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08/09/2022 | FRANCE | N°18/06901

France | France, Cour d'appel de Lyon, 1ère chambre civile a, 08 septembre 2022, 18/06901


N° RG 18/06901

N° Portalis DBVX - V - B7C - L6MM









Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 23 juillet 2018



Loyers commerciaux



RG : 17/00002

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



1ère chambre civile A



ARRET DU 08 Septembre 2022







APPELANTE :



SCI ANVARO

[Adresse 1]

[Localité 5]



représentée par la SELARL LALLEMENT & ASSOC

IES, avocat au barreau de LYON, toque : 374









INTIMEE :



Mme [G] [H] épouse [L] exerçant sous le nom commercial de [G] COIFFURE

née le 11 Septembre 1974 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 5]



représentée par Maître Norber...

N° RG 18/06901

N° Portalis DBVX - V - B7C - L6MM

Décision du Tribunal de Grande Instance de LYON

Au fond du 23 juillet 2018

Loyers commerciaux

RG : 17/00002

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

1ère chambre civile A

ARRET DU 08 Septembre 2022

APPELANTE :

SCI ANVARO

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par la SELARL LALLEMENT & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 374

INTIMEE :

Mme [G] [H] épouse [L] exerçant sous le nom commercial de [G] COIFFURE

née le 11 Septembre 1974 à [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 5]

représentée par Maître Norbert BEAL, avocat au barreau de LYON, toque : 56

******

Date de clôture de l'instruction : 24 Mai 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 01 Juin 2022

Date de mise à disposition : 08 Septembre 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Anne WYON, président

- Françoise CLEMENT, conseiller

- Annick ISOLA, conseiller

assistés pendant les débats de Séverine POLANO, greffier

A l'audience, l'un des membres de la Cour a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne WYON, président, et par Séverine POLANO, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Par acte sous seing privé du 30 novembre 2012, Mme [H] épouse [L] a acquis un fonds artisanal de coiffure exploité [Adresse 2], comprenant un droit au bail.

Les locaux où était exploité ledit fonds appartiennent à la société Anvaro, bailleur, qui est intervenu à l'acte et a agréé la cession.

Il était mentionné à l'acte de cession que par exploit d'huissier de justice du 23 octobre 2012, le preneur avait reçu du bailleur, un congé pour le 31 août 2013 avec offre de renouvellement moyennant un loyer mensuel de 1 030 euros HT et hors charges, et les nouvelles conditions.

Mme [L] a saisi le tribunal de grande instance de Lyon en nullité de ce congé avec offre de renouvellement et par acte d'huissier de justice du 28 septembre 2015, elle a demandé le renouvellement de son bail commercial pour une durée de neuf années à compter du 1er octobre 2015, moyennant un loyer mensuel de 1 021, 55 euros HT.

Par acte d'huissier de justice du 9 décembre 2015, la société Anvaro a fait délivrer à Mme [L] une acceptation de renouvellement avec la fixation d'un nouveau loyer à hauteur de 1 430 euros HT et hors charges.

Le 21 juin 2018, le tribunal de grande instance de Lyon a prononcé la nullité du congé au motif que les conditions du bail ne pouvaient pas être modifiées à l'occasion de son renouvellement.

Par acte d'huissier de justice du 25 novembre 2016, la société Anvaro a fait assigner devant le juge des loyers commerciaux Mme [L] aux fins de voir fixer à la somme de 1 430 euros HT par mois, le loyer du bail renouvelé le 1er octobre 2015 à la suite de la demande de renouvellement notifiée par le preneur le 28 septembre 2015.

Par jugement du 4 septembre 2017, une expertise a été confiée à M. [M] à l'effet de donner son avis sur les motifs de déplafonnement du loyer ainsi que sur le montant de la valeur locative des locaux.

L'expert a déposé son rapport le 25 janvier 2018.

Par jugement du 23 juillet 2018, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Lyon a :

- fixé à la somme de 9 900 euros HT et hors charges le montant annuel du loyer du bail renouvelé, toute autre clause et condition du bail restant inchangées, à compter du 1er octobre 2015, avec intérêts au taux légal sur chaque échéance d'arriéré depuis le renouvellement, conformément aux dispositions de l'article 1153 du code civil, capitalisés selon les modalités de l'article 1154 du code civil, à compter du 25 novembre 2016, date de délivrance de l'assignation par le bailleur en demande de fixation du loyer du bail renouvelé,

- condamné la SCI Anvaro aux dépens comprenant les frais d'expertise et à verser à Mme [L] une somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Selon déclaration du 3 octobre 2018, la société Anvaro a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 9 septembre 2020, la société Anvaro demande à la cour de :

- dire et juger recevable et bien fondé l'appel,

- réformer dans son intégralité le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lyon le 23 juillet 2018,

en conséquence, statuant de nouveau,

- fixer à la somme de 15 000 euros HT et hors charges, le montant annuel du loyer du bail renouvelé, toutes les autres clauses, charges et conditions du bail expiré demeurant inchangées, à compter du 1er octobre 2015, avec intérêts au taux légal sur chaque échéance d'arriéré depuis le renouvellement, capitalisés à compter du 25 novembre 2016, date de délivrance de l'assignation par la société Anvaro en demande de fixation du loyer du bail renouvelé, 

- débouter Mme [L] de ses prétentions, fins et moyens contraires,

- condamner Mme [L] au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance et celle d'appel, ainsi qu'aux dépens, y compris les frais d'expertises s'il y a lieu.

Dans ses dernières conclusions déposées au greffe le 29 août 2020, Mme [L] demande à la cour de :

- débouter la société Anvaro de l'intégralité de ses demandes infondées,

en revanche,

- déclarer bien fondée Mme [L] en ses demandes,

en conséquence,

- confirmer le jugement du juge des loyers commerciaux au tribunal de grande instance de Lyon du 23 juillet 2018 en ce qu'il a :

- 'xé le montant du loyer du bail renouvelé à compter du 1er octobre 2015 à la somme annuelle de 9 900 euros hors taxes et hors charges soit un loyer mensuel de 825 euros hors taxes et hors charges, toutes les autres clauses, charges et conditions du bail expiré demeurant inchangées,

- condamné la société Anvaro au paiement des intérêts au taux légal sur chacune des échéances dues à compter du 1er octobre 2015, 

- dit et jugé que ces intérêts seront capitalisés pour ceux correspondent à la créance de loyers due depuis plus d'un an,

- condamné la société Anvaro au paiement des dépens, y compris les frais d'expertise et à payer à Mme [L] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

y ajoutant,

- condamner la société Anvaro aux dépens et à payer à Mme [L] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Il convient de se référer aux écritures des parties pour plus ample exposé de leurs prétentions et moyens.

 

L'ordonnance de clôture rendue le 11 septembre 2020 a été révoquée et la clôture de la procédure de nouveau ordonnée le 24 mai 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

A titre liminaire, il sera rappelé que les « demandes » tendant à voir « constater » ne constituent pas des prétentions au sens de l'article 4 du code de procédure civile et ne saisissent pas la cour ; il en est de même des « demandes » tendant à voir « dire et juger » lorsque celles-ci développent en réalité des moyens.

La SCI Anvaro fait valoir que :

- l'acte de cession du fonds de commerce ne fait état d'aucune difficulté ni d'aucun litige tel que le cédant l'a déclaré ; elle conteste toute imputabilité dans les prétendus problèmes d'humidité rencontrés tel que l'a justement retenu le premier juge qui a également rejeté les critiques concernant l'équipement de climatisation,

- les places gratuites de stationnement proposées au parking du Champ de mars bénéficient à Mme [L] ainsi que l'a justement retenu le premier juge qui a retenu l'existence d'une évolution positive en cela pour le commerce de cette dernière et indiqué qu'il y a lieu à déplafonnement du loyer,

- Mme [L] qui fait état de l'évolution défavorable de son chiffre d'affaires ne justifie en rien de cette situation qui ne constitue pas un critère légal dans l'appréciation de l'existence ou non d'un déplafonnement dans la mesure où le preneur est seul responsable de la gestion de son fonds de commerce,

- la pondération telle que retenue par l'expert est critiquable en ce que la charte de l'expertise en évaluation immobilière n'est qu'un document de référence non normatif alors même que des différences d'appréciation ont été enregistrées entre les experts intervenus successivement,

- aucune référence sur la méthode de calcul employée pour définir la valeur locative n'est donnée par l'expert qui n'a pas retenu la moyenne des 4 valeurs de comparaison, la notion d'hyper centre dans la petite commune qu'est [Localité 5] n'étant pas pertinente.

Mme [L] soutient quant à elle que :

- les locaux sont vétustes et présentent des problèmes d'humidité, le système de climatisation qui est la propriété du bailleur, est vieillissant,

- doivent être pris en considération : la situation excentrée du local situé dans un quartier résidentiel, l'absence d'évolution de sa clientèle de proximité et de la desserte des lieux, l'absence d'évolution favorable des emplacements de stationnement puisqu'elle ne dispose toujours pas de parking propre ni d'emplacement handicapé, les places créées ayant juste eu pour vocation de remplacer un stationnement anarchique,

- son chiffre d'affaires a évolué défavorablement, justifiant en cela l'absence de déplafonnement,

- la méthode de pondération retenue par l'expert qui a été extrêmement rigoureux dans ses mesures et sa démarche doit être approuvée,

- les prix couramment pratiqués dans le voisinage ont été justement retenus par l'expert au titre de fonds de même destination et validés à juste titre par le premier juge.

Sur ce :

La cour constate que les parties s'opposent sur une somme de 5 100 euros constituant la différence entre le montant du loyer annuel HT et HC invoqué par la bailleresse à hauteur de 15 000 euros et le montant du loyer annuel fixé par l'expert et retenu par le premier juge à hauteur de 9 900 euros HT et HC et dont le preneur sollicite la confirmation, soit une somme HT HC de 425 euros HT HC par mois.

Les parties qui ont communiqué de très nombreuses pièces, n'ont cependant nullement produit devant la cour le rapport d'expertise déposé par l'expert judiciaire ; la cour s'en tiendra donc aux constatations de l'expert telles qu'elles sont rapportées par le premier juge aux termes de son jugement, le teneur de ces dernières ne faisant l'objet d'aucune discussion entre les parties qui contestent seulement les conséquences juridiques qui en ont été tirées.

L'expert judiciaire a essentiellement conclu aux termes de son rapport que :

- il sera retenu une surface pondérée commerce de 82 m² environ, pour un local en état d'usage, adapté à sa destination contractuelle ; il a ajouté qu'aucune modification ne devait être retenue s'agissant des caractéristiques des locaux, de la destination des lieux et des obligations respectives des parties mais qu'une modification notable, consistant dans la réalisation et l'augmentation des places de stationnement publiques à proximité immédiate (en vis-à-vis) du fonds, lui profitait directement,

- en fonction des éléments ci-dessus et des prix couramment pratiqués dans le voisinage, la valorisation locative est au 1er octobre 2015 de 82 m² X 120 euros/m²/an/HT/HC soit 9 900 euros annuels, valeur inférieure au loyer plafond.

Le premier juge a très justement répondu aux arguments des parties et considéré dans des termes pertinents qui répondent aux moyens soulevés en appel, et que la cour adopte, que la valeur locative doit être arrêtée à la somme annuelle arrondie à 9 900 euros HT et hors charges à compter du 1er octobre 2015, en retenant essentiellement que :

- l'expert s'est justement référé, s'agissant du calcul de la surface utile brute (102,55 m²) et la surface pondérée (82,17 m²), à la charte de l'expertise en évaluation immobilière, comme il est d'usage et il n'y a pas lieu de se référer aux critères retenus par la commission municipale ou les services fiscaux en la matière,

- l'expert s'est rendu sur place à deux reprises, sans constater de traces d'humidité actuelles, Mme [L] ne justifie pas avoir déclaré un sinistre dégâts des eaux à son assureur et elle ne justifie pas que les traces constatées dans son procès-verbal de constat d'huissier du 22 novembre 2016, qui en raison de leur localisation, pourraient tout aussi bien provenir d'une fuite du réfrigérateur, du cumulus ou du lave-linge, proviennent d'un dégât des eaux ou d'infiltrations,

- le bail met à la charge du preneur l'entretien des lieux à l'exception des grosses réparations de l'article 606 du code civil et Mme [L] ne justifie ni que le système de climatisation installé dans les locaux serait préexistant à la signature du bail ni que cet équipement serait affecté de vices,

- s'agissant des facteurs de commercialité, c'est à bon droit que l'expert a relevé que le salon de coiffure ne bénéficiait pas d'un parking qui lui est propre ; que pour autant l'[Adresse 3] proposait 50 places de stationnement gratuites, bilatérales depuis l'existence de travaux réalisés par la commune en 2007/08 ; que cette offre de stationnement qui a répondu à une demande des résidents du quartier, a profité également au fonds de Mme [L] et qu'il s'agit en cela d'une évolution positive pour son commerce, même si une baisse de chiffre d'affaires est alléguée par cette dernière, élément dont il convient de ne pas tenir compte pour rejeter une demande de déplafonnement dans la mesure où le preneur est seul responsable de la gestion de son fonds de commerce,

- il y a donc lieu à déplafonnement du loyer,

- pour déterminer les prix couramment pratiqués dans le voisinage, l'expert s'est livré à une enquête de terrain et a vérifié les références communiquées par le conseil de la SCI Anvaron lors d'un second déplacement sur les lieux,

- il doit être noté que : ces 4 éléments de comparaison (4 salons de coiffure) sont tous situés plus près du centre de la commune alors que l'avenue du Champ de Mars ne compte que le salon de coiffure exploité par Mme [L], ces 4 salons sont tous positionnés sur un axe se déployant de part et d'autre de l'hyper centre de la commune, marqué d'une commercialité plus importante,

- les surfaces pondérées de ces locaux de comparaison sont toutes inférieures à celles du preneur,

- c'est à bon droit qu'une valeur de 120 euros/m² a alors été retenue par l'expert qui a tenu compte de la plus grande surface du salon, de sa situation excentrée et des facilités de stationnement dont il bénéficie, après avoir répondu aux dires des parties.

Le jugement critiqué mérite en conséquence d'être confirmé en ce qu'il a fixé à la somme de 9 900 euros HT et hors charge la valeur locative à compter du 1er octobre 2015, outre intérêts au taux légal à compter du renouvellement, avec capitalisation à compter de la délivrance de l'assignation en fixation du loyer du bail renouvelé délivrée par le bailleur le 25 novembre 2016.

Le premier juge a également très justement mis à la charge de la SCI Anvaro les dépens comprenant notamment les frais d'expertise et une indemnité de procédure de 1 500 euros, une nouvelle indemnité de 3 000 euros devant être mise à sa charge à ce titre en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 23 juillet 2018 par le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Lyon,

Y ajoutant,

Condamne la SCI Anvaro aux dépens,

Déboute la SCI Anvaro de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à Mme [L] une indemnité de 3 000 euros à ce titre.

LE GREFFIER LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre civile a
Numéro d'arrêt : 18/06901
Date de la décision : 08/09/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-09-08;18.06901 ?
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