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21/07/2022 | FRANCE | N°21/03419

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 21 juillet 2022, 21/03419


N° RG 21/03419

N° Portalis DBVX-V-B7F-NSIL















Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 28 avril 2021



RG : 2021f00852











Société ACCIMMO-PIERRE



C/



LA PROCUREURE GENERALE

S.A.S. ELUTIONS





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRÊT DU 21 Juillet 2022





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APPELANTE :



Société ACCIMMO-PIERRE

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102 et ayant pour avocat plaidant, Me Sophie COMMERCON, avocat au barreau de PARIS, substitué par M...

N° RG 21/03419

N° Portalis DBVX-V-B7F-NSIL

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 28 avril 2021

RG : 2021f00852

Société ACCIMMO-PIERRE

C/

LA PROCUREURE GENERALE

S.A.S. ELUTIONS

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRÊT DU 21 Juillet 2022

APPELANTE :

Société ACCIMMO-PIERRE

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentée par Me Vincent DE FOURCROY de la SELARL DE FOURCROY AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de LYON, toque : 1102 et ayant pour avocat plaidant, Me Sophie COMMERCON, avocat au barreau de PARIS, substitué par Me Laudine MALATRAY, avocat au barreau de LYON

INTIMEES :

Mme LA PROCUREURE GENERALE

[Adresse 1]

[Localité 4]

En la personne de Monsieur Fabrice TREMEL, substitut général,

S.A.S. ELUTIONS

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Olivier MOUSSA de la SELARL SHIFT AVOCATS, avocat au barreau de LYON, toque : 194

******

Date de clôture de l'instruction : 28 Avril 2022

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 05 Mai 2022

Date de mise à disposition : 21 Juillet 2022

Audience présidée par Anne-Marie ESPARBÈS, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne-Marie ESPARBÈS, président

- Catherine CLERC, conseiller

- Marie CHATELAIN, vice-présidente placée

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte d'huissier de justice du 15 mars 2021, exposant que sa locataire, après une ordonnance de référé du 6 juillet 2020 (constatant la résiliation du bail commercial du 7 novembre 2017 au 9 décembre 2019, la condamnant au paiement d'une dette locative de 181'120,35'€ arrêtée à mai 2020 et suspendant les effets de la clause résolutoire avec délais de paiement accordés sur 24 mois avec clause de déchéance), non-respect de l'échéancier, reprise des lieux le 15 février 2021 et divers actes d'exécution restés infructueux, et au vu d'une dette locative de 300'490,50'€ au 6 avril 2022, la SCPI Accimmo-Pierre a fait assigner la SAS Elutions afin de faire constater la cessation des paiements et d'en fixer la date, prononcer l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire de Elutions et, à titre subsidiaire, d'une liquidation judiciaire, ainsi que prononcer la nullité de tout acte à titre gratuit (article L.621-107 du code de commerce) fait dans les 6 mois précédant la date de cessation des paiements.

Par jugement du 28 avril 2021, ayant rejeté la demande de second renvoi formulée conjointement par les deux conseils sur la foi de pourparlers entre les parties et en l'absence à l'audience du conseil de la requérante, le tribunal de commerce de Lyon a :

débouté Accimmo-Pierre de sa demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire et subsidiairement de liquidation judiciaire à l'encontre de Elutions,

et dit que les dépens restent à la charge de la requérante.

Accimmo-Pierre a interjeté appel par acte du 3 mai 2021 pour critiquer son débouté de sa demande d'ouverture de redressement judiciaire et de celle subsidiaire de liquidation judiciaire.

Par conclusions du 14 avril 2022, fondées sur les articles L.631-1 et R.631-2 du code de commerce, Accimmo-Pierre demande à la cour par voie d'infirmation, la jugeant recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions, de :

constater la situation de cessation des paiements de Elutions,

à titre principal, ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de cette dernière avec toute conséquence de droit,

à titre subsidiaire, ouvrir une procédure de liquidation judiciaire avec toute conséquence de droit, en cas d'impossibilité manifeste de tout redressement de Elutions au sens de l'article L.640-1 du code de commerce,

et dire que les dépens seront employés en frais privilégiés de la procédure ainsi ouverte.

Par conclusions du 9 juillet 2021, fondées sur les articles L.631-1 et R.631-2 du code de commerce, Elutions demande à la cour de':

juger que la demande de Accimmo Pierre d'ouverture à son encontre d'une procédure de redressement judiciaire, subsidiairement de liquidation judiciaire, est irrecevable, et l'en débouter,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Accimmo Pierre de l'ensemble de ses demandes et lui a laissé à charge les dépens de première instance,

débouter Accimmo Pierre de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

condamner celle-ci à la somme de 2'000'€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

ainsi qu'aux dépens d'appel, dont distraction au profit de Me Moussa.

Le ministère public, par avis du 4 octobre 2021, a dit n'avoir pas d'observations.

MOTIFS

Sur l'irrecevabilité

L'article R.632-1 alinéa 2 du code de commerce dispose que «'la demande d'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire est à peine d'irrecevabilité, qui doit être soulevée d'office, exclusive de toute autre demande relative au même patrimoine, à l'exception d'une demande d'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire formée à titre subsidiaire'».

Le premier juge a motivé son jugement déboutant Accimmo-Pierre de son action, par l'impossibilité d'apprécier la demande en l'absence du requérant et le fait que la demande d'ouverture d'une procédure collective ne constitue pas un mode de règlement amiable des litiges, et en rappelant le texte de la disposition précitée visant l'irrecevabilité de toute «'autre demande'».

Ce «'débouté'» est prononcé à tort, dès lors que l'existence d'une autre demande que celle en ouverture de procédure collective, portée dans l'assignation par le créancier, constituée, selon les termes de cet acte rapportés par le jugement déféré, par une demande en prononcé de la nullité de tout acte à titre gratuit fondée sur l'article L.621-107 du code de commerce fait dans les 6 mois précédant la date de cessation des paiements, doit conduire à l'irrecevabilité totale de la demande, en application des termes exprès de R.632-1 alinéa 2 précité.

Le jugement déféré encourt donc l'infirmation de ce seul chef.

Cependant, l'article R.631-6 du code de commerce autorise la cour ayant annulé ou infirmé un jugement statuant sur l'ouverture d'un redressement judiciaire, d'office, à ouvrir une procédure de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire, et ce, d'autant plus qu'en l'espèce, Accimmo-Pierre limite sa demande en cause d'appel à l'ouverture d'une procédure collective.

Sur le fond

L'article L.631-1 du code de commerce dispose que la procédure de redressement judiciaire est ouverte au débiteur, tel que Elutions, qui, dans l'impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements, précisant que «'le débiteur qui établit que les réserves de crédit ou les moratoires dont il bénéficie de la part de ses créanciers lui permettent de faire face au passif exigible avec son actif disponible n'est pas en cessation des paiements'».

L'article L.640-1 du même code institue une procédure de liquidation judiciaire pour le débiteur, tel que Elutions, qui se trouve en état de cessation des paiements et dont le redressement est manifestement impossible.

La charge de la preuve appartient au requérant, soit en l'espèce Accimmo-Pierre.

S'agissant tout d'abord de l'état de cessation des paiements, Accimmo-Pierre justifie par ses productions, non seulement de son titre de créance, constitué du bail commercial conclu le 7 novembre 2017 avec Elutions, mais aussi de l'exigibilité de sa créance révélée par l'ordonnance de référé du 6 juillet 2020 qui a constaté la résiliation du bail de plein droit en organisant la suspension des effets de la clause résolutoire, mise en échec par l'absence de respect par Elutions, ainsi que par les divers décomptes attestant d'une dette de Elutions arrêtée au 6 avril 2022 d'un montant élevé de 300'490,50'€ constitutive d'un passif exigible.

De son côté, Elutions qui ne conteste ni le principe ni le montant de sa dette, fait état des discussions amiables avec Accimmo-Pierre pour invoquer un «'moratoire de fait'» accordé par son créancier.

Cependant, un tel moratoire, qui ne correspond pas à celui visé à l'article L.631-1 précité exigeant un accord effectif entre créancier et débiteur, n'est pas confirmé par Accimmo-Pierre, celle-ci au contraire, faisant état à l'encontre de Elutions d'une absence de compte bancaire, d'un défaut de fonds propres et rappelant l'absence de tout paiement de la part de Elutions depuis le 24 février 2020.

Ce dernier point est attesté par les décomptes produits et Elutions n'émet aucune protestation, ce qui est le cas aussi de l'absence de compte bancaire visé par un rapport (pièce 12 de l'appelante) qu'elle ne critique ni dans le fond ni dans la forme. Quant au manque de fonds propres, il se déduit de l'absence de toute proposition de règlement de la part de Elutions.

De plus, contrairement à ce que Elutions prétend, les diverses mesures d'exécution initiées par Accimmo-Pierre pour contrer son défaut de paiement des loyers depuis juillet 2018 (à savoir commandements de payer des 18 déc 2018 puis 8 novembre 2019, commandement aux fins de saisie-vente du 28 janvier 2021, procès-verbal de saisie-attribution du 10 février 2021), tous actes laissant persister une dette de 300'490,50'€ au 6 avril 2022, montant non discuté, corroborent l'impossibilité pour Elutions de faire face à cette dette avec un actif disponible, au sujet duquel elle ne vise d'ailleurs aucun document.

Quant à la date à retenir, à défaut de plus ample élément développé par Accimmo-Pierre, elle est provisoirement fixée eu égard aux éléments factuels précédemment retenus, à celle du prononcé de l'arrêt qui a retenu la caractérisation de l'état de cessation des paiements.

S'agissant ensuite de l'impossibilité pour Elutions de se redresser, aucun élément n'est avancé par Accimmo-Pierre qui ne développe aucun moyen de droit ou de fait, et ne produit aucun document sur ce point.

Par voie de conséquence, est prononcée l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire à l'égard de Elutions, avec toutes conséquences de droit comme visé au dispositif de l'arrêt.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Les dépens de première instance et d'appel sont imputés à la procédure collective, ce qui exclut l'application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de l'intimée d'autant plus qu'elle est partie perdante, et la demande d'indemnité de procédure de celle-ci est rejetée.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Infirme le jugement déféré, statuant à nouveau et ajoutant,

Constate l'état de cessation des paiements de la société Elutions,

Fixe provisoirement la date de cessation des paiements au 21 juillet 2022,

Prononce l'ouverture d'un redressement judiciaire à l'égard de la société Elutions,

Renvoie l'affaire devant le tribunal de commerce de Lyon aux fins de désignation des organes de la procédure, de fixation des délais et de poursuite de la procédure collective,

Déboute la société Elutions de sa demande d'indemnité de procédure,

Ordonne l'emploi des dépens de première instance et d'appel en frais privilégiés de la procédure collective de la société Elutions.

Le Greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 21/03419
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;21.03419 ?
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