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24/08/2022 | FRANCE | N°21/06986

France | France, Cour d'appel de Lyon, 8ème chambre, 24 août 2022, 21/06986


N° RG 21/06986 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N24Q









Décision du Juge des contentieux de la protection de Nantua au fond du 03 mai 2021



RG : 11-21-0098





[E]



C/



[Y]





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



8ème chambre



ARRÊT DU 24 Août 2022







APPELANT :



M. [X]

Né le 21 janvier 1951 à Parimaribo (Surinam),

Retraité, de nat

ionalité Canadienne

Demeurant [Adresse 1]



Représenté par Me Emmanuelle DEVEAUX, avocat au barreau D'AIN



INTIMÉ :



M. [W] [Y]

Né le 17 Décembre 1988 à Dakar Sénégal

De nationalité Italienne

Demeurant [Adresse 2]



Défaillant





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Dat...

N° RG 21/06986 - N° Portalis DBVX-V-B7F-N24Q

Décision du Juge des contentieux de la protection de Nantua au fond du 03 mai 2021

RG : 11-21-0098

[E]

C/

[Y]

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

8ème chambre

ARRÊT DU 24 Août 2022

APPELANT :

M. [X]

Né le 21 janvier 1951 à Parimaribo (Surinam),

Retraité, de nationalité Canadienne

Demeurant [Adresse 1]

Représenté par Me Emmanuelle DEVEAUX, avocat au barreau D'AIN

INTIMÉ :

M. [W] [Y]

Né le 17 Décembre 1988 à Dakar Sénégal

De nationalité Italienne

Demeurant [Adresse 2]

Défaillant

******

Date de clôture de l'instruction : 03 Mai 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Juillet 2022

Date de mise à disposition : 24 Août 2022

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

- Christine SAUNIER-RUELLAN, président

- Karen STELLA, conseiller

- Véronique MASSON-BESSOU, conseiller

assistés pendant les débats de William BOUKADIA, greffier

A l'audience, [H] [Z] a fait le rapport, conformément à l'article 804 du code de procédure civile.

Arrêt M. [W] [Y] Réputé contradictoire, la déclaration d'appel ayant été signifiée à l'intimé le 15 novembre 2021 à sa personne

Rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Christine SAUNIER-RUELLAN, président, et par William BOUKADIA, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

****

Le 26 janvier 2021, [B] [E] a assigné [W] [Y] devant le juge du contentieux de la protection du tribunal de proximité de NANTUA aux fins de voir :

prononcer la résiliation du bail verbal le liant à [W] [Y] et ordonner son expulsion ;

condamner Monsieur [Y] à lui payer 4 295 euros pour les loyers et charges impayés au 1er janvier 2021 outre le dépôt de garantie ;

condamner Monsieur [Y] à lui payer 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre les dépens.

Cité en l'étude, le défendeur n'a pas comparu ni été représenté.

Par jugement du 3 mai 2021, le juge du contentieux de la protection du tribunal de proximité de NANTUA a':

débouté Monsieur [E] de l'intégralité de ses demandes ;

condamné Monsieur [E] aux dépens de l'instance.

Le juge a retenu en substance que :

le demandeur ne prouvait pas qu'il a consenti le bail verbal allégué ;

si lors des tentatives de signification du commandement de payer du 4 novembre 2020 et de l'assignation du 26 janvier 2021, l'huissier de justice a relevé le nom d'[W] [Y] sur la boîte aux lettres, les pièces produites ne suffisent pas à pallier le défaut de production d'un bail écrit ;

il n'est aucune preuve que le demandeur est propriétaire du local qu'il prétend avoir donné à bail ;

aucun constat d'huissier n'est produit pour faire constater l'occupation du bien par [W] [Y] ;

la simple reproduction d'un courrier électronique par un voisin à une agence Foncia dont la fonction précise n'est pas mentionnée ne peut compenser cette légèreté probatoire ;

à supposer qu'un bail verbal ait réellement été conclu, le montant du loyer convenu n'est pas établi et aucun élément ne permet au juge de l'évaluer au vu des caractéristiques du bien.

Par déclaration électronique du 15 septembre 2021, le conseil de [X] a interjeté appel du jugement en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et condamné aux entiers dépens.

Suivant ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 12 octobre 2021, [B] [E] demande à la Cour de':

Vu les articles 1103, 1217 et 1741 du code civil et la loi du 6 juillet 1989,

infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau,

rejeter toutes fins ou conclusions contraires ;

déclarer recevable la demande aux fins de voir constater la résiliation du bail d'habitation ;

constater qu'[W] [Y] n'a pas réglé l'intégralité des loyers depuis le mois de septembre 2020 ;

résilier le bail verbal conclu entre Monsieur [E] et Monsieur [Y] se rapportant à la location de l'appartement situé [Adresse 2] ;

déclarer [W] [Y] occupant sans droit ni titre des locaux dont s'agit ;

ordonner en conséquence à celui-ci de libérer les lieux après avoir satisfait aux obligations incombant au locataire sortant ;

supprimer le délai de deux mois prévu à l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 modifié par la loi du 29 juillet 1998 ;

dire qu'à défaut, il pourra après signification d'un commandement de quitter les lieux faire procéder à son expulsion et à celle de tout occupant de son chef y compris, le cas échéant, avec le concours d'un serrurier et de la force publique et ce conformément aux dispositions de l'article L 411-1 à L 433-3 du code des procédure civile d'exécution et R 411-1 à R 451-1 du même code ;

condamner [W] [Y] à lui payer 12 295 euros somme arrêtée au 30 octobre 2021, somme à parfaire jusqu'à la date de résiliation ;

le condamner à lui verser 1 000 euros de dépôt de garantie ;

le condamner à lui payer les intérêts de retard au taux légal sur la somme de 13 295 euros outre somme à parfaire à la date de la résiliation, intérêts calculés à compter du 4 novembre 2020,

le condamner à payer à compter de la date de résiliation à lui payer une indemnité d'occupation au moins égale au loyer et charge courants jusqu'à la date effective et définitive des lieux ;

fixer le montant de cette indemnité à celui du loyer outre charges, soit 1 000 euros qui auraient été dus en l'absence de résiliation du bail ;

rappeler que conformément à l'article 514 du code de procédure civile, l'exécution provisoire est de droit ;

condamner Monsieur [Y] à lui payer 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

le condamner à payer les entiers dépens de l'instance comprenant le coût du commandement de payer, celui de la notification de l'assignation, et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'État dans le département.

Monsieur [Y] n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions lui ont été signifiées le 15 novembre 2021 à sa personne. Le présent arrêt sera réputé contradictoire à son égard.

Pour l'exposé des moyens développés par les parties, il sera fait référence conformément à l'article 455 du code de procédure civile à leurs écritures déposées et débattues à l'audience du 5 juillet 2022 à 9 heures.

A l'audience, le conseil de l'appelant a pu faire ses observations et/ou déposer ou adresser son dossiers. Puis, l'affaire a été mise en délibéré au 24 août 2022.

MOTIFS

A titre liminaire, les demandes des parties tendant à voir la Cour «'constater'» ou «'dire et juger'» ne constituant pas des prétentions au sens des articles 4, 5, 31, et 954 du code de procédure civile mais des moyens ou arguments au soutien des véritables prétentions, il n'y a pas lieu de statuer sur celles-ci.

Selon l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi, les faits nécessaires au succès de sa prétention.

Selon l'article 1315 du code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier du paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.

La charge de la preuve pèse sur Monsieur [E] s'agissant de sa qualité de propriétaire, de sa qualité de bailleur, et du montant de sa créance notamment.

Sur la qualité de propriétaire

Il ressort des pièces 9 et 10, soit le titre de propriété et l'attestation notariée, que [B] [E] a acquis un appartement n° 82 de 3 pièces sis au 9ème étage avec cave et parking sis [Adresse 2].

Sur l'existence d'un bail verbal

La preuve écrite d'un bail d'habitation n'est pas obligatoire. Lorsqu'un bail a reçu un commencement d'exécution, la preuve du bail verbal peut être rapportée par tous moyens comme l'occupation des lieux, le paiement des loyers, et la production de quittances.

Il s'agit d'établir la rencontre des consentements sur la chose louée et le montant du loyer pour rendre le bail verbal valable.

Les échanges de mails (pièce 11) entre [W] [Y] et [X] en août et septembre 2020 établissent sans doute possible qu'[W] [Y] est locataire de [X] et que des difficultés de paiement régulier du loyer mensuel sont apparues. Il est clairement fait état d'une location et de l'impatience grandissante de Monsieur [E] pour obtenir paiement de ses loyers au point qu'il lui a indiqué qu'il devrait, à défaut, partir de l'appartement. De ces échanges, il ressort que le loyer mensuel était convenu entre les parties à hauteur de 1 000 euros. Il ressort de la pièce 12, la preuve d'un paiement émanant d'[W] [Y] établissant un commencement d'exécution outre le fait qu'il a expliqué qu'il avait pris la liberté de sous-louer une chambre à une autre personne qui tarde à payer son dû.

Un autre échange de mails (pièce 15) établit qu'en octobre 2020, [W] [Y] ne comptait pas quitter l'appartement faute d'en avoir trouvé un autre. Il l'occupait dès lors nécessairement à cette date. Le 4 novembre 2020, l'huissier de justice a pu constater la présence de son nom sur la boîte aux lettres. En février 2021, des voisins se sont plaints à FONCIA des nuisances provenant du locataire de l'appartement 82, Monsieur [W] [Y] (pièce 16).

Dès lors, la preuve du bail verbal entre [B] [E] et [W] [Y] est suffisamment établie, s'agissant de l'appartement 82 sis [Adresse 2], pour un loyer contractuel mensuel de 1 000 euros.

Sur la résiliation du bail verbal et ses conséquences

La résiliation d'un bail verbal est possible. Si elle suit les règles prévues par la loi du 6 juillet 1989, ce bail verbal est risqué, le bailleur ne pouvant pas faire jouer de clause résolutoire, laquelle pour être valable doit être prévue par un contrat écrit. Ainsi, le bailleur doit demander la résiliation judiciaire du bail aux torts du locataire en application de l'article 1217 du code civil en établissant une faute suffisamment grave.

En l'espèce, il ressort suffisamment des éléments ci-dessus développés une faute suffisamment grave du locataire puisque son principal devoir, en application de l'article 7 a) de la loi du 6 juillet 1989, est de payer régulièrement ses loyers, ce qu'il ne fait pas de son propre aveu, l'intéressé n'ayant pas régularisé les causes de commandement de payer du 4 novembre 2020 dans les deux mois légaux et continuant de ne pas payer son loyer.

L'assignation aux fins de résiliation du bail a bien été dénoncée au représentant de l'État conformément aux dispositions de la loi du 6 juillet 1989.

En conséquence, la résiliation du bail verbal doit être prononcée aux torts d'[W] [Y] ainsi que son expulsion, étant devenu sans droit ni titre à la date du présent arrêt, et de celle de tout occupant de son chef au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier.

Sur la suppression du délai de deux mois pour quitter les lieux

L'appelant fait état d'un article abrogé, l'article 62 de la loi du 9 juillet 1991 modifié par la loi du 29 juillet 1998. Il s'agit en réalité de l'article L 412-1 du code des procédures civiles d'exécution. Ce délai de deux mois suivant un commandement de quitter les lieux ne peut être supprimé que sous certaines conditions strictes qui ne sont pas réunies au cas d'espèce, Monsieur [Y] n'étant pas entré dans les lieux par voie de fait et n'ayant pas fait échec à une procédure de relogement.

En outre, force est de constater que l'appelant a sollicité la suppression de ce délai légal sans développer le moindre moyen pour qu'il soit dérogé à ce principe.

La Cour dit n'y avoir lieu à suppression du délai de deux mois et qu'ainsi Monsieur [E] est autorisé à faire procéder à l'expulsion d'[W] [Y] et de tout occupant de son chef à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement de quitter les lieux.

Sur le montant de l'impayé

Il ne peut être tenu compte du dépôt de garantie de 1 000 euros à défaut de contrat écrit contresigné prévoyant expressément cette somme. Le montant de la créance de loyers impayés s'élève à la somme de 12 295 euros, somme arrêtée au mois d'octobre 2021 inclus avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 000 euros à compter du 4 novembre 2020, date du commandement de payer valant mise en demeure, et à compter du présent arrêt pour le surplus.

En conséquence, la Cour fait droit à la demande de [X] aux fins de condamnation d'[W] [Y] à lui payer la somme de 12 295 euros, somme arrêtée au mois d'octobre 2021 inclus avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 000 euros à compter du 4 novembre 2020, date du commandement de payer valant mise en demeure, et à compter du présent arrêt pour le surplus. La Cour le déboute de sa demande de condamnation au titre du dépôt de garantie non versé.

Il n'appartient pas à la Cour de faire des calculs de créance au titre d'une somme à parfaire puisqu'il appartenait à l'appelant d'actualiser le montant de sa créance, ce qu'il pouvait faire y compris après la clôture de l'instruction pour déterminer le montant exact de sa demande. La Cour n'a pas à statuer ultra petita ni à suppléer la carence des parties.

Sur l'indemnité d'occupation mensuelle

La Cour dispose, sur la base du loyer courant convenu, des éléments suffisants pour fixer à 1 000 euros le montant de l'indemnité mensuelle d'occupation due à compter du présent arrêt et jusqu'à libération effective des lieux.

Sur les demandes accessoires

Partie perdante, [W] [Y] doit supporter les entiers dépens de première instance comprenant le coût du commandement de payer, des notifications, des assignations au défendeur et au représentant de l'Etat et d'appel. La Cour infirme le jugement sur les dépens.

En équité, la Cour condamne [W] [Y] à payer la somme de 2 000 euros à [B] [E] au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Le pourvoi en cassation n'étant pas une voie de recours suspensive d'exécution, la demande relative à l'exécution provisoire est sans objet.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau,

prononce la résiliation du bail verbal conclu entre Monsieur [E] et Monsieur [Y] se rapportant à la location de l'appartement situé [Adresse 2], à compter du présent arrêt ;

déclare [W] [Y] occupant sans droit ni titre des locaux à compter du présent arrêt ;

dit que Monsieur [Y] doit libérer les lieux et qu'à défaut de départ volontaire dans un délai de deux mois à compter de la signification d'un commandement de quitter les lieux, Monsieur [X] est autorisé à faire procéder à son expulsion et à celle de tout occupant de son chef y compris le cas échéant avec le concours d'un serrurier et de la force publique ;

condamne [W] [Y] à payer à [B] [E] la somme de 12 295 euros, somme arrêtée au 30 octobre 2021 inclus avec intérêts au taux légal sur la somme de 3 000 euros à compter du 4 novembre 2020, date du commandement de payer valant mise en demeure, et à compter du présent arrêt pour le surplus ;

déboute Monsieur [E] de sa demande aux fins de suppression du délai de deux mois pour quitter les lieux et aux fins de condamnation d'[W] [Y] à lui verser 1 000 euros de dépôt de garantie ;

déboute [B] [E] aux fins de voir condamner [W] [Y] au titre d'une somme à parfaire au titre des loyers impayés entre novembre 2021 et juillet 2022 ;

condamne [W] [Y] à payer à [B] [E] à compter du présent arrêt une indemnité d'occupation d'un montant de 1 000 euros par mois jusqu'à la date effective et définitive des lieux ;

déclare sans objet la demande au titre de l'exécution provisoire de droit ;

condamne [W] [Y] à payer à [B] [E] la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

condamne [W] [Y] à payer les entiers dépens de première instance comprenant le coût du commandement de payer, celui de la notification de l'assignation, et celui de la notification de l'assignation au représentant de l'État dans le département ainsi que les dépens d'appel.

LE GREFFIERLE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 21/06986
Date de la décision : 24/08/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-08-24;21.06986 ?
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