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09/09/2022 | FRANCE | N°19/06767

France | France, Cour d'appel de Lyon, Chambre sociale b, 09 septembre 2022, 19/06767


AFFAIRE PRUD'HOMALE



RAPPORTEUR





N° RG 19/06767 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MTWG





[M]



C/

Association CROIX ROUGE FRANCAISE







APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'OYONNAX

du 16 Septembre 2019

RG : 18/00077











COUR D'APPEL DE LYON



CHAMBRE SOCIALE B



ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2022







APPELANTE :



[B] [M] épouse [L]

née le 29 Janvier 1974 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 1]



représentée par Me Solène THOMASSIN, avocat au barreau d'AIN



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 69123/2/2019/32056 du 21/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridiction...

AFFAIRE PRUD'HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 19/06767 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MTWG

[M]

C/

Association CROIX ROUGE FRANCAISE

APPEL D'UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'OYONNAX

du 16 Septembre 2019

RG : 18/00077

COUR D'APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE B

ARRÊT DU 09 SEPTEMBRE 2022

APPELANTE :

[B] [M] épouse [L]

née le 29 Janvier 1974 à [Localité 6]

[Adresse 2]

[Localité 1]

représentée par Me Solène THOMASSIN, avocat au barreau d'AIN

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Partielle numéro 69123/2/2019/32056 du 21/11/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMÉE :

CROIX ROUGE FRANCAISE

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Romain LAFFLY de la SELARL LAFFLY & ASSOCIES - LEXAVOUE LYON, avocat au barreau de LYON

et ayant pour avocat aplaidant Me Frédéric RENAUD de la SELARL RENAUD AVOCATS, avocat au barreau de LYON,

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 18 Mai 2022

Présidée par Sophie NOIR, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Gaétan PILLIE, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

- Patricia GONZALEZ, présidente

- Sophie NOIR, conseiller

- Catherine CHANEZ, conseiller

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 09 Septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Patricia GONZALEZ, Présidente et par Ludovic ROUQUET, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES:

L'association Croix Rouge Française a engagé par Mme [B] [M] par plusieurs contrats à durée déterminée à temps partiel conclus :

- du 19 juin au 15 juillet 2016

- du 16 juillet au 31 juillet 2015

- du 1er au 30 septembre 2015

- du 1er octobre au 31 octobre 2015

- du 2 novembre au 30 novembre 2015

- du 1er au 23 décembre 2015.

- du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2016.

La salariée a été embauchée en contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à compter du 1er janvier 2017 à hauteur de 75,83 heures par mois puis à temps complet du 1er janvier 2017 au 30 juin 2017 dans le cadre d'un contrat d'accompagnement dans l'emploi assorti d'une formation (BP JEPS animation sociale), diplôme qu'elle a obtenu le 29 juin 2017.

La relation de travail était soumise à la convention collective du personnel salarié de la Croix-Rouge française.

Mme [B] [M] a été placée en arrêt de travail à plusieurs reprises :

- du 28 août au 25 septembre 2017

- à compter du 12 octobre 2017.

Le 18 juillet 2018, elle a saisi le conseil des prud'hommes d'Oyonnax qui, par jugement du 16 septembre 2019 a:

- rejeté la demande requalification en CDI des CDD du 11 juin 2015 et ceux établis postérieurement

- rejeté la demande d'indemnité de requalification

- fixé l'ancienneté de Mme [B] [M] au 1er septembre 2015

- ordonné à l'employeur de rectifier les bulletins de salaire du 1er janvier 2016 au 30 juin 2017 avec la mention d'emploi animatrice de loisirs

- débouté Mme [B] [M] de sa demande de reclassement en animatrice sociale niveau 5

- débouté Mme [B] [M] de sa demande de versement de la somme de 3000 euros au titre des rappels de salaires

- dit et jugé qu'il n'y a pas lieu de rectifier les bulletins de salaire depuis le 1er juillet 2017

- débouté Mme [B] [M] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail

- débouté Mme [B] [M] de toutes ses autres demandes

- condamné l'association Croix Rouge Française à payer la somme de 1500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile

- rejeté la demande reconventionnelle de l'association Croix Rouge Française sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamné l'association Croix Rouge Française aux entiers dépens de l'instance.

Mme [B] [M] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 3 octobre 2019.

Le 20 novembre 2011, le médecin du travail l'a déclarée inapte à tout reclassement dans un emploi et l'employeur l'a licenciée le 26 décembre 2019 pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 8 mai 2020 Mme [B] [M] demande à la cour de :

- CONFIRMER la décision du Conseil des prud'hommes du 16 septembre 2019 en ce qu'il a fixé au 1er septembre 2015 la date d'ancienneté de Madame [L] ;

- CONFIRMER la décision du Conseil des prud'hommes du 16 septembre 2019 en ce qu'il a ordonné la rectification des bulletins de salaire du 1er janvier 2016 au 30 juin 2017 avec la mention animatrice de loisirs ;

- CONFIRMER la décision du Conseil des prud'hommes du 16 septembre 2019 en ce qu'il a condamné la CROIX ROUGE FRANCAISE à verser à Madame [L] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- REFORMER PARTIELLEMENT la décision rendue par le Conseil des prud'hommes d'OYONNAX le 16 septembre 2019 et en conséquence :

- REQUALIFIER le contrat de travail à durée déterminée du 11 juin 2015 et les contrats établis postérieurement, en contrat à durée indéterminée ;

- CONDAMNER la CROIX ROUGE FRANCAISE à verser à Madame [L] la somme de 1515,10 euros au titre de l'indemnité de requalification ;

- DIRE QUE Madame [L] relève de la position 5 animatrice sociale (socio éducatif) depuis le 1er juillet 2017 ;

- ORDONNER à la CROIX ROUGE FRANCAISE de rectifier les bulletins de salaire depuis le 1er juillet 2017 avec la mention de l'emploi : ANIMATRICE SOCIALE POSITION 5, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

- CONDAMNER la CROIX ROUGE FRANCAISE à verser à Madame [L] une somme de 10 000 euros à titre d'indemnité forfaitaire au titre des rappels de salaires dus au titre de la classification au poste d'animatrice sociale de position 5 ;

- REQUALIFIER le licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse

- CONDAMNER la CROIX ROUGE FRANCAISE à verser à Madame [L] les sommes suivantes :

- La somme de 9 090,60 euros (6 mois de salaire) à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

- La somme de 13 635,90 euros (9 mois de salaire) au titre du préjudice moral subi

- La somme de 3030,2 euros au titre du préavis

- La somme de 303,02 euros au titre de l'indemnité de congés payés sur préavis

- Un rappel de 2 445,16 euros bruts au titre d'indemnité de licenciement

- La somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

- DEBOUTER la CROIX ROUGE FFRANCAISE de son appel incident et de toutes ses demandes.

Dans ses dernières conclusions notifiées le 21 mars 2022, l'association Croix Rouge Française demande pour sa part à la cour :

- CONFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté Madame [L] :

- de sa demande de requalification CDI en CDD,

- de sa demande de repositionnement conventionnel et de « l'indemnité forfaitaire »

afférente,

- de résiliation judiciaire et de ses demandes subséquentes au titre de l'indemnité de

licenciement, de l'indemnité compensatrice de préavis, des dommages-intérêts pour

licenciement sans cause réelle et sérieuse et des dommages-intérêts pour préjudice

moral

- ACCUEILLIR l'appel incident de l'Association CROIX ROUGE FRANCAISE,

Par conséquent,

- INFIRMER le jugement en ce qu'il a fixé l'ancienneté de Madame [L] au 1er septembre 2015 et condamné la concluante au paiement d'un article 700 à hauteur de 1.500 euros,

I. SUR LES GRIEFS FORMULES PAR MADAME [L]

Sur l'ancienneté de Madame [L],

- ACCUEILLIR l'appel incident,

Et ainsi,

- INFIRMER la décision rendue par le Conseil de Prud'hommes d'OYONNAX, en ce qu'il juge que l'ancienneté de Madame [L] devait démarrer au 1er septembre 2015,

- FIXER l'ancienneté de Madame [L] au 1er janvier 2016,

Sur le repositionnement conventionnel,

- REJETER l'appel principal, et CONFIRMER le jugement,

Et ainsi,

- JUGER que Madame [L] ne démontre pas avoir effectivement occupé l'emploi conventionnel d'animatrice socio-éducative, lui permettant de revendiquer la position 5,

-La DEBOUTER de sa demande de rappel de salaire « forfaitaire » à ce titre

- Sur la requalification en contrat à durée indéterminée,

-REJETER l'appel principal, et CONFIRMER le jugement,

Et ainsi,

- JUGER que le recours au contrat de travail à durée déterminée a été conforme aux dispositions légales et n'a pas eu pour objet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'Association,

-La DEBOUTER de toute prétention à ce titre.

Sur la mention de l'emploi occupé,

-CONSTATER, en l'état de la régularisation opérée par l'Association s'agissant de la

mention de l'emploi occupé, que l'erreur matérielle relative à l'intitulé de la mention de

l'emploi de Madame [L] sur ses fiches de paie allant du 1er janvier 2016 au 30 juin 2017 est désormais sans objet.

II. SUR LES DEMANDES AU TITRE DE LA RUPTURE DU CONTRAT,

- JUGER irrecevable la demande nouvelle tendant à voir requalifier le licenciement pour inaptitude en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Subsidiairement ,

- Si la Cour s'estime saisie de la demande tendant à la contestation du licenciement pour inaptitude, REJETER l'appel principal, et CONFIRMER le jugement en ce qu'il écarte toute exécution fautive du contrat de travail par l'Association,

Et ainsi,

-JUGER que Madame [L] ne démontre pas l'existence d'un comportement fautif de l'Association à l'origine de la dégradation de son état de santé,

-DEBOUTER Madame [L] de sa demande tendant à voir constater l'origine fautive de son

inaptitude, et de toutes ses demandes indemnitaires afférentes

- Si la Cour s'estime encore saisie de la demande de résiliation judiciaire,

-REJETER l'appel principal, et CONFIRMER le jugement,

Et ainsi,

-JUGER que Madame [L] ne démontre pas l'existence d'un manquement grave de l'Association ayant rendu impossible la poursuite de son contrat de travail,

En conséquence,

-DEBOUTER Madame [L] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux

torts de l'employeur et de toutes ses demandes afférentes

A titre infiniment subsidiaire,

- Enfin, et si la Cour de céans venait à entrer en voie de condamnation à l'encontre de

l'Association, et ainsi juger que la rupture du contrat de travail de Madame [L] trouve son origine dans l'exécution fautive de ce dernier par l'employeur,

- LIMITER le montant des prétentions financières de la salariée afférentes à la rupture de son

contrat de travail à de plus justes proportions

III. SUR L'ARTICLE 700 DU CODE DE PROCEDURE CIVILE:

- INFIRMER la décision rendue par le Conseil de Prud'hommes d'OYONNAX, en ce qu'il a

condamné l'Association à payer à Madame [L] la somme 1.500 euros au titre de l'article 700.

du code de procédure civile,

- CONDAMNER reconventionnellement Madame [L] au paiement de la somme de 2.500

euros au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers

dépens.

L'ordonnance de clôture de la procédure est intervenue le 22 mars 2022.

Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la Cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

MOTIFS DE LA DÉCISION

À titre liminaire, la cour rappelle qu'elle n'est pas tenue de statuer sur les demandes de «constatations» ou de « dire » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions dans la mesure où elles ne sont pas susceptibles d'emporter des conséquences juridiques ou qu'elles constituent en réalité des moyens.

Sur la reclassification de Mme [B] [M] à la position 5 animatrice sociale (socio-éducatif) depuis le 1er juillet 2017 et la demande de rappel de salaire :

Il appartient au salarié qui se prévaut d'une classification conventionnelle différente de celle dont il bénéficie au titre de son contrat de travail, de démontrer qu'il assure de façon permanente, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de la classification qu'il revendique, ce qui ne peut résulter des simples mentions de la fiche du poste occupé.

L'emploi d'animateur de loisirs classé en position 3 ou 4 par la convention collective du personnel salarié de la Croix-Rouge française est défini ainsi : 'Il propose et coordonne des activités de loisirs auprès des bénéficiaires (personnes âgées, handicapées ou en difficulté d'insertion sociale) et leur apporte, dans ce cadre, un soutien moral et social afin d'assurer leur indépendance et le maintien des relations avec l'extérieur :

- Il organise des activités de divertissement adaptées aux besoins des bénéficiaires : ateliers, journées à thèmes, sorties, soirées ;

- Il assure la tenue de la bibliothèque et de la ludothèque ;

- Il peut être amené à accompagner le bénéficiaire dans les déplacements que nécessitent son suivi thérapeutique ou ses démarches administratives ;

- Il participe, en lien avec les équipes paramédicales ou socio-éducatives, aux démarches d'évaluation des activités proposées et intervient sur l'élaboration de documents relatifs à la

qualité et sécurité des animations.

Il exerce ses missions sous la responsabilité d'un cadre de santé ou d'un cadre socio-éducatif ou sous la responsabilité directe du directeur d'établissement. Selon l'organisation, il réalise tout ou partie des activités décrites (...)'.

L'emploi d'animateur socio-éducatif classé en position 5 par la convention collective du personnel salarié de la Croix-Rouge française est défini ainsi : 'Il conçoit et met en 'uvre des programmes d'activités et des projets d'animation auprès de personnes démunies ou isolées dans le cadre qui lui est assigné :

- Il identifie les besoins des personnes et met en place des projets en lien avec leurs aptitudes, leurs compétences, leurs goûts pour favoriser le développement personnel, en cohérence avec le programme de l'établissement ;

- Il participe à l'accueil de la personne et de sa famille dans son nouveau lieu de vie ;

- Il propose et anime des activités spécifiques à orientation culturelle ou sportive pour enrichir le quotidien de la personne ;

- Il développe le réseau de partenaires extérieurs pour ouvrir l'établissement aux activités culturelles et ludiques.

Il exerce ses missions sous la responsabilité d'un responsable ou du directeur des services éducatifs et/ou sociaux, ou sous la responsabilité directe du directeur d'établissement'.

En l'espèce, les parties s'accordent pour dire que, nonobstant les stipulations des CDD, Mme [B] [M] n'a jamais exercé les fonctions d'aide soignante mais des fonctions d'animatrice.

Mme [B] [M] soutient qu'après l'obtention de son diplôme d'animatrice sociale le 29 juin 2017 elle a exercé des fonctions d'animatrice sociale au sein de l'Ehpad de [Localité 5] et non pas d'animatrice de loisirs comme le soutient l'employeur, en ce que :

- elle a mis en 'uvre des programmes d'activité auprès de personnes âgées et handicapées

- elle a travaillé chez elle pour offrir aux résidents une animation riche et complète, autre que celle proposée dans le cadre du simple loisir

- elle a participé et organisé des événements importants pour les personnes démunies et isolées (la semaine bleue pour les personnes âgées....)

- ces activités proposées concernaient des personnes dépendantes et non des personnes autonomes

- elle a organisé seule des sorties à l'extérieur

- elle a pris des initiatives en contactant les écoles

- elle a trouvé des partenaires locaux

- elle a organisé une fête de la musique à l'Ehpad.

L'association Croix Rouge Française répond :

- que Mme [B] [M] exerçait des fonctions d'animatrice de loisirs

- qu'après son diplôme d'animatrice sociale, elle n'a jamais repris le travail

- que la salariée ne rapporte pas la preuve de ce que ses activités réellement exercées relevaient de la qualification d'animateur socio-éducatif

- qu'elle n'a jamais mis en 'uvre un véritable projet d'animation, ses missions se limitant à de l'animation ponctuelle d'ateliers avec quelques résidents.

L'employeur ne rapporte pas la preuve de ce que Mme [B] [M] n'a jamais repris son poste de travail entre le 29 juin 2017 et le 12 octobre 2017 date à partir de laquelle il est constant qu'elle n'a plus repris son poste.

De son côté, Mme [B] [M] ne rapporte pas la preuve de ce qu'elle a assuré de façon permanente, entre le 1er juillet 2017 et le 28 août 2017 puis entre le 25 septembre 2017 et le 12 octobre 2017, dans le cadre de ses fonctions, des tâches et responsabilités relevant de l'emploi d'animatrice socio-éducatif position 5 qu'elle revendique en ce que :

- le projet d'animation sociale dans une démarche partenariale mené dans le cadre de sa formation BP Jeps animation sociale est antérieur au 1er juillet 2017, tout comme le projet 'du chant d'antan à aujourd'hui' préparé par Mme [B] [M] dans le cadre de cette formation

- l'article de presse indiquant que Mme [B] [M] et Mme [A], professeur au conservatoire de [Localité 5], ont convaincu leurs directions respectives d'organiser un concert au sein de l'Ehpad ne suffit pas à démontrer que la salariée était en charge de façon permanente du développement de partenariats locaux

- il n'est pas contesté que la fête de la musique commune organisée entre l'Ehpad et le centre de loisirs est datée du 21 juin 2017.

En conséquence la cour, confirmant le jugement de ces chefs, rejette la demande de reclassification de la salariée dans l'emploi d'animatrice sociale niveau 5 et rejette la demande forfaitaire de rappel de salaire forfaitisée de 10'000 euros présentée sur le fondement de la reclassification au niveau 5.

Sur la demande de requalification du contrat de travail à durée déterminée du 11 juin 2015 et des contrats établis postérieurement en un contrat de travail à durée indéterminée :

Selon l'article L1242-2 du code du travail dans sa version applicable en la cause, sous réserve des dispositions de l'article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l'exécution d'une tâche précise et temporaire, et seulement dans des cas limitativement énumérés dont celle du remplacement d'un salarié absent ou d'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

En cas de non-respect des motifs de recours au CDD, le contrat de travail est réputé à durée indéterminée par application des dispositions de l'article l'article L1245-1 du code du travail.

En cas de litige sur le motif de recours, il incombe à l'employeur de rapporter la preuve de la réalité du motif énoncé dans le contrat à durée déterminée.

Par application des dispositions de l'article L 1245-2 du code du travail, lorsque le conseil de prud'hommes fait droit à la demande du salarié, il lui accorde une indemnité, à la charge de l'employeur, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire. Cette disposition s'applique sans préjudice de l'application des dispositions du titre III en l'espèce, du présent livre relatives aux règles de rupture du contrat de travail à durée indéterminée.

Mme [B] [M] fait notamment valoir au soutien de sa demande de requalification que les CDD conclus le 11 juin 2015, 19 juin 2015, 16 juillet 2015, 1er septembre 2015, 1er octobre 2015, 2 novembre 2015 et le 1er décembre 2015 mentionnent le motif du remplacement partiel des tâches de Mme [Z], aide médico psychologique et non pas animatrice de loisirs.

L'association Croix Rouge Française répond que le poste d'aide médico-psychologique recouvre des missions d'animation puisqu'il implique 'un soutien psychologique et relationnel et l'encouragement à des activités de loisirs' et que Mme [B] [M] a été embauché en CDD pour assurer le remplacement partiel de Mme [Z] 'pour ce qui concernait les tâches d'animation normalement assurées par un AMP'.

En l'espèce, le premier CDD a été conclu au titre de la période du 11 juin 2015 au 18 juin 2015

au motif du 'remplacement partiel des tâches de Mme [Z] [G] (catégorie employé-code emploi nomenclature CRF EA03TD-AMP), en absence maladie (...)'.

Il résulte de l'attestation de Mme [C], encadrant de proximité pour les services hébergement, cuisine, maintenance et animation, datée du 29 août 2018 et de Mme [X], autre salariée de l'association Croix Rouge Française, datée du 30 août 2018 que Mme [B] [M] était en charge de l'organisation d'animations à destination des pensionnaires de l'établissement.

L'emploi d'aide medico-psychologique est défini ainsi par la convention collective du personnel salarié de la Croix-Rouge française : 'Il participe au sein d'équipes pluridisciplinaires à l'accompagnement des personnes handicapées ou personnes dépendantes et leur apporte l'assistance individualisée que nécessite leur état psychique ou physique :

- Il les soutient dans les actes de la vie quotidienne ;

- Il prend soin des personnes plus ou moins dépendantes et apporte un soutien dans la rééducation fonctionnelle ;

- Il les accompagne dans les activités spécifiques prescrites par le corps médical et paramédical ;

- Il assure un soutien psychologique et relationnel et encourage à des activités de loisirs (...)'.

Or, l'encouragement à des activités de loisirs qui suppose la participation de l'AMP aux activités de loisirs diffère de l'organisation d'activités de loisirs qui suppose une initiative et une responsabilité particulière du salarié et relève plus spécifiquement de l'emploi d'animateur de loisirs tel que défini à la convention collective.

De plus, l'association Croix Rouge Française ne démontre pas que la salariée remplacée était en charge de tâches d'animation.

Dans ces conditions, l'employeur ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de la réalité du motif énoncé dans le contrat à durée déterminée

En conséquence la cour, infirmant le jugement de ce chef, requalifie le CDD du 11 juin 2015 en contrat de travail à durée indéterminée.

De ce fait et par application des dispositions de l'article L 1245-2 du code du travail précité, Mme [B] [M] peut prétendre à une indemnité de requalification à hauteur de 1515,10 euros, montant non discuté.

Sur la fixation de la date d'ancienneté au 1er septembre 2015 :

Le CDD du 11 juin 2015 étant requalifié en CDI le jugement déféré sera infirmé en ce qu'il a fixé l'ancienneté de la salariée au 1er septembre 2015.

Sur la demande de rectification sous astreinte des bulletins de salaire du 1er janvier 2016 au 30 juin 2017 avec la mention de l'emploi 'animatrice de loisirs' puis à compter du 1er juillet 2017 avec la mention de l'emploi 'animatrice social, position 5 :

Compte tenu des termes du présent arrêt, l'association Croix Rouge Française sera condamnée à délivrer à Mme [B] [M] des bulletins de paie à compter du 1er janvier 2016 et jusqu'au 30 juin 2017 mentionnant l'emploi d'animatrice de loisirs.

En revanche, dès lors que la salariée est déboutée de sa demande de reclassification à l'emploi d'animatrice sociale position 5, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande de transmission de bulletins de salaire mentionnant l'emploi d'animatrice social à compter du 1er juillet 2017.

Le jugement déféré sera confirmé de ces chefs.

Sur la requalification du licenciement pour inaptitude en licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Le licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse lorsqu'il est démontré que l' inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l'employeur qui l'a provoquée.

On l'espèce, Mme [B] [M] soutient pour la première fois en cause d'appel que son inaptitude est consécutive aux agissements fautifs de l'employeur à qui elle reproche :

- d'avoir mentionné une date d'ancienneté et un emploi erronés sur ses bulletins de salaire

- de ne pas l'avoir classée à la position 5 à compter du 1er juillet 2017

- avoir commis des erreurs récurrentes graves en matière de paiement du salaire et d'édition des bulletins de salaire la privant durant plusieurs mois de sommes auxquelles elle avait droit

- de pas lui avoir payé de salaire entre le 1er décembre 2018 le 30 novembre 2019

- lui avoir payé une indemnité de licenciement erronée

- avoir transmis tardivement ses documents de fin de contrat

- avoir refusé d'aménager ses horaires pour lui permettre d'être présente aux côtés de son père gravement malade durant les derniers mois de sa vie la contraignant à multiplier les déplacements

- l'avoir, 'durant toute son absence', relancée pour connaître sa date de reprise en mentionnant que son absence perturbait gravement le fonctionnement de l'entreprise.

La salariée indique finalement que 'si un aménagement de ses horaires lui était proposé, il n'en demeure pas moins que l'employeur a eu du mal à accepter [ses] nombreuses absences' et indique avoir été particulièrement choquée de recevoir, le 3 janvier 2018, soit un mois après le décès de son père, un courrier de l'employeur lui demandant de lui rembourser une somme correspondant aux heures non effectuées depuis le 1er janvier 2017.

Cependant, l'attestation de Mme [E] du 7 octobre 2019, par laquelle cette psychologue émet 'beaucoup de réserves et de doutes sur l'aptitude sur le plan psychologique de Mme [L] [B] de pouvoir réintégrer l'Ehpad de la Croix-Rouge' ne permet pas d'établir un lien entre l'inaptitude prononcée par le médecin du travail le 20 novembre 2019 et les manquements que la salariée reproche à l'employeur.

Il en va de même de l'attestation de M. [J] [L] datée du 13 avril 2020 dans laquelle ce dernier n'évoque pas une altération de l'état de santé de son épouse et de celle de Mme [D] [Y], amie de Mme [B] [M], qui ne fait manifestement que retranscrire les propos de la salariée sur l'origine de sa dépression.

En conséquence la cour, rejette la demande tendant à voir déclarer le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi, la demande d'indemnité compensatrice de préavis et la demande d'indemnité de licenciement.

Sur les demandes accessoires:

Partie perdante, l'association Croix Rouge Française supportera la charge des dépens de première instance et d'appel.

Par ailleurs, Mme [B] [M] a dû pour la présente instance exposer tant en première instance qu'en appel des frais de procédure et honoraires non compris dans les dépens qu'il serait inéquitable de laisser intégralement à sa charge.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné l'association Croix Rouge Française à lui payer la somme de 1500 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile, et de condamner cet employeur à lui payer sur le même fondement une indemnité de 1500 euros au titre des frais qu'elle a dû exposer en appel.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

CONFIRME le jugement déféré SAUF en ce qu'il a:

- rejeté la demande de requalification en CDI des contrats à durée déterminée du 11 juin 2015 et ceux établis postérieurement ;

- rejeté la demande d'indemnité de requalification ;

- fixé l'ancienneté de la salariée au 1er septembre 2015 ;

INFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions et, statuant à nouveau et y ajoutant:

REQUALIFIE le CDD du 11 juin 2015 en contrat de travail à durée indéterminée ;

CONDAMNE l'association Croix Rouge Française à payer à Mme [B] [M] la somme de 1515,10 euros à titre d'indemnité de requalification ;

REJETTE la demande tendant à voir déclarer le licenciement dénué de cause réelle et sérieuse, la demande de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral subi, la demande d'indemnité compensatrice de préavis et la demande d'indemnité de licenciement ;

DIT que les sommes allouées supporteront, s'il y a lieu, le prélèvement des cotisations et contributions sociales ;

CONDAMNE l'association Croix Rouge Française à payer à Mme [B] [M] la somme de 1500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE l'association Croix Rouge Française aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Le greffier, La présidente,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : Chambre sociale b
Numéro d'arrêt : 19/06767
Date de la décision : 09/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-09;19.06767 ?
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