AFFAIRE PRUD'HOMALE
RAPPORTEUR
N° RG 18/04330 - N° Portalis DBVX-V-B7C-LYJM
[D]
C/
S.A.S. DIVA SALON
APPEL D'UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de ROANNE
du 28 Mai 2018
RG : 17/00004
COUR D'APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022
APPELANTE :
[N] [D]
[Adresse 9]
[Localité 17]
représentée par Me Olivier LE GAILLARD de la SELARL BLG AVOCATS, avocat au barreau de ROANNE
INTIMÉE :
Société DIVA SALON
[Adresse 5]
[Localité 7]
représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON,
ayant pour avocats plaidants Me Marielle ZUCCHELLO, avocat au barreau de PARIS et Me Joël GRANGE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
PARTIE INTERVENANTES :
S.E.L.A.R.L. [H] prise en la personne de Me [O] [H] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société DIVA SALON
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON
ayant pour avocats plaidants Me Marielle ZUCCHELLO, avocat au barreau de PARIS et Me Joël GRANGE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
Société [F]-CHARPENTIER prise en la personne de Me [Y] [F] ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société DIVA SALON
[Adresse 6]
[Localité 13]
représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON
ayant pour avocats plaidants Me Marielle ZUCCHELLO, avocat au barreau de PARIS et Me Joël GRANGE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
S.E.L.A.F.A. MJA prise en la personne de Me [V] [P] ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société DIVA SALON
[Adresse 1]
[Adresse 16]
[Localité 14]
représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON
ayant pour avocats plaidants Me Marielle ZUCCHELLO, avocat au barreau de PARIS et Me Joël GRANGE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
S.E.L.A.R.L. AJ PARTENAIRES prise en la personne de Me [L] [A] ès-qualités d'administrateur judiciaire de la société DIVA SALON
[Adresse 4]
[Localité 11]
représentée par Me Gaël SOURBE de la SCP BAUFUME ET SOURBE, avocat au barreau de LYON
ayant pour avocats plaidants Me Marielle ZUCCHELLO, avocat au barreau de PARIS et Me Joël GRANGE de la SCP FLICHY GRANGÉ AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
Association UNEDIC DELEGATION AGS D ILE DE FRANCE OUEST Association déclarée, représentée par sa directrice nationale Madame [E] [C]
[Adresse 3]
[Localité 15]
représentée par Me Cécile ZOTTA de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE CHALON SUR SAONE Association déclarée, représentée par sa directrice nationale Madame [E] [C]
[Adresse 10]
[Localité 12]
représentée par Me Cécile ZOTTA de la SCP J.C. DESSEIGNE ET C. ZOTTA, avocat au barreau de LYON
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 05 Mai 2022
Présidée par Bénédicte LECHARNY, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Elsa SANCHEZ, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
- Nathalie PALLE, président
- Bénédicte LECHARNY, conseiller
- Thierry GAUTHIER, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 08 Septembre 2022 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Président et par Elsa SANCHEZ, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Suivant contrat de travail à durée indéterminée du 2 mai 1996, Mme [N] [D] (la salariée) a été engagée par la société Diva France en qualité d'agent de production.
Elle a été placée en arrêt de travail à compter du 2 septembre 2014 à la suite d'une maladie professionnelle.
Par jugement du 29 février 2016, le tribunal de commerce de Meaux a prononcé le redressement judiciaire de la société Diva France, puis par jugement du 23 mai 2016, il a arrêté un plan de cession des activités de la société Diva France et les actifs de cette dernière ont été repris par la société Perceva avec faculté de substitution au profit de la société nouvellement créée France Bedding Group (devenue Adova Group) ou de l'une des ses filiales. La société Diva Salon, filiale du groupe Adova, a ainsi repris la société Diva France.
Par courrier du 9 juin 2016, l'administrateur judiciaire de la société Diva France a indiqué à la salariée que son poste ne figurait pas parmi les postes repris dans le cadre du plan de cession et qu'elle était donc concernée par une procédure de licenciement économique. La salariée a été dispensée d'activité dans l'attente du déroulement de cette procédure
Par courrier du 23 juin 2016, l'administrateur judiciaire a informé la salariée que le repreneur souhaitait reprendre trois postes de conducteurs de machine et un poste d'encolleur supplémentaires. En vertu des critères d'ordre dans la catégorie des conducteurs de machine, la salariée n'a pas été licenciée et son contrat de travail a été transféré en application de l'article L. 1224-1 du code du travail au sein de la société Diva Salon.
Le 3 octobre 2016, la salariée a été convoquée à une visite médicale de reprise conformément à l'article R. 4626-22 du code du travail au terme de laquelle elle a été déclarée inapte à son poste.
Le 18 octobre 2016, à l'issue de la seconde visite de reprise, la salariée a de nouveau été déclarée inapte à son poste de conducteur de machine, avec les précisions suivantes : « un poste en reclassement pourrait être proposé à la salariée respectant les préconisations suivantes :
- pas de travaux bras au dessus des épaules
- pas de travaux sollicitant les membres supérieurs : avec des mouvements répétés associant des manutentions supérieures à 2 kg ou des efforts répétés de traction poussée ».
Par courrier du 25 octobre 2016, la société Diva Salon a informé la salariée qu'elle allait chercher les postes de reclassement disponibles en son sein et dans le groupe et lui a adressé un questionnaire concernant les offres de reclassement à l'étranger.
Le 2 novembre 2016, la salariée a précisé à la société Diva Salon qu'elle accepterait toutes propositions « dès lors qu'elles ne comportent pas de modifications substantielles de son contrat de travail concernant notamment la rémunération, le temps de travail et la localisation de [s]on emploi ».
Le 3 novembre 2016, la société Diva Salon a convoqué la salariée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 15 novembre 2016, puis par courrier du 18 novembre 2016, elle lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement dans les termes suivants :
« Suite à l'entretien préalable que nous avons eu le 15 novembre 2016, nous avons le regret de vous notifier votre licenciement pour le motif suivant :
- inaptitude au poste de travail constatée par le médecin du travail à la suite de laquelle votre reclassement dans l'entreprise s'est révélé impossible.
Nous avons par ailleurs évoqué les éventuelles possibilités de reclassement au sein d'autres établissements de notre groupe, ainsi que l'avis des délégués du personnel que nous avions recueilli en date du 02 novembre 2016. Vous nous avez fait part de l'impossibilité d'envisager un reclassement sur une autre entreprise.
Votre contrat de travail prendra fin à dater de la première présentation de la présente à votre domicile car votre inaptitude rend impossible l'exécution de votre préavis.
Vous bénéficiez cependant d'une indemnité de préavis calculée et versée conformément aux dispositions légales. [...] ».
Par requête du 24 janvier 2017, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Roanne aux fins de voir dire et juger que la société Diva Salon n'a pas satisfait à son obligation de reclassement et que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle a également sollicité la condamnation de la société à lui verser diverses sommes à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation de reclassement, absence d'information par écrit des motifs s'opposant au reclassement et exécution déloyale du contrat.
Par jugement du 28 mai 2018, le conseil de prud'hommes, en sa formation paritaire, a :
- constaté que la société Diva Salon n'a pas satisfait à son obligation de reclassement,
- dit et jugé que le licenciement de la salariée s'apprécie dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- condamné la société Diva Salon à verser à la salariée un complément d'indemnité de licenciement d'un montant de 6 888,88 euros,
- condamné la société Diva Salon à payer à la salariée la somme de 1 698,50 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'information par écrit des motifs s'opposant au reclassement,
- débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,
- condamné la société Diva Salon à verser à la salariée la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- débouté les parties de toutes autres demandes,
- dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens.
La salariée a interjeté appel de ce jugement, le 14 juin 2018.
Par jugement du 16 juin 2020, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'égard de la société Diva Salon et a désigné en qualité de mandataires judiciaires, la société MJA et la société [H], et en qualité d'administrateurs judiciaires, la société [F]-Charpentier et la société AJ Partenaires.
Par jugement du 1er octobre 2020, le tribunal a converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire, a mis fin à la mission des sociétés [F]-Charpentier et AJ Partenaires, et a nommé les sociétés MJA et [H] en qualité de liquidateurs judiciaires (les liquidateurs judiciaires).
Dans ses dernières conclusions notifiées le 1er octobre 2020, la salariée demande à la cour de :
- déclarer recevable et bien-fondé l'appel interjeté,
- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Roanne le 28 mai 2018 en ce qu'il a dit que la société Diva Salon n'avait pas satisfait à son obligation de reclassement et que par conséquent son licenciement s'appréciait dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- réformer le jugement entrepris en ce qu'il a limité son indemnisation au paiement d'un complément d'indemnité de licenciement d'un montant de 6 888,88 euros et fixé au passif du redressement judiciaire de la société Diva Salon une somme de 27 176 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
- confirmer le jugement rendu en ce qu'il a condamné la société Diva Salon au paiement d'une somme de 1 698,50 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'information par écrit des motifs s'opposant à son reclassement,
- réformer le jugement rendu en ce qu'il l'a déboutée de sa demande au titre de l'exécution déloyale de son contrat de travail et lui allouer une somme de 15 000 euros à titre de dommages-intérêts,
- confirmer le jugement rendu le 28 mai 2018 pour le surplus,
- juger que l'ensemble des sommes qui lui seront allouées bénéficieront de la garantie AGS,
Y ajoutant,
- condamner la société Diva Salon au paiement d'une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, et aux entiers dépens,
- ordonner que, dans l'hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par le jugement à intervenir, l'exécution devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier de justice, le montant des sommes retenues par l'huissier, en application de l'article R. 444-55 du code de commerce et son tableau 3-1 annexé, devra être supporté par le débiteur, en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d'exécution ne prévoyant qu'une simple faculté de mettre à la charge du créancier lesdites sommes.
Dans leurs dernières conclusions notifiées le 23 octobre 2020, la société Diva Salon, les sociétés [F]-Charpentier et AJ Partenaires et les liquidateurs judiciaires demandent à la cour de :
A titre principal,
- mettre hors de cause la société [F]-Charpentier prise en la personne de Me [F], et la société AJ Partenaires prise en la personne de Me [A], ès-qualités d'administrateurs judiciaires,
- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Roanne du 28 mai 2016 en ce qu'il a:
jugé que la société Diva Salon n'a pas satisfait à son obligation de reclassement,
jugé que le licenciement de la salariée s'apprécie dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,
condamné la société Diva Salon à verser à la salariée un complément d'indemnité de licenciement d'un montant de 6 888,88 euros,
condamné la société Diva Salon à payer à la salariée la somme de 1 698,50 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'information par écrit des motifs s'opposant au reclassement,
condamné la société Diva Salon à verser à la salariée la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
dit que chaque partie supportera la charge de ses dépens,
- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Roanne du 28 mai 2016 en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,
En conséquence,
- dire et juger que la société Diva Salon a bien respecté les exigences légales s'agissant de la procédure de reclassement et de licenciement de la salariée,
- dire et juger que la société Diva Salon a loyalement exécuté le contrat de travail de la salariée,
- débouter la salariée de l'ensemble de ses demandes en dommages-intérêts,
- condamner la salariée aux entiers dépens et à la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
- limiter à la somme de 12 mois de salaire, soit 20 382 euros bruts, le montant des dommages-intérêts au titre du manquement à l'obligation de reclassement,
- limiter à la somme de 1 euro symbolique le montant des dommages-intérêts au titre de l'absence de notification des motifs s'opposant au reclassement de la salariée,
- limiter à la somme de 1 euro symbolique le montant des dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail de la salariée.
Dans ses conclusions notifiées le 17 décembre 2020, l'Unedic, délégations AGS-CGEA d'Ile-de-France Ouest et de Chalon-sur-Saône, demande à la cour de :
- dire et juger recevable et bien-fondé l'intervention volontaire du CGEA d'Ile-de-France Ouest,
- mettre hors de cause le CGEA de Chalon-sur-Saône,
- dire et juger bien-fondé l'appel incident formé par la société représentée par ses mandataires,
- dire et juger non-fondé l'appel de la salariée,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que le licenciement était dénué de cause réelle et sérieuse,
- infirmer le jugement entrepris en ses condamnations,
- confirmer le jugement entrepris quant au rejet de la demande de dommages-intérêts au titre de l'exécution déloyale du contrat de travail,
Et, statuant à nouveau,
- débouter la salariée de ses demandes de dommages-intérêts,
Très subsidiairement,
- réduire le quantum des dommages-intérêts dans la limite du préjudice démontré,
En tout état de cause,
- dire et juger que l'article 700 du code de procédure civile n'est pas garanti par l'AGS,
- dire et juger que l'AGS ne devra procéder à l'avance des créances visées aux articles L. 3253-6 et L. 3253-8 et suivants du code du travail, que dans les termes et conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19, L. 3253-20, L. 3253-21, L. 3253-15 et L. 3253-17 du code du travail,
- dire et juger que l'obligation du CGEA de faire l'avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s'exécuter que sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
- les mettre hors dépens.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 19 avril 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1. Sur la mise hors de cause des sociétés [F]-Charpentier et AJ Partenaires, ès qualités d'administrateurs judiciaires de la société Diva Salon
Le tribunal de commerce de Paris ayant, par jugement du 1er octobre 2020, converti la procédure de redressement judiciaire en liquidation judiciaire et mis fin à la mission des sociétés [F]-Charpentiers et AJ Partenaires, il y a lieu de les mettre hors de cause.
2.Sur la mise hors de cause du CGEA de Chalon-sur-Saône et l'intervention volontaire du CGEA d'Ile-de-France Ouest
Il convient de recevoir l'intervention volontaire à l'instance du CGEA d'Ile-de-France Ouest, compétent en l'espèce, et de mettre hors de cause le CGEA de Chalon-sur-Saône.
3. Sur le bien-fondé du licenciement
La salariée conteste son licenciement en invoquant à l'encontre de la société Diva Salon une absence de recherche de reclassement sérieuse aux motifs que :
- elle ne prouve pas avoir procédé à des recherches auprès des différentes sociétés du groupe en n'établissant pas l'envoi du courrier du 25 octobre 2016 à celles-ci,
- elle a convoqué la salarié à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement sans être en possession de toutes les réponses des sociétés,
- elle ne justifie pas avoir tenté de reclasser la salariée au sein même du site de [Localité 17].
La salariée sollicite par conséquent la confirmation du jugement qui a retenu que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse. Elle fait observer toutefois que le conseil de prud'hommes a appliqué le barème issu de l'ordonnance du 22 septembre 2017 qui n'était pas applicable aux licenciements prononcés antérieurement au 24 septembre 2017 et que les premiers juges ont en outre déduit du montant des dommages-intérêts issus du barème le montant de l'indemnité de licenciement perçue alors que ces sommes n'ont pas la même nature, ni la même finalité. Elle sollicite dès lors la réformation du jugement et l'octroi d'une indemnité de 27 176 euros à titre de dommages-intérêts, soit l'équivalent de 16 mois de salaire.
La société Diva Salon et ses liquidateurs judiciaires répliquent qu'à la suite de l'avis d'inaptitude de la salariée, il n'existait aucune solution de reclassement au sein de l'entreprise; que la société a, le 25 octobre 2016, sollicité l'ensemble des autres sociétés du groupe afin qu'elles recherchent des postes de reclassement susceptibles d'être conformes aux prescriptions du médecin du travail, bien que la salariée ait fait part de sa volonté de ne pas être reclassée en dehors de son secteur géographique ; que ces sociétés ont répondu qu'elles ne disposaient pas de postes répondant aux critères demandés, étant observé que toutes les entités du groupe avaient été placées en redressement ou liquidation judiciaires en février 2016. Ils soulignent que le détail des recherches de reclassement n'avait pas à figurer de manière exhaustive dans la lettre de licenciement contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges ; que la société n'avait pas à aménager le poste de la salariée puisque le médecin du travail avait rendu un avis d'inaptitude et non un avis d'aptitude avec réserves; qu'en tout état de cause, aucune adaptation du poste n'était possible. Ils ajoutent que la société n'a aucunement précipité la procédure de licenciement et que la consultation des délégués du personnel est intervenue régulièrement, avant l'engagement de la procédure de licenciement. Enfin, ils font observer qu'aucun recrutement n'est intervenu entre le 1er juin 2016 et juillet 2017, comme en témoigne le registre du personnel.
Le CGEA d'Ile-de-France Ouest rappelle que la présente action ne peut en aucun cas conduire à sa condamnation directe mais uniquement, le cas échéant, à la fixation de créances salariales à la liquidation judiciaire de la société Diva Salon ; que s'agissant du licenciement, il ne dispose d'aucun élément particulier et s'en rapporte aux explications développées par la société Diva Salon, représentée par ses mandataires judiciaires ; qu'en tout état de cause, la salariée devra être déboutée de sa demande de dommages-intérêts; que conformément aux dispositions applicables et à la jurisprudence constante de la Cour de cassation, il appartient à la salariée de justifier du quantum du préjudice qu'elle invoque au-delà de l'indemnisation prévue par les textes.
Sur ce,
Aux termes de l'article L. 1226-10 du code du travail, dans sa rédaction applicable à la cause, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existant dans l'entreprise. Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l'aptitude du salarié à bénéficier d'une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.
Si le médecin du travail a constaté l'inaptitude physique d'origine professionnelle d'un salarié, l'employeur est tenu à une obligation de reclassement de ce salarié.
A ce titre, il doit faire des propositions loyales et sérieuses, et doit assurer l'adaptation du salarié à son emploi en lui assurant une formation complémentaire. L'obligation de reclassement s'impose à l'employeur et à défaut, le licenciement est privé de cause réelle et sérieuse. Elle doit s'effectuer au sein de l'entreprise et au sein du groupe auquel elle appartient, parmi les entreprises entre lesquelles une permutation en tout ou partie du personnel est possible.
En l'espèce, le 18 octobre 2016, à l'issue d'une seconde visite médicale de reprise, la salariée a été déclarée inapte à son poste de conducteur de machine.
La loi ne fait pas obligation à l'employeur de donner, aux termes de la lettre de licenciement, des précisions sur les possibilités d'adaptation ou non du poste de travail du salarié pour lequel celui-ci a été déclaré inapte, contrairement à ce qu'ont indiqué les premiers juges.
Elle impose uniquement à l'employeur de mentionner l'inaptitude et l'impossibilité de reclassement ce qui a bien été formulé en l'espèce.
La société Diva Salon et ses liquidateurs judiciaires démontrent par la production du courrier du 25 octobre 2016 (leurs pièces 5 et 6) et des réponses apportées à celui-ci, avoir procédé à des recherches de reclassement de la salariée auprès des sociétés du groupe.
Il est constant que par courrier du 2 novembre 2016, la salariée a indiqué à la société Diva Salon qu'elle n'accepterait qu'une proposition ne comportant pas de modification substantielle de son contrat de travail, s'agissant du temps de travail, de la rémunération et de la localisation de son emploi, situé au Coteau, près de [Localité 17] (Loire). Celle-ci ne peut donc faire grief à l'employeur de ne pas avoir attendu de recevoir l'ensemble des réponses des sociétés du groupe situées dans d'autres régions de France, et notamment une réponse (négative) de la société Paris Bedding intervenue le 14 novembre 2016, pour la convoquer à un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement, alors qu'il ressort de son courrier qu'elle ne souhaitait pas changer de localisation géographique.
La société Diva Salon établit par ailleurs, par la production du registre du personnel et de l'état des effectifs, qu'elle n'a pu procéder à un reclassement de la salariée sur son site, faute d'emploi disponible et compatible avec son état de santé.
Elle démontre encore avoir consulté les délégués du personnels le 2 novembre 2016, soit après la constatation de l'inaptitude le 18 octobre 2016 et avant l'engagement de la procédure de licenciement le 3 novembre 2016.
Enfin, il ne saurait lui être reproché d'avoir précipité l'engagement de la procédure de licenciement, alors que le second avis médical est daté du 18 octobre 2016, que la salariée a été convoquée à l'entretien préalable à un éventuel licenciement le 15 novembre 2016 et a été licenciée par lettre notifiée le dernier jour du délai d'un mois prévu par l'article L. 1226-11 du code du travail.
Il s'ensuit que la société Diva Salon a procédé à une recherche loyale et sérieuse de reclassement de la salariée, laquelle ne peut valablement soutenir que le licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Le jugement est par conséquent infirmé et la salariée est déboutée de sa demande de dommages-intérêts.
4. Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect de l'obligation d'exposer les motifs s'opposant au reclassement
La salariée reproche à la société Diva Salon de ne pas lui avoir fait connaître par écrit, préalablement à la rupture de son contrat de travail, les motifs s'opposant à son reclassement.
La société Diva Salon et ses liquidateurs judiciaires répliquent que la salariée ne démontre pas avoir subi un quelconque préjudice résultant de l'absence de notification des motifs s'opposant à son reclassement ; que la seule circonstance que ces motifs n'aient pas été portés à sa connaissance, par écrit, avant l'engagement de la procédure de licenciement n'est pas de nature à caractériser, en soi, l'existence d'un préjudice ; que la salariée ne pourrait dès lors se voir octroyer que la somme d'un euro symbolique.
Le CGEA d'Ile-de-France Ouest estime que la salariée doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour prétendue absence de notification écrite des motifs s'opposant à son reclassement, dès lors qu'elle sollicite par ailleurs une indemnisation au titre du manquement à l'obligation de reclassement.
Sur ce,
Selon l'article L. 1226-12, alinéa 1er, du code du travail, lorsque l'employeur est dans l'impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s'opposent au reclassement .
Le non-respect de cette obligation, laquelle doit être remplie avant que ne soit engagée la procédure de licenciement, entraîne pour le salarié un préjudice réparé par l'allocation de dommages-intérêts dont le montant est souverainement apprécié par les juges du fond.
En l'espèce, il ne ressort d'aucune pièce et il n'est pas sérieusement discuté que la société Diva Salon n'a, à aucun moment, avisé la salariée par écrit des motifs s'opposant à son reclassement avant d'engager la procédure de licenciement.
Le jugement est par conséquent confirmé en ce qu'il a alloué à la salariée une indemnité de 1 698,50 euros au titre du préjudice subi, celle-ci n'ayant pu en particulier modifier, le cas échéant, ses souhaits de reclassement eu égard aux motifs avancés par l'employeur. Compte tenu de la procédure collective en cours, il convient de fixer la créance au passif de la liquidation judiciaire de la société Diva Salon.
5. Sur la demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail
La salariée rappelle qu'elle a appris par courrier du 26 mai 2016 que son poste n'était pas repris et qu'une procédure de licenciement allait être entreprise à son encontre ; qu'elle a reçu confirmation de son licenciement par courrier du 9 juin 2016 mais que par courrier du 23 juin 2016, elle a eu connaissance de ce qu'elle ne serait plus licenciée ; qu'ainsi, pendant un mois, elle aurait pu mettre fin d'elle-même à son contrat de travail en optant pour le plan de départ volontaire ou en adhérant au contrat de sécurisation professionnelle ; que le but de la société Diva Salon était de tenter de la faire partir d'elle-même et à bon compte, le directeur du site sachant pertinemment que son état de santé poserait problème lors de la reprise ; que néanmoins, la manoeuvre a échoué, les délégués du personnel ayant fait pression pour que son poste soit conservé ; que ce comportement est constitutif d'une exécution déloyale du contrat de travail et que son préjudice est certain.
La société Diva Salon et ses liquidateurs judiciaires s'opposent à la demande, rappelant qu'alors que le poste de la salariée devait être supprimé au regard de l'offre de reprise, ce dont cette dernière avait été informée, la société Diva Salon a finalement accepté, sur la demande des délégués du personnel, de reprendre un nombre de postes supérieur à celui arrêté dans l'offre de reprise ; que par courrier du 23 juin 2016, les administrateurs judiciaire ont indiqué à la salariée que, par application des critères d'ordre, son contrat de travail serait finalement transféré à la société Diva Salon ; que la salariée a été fixée rapidement sur sa situation professionnelle, moins de deux semaines s'étant écoulées entre les deux courriers ; que si la salariée avait été licenciée pour motif économique par le cédant, la société Diva France, elle n'aurait jamais été salariée de la société Diva Salon, de sorte que son raisonnement est absurde ; qu'elle ne voulait manifestement pas que son contrat de travail avec la société cédante soit rompu puisqu'elle ne s'est pas portée candidate à la procédure de départ volontaire qui était ouverte et à laquelle elle était éligible ; qu'il ne peut être reproché à la société Diva Salon d'avoir conservé quatre postes supplémentaires dont le sien et que le licenciement pour inaptitude ne caractérise pas une exécution déloyale du contrat de travail.
Le CGEA d'Ile-de-France Ouest fait valoir qu'aucun acte d'exécution déloyale ne peut être caractérisé et qu'à défaut de démonstration d'un préjudice distinct avéré, la demande de dommages-intérêts de ce chef ne peut qu'être rejetée.
Sur ce,
Il ne ressort pas des circonstances de la cause et des explications de la salariée une attitude déloyale de la société Diva Salon dans l'exécution de son contrat de travail alors que celle-ci a conservé des postes supplémentaires sur la demande des délégués du personnel, dont celui de la salariée par I'effet des critères d'ordre arrêtés par l'administrateur judiciaire.
La salariée n'est pas davantage fondée à soutenir qu'elle aurait été privée de la procédure de licenciement économique par le fait de la société Diva Salon, alors qu'elle aurait pu faire le choix d'un départ volontaire.
Les premiers juges ont exactement relevé au surplus que son licenciement est lié à une inaptitude avec impossibilité de reclassement et non à une exécution déloyale du contrat de travail. Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu'il a débouté la salariée de sa demande de dommages-intérêts.
6. Sur les demandes accessoires
Il y a lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l'Unedic, délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest, qui sera tenue dans les limites de ses obligations légales résultant des dispositions des articles L. 3253-15 et suivants du code du travail.
Le jugement est confirmé en ses dispositions relatives aux frais irrépétibles de première instance, sauf à préciser que l'indemnité de 2 000 euros sera fixée au passif de la liquidation judiciaire.
Les liquidateurs judiciaires, parties perdantes au principal, sont tenus aux dépens de première instance et d'appel.
En cause d'appel, il n'est pas inéquitable, au vu des circonstances, de laisser à chaque partie la charge de ses frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement déféré :
en ce qu'il a débouté Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,
ainsi qu'en celles de ses dispositions relatives aux dommages-intérêts pour absence d'information par écrit des motifs s'opposant au reclassement et aux frais irrépétibles, sauf à préciser que les sommes de 1 698,50 euros à titre de dommages-intérêts pour absence d'information par écrit des motifs s'opposant au reclassement et de 2 000 euros à titre d'indemnité pour frais irrépétibles sont fixées au passif de la société Diva Salon,
L'INFIRME pour le surplus,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,
MET hors de cause la société [F]-Charpentier, prise en la personne de Me [F], la société AJ Partenaires, prise en la personne de Me [A], administrateurs judiciaires, et l'Unedic, délégation AGS CGEA de Chalon-sur-Saône,
REÇOIT l'Unedic, délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest, en son intervention volontaire,
DÉBOUTE Mme [D] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
DÉCLARE le présent arrêt opposable à l'Unedic, délégation AGS CGEA d'Ile-de-France Ouest, qui sera tenue dans les limites de ses obligations légales résultant des dispositions des articles L. 3253-15 et suivants du code du travail et sur présentation d'un relevé par le mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l'absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement,
CONDAMNE les sociétés MJA, prise en la personne de Mme [V] [P], et [H], prise en la personne de M. [O] [H], ès-qualités de liquidateurs judiciaires de la société Diva Salon, aux dépens de première instance et d'appel,
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE