AFFAIRE PRUD'HOMALE : COLLÉGIALE
N° RG 19/03094 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MK6H
[Z]
C/
Société TRANSPORTS LIOTIER
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de SAINT ETIENNE
du 10 Avril 2019
RG : 17/00452
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE A
ARRÊT DU 14 SEPTEMBRE 2022
APPELANT :
[G] [Z]
né le 16 septembre 1967 à [Localité 6]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représenté par Me Isabelle NABUCET, avocat au barreau de LYON et ayant pour avocat plaidant Me Carine URSINI-MAURIN, avocat au barreau de BOURGOIN-JALLIEU
INTIMÉE :
Société TRANSPORTS LIOTIER
52 Route DU 3 JUILLET 1867
[Localité 2]
représentée par Me Margerie FARRE-MALAVAL de la SELARL FARRE, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 17 Mai 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Joëlle DOAT, Présidente
Nathalie ROCCI, Conseiller
Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller
Assistés pendant les débats de Morgane GARCES, Greffière.
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 14 Septembre 2022, par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Joëlle DOAT, Présidente, et par Morgane GARCES, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
*************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :
[G] [Z] a été embauché à compter du 4 janvier 2016 par la SARL TRANSPORTS LIOTIER en qualité de technico-commercial, statut cadre, groupe 9, suivant contrat de travail écrit à durée indéterminée en date du 22 décembre 2015 soumis à la convention collective nationale des transports routiers de marchandises (IDCC 3085).
A l'issue de la visite du 2 juin 2017, le médecin du travail a estimé le salarié temporairement inapte à l'exercice de son emploi, et [G] [Z] a dû bénéficier à compter de cette date d'un arrêt de travail, prolongé par la suite de façon ininterrompue.
Le 25 septembre 2017, [G] [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de diverses demandes indemnitaires et salariales au titre de l'exécution du contrat de travail, ainsi que d'une demande de résiliation judiciaire aux torts de l'employeur produisant les effets d'un licenciement nul ou, subsidiairement, sans cause réelle et sérieuse, et de demandes indemnitaires et salariales afférentes.
Et, à l'issue de la visite du 22 décembre 2017, le médecin du travail a estimé [G] [Z] définitivement inapte à son poste de chargé de développement, en précisant que « l'état de santé ne permet pas de proposer des tâches ou des postes dans l'établissement ; tout maintien en emploi serait gravement préjudiciable à la santé de M. [Z] ».
Par correspondance du 11 janvier 2018, la SARL TRANSPORTS LIOTIER a convoqué [G] [Z] à un entretien préalable à son éventuel licenciement, fixé au 19 janvier suivant, auquel l'intéressé n'a pas assisté.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER a procédé au licenciement de [G] [Z] pour inaptitude et impossibilité de reclassement, par correspondance du 25 janvier 2018.
Par ordonnance du 9 avril 2018, le conseil de prud'hommes de Saint-Étienne statuant en référé a débouté [G] [Z] de l'ensemble des demandes de communication des documents de fin de contrat et de condamnation de la société TRANSPORTS LIOTIER à lui verser les diverses sommes au titre de son obligation de reprise du versement du salaire, ainsi qu'à titre d'indemnité spéciale de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier dont il l'avait saisi le 9 février précédent.
Et, par jugement en date du 28 mars 2019, le conseil de prud'hommes de Saint-Etienne ' section encadrement ' a :
DÉBOUTÉ [G] [Z] de l'intégralité de ses demandes ;
CONDAMNÉ la SARL TRANSPORTS LIOTIER à verser à [G] [Z] la somme de 118,41 euros au titre de la prime objectifs ;
DÉBOUTÉ les parties de toutes leurs autres demandes, plus amples ou contraires ;
DÉBOUTÉ les parties de leurs demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNÉ la SARL TRANSPORTS LIOTIER aux entiers dépens ;
DIT y avoir lieu d'ordonner l'exécution provisoire de la décision.
[G] [Z] a interjeté appel de cette décision le 3 mai 2019.
Par ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 7 février 2022 et auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, [G] [Z] sollicite de la cour de :
INFIRMER le jugement entrepris dans toutes ses dispositions, en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes ;
Et, statuant à nouveau,
- Sur les éléments concourant à la résiliation judiciaire :
PRONONCER la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur ;
CONDAMNER la société TRANSPORTS LIOTIER à lui verser les sommes suivantes :
- 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l'obligation de sécurité de résultat,
- 12 856,10 euros au titre de rappel de salaire (heures supplémentaires) pour la période du 4 janvier 2016 au 2 juin 2017, outre 1 285,61 euros au titre des congés payés afférents,
- 7 541,65 euros à titre de contrepartie financière des repos compensateurs non pris pour la période du 4 janvier 2016 au 2 juin 2017,
- 3 000 euros au titre de dommages et intérêts pour non-respect de la durée maximale journalière,
- 3 000 euros au titre de dommages et intérêts pour non-respect des temps de pause,
- 2 683,23 euros au titre de la prime d'objectif pour la période de janvier 2016 à mai 2017,
- 25 020 euros à titre d'indemnité pour travail dissimulé,
- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour défaut d'information et le retard dans le versement des indemnités journalières (prévoyance),
- 406,16 euros au titre du remboursement des frais professionnels engagés ;
- Sur les effets de la résiliation judiciaire du contrat de travail :
A titre principal,
CONDAMNER la société TRANSPORTS LIOTIER à lui verser la somme de 72 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement nul ;
A titre subsidiaire,
CONDAMNER la société TRANSPORTS LIOTIER à lui verser la somme de 72 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
CONDAMNER la société TRANSPORT LIOTIER à lui verser la somme de 155,01 euros au titre de complément de l'indemnité légale de licenciement ;
CONDAMNER la société TRANSPORT LIOTIER à lui verser la somme de 12 610,30 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre les congés payés afférents ;
CONDAMNER la société TRANSPORTS LIOTIER à lui verser la somme de 36 000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du grave préjudice moral subi ;
En tout état de cause,
FIXER son salaire moyen des 12 derniers mois à 4 170,10 euros bruts ;
DÉBOUTER la société TRANSPORTS LIOTIER de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
CONDAMNER la société TRANSPORTS LIOTIER au paiement de la somme 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens ;
ASSORTIR l'ensemble des sommes des intérêts légaux.
Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 octobre 2019, auxquelles il convient expressément de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la SARL TRANSPORTS LIOTIER sollicite de la cour de :
CONFIRMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Étienne le 10 avril 2019 en ce qu'il a débouté Monsieur [Z] de l'intégralité de ses demandes ;
DÉCLARER recevable et bien fondé son appel incident ;
En conséquence,
RÉFORMER le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Saint-Étienne le 10 avril 2019 en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'abus de droit ;
CONDAMNER Monsieur [Z] à lui payer la somme de 5 000 euros au titre du préjudice subi du fait de l'abus de droit sur le fondement de l'article 1240 (ex 1382) du code de procédure civile ;
LE CONDAMNER à lui payer la somme de 6 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.
La clôture de l'instruction de l'affaire a été prononcée le 24 mars 2022, et l'affaire fixée pour être plaidée à l'audience du 17 mai suivant.
SUR CE :
- Sur le harcèlement moral et la discrimination :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, qu'il a été victime d'agissements de harcèlement moral à caractère raciste de la part du dirigeant de l'entreprise au cours de sa période d'emploi, qui sont à l'origine de son arrêt de travail et, in fine, de son inaptitude, et caractérisés par :
- des propos racistes, blessants et rabaissants de son employeur ;
- des messages et appels pressants durant la période d'arrêt de travail dont il a dû bénéficier.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- Monsieur [Z] ne démontre pas l'existence de faits permettant de constituer un harcèlement et une discrimination, alors qu'il entretenait des relations amicales avec le dirigeant de la société ;
- à l'inverse, les différents salariés qui ont eu l'occasion de travailler avec lui se sont plaints de ses problèmes organisationnels, allant même jusqu'à indiquer qu'ils préféraient ne pas faire appel à lui dans le travail ;
- aucune pièce médicale versée aux débats par Monsieur [Z] ne vient établir un lien entre son état de santé et ses conditions de travail, alors que la caisse primaire d'assurance maladie, suivant l'avis négatif du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, a refusé la prise en charge de son arrêt de travail au titre de la législation sur les risques professionnels.
* * * * *
L'article L. 1152-1 du code du travail rappelle qu'indépendamment de l'intention de leur auteur, aucun salarié ne doit subir des agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail, ou susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Il résulte de l'article L. 1154-1 du même code que pour se prononcer sur l'existence d'un harcèlement moral, il appartient au juge d'examiner l'ensemble des éléments de fait présentés par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d'apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de laisser supposer l'existence d'un harcèlement. Dans l'affirmative, il revient au juge d'apprécier si l'employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Il convient de relever en l'espèce, en premier lieu, qu'au soutien du grief qu'il tire des propos racistes et rabaissants dont il a fait l'objet au cours de sa période d'emploi, [G] [Z] verse aux débats :
- les attestations respectivement établies les 17 juin, 20 et 29 juillet 2017 par [K] [S], [I] [M] et [V] [P], collègues de travail et client de l'entreprise, dont les termes elliptiques, vagues et non circonstanciés ne permettent pas d'établir l'existence de faits précis, susceptibles d'étayer ou d'objectiver les allégations de l'appelant ;
- une attestation établie le 3 juillet 2017 par [O] [C], client de la société, aux termes de laquelle, lors de leur rencontre le 12 janvier 2017, le gérant de la SARL TRANSPORTS LIOTIER aurait désigné Monsieur [Z] par les termes « le cousin arabe, le bicot » et se serait montré « très blessant en expliquant à Monsieur [Z] qu'il devait savoir aussi gérer les dossiers litiges ».
Il convient de relever pour autant que [O] [C] précise dans son attestation précitée que les propos racistes ainsi rapportés avaient été tenus en l'absence de [G] [Z], sans indiquer les circonstances ' chronologiques notamment ' dans lesquelles ils auraient été rapportés à l'intéressé.
Il apparaît en second lieu, s'agissant du grief tiré par le salarié des messages téléphoniques pressants reçus de l'employeur pendant l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier à compter du 2 juin 2017, que [G] [Z] verse aux débats l'ampliation de plusieurs messages « SMS » reçus les 6 et 7 juin 2017 du représentant de la SARL TRANSPORTS LIOTIER par lesquels celui-ci exprime, avec une impatience croissante en l'absence de réponse de leur destinataire, le souhait de pouvoir reprendre rapidement possession de l'ordinateur, du téléphone et du véhicule de service mis à la disposition de l'intéressé, dans l'objectif exprimé de pouvoir s'assurer de la bonne réception et du bon traitement des demandes des clients pendant son absence.
Et, par correspondance du 13 juin 2017, la SARL TRANSPORTS LIOTIER a sollicité de [G] [Z] de procéder à la restitution du matériel mis à sa disposition « dans les plus brefs délais ».
Il convient de relever parallèlement que [G] [Z] a dû bénéficier d'un arrêt de travail à compter du 2 juin 2017 à raison d'un « syndrome anxieux (') avec extrasystoles », renouvelé à compter du 27 juin 2017 à raison de « dépression + Sd anxieux ». Et par certificat médical du 28 novembre 2017, le docteur [J] expose que : « (') Le syndrome « anxio-dépression » marqué de Monsieur [Z] [G] (') est situationnel, réactionnel et d'épuisement. Actuellement l'évolution de la symptomatologie est incompatible avec une reprise professionnelle. L'environnement et les inter-personnalités ne peuvent que nuire à notre patient sur le plan de son équilibre psychique ».
Or, les seules pièces ainsi versées aux débats ne permettent pas de considérer que, ainsi que le soutient [G] [Z], le harcèlement moral qu'il dénonce serait à l'origine de l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier à compter du 2 juin 2017 ni, plus généralement, que la dégradation de son état de santé aurait, même partiellement, été provoquée par ses conditions de travail.
Il apparaît ainsi que les seuls faits dont [G] [Z] établit la matérialité, par leur nature disparate et les circonstances ci-dessus exposées de leurs survenues, sont insuffisants, même pris dans leur ensemble, à laisser supposer l'existence du harcèlement moral qu'il dénonce, ou même de la discrimination qu'il évoque.
- Sur l'absence de visite médicale d'embauche :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que son employeur a manqué à son obligation de sécurité en ce que :
- ce n'est que 17 mois après son embauche qu'il a pu bénéficier d'une visite auprès du médecin du travail, au cours de laquelle celui-ci l'a d'ailleurs estimé inapte temporairement à son poste ;
- nonobstant la décision de la caisse primaire d'assurance maladie de ne pas prendre en charge son arrêt de travail au titre de la législation sur les risques professionnels, la dégradation de son état de santé et l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier sont en lien avec ses conditions de travail.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- Monsieur [Z] ne précise aucunement dans quelles circonstances il aurait été mis en danger et n'apporte aucune preuve au soutien de ses prétentions.
- en tout état de cause, l'absence de visite médicale à l'embauche ne constitue pas un manquement de l'employeur suffisamment grave pour justifier une résiliation judiciaire du contrat de travail et, dès lors que cette visite a bien eu lieu, un simple retard ne cause pas nécessairement de préjudice au salarié.
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Il résulte des dispositions conjuguées des articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que l'employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale de ses salariés.
Il convient de rappeler à cet égard que l'article R. 4624-10 du code du travail, dans sa rédaction alors applicable, dispose que le salarié doit bénéficier d'un examen médical par le médecin du travail avant l'embauche, ou au plus tard avant l'expiration de la période d'essai.
Il apparaît pourtant, à l'examen des pièces produites, que [G] [Z] n'a fait l'objet d'aucune examen par le médecin du travail à la période de son embauche au sein de la SARL TRANSPORTS LIOTIER le 4 janvier 2016, ni même, par la suite, au cours de sa période d'emploi, préalablement à la visite du 2 juin 2017 à l'issue de laquelle le médecin du travail a été amené à considérer que le salarié « ne (pouvait) pas poursuivre son poste aujourd'hui » et à orienter celui-ci vers son médecin traitant aux fins de prescription d'un arrêt de travail.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER ne soutient et, a fortiori, n'établit pas qu'elle aurait sollicité le service de santé au travail afin de programmer la visite préalable à l'embauche de [G] [Z].
Ainsi qu'il a pu l'être constaté précédemment, l'examen des pièces versées aux débats ne permet pas de considérer que les conditions de travail de [G] [Z] seraient en tout ou partie à l'origine de la dégradation de son état de santé ni, a fortiori, de l'inaptitude définitive de l'intéressé à occuper son emploi, constatée par le médecin du travail le 22 décembre 2017.
Mais, si [G] [Z] n'explicite pas dans les conclusions dont il saisit la cour la nature ni l'ampleur du préjudice dont il sollicite réparation, la finalité dévolue à la visite médicale prévue par les dispositions précitées, d'une part, les difficultés de santé dont justifie le salarié au cours de sa période d'emploi, d'autre part, et la durée du manquement imputable à l'employeur en matière de prévention des risques professionnels, enfin, permettent d'évaluer le préjudice subi par l'appelant à raison de l'absence d'organisation par l'employeur de la visite médicale d'embauche à une somme ne pouvant être inférieure à 1 500 euros.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER lui en devra réparation, par infirmation du jugement déféré.
- Sur la modification du contrat de travail :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que son employeur a modifié unilatéralement un élément essentiel du contrat de travail, en ce qu'il lui avait octroyé à compter de son embauche un avantage en nature retraite (article 82) avant de le lui retirer unilatéralement, et sans information préalable, en mars 2017.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- le cabinet comptable LEXTENSO qui gère les paies pour l'entreprise a commis une erreur matérielle sur les bulletins de salaire de [G] [Z] en procédant à des retenues sur salaire sous la mention « 32003 Avantage Nature retraite Art 82 » sans que le contrat de travail de Monsieur [Z] ne porte aucune mention de cet avantage en nature retraite ;
- lorsque l'entreprise s'est rendu compte de cette erreur, au mois de mars 2017, elle a immédiatement régularisé la situation et a remboursé à Monsieur [Z] les retenues indues sur 14 mois, sans que cette régularisation ne caractérise une modification unilatérale du contrat de travail.
* * * * *
Il ressort des dispositions de l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du même code aux termes de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
L'article L. 1222-1 du code du travail rappelle à cet égard que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi par les parties.
Et il apparaît en l'espèce, que les bulletins de paie délivrés à [G] [Z] par la SARL TRANSPORTS LIOTIER portent mention chaque mois, pour la période s'étendant de l'embauche de l'intéressé en janvier 2016 au mois de février 2017 inclus, d'un « Avantage Nature Retraite art.82 » à hauteur de 102,45 euros, et de la retenue concomitante au titre d'un « Ret Avantage Nature Retraite » d'un montant strictement identique.
L'examen du bulletin de paie délivré à [G] [Z] pour le mois de mars 2017 met en évidence que la SARL TRANSPORTS LIOTIER a procédé à cette date à une régularisation d'un montant global de 1 434,30 euros correspondant aux précomptes opérés au cours des quatorze premiers mois de la relation de travail au titre de l'« Avantage Nature Retraite Art82 ».
Il convient de rappeler à cet égard que la mention, sur le bulletin de salaire remis au salarié en application des articles L. 3243-2 et R. 3243-1 du code du travail, de la nature et du montant des sommes versées, n'a pas pour effet de contractualiser les avantages qui y sont décrits.
Et, tandis que [G] [Z] ne pouvait se prévaloir d'aucun avantage en nature au titre des stipulations contractuelles ou conventionnelles applicables à la relation de travail, l'intéressé ne se prévaut d'aucun usage ni engagement unilatéral de son employeur en ce sens.
Le grief formé par [G] [Z] à l'encontre de son employeur d'une modification unilatérale de son contrat de travail ne peut donc être considéré comme établi.
- Sur les heures supplémentaires :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande de rappel de salaires au titre des heures supplémentaires, et de ses demandes indemnitaires au titre des repos compensateurs non pris et du travail dissimulé, que :
- Pour les périodes du 4 janvier au 31 décembre 2016 et du 1er janvier au 2 juin 2017, il a accompli 400,75 et 249,05 heures supplémentaires qui ne lui ont pas été rémunérées par son employeur ;
- Il aurait donc dû bénéficier, en application de la convention collective, d'un repos compensateur de 270,75 heures pour l'année 2016 et de 119 heures pour l'année 2017 puisqu'il a accompli des heures supplémentaires au-delà du contingent de 130 heures ;
- la société ayant parfaitement connaissance de ses horaires effectifs de travail, c'est volontairement que l'employeur a procédé, dans la rémunération et la déclaration de son temps de travail, à la dissimulation d'une partie des heures de travail effectuées.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- les pièces produites par le salarié ne permettent pas de démontrer la réalité des heures supplémentaires que Monsieur [Z] prétend avoir accomplies ;
- les heures effectuées par Monsieur [Z] n'ont jamais été imposées par son employeur, alors que le salarié jouissait d'un très grande autonomie dans l'organisation de son temps de travail et la prise de ses congés ;
- Monsieur [Z] n'a jamais saisi son employeur d'une quelconque demande au titre d'heures supplémentaires de travail, et ne lui a jamais transmis les tableaux dont il se prévaut désormais à l'occasion de la procédure prud'homale.
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Il doit être rappelé qu'aux termes de l'article L. 3171-1, alinéa 1er, du code du travail, l'employeur est tenu d'afficher les heures auxquelles commence et finit le travail ainsi que les heures et la durée des repos.
Ainsi, selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient à l'employeur de fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par son salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.
Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme alors sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.
Il convient de relever en l'espèce, à cet égard, que le contrat de travail conclu le 22 décembre 2015 entre [G] [Z] et la SARL TRANSPORTS LIOTIER, stipulait notamment que :
- « Monsieur [G] [Z] effectuera 35 heures par semaine, soit 151,67 heures mensuelles. Monsieur [G] [Z] demeurera soumis à l'horaire collectif applicable dans l'entreprise » (« article 3 ' Durée et horaires de travail ») ;
- « En contrepartie de son travail, Monsieur [G] [Z] percevra une rémunération mensuelle brute fixée à 2 935,1 euros pour une durée de travail de 151,67 heures mensuelles » (« Article 4 ' Rémunération ; Rémunération fixe »).
[G] [Z] soutient avoir effectué de façon récurrente des heures supplémentaires de travail qui ne lui ont pas été rémunérées par son employeur, et produit au soutien de ses allégations un tableau récapitulant les heures de travail prétendument effectuées au cours de sa période d'emploi au sein de la SARL TRANSPORTS LIOTIER, détaillant notamment les heures de début et de fin du travail pour chaque journée travaillée et la durée de la pause méridienne dont il a bénéficié, ainsi que les copies de ses agendas professionnels pour la période en cause, supportant de façon manuscrite les horaires de début et de fin de travail ainsi que, pour certaines journées, des mentions relatives à ses activités professionnelles voire personnelles.
Mais, alors que les parties au contrat de travail avaient expressément entendu soumettre [G] [Z] à l'horaire collectif de travail, le salarié ne soutient pas que l'accomplissement des heures supplémentaires prétendument travaillées aurait été autorisé, même tacitement, par son employeur. Et les pièces versées aux débats ne permettent certainement pas de considérer que les heures de travail prétendument accomplies auraient été rendues nécessaires à la réalisation des tâches qui lui avaient été confiées par la SARL TRANSPORTS LIOTIER.
Le jugement déféré doit par conséquent être confirmé en ce qu'il a débouté [G] [Z] de sa demande de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires et de ses demandes afférentes au titre de la contrepartie des repos compensateurs et du travail dissimulé.
- Sur la durée maximale journalière :
[G] [Z] soutient, à l'appui de sa demande indemnitaire, que la durée maximale journalière du travail n'a pas été respectée par son employeur.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER n'a fait connaître aucune observation spécifique en réponse de ce chef.
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Il résulte des dispositions des articles L. 3121-18 et suivants que des heures supplémentaires ne peuvent être effectuées qu'à la condition de ne pas porter la durée quotidienne de travail effectif au-delà de 10 heures.
En cas de litige sur les seuils et plafonds prévus en matière de temps de travail, les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail ne trouvent pas à s'appliquer de sorte que la charge de la preuve pèse exclusivement à l'employeur.
Il ressort pour autant des énonciations qui précèdent que [G] [Z] était soumis par son employeur à l'horaire collectif de travail, à hauteur de 35 heures hebdomadaires, sans que les pièces versées aux débats ne permettent de considérer que des heures supplémentaires de travail auraient été sollicitées par l'employeur ou rendues nécessaires par la réalisation des tâches qui lui avaient été confiées par celui-ci.
Il peut être relevé parallèlement que [G] [Z] s'abstient de préciser, dans les écritures et pièces dont il saisit la cour, le préjudice dont il sollicite réparation à raison des manquements de la SARL TRANSPORTS LIOTIER qu'il invoque en matière de durée du travail, ni d'objectiver la réalité comme l'ampleur de ce préjudice.
Le jugement déféré, qui l'a débouté de sa demande indemnitaire, doit donc être confirmé.
- Sur les temps de pause :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que « A de nombreuses reprises, (il) a travaillé de longues heures sans pouvoir bénéficier d'une pause ».
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait valoir, en réponse, que [G] [Z] disposait de l'autonomie nécessaire dans l'exercice de ses fonctions, pour organiser à sa convenance les temps de repos dont il pouvait bénéficier.
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L'article L. 3121-33 du code du travail, pris pour l'application de l'article 4 de la directive 93/104/CE du Conseil du 23 novembre 1993 concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail, recodifiée par la directive 2003/88/CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003, dispose que le salarié doit bénéficier d'un temps de pause d'une durée minimale de 20 minutes dès que le temps de travail quotidien atteint 6 heures. Or, les dispositions de l'article L. 3171-4 du code du travail relatives à la répartition de la charge de la preuve des heures de travail effectuées entre l'employeur et le salarié ne sont pas applicables à la preuve du respect des seuils et plafonds, prévus tant par le droit de l'Union européenne que par le droit interne, qui incombe exclusivement à l'employeur.
Il ressort pour autant des énonciations qui précèdent que [G] [Z] était soumis par son employeur à l'horaire collectif de travail, organisé par demi-journées ne dépassant pas six heures consécutives de travail effectif, sans que les pièces versées aux débats ne permettent de considérer que des heures supplémentaires de travail auraient été sollicitées par l'employeur ou rendues nécessaires par la réalisation des tâches qui lui avaient été confiées par celui-ci.
Et, nonobstant les dispositions des articles 6 et 954 du code de procédure civile qui mettent à la charge des parties l'obligation d'invoquer les moyens de fait sur lesquels elles entendent fonder leurs prétentions, [G] [Z] s'abstient de fonder ses allégations sur des éléments précis, permettant de déterminer la réalité comme l'ampleur du manquement dont il se prévaut en matière de respect des temps de pause.
L'appelant ne précise pas plus la nature comme les circonstances du préjudice dont il sollicite réparation de ce chef.
Le jugement déféré, qui l'a débouté de sa demande indemnitaire, doit donc être confirmé.
- Sur la rémunération variable :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande de rappel de salaire, que :
- nonobstant les stipulations de l'article 4 du contrat de travail selon lesquelles il devait pouvoir prétendre à une rémunération variable « correspondant à 3% de la marge générée par le chiffre d'affaires hors taxe encaissé à partir de 5200euros de chiffre d'affaires réalisés (seuil de déclenchement de la rémunération variable) personnellement par Monsieur [G] [Z] », il n'a bénéficié d'aucune rémunération variable au cours de sa période d'emploi ;
- le document comptable finalement transmis par l'employeur est incomplet en ce que le chiffre d'affaires par client n'apparaît pas et en ce qu'il est impossible de savoir si l'impayé correspond à la vente qui a généré la marge mentionnée ou s'il s'agit d'un impayé global du compte client ;
- la société ne lui a pas permis de saisir toutes ses ventes en raison d'une absence de paramétrage du logiciel et d'un défaut de formation à l'utilisation du logiciel une fois le paramétrage opéré.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- les extraits produits par Monsieur [Z] ne sont pas nominatifs et ne permettent pas d'indiquer si les ventes en question ont été effectuées par l'intéressé, ni de s'assurer de ce qu'elles ont donné lieu à encaissement du prix de vente, alors que son contrat de travail prévoit que, pour bénéficier de la prime d'objectif, il doit mener une opération à bonne fin, sans l'aide d'un autre collaborateur, et pour cela saisir les données de la vente dans le logiciel que ces opérations ont été menées à bonne fin et donc ont fait l'objet d'un encaissement, Monsieur [Z] reconnaît expressément dans ses écritures qu'il n'a jamais saisi aucune vente entre les mois de janvier et septembre 2016 ;
- le tableau établi à partir du mois de septembre 2016 par le cabinet comptable et commissaire aux comptes de la société qui fait état, mois par mois, de l'ensemble des marges sur opérations qui ont été diligentées par [G] [Z] ainsi que des commandes qui ont fait l'objet d'impayés, met en évidence un droit à prime d'objectif à hauteur de la somme totale de 118,41 euros au titre des mois de novembre et décembre 2016, dont elle est débitrice à l'égard du salarié.
* * * * *
Il ressort des dispositions de l'article 1134 du code civil, devenu l'article 1103 du même code aux termes de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.
L'article L. 1222-1 du code du travail rappelle à cet égard que le contrat de travail doit être exécuté de bonne foi.
Les dispositions de l'article 4 du contrat de travail conclu le 4 janvier 2016 entre [G] [Z] et la SARL TRANSPORTS LIOTIER prévoient en l'espèce, s'agissant de la détermination et du calcul de la partie variable de la rémunération due au salarié, que :
« Rémunération fixe
En contrepartie de son travail, Monsieur [G] [Z] percevra une rémunération mensuelle brute fixée à 2 935,1 euros pour une durée de travail de 151,67 heures mensuelles.
Rémunération variable
Outre cette rémunération, Monsieur [G] [Z] percevra une rémunération variable chaque mois, correspondant à 3 % de la marge générée sur le chiffre d'affaires hors taxe encaissé à partir de 5 200 euros de chiffres d'affaires réalisé (seuil de déclenchement de la rémunération variable) personnellement par Monsieur [G] [Z].
Seules les opérations menées à bonne fin sans l'intervention effective d'un autre collaborateur (à l'entrée du dossier/du contrat, au cours de son traitement ou en signature) pourront faire l'objet d'une commission.
Seules les « ventes » respectant les dispositions légales et conformes à toutes conditions générales de vente actuelles ou à venir, telles que définies par la direction, seront prises en compte ».
Il convient de relever à titre liminaire, à cet égard, que [G] [Z] expose expressément, dans les écritures dont il saisit la cour, qu'il n'a pu mener seul les opérations commerciales auxquelles il a participé au cours des premiers mois de la relation de travail.
Mais [G] [Z], qui sollicite un rappel de commissions relatif aux ventes réalisées pour le compte de la SARL TRANSPORTS LIOTIER à compter de son embauche, verse aux débats une « liste des envois » reprenant l'ensemble des opérations qu'il expose avoir effectuées pour le compte de son employeur au cours de la période de juin à septembre 2016 avec, pour chacune d'elle, l'indication des donneurs d'ordre, expéditeur, destinataire, date de commande, dates de chargement et de livraison, chiffre d'affaires et marges générés.
Pourtant, la SARL TRANSPORTS LIOTIER, qui détenait seule les éléments relatifs à chacune des transactions ainsi recensées, s'abstient de produire les pièces susceptibles d'établir que, ainsi qu'elle le soutient, ces ventes n'auraient pas été effectuées par [G] [Z], ou n'auraient pas été menées à bonne fin.
Il apparaît ainsi que [G] [Z] pouvait valablement prétendre à un commissionnement au cours des mois de juin à septembre 2016 à hauteur des sommes de 155,31 euros, 271,90 euros, 84,19 euros et 242,59 euros, soit la somme totale de 753,99 euros.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER verse parallèlement aux débats le récapitulatif, établi par son cabinet d'expertise-comptable, des marges générées par les « opérations qui ont été diligentées seulement par Monsieur [Z] ainsi que des commandes qui ont fait l'objet d'impayés et donc n'ont pas pu générer de marge puisqu'elles n'ont pas été menées à bonne fin » pour la période de septembre 2016 à juin 2017.
Mais, dès lors que, lorsque le calcul de la rémunération du salarié dépend d'éléments détenus par l'employeur celui-ci est tenu de les produire en vue d'une discussion contradictoire, la SARL TRANSPORTS LIOTIER ne pouvait décider discrétionnairement du montant des paiements qu'elle était tenue d'effectuer au titre de la rémunération variable de son salarié sans faire connaître pour chaque affaire particulière les causes véritables du défaut d'aboutissement et de paiement des ventes qu'il avait générées, qu'elle était la seule à connaître.
Il ressort ainsi de l'examen des éléments comptables versés par la SARL TRANSPORTS LIOTIER qu'au regard du chiffre d'affaires mensuel qu'il avait généré, et qui excédait le seuil de déclenchement contractuellement convenu, [G] [Z] pouvait valablement prétendre à un commissionnement au cours des mois de novembre et décembre 2016, et mars, avril et mai 2017, à hauteur des sommes de 260,07 euros, 180,36 euros, 201,99 euros, 198,30 euros et 192,15 euros, soit la somme totale de 1 032,87 euros.
Il convient par conséquent de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL TRANSPORTS LIOTIER à rappel de rémunération variable, sauf à porter la somme due à [G] [Z] de ce chef à la somme de 1 786,86 euros bruts.
- Sur le régime de prévoyance :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que :
- il n'a été destinataire que fin septembre 2017 de la part de son employeur, alors qu'il se trouvait déjà en arrêt de travail depuis plusieurs mois, de la notice d'information relative au régime de prévoyance pour lequel il cotisait ;
- l'employeur n'a pas procédé aux démarches lui permettant de percevoir les indemnités de prévoyance durant son arrêt de travail, qui ne lui ont finalement été versées que le 25 juin 2019.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- la notice d'information relative au régime de prévoyance a été communiquée à [G] [Z] lors de son embauche, et de nouveau par courrier du 6 septembre 2017, et l'intéressé a effectivement perçu les prestations auxquelles il pouvait prétendre ;
- elle a toujours effectué avec diligence les démarches auprès de l'organisme gestionnaire, notamment lorsque des difficultés de versement lui ont été signalées par le salarié et son conseil.
* * * * *
Il convient de relever à titre liminaire que les allégations de [G] [Z] ' au demeurant très imprécises ' selon lesquelles « des erreurs volontaires de l'employeur » l'auraient empêché de « percevoir (des) indemnités journalières de sécurité sociale pour un montant (lui étant) dû », pas plus que l'indemnisation de la prévoyance à laquelle il pouvait prétendre, ne sont fondées ni en droit ni en fait, et ne sont étayées par aucune pièce probante.
Mais il ressort du contrat de travail conclu le 22 décembre 2015 entre [G] [Z] et la SARL TRANSPORTS LIOTIER (article 16 ' avantages sociaux) que :
« Monsieur [G] [Z] sera affilié dès son entrée dans la société, à l'ensemble des régimes sociaux dont bénéficient les salariés de la société.
- Caisse de retraite complémentaire : [Adresse 7] Picquart, [Localité 5]
- Caisse de prévoyance : VIVENS, [Adresse 1], [Localité 9]
- Régime de mutuelle (sous réserve de demande dispense).
Il déclare accepter le bénéfice des prestations de ces régimes et ne pourra se soustraire au paiement des cotisations mises à sa charge par ces régimes, telles que ces cotisations existent à la date de signature du présent contrat ou telles qu'elles sont susceptibles d'évoluer dans le futur en cas de modification des régimes en cours ».
Et l'article L. 932-6 du code de la sécurité sociale impose à l'adhérent, s'agissant des régimes de prévoyance collective à adhésion obligatoire, de remettre à chaque participant, à compter de son inscription puis à chaque modification de ses droits et obligations, la notice d'information établie par l'institution de prévoyance et qui définit les garanties souscrites par contrat ou par adhésion à un règlement et leurs modalités d'entrée en vigueur, ainsi que les formalités à accomplir en cas de réalisation du risque, le contenu des clauses édictant des nullités, des déchéances ou des exclusions ou limitations de garantie ainsi que des délais de prescription.
Il résulte ainsi des dispositions précitées que l'employeur, souscripteur du contrat de prévoyance, a le devoir de faire connaître de façon précise à son salarié, adhérent à ce contrat, les droits et obligations en ressortant. Et, débiteur envers celui-ci d'un devoir d'information et de conseil, il est responsable des conséquences qui s'attachent à une information incomplète ayant induit l'assuré en erreur sur la nature, l'étendue ou le point de départ de ses droits.
Or, il apparaît en premier lieu que la SARL TRANSPORTS LIOTIER ne justifie par aucune pièce probante que, préalablement à sa correspondance au conseil de [G] [Z] le 6 septembre 2017, elle se serait valablement libérée envers son salarié de l'obligation d'information mise à sa charge par les dispositions ci-dessus rappelées.
Et il apparaît en second lieu que :
- alors qu'elle n'avait pas informé valablement son salarié des modalités de mise en 'uvre de la garantie prévoyance à laquelle il avait adhéré, la SARL TRANSPORTS LIOTIER ne justifie pas des démarches qu'elle aurait été susceptible d'accomplir auprès de l'organisme gestionnaire pour le compte de [G] [Z], ensuite de l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier à compter du 2 juin 2017 ;
- faisant suite à la réclamation dont l'avait directement saisi [G] [Z], l'organisme gestionnaire du régime de prévoyance a faussement fait savoir à l'intéressé le 29 septembre 2017 qu'il n'était « pas affilié sur le contrat de prévoyance numéro 301755 de la société Transports LIOTIER », sans pour autant que le salarié n'estime devoir informer son employeur des difficultés ainsi rencontrées dans la perception des prestations de prévoyance auxquelles il aurait dû pouvoir prétendre ;
- par transmission électronique du 7 mai 2019, transmise par correspondance du même jour à l'employeur au soutien d'une demande de régularisation, l'organisme gestionnaire ASCORE/EXCELLIANCE a fait savoir à [G] [Z] « concernant (son) dossier d'incapacité de travail de 03.06.2017 » qu'il restait « en attente des éléments de (son) ancien employeur » ;
- c'est finalement par correspondance du 25 juin 2019 que la SARL TRANSPORTS LIOTIER a fait parvenir à [G] [Z] la somme de 7 719,82 euros qui lui avait été versée le 13 juin précédent par l'organisme gestionnaire ASCORE/AXELLIANCE au titre des prestations de prévoyance auxquelles pouvait prétendre son salarié, pour la période de l'arrêt de travail dont il avait dû bénéficier à compter du 2 juin 2017 et jusqu'à la rupture du contrat de travail survenue le 25 janvier 2018.
Il convient ainsi de constater que, nonobstant les éventuelles fautes et négligences susceptibles d'être imputées à l'organisme gestionnaire, les manquements imputables à la SARL TRANSPORTS LIOTIER, ci-dessus caractérisées, dans l'information de son salarié puis dans la mise en 'uvre avec diligence des démarches permettant à celui-ci de percevoir en temps utile les prestations de prévoyance au titre de la garantie collective souscrite, ont généré pour [G] [Z] un préjudice pouvant être évalué, au regard notamment du retard qu'il a subi dans le versement de ces prestations et du préjudice financier dont il justifie par la production de relevés de frais bancaires, à la somme de 1 500 euros, dont elle lui devra réparation.
- Sur les frais professionnels :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande de rappel de frais professionnels, qu'il a exposé des frais de carburant et de déplacement en avion pour les besoins de son activité professionnelle, qui ne lui ont pas été remboursés par son employeur.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que :
- Monsieur [Z] ne verse aux débats aucun justificatif permettant de fonder ses demandes ;
- en tout état de cause, le salarié ne démontre pas que les dépenses qu'il aurait supportées devraient être considérées comme des frais professionnels.
* * * * *
Il résulte des dispositions combinées des articles 1135 du code civil ' devenu l'article 1194 du même code ' et L. 1221-1 du code du travail que les frais qu'un salarié expose pour les besoins de son activité professionnelle et dans l'intérêt de l'employeur, doivent être supportés par ce dernier.
C'est toutefois par une juste appréciation de fait et de droit des circonstances de la cause que les premiers juges, constatant que les seules pièces versées aux débats ne permettaient pas d'établir que les sommes versées par [G] [Z] au titre de la réservation de deux billets d'avion aller-retour entre [Localité 9] et L[Localité 8]les 26 et 28 juin 2016, d'une part, et du paiement de carburant entre le 11 et le 31 mai 2017, d'autre part, auraient été exposés pour les besoins de son activité professionnelle, ont débouté l'intéressé de sa demande de rappel de frais professionnels.
- Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de son employeur, produisant les effets d'un licenciement nul en ce qu'elle intervient dans un contexte de harcèlement moral et de propos discriminatoires ou, à tout le moins, d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, que :
- il a été victime de harcèlement moral, notamment à caractère raciste ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER a manqué à son obligation de sécurité de résultat et à son obligation d'établir le document d'évaluation des risques (AUCUN DEVELOPPEMENT SUR CE DERNIER POINT) ;
- l'employeur a modifié unilatéralement son contrat de travail ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER n'a pas respecté son droit au repos et ne lui a rémunéré aucune heure supplémentaire ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER a volontairement dissimulé des heures de travail ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER n'a pas effectué les démarches nécessaires pour une prise en charge rapide par l'organisme de prévoyance ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER n'a pas transmis d'attestation de salaire conforme ;
- la société TRANSPORTS LIOTIER ne lui a pas remboursé certains frais professionnels.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que les manquements de l'employeur invoqués par le salarié ne sont pas établis, et ne sont ni de nature ni d'une gravité telle qu'ils auraient empêché la poursuite de la relation de travail.
* * * * *
Il résulte des dispositions des articles 1224 et suivants du code civil que le juge peut, à la demande du salarié, prononcer la résolution du contrat de travail en cas d'inexécution suffisamment grave par l'employeur de tout ou partie des obligations en découlant.
Tout salarié est ainsi recevable à demander la résiliation de son contrat de travail devant le juge prud'homal s'il justifie de manquements de l'employeur aux obligations nées de ce contrat, si leur gravité rend impossible la poursuite du contrat de travail.
Or, il convient de relever en premier lieu que, tandis que [G] [Z] a dû bénéficier d'un arrêt de travail à compter du 2 juin 2017, ce n'est que le 29 juin suivant que la SARL TRANSPORTS LIOTIER a établi l'attestation de salaires prévue par l'article R. 323-10 du code de la sécurité sociale, et dont la transmission à la caisse primaire d'assurance maladie permet la détermination des indemnités journalières devant être versées au salarié en arrêt de travail.
Et il doit d'ailleurs être constaté que, suite à la réclamation dont l'avait saisie [G] [Z], la SARL TRANSPORTS LIOTIER a dû faire parvenir à son salarié une attestation de salaires rectifiée par correspondance du 17 juillet 2017.
Pourtant, la SARL TRANSPORTS LIOTIER, qui avait été informé par le médecin du travail de l'inaptitude temporaire de son salarié et avait sollicité à plusieurs reprises de son salarié la restitution des outils professionnels mis à sa disposition afin de permettre la bonne continuation de son activité pendant le cours de son absence pour maladie, ne peut sérieusement se prévaloir d'un retard dans la transmission par l'intéressé de son arrêt de travail pour s'exonérer de sa propre responsabilité.
Et, si l'appelant ne justifie d'aucun préjudice financier à raison des manquements de l'employeur qu'il dénonce, le retard de la SARL TRANSPORTS LIOTIER dans l'établissement de l'attestation de salaires prévue par l'article R. 323-10, a retardé de plusieurs semaines le versement à [G] [Z], par la caisse primaire d'assurance maladie, des indemnités journalières auxquelles il pouvait prétendre durant l'arrêt de travail dont il a dû bénéficier.
Il ressort en outre des énonciations qui précèdent que la SARL TRANSPORTS LIOTIER ne justifie pas de l'information de son salarié quant à l'étendue de ses droits et obligations en matière de prévoyance, ni de l'accomplissement diligent des démarches qui auraient dû permettre à celui-ci de percevoir en temps utile les prestations auxquelles il légitimement prétendre à ce titre
Il convient de relever, enfin, que la SARL TRANSPORTS LIOTIER a longtemps été défaillante, suite à l'embauche de [G] [Z], dans l'organisation d'une visite de son salarié auprès du médecin du travail.
Pour autant, les allégations de [G] [Z] selon lesquelles la SARL TRANSPORTS LIOTIER aurait manqué à son obligation de sécurité en ne procédant pas à l'établissement d'un document d'évaluation des risques professionnelles, dont il ne tire d'ailleurs aucune conséquence, sont contredites par les pièces que verse aux débats l'employeur.
Et il ressort parallèlement des constatations ci-dessus exposées qu'il ne peut être considéré que [G] [Z] aurait, ainsi qu'il le soutient, été victime de harcèlement moral ou de discrimination au cours de la relation de travail, ni que son employeur aurait modifié unilatéralement son contrat de travail, aurait omis de rémunéré ou dissimulé tout ou partie des heures de travail réellement effectuées, méconnu le droit au repos de son salarié, ou encore omis de prendre en charge tout ou partie des frais professionnels exposés par celui-ci.
Il convient de relever, enfin, que l'examen des pièces versées aux débats ne permet pas de considérer que l'arrêt de travail dont a dû bénéficier [G] [Z] à compter du 2 juin 2017 et, in fine, l'inaptitude définitive à occuper son emploi aurait été causée, même partiellement, par ses conditions de travail.
Il apparaît ainsi, au terme de l'ensemble des énonciations qui précèdent, que les manquements de la SARL TRANSPORTS LIOTIER à ses obligations découlant du contrat de travail qu'elle avait conclu avec [G] [Z], telles qu'établies par celui-ci, n'étaient pas d'une gravité telle qu'ils auraient empêché la poursuite de la relation de travail.
Le jugement déféré, qui a débouté [G] [Z] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et de ses demandes indemnitaires et salariales afférentes à la rupture de la relation de travail, doit donc être confirmé.
- Sur le préjudice moral :
[G] [Z] soutient en substance, à l'appui de sa demande indemnitaire, que l'employeur lui doit réparation du préjudice moral né de la dépression avec syndrome post traumatique dont il souffre de son fait, et du harcèlement moral et des propos racistes dont il a été victime.
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, en réponse, que Monsieur [Z] ne justifie d'aucun préjudice au soutien de sa demande.
* * * * *
Il ressort des énonciations qui précèdent qu'il ne peut être considéré que, si [G] [Z] a dû bénéficier d'un arrêt de travail à compter du 2 juin 2017 à raison d'un « syndrome anxieux (') avec extrasystoles », renouvelé à compter du 27 juin 2017 à raison de « dépression + Sd anxieux », la dégradation de l'état de santé de l'intéressé aurait, même partiellement, été provoquée par ses conditions de travail ou par un manquement de l'employeur à ses obligations découlant du contrat de travail.
Et il ne peut pas plus être considéré que, ainsi qu'il le soutient, [G] [Z] aurait été victime d'agissements de harcèlement moral ou de discrimination au cours de sa période d'emploi.
Enfin, les termes de l'attestation de [O] [C] ne permettent pas de déterminer les circonstances dans lesquelles les propos racistes tenus par l'employeur à l'encontre de [G] [Z], en l'absence de l'intéressé, auraient pu être rapportés à celui-ci.
Le jugement déféré, qui a débouté [G] [Z] de sa demande indemnitaire au titre du préjudice moral, doit par conséquent être confirmé.
- Sur l'abus du droit d'agir en justice :
La SARL TRANSPORTS LIOTIER fait notamment valoir, au soutien de sa demande indemnitaire, que l'action introduite par le salarié sans réel fondement ni légitimité constitue un abus du droit d'agir en justice dans un but purement pécuniaire.
[G] [Z] soutient en réponse, que la société ne démontre pas qu'il aurait abusé de son droit légitime d'agir en justice.
* * * * *
Dès lors que la défense en justice de ses intérêts représente pour chacun un droit qui n'est susceptible d'engager la responsabilité de celui qui en fait usage qu'en cas d'abus ou d'intention de nuire, dont l'intimée ne rapporte pas la preuve en l'espèce, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu'il a débouté la SARL TRANSPORTS LIOTIER de la demande indemnitaire reconventionnelle qu'elle formait à l'encontre de [G] [Z].
- Sur les demandes accessoires :
La SARL TRANSPORTS LIOTIER, partie perdante au sens des dispositions de l'article 696 du code de procédure civile, doit être condamnée à supporter les dépens de l'instance.
Et il serait inéquitable, compte-tenu des circonstances de l'espèce telles qu'elles ressortent de l'ensemble des constatations qui précèdent notamment, de laisser à la charge de [G] [Z] l'intégralité des sommes qu'elle a été contraint d'exposer en justice pour la défense de ses intérêts, de sorte qu'il convient de condamner la SARL TRANSPORTS LIOTIER à lui verser la somme de 2 500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement déféré en ce qu'il a débouté [G] [Z] des demandes indemnitaires qu'il formait au titre de l'absence de visite médicale d'embauche et des manquements imputables à l'employeur en matière d'information et de mise en 'uvre de la garantie souscrite au titre de la prévoyance ;
CONFIRME le jugement dont appel pour le surplus, sauf à porter la somme due par la SARL TRANSPORTS LIOTIER à [G] [Z] à titre de rappel de rémunération variable à la somme de mille sept cent quatre-vingt-six euros et quatre-vingt-six centimes (1 786,86 euros) bruts ;
Statuant de nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
CONDAMNE la SARL TRANSPORTS LIOTIER à verser à [G] [Z] les sommes de :
- mille cinq cents euros (1 500 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né de son manquement à son obligation de sécurité,
- mille cinq cents euros (1 500 euros) à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du défaut d'information et du retard dans le versement des prestations de prévoyance ;
CONDAMNE la SARL TRANSPORTS LIOTIER à verser à [G] [Z] la somme de deux mille cinq cents euros (2 500 euros) en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE la SARL TRANSPORTS LIOTIER de la demande qu'elle formait sur le fondement de ces mêmes dispositions ;
CONDAMNE la SARL TRANSPORTS LIOTIER au paiement des dépens de l'instance d'appel.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE