à un décompte du temps de travail selon les modalités ci-dessus rappelées d'un forfait annuel en heures.

Et, tandis qu'[P] [E] a très expressément fait part son employeur, dès le 15 avril 2013 et à de très nombreuses reprises par la suite, de son opposition à sa décision de le « rétrograder de la modalité 3 à la modalité 2 » et à la modification des modalités de décompte de son temps de travail, la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a estimé devoir procéder à compter d'avril 2013, et jusqu'à la rupture de la relation de travail, à un décompte du temps de travail de son salarié selon les modalités d'un forfait annuel en heures, à hauteur de 1 670 heures travaillées par an.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, qui n'a ainsi pas estimé devoir régulariser avec son salarié une nouvelle convention de forfait annuel en heures, ne justifie pas plus qu'elle se serait assurée du respect des durées maximales ou même raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires, notamment par la tenue périodiques d'entretiens destinées à évaluer la charge de travail du salarié.

Or, nonobstant l'absence de toute pièce justificative de l'appelant quant à l'étendue du préjudice dont il demande réparation, le manquement de son employeur à ses obligations découlant du contrat de travail, ainsi mis en évidence, a par sa nature et sa persistance dans le temps en dépit des multiples réclamations dont l'avait saisi son salarié, généré pour [P] [E] un préjudice moral qui peut être évalué à la somme de 2 500 euros.

Il convient de relever pour autant qu'[P] [E], qui soutient qu'il n'aurait pu « bénéficier des calculs de certains avantages selon la modalité 3 » du fait de l'exécution fautive du contrat de travail par son employeur de ce chef, s'abstient de préciser le préjudice financier et le manque à gagner dont il demande réparation, et ne verse aux débats aucune pièce susceptible d'en établir la réalité ni, a fortiori, l'ampleur.

Il ressort par ailleurs des énonciations qui précèdent, s'agissant des griefs tirés en second lieu par l'appelant du refus par son employeur d'appliquer les conditions contractuelles convenues pour son affectation sur le chantier de l'autoroute A9 à [Localité 6], que :

- les différends nés, entre les parties au contrat de travail, de la réintégration du salarié ensuite de la fin de sa mission d'expatriation en Algérie, ont donné lieu à la régularisation le 15 décembre 2011 d'un protocole transactionnel aux termes duquel [P] [E] a accepté « expressément et définitivement sa mutation au sein de l'Etablissement INGEROP Conseil & Ingénierie domicilié à [Localité 7] à compter du 1er Octobre 2011 comme celui lui a été indiqué par avenant à son contrat de travail en date du 28 septembre 2011 et accept(é) de signer en l'état cet avenant » ;

- [P] [E] ne peut valablement reprocher à la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE de ne pas avoir appliqué une partie des termes de ses propositions de nouvel avenant au contrat de travail qu'il avait expressément refusées.

Il apparaît en troisième lieu qu'[P] [E], qui ne peut tirer valablement argument d'un manquement de l'employeur au respect des minima conventionnels ou au principe d'égalité de traitement, n'établit pas le caractère fautif, dont il se prévaut, de la décision de son employeur de ne pas procéder à l'augmentation de sa rémunération postérieurement au 1er janvier 2014.

Il apparaît par ailleurs, en quatrième lieu, que les allégations de l'appelant selon lesquelles, « par rapport à ses collègues de travail », il aurait été privé de bureau, se serait vu refuser une demande de formation en anglais ainsi que la réservation de billets d'avion en classe business dont auraient bénéficié ses collègues, ne sont étayés par aucune des pièces qu'il verse aux débats.

Et les copie de carte grise et photographies du véhicule PEUGEOT 3008 immatriculé au nom de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE sont, à elles seules, largement insuffisantes à établir l'existence d'une inégalité de traitement dans la mise à sa disposition d'un véhicule, ou, plus généralement, l'existence d'un manquement de son employeur à l'une quelconque de ses obligations découlant du contrat de travail.

Le formulaire générique de rappel des consignes et procédures internes de sécurité pour les salariés de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE amenés à se déplacer au Niger pour l'exécution du contrat conclu par la société avec « UNICAF ' Bolloré Africa Logistics » est, de même, très insuffisant à établir qu'[P] [E] aurait eu à souffrir d'un manquement de son employeur à son obligation de sécurité à l'occasion d'un ou plusieurs de ses éventuels déplacements professionnels dans ce pays, ni qu'il aurait été victime d'un traitement différencié par rapport à ses collègues de travail en cette/ces occasion(s).

Et les réclamations adressées par le salarié lui-même à son employeur, ou la reprise elliptique d'éléments du compte-rendu de la réunion du 15 février 2017 du comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail de la société dans le compte-rendu de l'enquête administrative menée par la caisse primaire d'assurance maladie suite à la déclaration d'un accident du travail qui serait survenu le 1er septembre 2016, sont très insuffisants à établir que, ainsi que le soutient [P] [E], il aurait fait l'objet « de propos discourtois et rabaissant(s) » (d'ailleurs non précisés) de la part de son supérieur hiérarchique ou qu'il aurait été évincé du suivi d'un dossier à l'issue d'un échange le 1er septembre 2016, en présence du client de la société.

Il apparaît enfin, en cinquième et dernier lieu, s'agissant du grief tiré par l'appelant du refus de son employeur de lui verser le complément de salaire auquel il pouvait prétendre au cours de l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier, que :

- [P] [E] a dû bénéficier d'un arrêt de travail du 9 septembre au 30 novembre 2016, initialement prescrit par son médecin traitant pour maladie ordinaire ;

- par lettre recommandée reçue le 2 novembre 2018 par la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, [P] [E] a fait parvenir à son employeur des certificats médicaux d'arrêt de travail initial et de prolongation des 9 septembre, 23 septembre et 10 octobre 2016 faisant expressément suite et référence, désormais, à un accident du travail survenu le 1er septembre 2016 ;

- la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a accompagné sa déclaration d'accident du travail à la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire, effectuée le 4 novembre 2016, d'une correspondance circonstanciée détaillant ses réserves quant à la réalité et à l'imputabilité de l'accident du 1er septembre 2016 ainsi déclaré ;

- par décision du 8 mars 2017 faisant suite à l'enquête administrative clôturée le 17 février précédent, la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire a refusé la prise en charge de l'arrêt de travail du 9 septembre 2016 au titre de la législation sur les risques professionnels.

Mais ce n'est qu'avec la rémunération lui étant due pour le mois de mars 2017 que la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE a versé à [P] [E] la somme de 1 474,71 euros bruts à titre de « garantie sur le net » à laquelle il pouvait prétendre au titre de son arrêt de travail débuté le 9 septembre 2016.

Ainsi, nonobstant la contestation dont elle avait saisi la caisse primaire d'assurance maladie quant à l'imputabilité au travail de l'arrêt maladie dont a dû bénéficier son salarié du 9 septembre au 30 novembre 2016, le retard caractérisé de la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE dans la mise en 'uvre de la garantie de salaire à laquelle pouvait prétendre [P] [E] par application des articles 41 et 43 de la convention collective a généré pour celui-ci un préjudice qui peut être évalué à la somme de 1 000 euros, dont elle lui devra réparation.

Il convient par conséquent de condamner la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à verser à [P] [E], par infirmation du jugement déféré, la somme globale de 3 500 euros à titre de dommages et intérêts en réparation des préjudices nés pour l'intéressé de ses manquements à ses obligations découlant du contrat de travail qu'elle avait conclu avec l'intéressé.

- Sur la restitution des effets personnels :

[P] [E] soutient en substance, à l'appui de sa demande, que :

- il a laissé des affaires personnelles en Algérie à la fin de son expatriation dans ce pays, mais son employeur l'a informé en 2017 qu'il n'aurait pas d'autre opportunité de marché dans ce pays dans les prochaines années, de sorte que ses effets sont restés stockés dans les locaux de la filiale INGEROP ALGERIE ;

- le groupe ne peut conserver les effets personnels d'un salarié parti à la retraite.

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE fait valoir en réponse que :

- la demande est irrecevable en ce qu'elle méconnaît l'autorité de la chose jugée s'attachant au protocole transactionnel signé le 15 décembre 2011 après la fin de la mission en expatriation du salarié ;

- l'intéressé ne produit en tout état de cause aucune pièce au soutien de sa demande.

* * * * *

Par protocole transactionnel régularisé le 15 décembre 2011, [P] [E] et la SAS INGEROP INTERNATIONAL ont entendu mettre un terme au différend les opposant sur les modalités de la fin de la mission d'expatriation du salarié en Algérie.

Et, au terme du protocole transactionnel ainsi conclu, [P] [E] s'est déclaré « à la date de signature de la présente transaction, pleinement rempli de tous les droits nés de l'exécution de son contrat de travail et (a reconnu) n'avoir plus aucune demande à formuler, vis-à-vis de la Société INGEROP INTERNATIONAL, à quelque titre que ce soit », et a renoncé « en conséquence, pour lui-même et ses ayants droits à toute action ou instance qu'il pourrait intenter, à la date de signature de la présente transaction, au titre de l'exécution de son contrat de travail à l'encontre de la Société INGEROP INTERNATIONAL devant tout organisme ou juridiction ».

Les premiers juges ont ainsi considéré à bon droit que la demande de restitution d'effets personnels formée par [P] [E], qui ne trouvait son fondement que dans les conditions d'exécution et de fin de la mission d'expatriation en Algérie qui lui avait été confiée par la SAS INGEROP INTERNATIONAL, se heurtait à l'autorité attachée aux termes de la transaction du 15 décembre 2011.

Cette demande était ainsi irrecevable par application des dispositions de l'article 2052 du code civil, dans leur rédaction antérieure à la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016.

- Sur les demandes accessoires :

La SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE, partie perdante au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être condamnée à supporter les dépens de l'instance.

Et il serait inéquitable, compte-tenu des circonstances de l'espèce tels qu'elles ressortent de l'ensemble des constatations qui précèdent notamment, de laisser à la charge d'[P] [E] l'intégralité des sommes qu'il a été contraint d'exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à verser à son salarié la somme de 1 600 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et, y ajoutant, de condamner l'employeur à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à réparation d'un manque à gagner du fait de la rétrogradation, à rappel de salaire au titre des minimum conventionnels et à fournir à [P] [E] des fiches de salaire rectifiés, et en ce qu'il a débouté le salarié de sa demande indemnitaire pour exécution déloyale du contrat de travail ;

CONFIRME le jugement dont appel pour le surplus ;

Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu de faire sommation à l'employeur de communiquer de nouvelles pièces ;

CONDAMNE la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à verser à [P] [E] la somme de trois mille cinq cents euros (3 500 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né des manquements de son employeur aux obligations découlant du contrat de travail ;

DEBOUTE [P] [E] de sa demande de rappel de salaire au titre des minima conventionnels, et de sa demande tendant à la délivrance de bulletins de salaire rectifiés à compter de 2011 ;

CONDAMNE la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE à verser à [P] [E] la somme de deux mille euros (2 000 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SAS INGEROP CONSEIL ET INGENIERIE au paiement des dépens de l'instance d'appel.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale a
Numéro d'arrêt : 19/01677
Date de la décision : 21/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-21;19.01677 ?
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