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08/09/2022 | FRANCE | N°18/07209

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 08 septembre 2022, 18/07209


N° RG 18/07209

N° Portalis DBVX - V - B7C - L7D3









Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 27 juillet 2018



4ème chambre



RG : 16/11181





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 08 Septembre 2022







APPELANTE :



CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES FLANDRES venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance

maladie du Hainaut

[Adresse 3]

[Adresse 8]

[Localité 4]



représentée par la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T.566









INTIMEES :



SAS HPM Nord vient aux droits du GIE HPM qui venait lui-m...

N° RG 18/07209

N° Portalis DBVX - V - B7C - L7D3

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 27 juillet 2018

4ème chambre

RG : 16/11181

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 08 Septembre 2022

APPELANTE :

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES FLANDRES venant aux droits de la Caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut

[Adresse 3]

[Adresse 8]

[Localité 4]

représentée par la SELARL BDL AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : T.566

INTIMEES :

SAS HPM Nord vient aux droits du GIE HPM qui venait lui-même aux droits de la société Clinique du [10]

[Adresse 2]

[Adresse 9]

[Localité 5]

SOCIETE HOSPITALIERE D'ASSURANCES MUTUELLES (SHAM)

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentées par l'AARPI CABINET CHOULET AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 183

******

Date de clôture de l'instruction : 21 Janvier 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Juin 2022

Date de mise à disposition : 08 Septembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l'audience, l'un des membres de la Cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Le 9 décembre 2003, [O] [B] a contracté une infection nosocomiale à l'occasion d'une arthroplastie (pose d'une prothèse) de la hanche gauche réalisée au sein de la société Clinique du [10] à [Localité 11], aux droits de laquelle est venu le GIE HPM.

[O] [B] a saisi la Commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux (CCI) du Nord, laquelle ne s'est pas prononcée en l'absence d'une consolidation de l'état de santé du patient.

Il a également saisi le juge des référés qui, par une ordonnance rendue le 9 avril 2010, lui a alloué une provision à hauteur de 25 000 euros.

Suivant exploit du 13 juillet 2010, [O] [B] a assigné le GIE HPM et l'assureur de ce dernier, la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), devant le tribunal de grande instance de Lyon en responsabilité et condamnation à lui payer à titre provisionnel une somme de 105 380,02 euros en réparation de ses préjudices temporaires.

Par jugement en date du 23 avril 2012, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- déclaré le GIE HPM responsable de l'infection nosocomiale contractée par [O] [B] suite à l'intervention du 9 décembre 2003,

- condamné in solidum le GIE HPM et la SHAM à verser à [O] [B] une provision de 25 000 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres une provision de 200 000 euros.

Le GIE HPM et la SHAM ont relevé appel de ce jugement.

Cette décision a été confirmée par la cour d'appel de Lyon dans un arrêt du 19 mars 2013.

[O] [B] est décédé le [Date décès 7] 2015.

L'organisme social a par la suite chiffré sa créance définitive au titre des prestations servies au défunt à la somme de 607 909,57 euros.

Suivant acte d'huissier de justice du 16 septembre 2016, la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres a fait assigner le GIE HPM, venant aux droits de la société Clinique du [10], et la SHAM son assureur, devant le tribunal de grande instance de Lyon, afin d'obtenir leur condamnation solidaire au remboursement de ses débours.

Par jugement du 27 juillet 2018, le tribunal de grande instance de Lyon a :

- condamné in solidum le GIE HPM et la SHAM à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut la somme de 103 954,785 euros,

- condamné in solidum le GIE HPM et la SHAM à supporter le coût des entiers dépens de l'instance,

- dit que la condamnation aux dépens est assortie au profit de la société BDL Avocat, du droit de recouvrer directement contre les parties condamnées ceux des dépens dont elle aurait fait l'avance sans avoir reçu provision,

- condamné in solidum le GIE HPM et la SHAM à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut la somme de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre l'indemnité forfaitaire à hauteur de 1 055 euros prévue par l'article L376-1 du code de la sécurité sociale.

Selon déclaration du 15 octobre 2018, la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 5 novembre 2019, la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres demande à la cour :

- d'accueillir comme juste et bien fondé l'appel,

- de rejeter les prétentions de la SHAM et du GIE HIP, comme non fondées et se heurtant à l'autorité de la chose jugée,

- d'infirmer le jugement rendu le 27 juillet 2018 en ce qu'il a réduit sa créance à la somme de 103 954.78 euros,

En conséquence et statuant à nouveau,

- condamner solidairement le GIE HPM et son assureur, la SHAM, à lui régler les sommes suivantes :

* solde des prestations servies : 407 909,57 euros,

* indemnité forfaitaire : 1 080,00 euros,

* frais irrépétibles : 5 000 euros,

- condamner les mêmes aux entiers dépens, tant d'instance que d'appel, dont distraction au profit de la Selarl BdL Avocats, sur son affirmation de droit.

Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe le 19 février 2019, le GIE HPM et la SHAM demandent à la cour de :

- confirmer le jugement entrepris et dire et juger que la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres ne pourra exercer son recours que dans la limite de 50 %, correspondant à la quote-part de responsabilité de la Clinique du Croisé-Laroche dans l'étendue des préjudices subis par [O] [B] en homologation de l'avis émis par la CCI Nord Pas de Calais le 2 Septembre 2015,

- rejeter ou réduire les demandes de remboursement formulées par la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres au regard des explications données dans les présentes conclusions,

Dans tous les cas,

- condamner la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres à verser aux concluants une somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens distraits de droit au profit de Maître Choulet, avocat.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2020.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

La cour constate à titre liminaire que selon l'extrait Kbis produit au dossier, la SAS HPM nord vient aux droits du GIE HPM qui venait lui-même aux droits de la société Clinique du [10], aucune observation n'étant formée sur ce point par les parties.

La cour constate également que la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres vient aux droits de la caisse de celle du Hainaut, aucune observation n'étant non plus faite sur ce point par les parties.

I. Sur le montant de créance de la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres :

La caisse primaire d'assurance maladie des Flandres fait essentiellement valoir que sa créance a été arrêtée le 18 mai 2009 après la sortie de rééducation fonctionnelle de [O] [B], à hauteur de 607 909,57 euros.

Elle rappelle que seuls les frais de soins en lien avec l'infection nosocomiale peuvent être pris en compte. En ce sens, elle demande à ce que la SHAM et le GIE HPM lui règlent la somme de 407 909,57 euros correspondant au solde des prestations servies à la victime.

Elle ajoute que l'indemnisation ne peut pas dépendre d'une quote-part de responsabilité au motif que le jugement du tribunal de grande instance de Lyon et l'arrêt de cour d'appel ayant retenu l'entière responsabilité du GIE HPM ont autorité de chose jugée.

Le GIE HPM aux droits duquel vient la société HPM nord et la SHAM demandent à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a limité le recours de la caisse primaire d'assurance maladie aux seules conséquences de l'infection nosocomiale à l'exclusion des conséquences de l'affection iatrogène.

Ils font valoir que le préjudice subi par [O] [B] a pour conséquence l'infection nosocomiale mais également la complication iatrogène intervenue au mois d'octobre 2009, limitant en cela le recours de la caisse à 50 % correspondant à sa quote-part de responsabilité.

Subsidiairement, le GIE HPM aux droits duquel vient la société HPM nord et la SHAM font valoir que la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres ne rapporte pas la preuve de l'existence du lien de causalité entre la survenance de l'infection nosocomiale et les frais engagés. Ils précisent que certains de ces frais n'étaient pas nécessaires comme l'appareillage. Ils soutiennent encore que la caisse ne démontre pas que les arrérages échus pour mise en invalidité, les indemnités journalières et la rente d'invalidité soient strictement imputable à l'infection nosocomiale.

Sur ce :

Le premier juge a très justement retenu l'autorité de chose jugée attachée à la décision irrévocable rendue par la cour d'appel de Lyon le 19 mars 2013, laquelle a confirmé un jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 23 avril 2012, ayant notamment déclaré le GIE HPM, anciennement dénommé Clinique du [10], responsable de l'infection nosocomiale contractée par [O] [B] à la suite de l'intervention du 9 décembre 2003.

Aux termes de l'article L.376-1 alinéa 2 du code de la sécurité sociale, le recours des tiers payeurs, subrogés dans les droits d'une victime d'un dommage qu'ils indemnisent, s'exercent à l'encontre des auteurs responsables de l'accident.

La responsabilité de l'établissement de santé ayant été retenue par les décisions de justice susvisées au titre de la seule infection nosocomiale contractée, la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres dispose donc d'un recours subrogatoire limité à l'indemnisation qu'elle a versée au seul titre de cette infection.

Les constatations et conclusions apportées par les différents rapports d'expertise produits au dossier des parties démontrent que si [O] [B] a été victime d'une infection nosocomiale contractée au cours de l'intervention d'arthroplastie réalisée le 9 décembre 2003 au sein de la société Clinique du [10], il a également été victime d'une affection iatrogène ayant consisté dans le développement d'une allergie au matériel prothétique, diagnostiquée en octobre 2009, alors que le phénomène infectieux semblait éradiqué.

Il appartient donc à la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres dont le recours subrogatoire est limité aux frais qu'elle a engagés en lien de causalité avec la seule infection nosocomiale, de justifier l'imputabilité à cette infection, des débours dont elle réclame le remboursement.

Si elle s'était limitée à produire devant le premier juge un simple relevé de ses débours, ne permettant pas au juge de connaître avec précision la nature des frais, indemnités ou arrérages versés à la victime, elle produit en cause d'appel une attestation d'imputabilité établie par son médecin conseil du recours contre tiers le 20 octobre 2015, complétée par un addendum du 2 août 2018.

Se trouve dressée dans cette attestation une liste des périodes d'hospitalisation de [O] [B], des consultations médicales et examens spécialisés, des examens biologiques, des actes de rééducation, des médicaments prescrits avec la date de leur prescription, des produits utilisés pour les examens spécialisés ou les pansements, des actes infirmiers définis par leur nature, des appareillages, des transports définis dans leur catégorie et leur date, des arrêts de travail dont a bénéficié l'assuré tant pour le « premier dommage » (infection nosocomiale) que pour le « second dommage » (allergie au matériel prothétique), outre la précision de l'existence d'une pension d'invalidité attribuée le 8 décembre 2006.

La cour constate que l'ensemble des débours dont le paiement est réclamé par la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres est constitué pour l'essentiel de dépenses postérieures à l'écoulement d'une période de 6 mois normalement prévue pour obtenir une consolidation à l'issue d'une arthroplastie dépourvue de complications (liées notamment à une infection nosocomiale) et antérieures à la date de consolidation de la victime fixée le 13 juin 2012 par le médecin expert désigné par la CCI ; en ne retenant, par comparaison entre les débours listés sur le relevé définitif des débours établi le 20 avril 2016 et les données présentées aux termes de l'attestation d'imputabilité, que les frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillages (une canne anglaise), de transport en lien de causalité avec l'infection nosocomiale dont le traitement et les soins ont perduré jusqu'en octobre 2009, laissant place alors à la mise ne place de traitements et de soins en lien avec l'allergie au matériel prothétique développé par la victime, le montant des débours engagés par le tiers payeur pouvant donner lieu à recours subrogatoire peut être ainsi établi :

- frais hospitaliers : après déduction des frais engagés du 13 au 15 février 2008 et du 5 au 10 novembre 2008, non retenus aux termes de l'attestation d'imputabilité, reste une somme de 455 110,82 euros,

- frais médicaux engagés pour la période du 29 juillet 2004 au 6 mai 2009 : 16 368 euros tel que réclamé par la caisse,

- frais pharmaceutiques engagés pour la période du 29 octobre 2004 au 19 mai 2009 : 13 901,18 euros,

- frais d'appareillage engagés du 13 mars 2006 au 28 octobre 2007 : 39,49 euros tel que réclamé par la caisse,

- frais de transports engagés du 3 décembre 2004 au 18 mai 2009, tant en ambulance qu'en véhicule sanitaire léger, taxi ou véhicule particulier : 7 979,85 euros tel que réclamé par la caisse,

- indemnités journalières versées à la victime pour la période du 10 mai 2004 (date de début de l'arrêt de travail imputable) au 7 décembre 2006, date à laquelle le décompte est arrêté par la caisse : 40 775,13 euros,

- montant des arrérages de la pension d'invalidité attribuée à compter du 8 décembre 2006, soit avant même la survenance de l'allergie développée par la victime en octobre 2009, pendant une durée de trois années : 61 261,51 euros tel que réclamé par la caisse,

- soit une somme globale de 595 221,47 euros au paiement de laquelle doivent être condamnés in solidum, l'établissement de santé et son assureur, sous déduction de la provision de 200 000 euros déjà perçue.

Une somme de 1 080 euros doit également être allouée à la caisse à la charge in solidum des susnommés, à titre d'indemnité forfaitaire.

II. Sur les frais de procédure et les dépens :

L'équité ne commande pas l'octroi d'une indemnité de procédure au bénéfice des parties.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Infirme le jugement rendu le 27 juillet 2018 par le tribunal de grande instance de Lyon en ce qu'il a condamné in solidum le GIE HPM et la SHAM à payer à la caisse primaire d'assurance maladie du Hainaut la somme de 103 954,785 euros,

Statuant à nouveau du chef infirmé, confirmant pour le surplus et y ajoutant,

Condamne in solidum le GIE HPM aux droits duquel vient la société HPM nord et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), à payer à la caisse primaire d'assurance maladie des Flandres la somme de 395 221,47 euros, en remboursement du solde de ses débours et celle de 1 080 euros à titre d'indemnité forfaitaire,

Rejette toute autre demande des parties y compris celles au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum le GIE HPM aux droits duquel vient la société HPM nord et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) aux dépens.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 18/07209
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;18.07209 ?
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