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21/07/2022 | FRANCE | N°19/02926

France | France, Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 21 juillet 2022, 19/02926


N° RG 19/02926 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MKRX















Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 05 mars 2019



RG : 2017j00338











[B]



C/



SAS LOCAL





RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE LYON



3ème chambre A



ARRET DU 21 Juillet 2022







APPELANTE :



Mme [Y] [B]


née le 16 Septembre 1970 à [Localité 5] (69)

[Adresse 2]

[Localité 4]





Représentée par Me Céline SAMUEL de la SELAS SAMUEL AVOCAT, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE



(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/010749 du 07/05/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionn...

N° RG 19/02926 - N° Portalis DBVX-V-B7D-MKRX

Décision du

Tribunal de Commerce de SAINT ETIENNE

Au fond

du 05 mars 2019

RG : 2017j00338

[B]

C/

SAS LOCAL

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE LYON

3ème chambre A

ARRET DU 21 Juillet 2022

APPELANTE :

Mme [Y] [B]

née le 16 Septembre 1970 à [Localité 5] (69)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Céline SAMUEL de la SELAS SAMUEL AVOCAT, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2019/010749 du 07/05/2019 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de LYON)

INTIMEE :

SAS LOCAM - Location automobiles Matériels

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Michel TROMBETTA de la SELARL LEXI, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE

******

Date de clôture de l'instruction : 29 Janvier 2020

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 08 Juin 2022

Date de mise à disposition : 21 Juillet 2022

Audience présidée par Anne-Marie ESPARBES, magistrat rapporteur, sans opposition des parties dûment avisées, qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré,

assistée pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier.

Composition de la Cour lors du délibéré :

- Anne-Marie ESPARBES, présidente

- Catherine CLERC, conseillère

- Raphaële FAIVRE, vice-présidente placée

Arrêt rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d'appel, les parties présentes ou représentées en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne-Marie ESPARBES, présidente, et par Tiffany JOUBARD, Directrice des Services de Greffes Judiciaires, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Le 24 mars 2016, Mme [Y] [B] exploitant un commerce de véhicules automobiles sous l'enseigne « Destock - Argus - Import » a conclu un contrat de location avec la SAS Location Automobiles Matériels (Locam) portant sur une station de décalaminage fournie par la SARL Power System moyennant le règlement de 60 loyers mensuels de 215€ HT (258€ TTC).

Le 18 août 2016, Mme [B] a signé le procès-verbal de livraison et de conformité du matériel tandis que le fournisseur l'a signé le 16 août 2018.

Locam a adressé le 5 janvier 2017 à Mme [B] un courrier recommandé de mise en demeure de régler trois échéances impayées, sous peine de déchéance et de l'exigibilité de toutes sommes dues au titre du contrat.

Par acte du 16 mars 2017, Locam a fait assigner Mme [B] en paiement de la somme en principal de 16.744,20€ outre intérêts au taux légal, indemnité de procédure et charge des dépens.

Par jugement du 5 mars 2019, le tribunal de commerce de Saint-Étienne a :

- dit que le contrat de location lie dûment Mme [B] à Locam,

- débouté Mme [B] de sa demande de nullité du contrat,

- dit que Locam a dûment résilié le contrat de location par lettre recommandée avec accusé de réception du 5 janvier 2017,

- condamné Mme [B] à payer à Locam la somme de 16.744,20€ correspondant à l'intégralité des loyers échus impayés et à échoir en ce compris la clause pénale y afférente, outre intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 5 janvier 2017,

- autorisé Mme [B] à se libérer de sa dette par le versement de 24 mensualités égales successives à compter de la signification du jugement, dit que les versements effectués s'imputeront en priorité sur le capital et qu'en cas de non-paiement d'une échéance, la totalité de la dette deviendra immédiatement exigible,

- débouté Mme [B] du surplus de ses demandes,

- condamné Mme [B] à verser à Locam la somme de 100€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- imputé les dépens à la charge de Mme [B],

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire,

- et débouté Locam du surplus de ses demandes.

Mme [B] a interjeté appel par acte du 25 avril 2019.

Par conclusions du 12 juin 2019 fondées sur les articles L. 221-17 ancien, L. 221-5 et suivants du code de la consommation, 1108 et suivants anciens, 1130 et suivants, 1152 devenu 1231-5, 1217 et suivants, 1343, 1244 et suivants devenus 1343-5 du code civil, Mme [B] demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement, de :

à titre principal,

- prononcer la nullité du contrat de location conclu entre elle et Locam et en conséquence,

- débouter Locam de ses demandes, fins et conclusions,

- condamner Locam à lui rembourser la somme de 258€ correspondant à l'unique loyer payé par elle,

à titre subsidiaire,

- juger que les conditions générales du contrat lui sont inopposables faute d'acceptation par elle conformément à l'article 1119 dans le code civil,

- débouter Locam de ses demandes, fins et conclusions,

dans les deux cas,

- condamner Locam à régler à son avocat la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'article 700 de la loi de 1991 sur l'aide juridique,

- ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance,

- à titre infiniment subsidiaire,

- juger que les demandes de Locam sont manifestement excessives et doivent être minorées,

- lui accorder un moratoire de 24 mois pour rétablir sa situation obérée avec imputation prioritaire des règlements sur le capital,

- et juger que l'équité impose de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions du 5 septembre 2019 fondées sur les articles 1108, 1109, 1116, 1134 et suivants et 1149 anciens du code civil, l'article liminaire du code de la consommation et ses articles L.121-16 ancien, L.221-2, L.221-3 et L.221-1, ainsi que L.311-2 et L.511-21 du code monétaire et financier, 14 du code de procédure civile, L.110-3 du code de commerce, Locam demande à la cour de :

- dire non fondé l'appel de Mme [B],

- débouter celle-ci de toutes ses demandes,

- confirmer le jugement déféré sauf en ce qu'il a autorisé Mme [B] à s'acquitter de sa dette en 24 mensualités égales avec imputation prioritaire sur le capital,

- condamner Mme [B]à lui régler une indemnité de 1.500€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- et aux entiers dépens.

MOTIFS

A titre liminaire, il est précisé que le litige n'est pas soumis au nouveau droit des contrats issu de l'ordonnance du 10 février 2016 puisque le contrat a été signé avant le 1er octobre 2016.

Les obligations respectives des trois parties contractantes, y compris Power System fournisseur qui n'a pas été appelé à la cause, sont interdépendantes comme participant d'une même opération économique, ce dont il résulte que les clauses contraires à cette interdépendance sont réputées non écrites. Il en est ainsi, contrairement à ce que soutient Locam, de la clause des conditions générales du contrat mentionnant l'inopposabilité au loueur des clauses ou conventions particulières du bon de commande qui ne lui ont pas été expressément dénoncées.

Mme [B] soutient sa demande de nullité du contrat de location conclu entre elle et Locam sur le non-respect par cette dernière des dispositions du code de la consommation relatives au droit de rétractation et sur l'erreur substantielle commise par elle sur la nature même du contrat qui a vicié son consentement.

D'une part, s'agissant de la protection accordée à certains professionnels par le code de la consommation, il appartient à Mme [B] de démontrer qu'elle remplit les conditions légales, cumulatives, concernant la qualification du contrat conclu hors établissement, l'objet du contrat n'entrant pas dans le champ de son activité principale et le nombre de salariés au plus égal à 5.

Mme [B] ne verse au débat aucune pièce relative à ce chiffre de salariés.

Sans plus ample discussion sur ce premier point, Mme [B] est déboutée de sa demande de nullité du contrat de location.

Elle échoue tout autant sur le second point.

En effet, si elle rappelle la caractérisation de l'erreur sur un élément substantiel d'un contrat, souligne ses difficultés financières (création d'une entreprise dans un contexte de surendettement et de perception du RSA) en affirmant qu'en cet état elle ne souhaitait surtout pas s'engager sur une durée irrévocable, indique qu'elle n'a pas disposé d'un délai de réflexion pour accepter le contrat litigieux, et s'est en toute bonne foi fondée sur les affirmations du commercial de Power System, elle n'en apporte aucune preuve, ses productions se limitant, outre le contrat de location, à une plaquette publicitaire de Power System, des courriers de la commission de surendettement et un avis fiscal d'imposition sur les revenus 2015. Elle n'établit donc pas avoir signé le contrat sur la croyance que ce contrat était « immédiatement résiliable », ce qu'elle n'a pas plus indiqué par un courrier ultérieur qu'elle aurait pu adresser au fournisseur ou au bailleur.

Subsidiairement, sur le fondement des articles 1119 et 1367 du code civil, Mme [B] entend voir juger que les conditions générales du contrat lui sont inopposables faute de leur acceptation par elle au motif qu'elle n'a ni signé, ni même paraphé ces conditions générales et que sa signature ne figure que sur la première page du contrat.

Locam rétorque à bon droit que Mme [B] a apposé sa signature associée à son cachet commercial sur la première page du contrat juste au-dessous de la clause pré-imprimée par laquelle « le locataire déclare avoir pris connaissance, reçu et accepté les conditions particulières et générales figurant au recto et verso ... », et elle ajoute, justement, que cette acceptation de telles conditions figure en tête du contrat au-dessus de l'identification du numéro de ce document.

Mme [B] est donc infondée à prétendre à une inopposabilité des conditions générales et particulières du contrat de sorte qu'elle est liée conventionnellement à Locam.

Plus subsidiairement, Mme [B] demande à voir minorer les demandes en paiement de la part de Locam au vu de leur caractère manifestement excessif, ce qui suppose que préalablement, la demande de Locam en constatation de la résiliation de plein droit du contrat soit jugée fondée.

Or, l'examen de la mise en demeure adressée à Mme [B] par Locam par courrier du 5 janvier 2017 conduit à constater que suite à son envoi, celle-ci n'a pas été réceptionnée dès lors que l'information à l'expéditeur, assurée par les services de la Poste, indique « pli avisé et non réclamé ».

En l'état de la non-réception par Mme [B] de cette mise en demeure, elle n'a pu avoir pour effet de rappeler à la connaissance de cette dernière l'existence d'une telle clause de résiliation de plein droit ainsi que les modalités d'une régularisation possible dans le délai de 8 jours et la sanction attachée à l'absence de régularisation.

L'acte introductif d'instance n'a pas plus rempli l'office de la mise en demeure contractuellement imposée comme préalable à une résiliation de plein droit, dès lors que cette assignation qui porte la demande en condamnation de Mme [B] est nécessairement postérieure à l'acquisition de la résiliation prétendue par Locam.

Il résulte de ces considérations que Locam échoue dans son action en résiliation de plein droit du contrat à la charge de Mme [B].

Cependant, les parties n'ayant pas débattu de ces points, il convient de rouvrir les débats afin de provoquer leurs observations, sans révocation de l'ordonnance de clôture.

Les demandes formées par Locam sont ainsi réservées, ainsi que celles sollicitées par Mme [B] dépendant de sa condamnation ou non au profit de Locam (réduction de la créance de Locam et demande de moratoire avec imputation prioritaire de tout règlement sur le capital de la dette), tout comme les dépens et les demandes d'indemnité de procédure.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par arrêt mixte contradictoire,

Confirme le jugement déféré en ce qu'il a :

- dit que le contrat de location lie dûment Mme [B] à la société Locam,

- débouté Mme [B] de sa demande de nullité du contrat,

Avant-dire droit sur les demandes en paiement de la société Locam formées à l'encontre de Mme [B], ainsi que sur celles corrélatives sollicitées par Mme [B], ordonne la réouverture des débats à l'audience du 11 janvier 2023, sans révocation de l'ordonnance de clôture, pour lire et entendre les observations des parties sur la question de l'effet juridique à tirer ou non de la mise en demeure adressée par la société Locam à Mme [B] par l'envoi d'un courrier recommandé avec accusé de réception daté du 5 janvier 2017 qui n'a pas été réclamé par cette dernière, et la valorisation ou non de l'assignation comme pouvant ou non détenir l'effet de la mise en demeure conventionnelle au titre de préalable à la résiliation de plein droit du contrat,

Réserve en conséquence les demandes en paiement formées par la société Locam à l'encontre de Mme [B], ainsi que celles corrélatives sollicitées par Mme [B], outre celles en indemnité de procédure formées par les deux parties, ainsi que les dépens.

Prononcé par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

Signé par Anne-Marie ESPARBES, présidente, et par Tiffany JOUBARD, Directrice des Services de Greffes Judiciaires, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LA DSGJLA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Lyon
Formation : 3ème chambre a
Numéro d'arrêt : 19/02926
Date de la décision : 21/07/2022

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2022-07-21;19.02926 ?
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